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01 nov. 2020, 15:55
Retour en enfer  privé 
On peut trouver le bonheur même dans les moments les plus sombres...
Il suffit de se souvenir d'allumer la lumière.

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Pourquoi le monde était-il toujours Trop ?
Trop de bruit, trop d’espace, trop de rêves, trop de mensonges.
A moins qu’il ne soit pas assez.
Pas assez de joie, pas assez de sourires, pas assez de confiance.
*Il est jamais comme il faut t’façon. *
Elle repoussa la voix lui demandant sournoisement comment serait un monde « comme il faut » pour se concentrer sur le couloir.

Elle en avait des bonnes Ary.
Tu peux le faire.
Un frisson remonta le long de sa colonne vertébrale, faisant osciller dangereusement sa tête.
Peut-être qu’elle pouvait le faire.
Mais elle n’avait pas envie de sortir de ce wagon.

Au début du voyage, il lui avait semblé horrible. Plein des rumeurs et des Ombres.
La réalité, était qu’il était un wagon normal, vide de tout, sauf peut-être se cauchemars éveillés.
La réalité, était qu’elle allait devoir sortir hors de ce wagon qui avait recueilli ses craintes et en avait orné tous les sièges, et retrouver sa famille pour *Noël*

Nouveau frisson, de dégoût cette fois.
Noël. La fête de quoi pour les Autres ? Des cadeaux sous le sapin qui perd toutes ses aiguilles sur le sol. L’odeur du pain d’épice et de la bûche. Les bougies et le feu de cheminée qui ronronne, les rires et les courses effrénés des petits avec leurs nouveaux cadeaux, les sucres d’orges qui collent au dent, les crackers de Noël qui explosent en un nuage de fumée, les papiers cadeaux légers comme des plumes qui s’envolent, les lunes des sourires, les comètes dans les yeux étincelant comme des diamants de feu...
Elle s’arrêta avant de vomir pour de bon.

Noël aussi c’était comme ça chez elle.
Avec des cadeaux, des guirlandes, des rires.
Ce n’était simplement pas ses cadeaux. Pas ses guirlandes. Pas ses rires.
Pourquoi un mot débile pouvait-il faire toute la différence ?

Elle aussi, elle aurait voulu pouvoir parler pendant des heures comme les Qutes d’une nouvelle montre sorcière reçue ou même d’un simple paquet de gnomes au poivre découvert dans une chaussette à son nom au-dessus de la cheminée.
Le fait était qu’elle avait une chaussette. Qui restait vide.
Elle avait parfois un paquet sous le sapin. Qu’elle s’empressait d’ouvrir avant qu’on ne le remarque et était la plupart du temps un dessin de la part de son frère ou une fleur séchée de la part de sa sœur.
Elle les avait tous gardés, tous ces morceaux qu’on qualifierait d’inutile.
Ils étaient entreposés dans le double fond du tiroir de son bureau, sous le vrai tiroir qui était presque vide. Elle pouvait les compter sur le bout des doigts, sentir leur odeur ténue de papier ou d’ancien.

Le couloir était presque vide maintenant.
Ne montre pas tes faiblesses.

« D’accord. »

Avait-elle parlé pour elle ou pour Ary ?
Ses mains arrêtèrent de trembler.
*Un...Marguerite séchée dans un ruban violet.*
Tout paraissait plus loin, comme sous une couche d’eau épaisse. Même sa propre voix lui parut étouffée par un mur d’eau.
Elle savait qu’elle bougeait, qu’elle tenait d’une main la poignée de sa valise et de l’autre la main de la Rouge.
Elle entendait son propre souffle, alourdi, saccadé, mais comme si ce n’était plus le sien.
*Deux...Dessin d’un nimbus 2000*
Ce cœur qui battait dans cette poitrine trop petite n’était pas le sien.
Ces mains qui agrippaient une poignée en cuir à s’en faire craquer les os n’était pas la sienne.
Cette peur qui martelait ses tempes et tordait son ventre n’était pas la sienne.
Ces corps plus épars qui défilaient devant ses yeux lui étaient indifférents. Extérieurs.

Elle se mit en mouvement, lentement, ses pieds semblant retomber avec un fracas monumental sur le sol.
*Trois...Caracollant oublié dans un placard. *
Son cœur battait à se décrocher de sa poitrine, si fort qu’il aurait presque pu s’arrêter, laissant le vent de la course lui lécher les joues avant de repartir de plus belle.
Elle slalomait entre les valises encore posées sur le sol.
Les embrassades qu’elle apercevait derrière les vitres brumeuses ne la touchaient plus.
*Quatre... Épingle à cheveux décorée de perles blanches. *

Une porte se dessina devant elle.
Elle posa sa valise, l’ouvrit d’une main.

Les odeurs et les sons l’agressèrent d’un coup, comme une énorme vague la percutant de plein fouet.
*C...Cinq...Mini bateau en papier couleur lavande.*
Les rires, les couleurs, les quais plein de fumée qui lui firent monter les larmes aux yeux et toujours ce foutu cœur se débattant de l’entrave de son corps.

*S...S...Mais crève ! Crève si ça t’fait plaisir !*
Si je crève tu ne vis plus.
*Au moins ça f’ra moins mal. *
C’est parce que tu as décidé que ça faisait mal que ça te fait mal.
*Et comment j’fais pour décider que ça fait pas mal ?*
T’arrête de te poser des questions sur toi-même et tu t’acceptes.
*Comment j’peux m’accepter alors qu’Eux le pourront jamais ?*
Arrête avec les question. Comment veux-tu qu’ils t’acceptent si toi déjà tu peux pas t’accepter. Demande toi plutôt pourquoi tu ne t’acceptes pas.
*Parc’que j’suis pas comme Eux ! Et j’leur ai menti pour être comme Eux !*
C’est en mentant que tu leur ressembles?
*J’ai pas dit ça ! C’est juste que...Que...Oh puis merde oublie.*

Elle le reconnut au loin, dans la brume, avant même d’avoir besoin de le chercher. Comme si ses yeux avaient été aimantés par cette chevelure rousse tranchant dans le gris morne du quai.

« I...Il est là... »

Pitoyable.
Pourquoi est-ce que sa voix avait flanché, ses yeux plongé vers le sol et ses dents recommencé à mordiller sa lèvre ?
Comme si elle en avait peur, de sa famille.
*J’ai peur. *

« On dit qu’on peut éviter les fantômes. On dit qu’c’est beau, la vie. On dit qu’faut pas avoir peur. On dit que c’est moche les mensonges. On dit que Noël c’est joyeux. Alors pourquoi à chaque fois c’est tout l’contraire ? »

Aucun soucis Plume.
L'attente en valait amplement le coup !
Dernière modification par Alison Morrow le 28 août 2021, 12:34, modifié 2 fois.

Je ne lâche jamais rien. Quand je commence une barre de chocolat, je la mange jusqu'au bout.

13 déc. 2020, 22:10
Retour en enfer  privé 
Why people yell



Arya n'avait pas non plus très envie de sortir du train. Mais à vrai dire, elle ne voulait pas non plus y rester. Elle voulait retourner à Poudlard, dans le parc, et grimper à un arbre. Là, elle pourrait fermer les yeux et savourer la solitude, comme elle savait si bien le faire. Elle ne savait pas apprécier la compagnie. Elle ne se sentait jamais aussi seule que lorsqu'elle était entourée. Mais elle était actuellement cernée, dans l'impossibilité de se réfugier entre des branches. Elle prit donc une grande inspiration, regrettant de devoir bientôt supporter l'épreuve du quai bondé. Mais ce n'était qu'un mauvais moment à passer. En fait, les vacances entières ne seront qu'un désagréable instant à supporter.

Le train se viderait de tous ces gens. Il se viderait de son âme, de sa fumée. Le quai aussi se viderait à un moment donné, pour ne laisser que poussières et cheveux blonds. L'animation quitterait la moindre de ses cellules, disparaîtrait de son plancher et s'évaporerait dans l'air. Plus rien ne resterait. En quelques instants, tout ne serait plus qu'une neutre désolation. Mais Arya ne parvenait pas à déterminer si c'était une bonne chose ou non. Elle le désirait et le craignait à la fois.

Sur le quai, les embrassades allaient bon train. Les familles se retrouvaient, après plusieurs mois de séparation. Les gens criaient, sautaient dans les bras de leurs proches, souriaient. Elle crut un instant qu'elle aussi allait disparaître, avalée par toute cette agitation qui l’asphyxiait. Peut-être le voulait-elle. Mais elle tint bon. Elle ne retint de plaquer ses mains contre ses oreilles pour étouffer le son environnant. Elle se retint de hurler contre le monde autour d'elle pour qu'ils s'éloignent, tous. Elle se retint de fermer les paupières pour imaginer qu'il n'y avait personne. Non, elle se força à observer, tout ce qui se passait autour d'elle. Un garçon qui retrouvait sa mère et l'embrassait. Deux frère et sœur qui se dirigeaient vers un homme grand en costume. Tous semblaient savoir comment faire. Tous semblaient sincères. Était-ce inné, où avaient-ils subi un long enseignement pour en arriver là ? Pourquoi les autres savaient naturellement comment se comporter, comment agir ? Elle, elle avait la sensation de toujours partir de zéro, comme un nouveau-né qui découvrirait le monde.

Et puis Alison parla. Arya suivit son regard, qui se perdit dans la foule. L'heure de rejoindre leur famille avançait à grands pas démesurément trop raidement. Les battements de son cœur semblaient se calquer au rythme de sa panique. Mais elle devait rester calme. Après tout, rien ne lui disait que ça se passerait mal. Mais l'angoisse d'Alison était contagieuse.

Elle ne voyait pas les cheveux blonds de ses sœurs. Mais elle avait peur, si elle tournait la tête, de se retrouver nez à nez avec elle. Leur présence lui rappellerait trop de choses. Mais elles étaient inévitables, elle le savait.

Alison lui posa une question, une question à laquelle elle ne pouvait pas répondre. Elle aurait aimé être capable de sortir une phrase toute faite qui sonnerait bien, qui réglerait tous les soucis et soignerait son cœur. Mais elle tremblait tout autant qu'elle.

« Je sais pas, fit-elle, démunie. Je sais pas. »

Elle aurait voulu être forte pour Alison. Rester droite et ne pas flancher, histoire qu'elle essaie, elle aussi. Mais elle n'y parvenait pas. Plus maintenant. Son impuissance l'agaçait.

« Peut-être que les gens préfèrent l'illusion. C'est plus facile. »

Et Merlin seul savait à quel point elle l'était également, elle, dans l'illusion. Dans un déni tenace et fidèle auquel elle s'accrochait désespérément.

Vous dites que c'est si beau la vie. Je veux savoir comment je m'y prendrai pour vivre.
~ Antigone, Anouilh
3èmeannée 2045/2046

19 janv. 2021, 08:38
Retour en enfer  privé 
Respire tant qu'il en est encore temps.
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*Elle sait pas.*
La voilà bien avancée. Magnifiquement avancée, face à tous ces inconnus qui fréquentaient les couloirs avec elle.
Elle détournait les yeux devant les familles trop réjouies.
Tout était Trop sur ce quai, comme à chaque fois qu'elle y collait les pieds : les gens, les bruits, les embrassades.
Il y avait trop de sincérité, trop de plaisir de se retrouver, trop de gentillesse.
Un trop-plein de Trop dont elle ne parvenait jamais à se démêler.

Elle aurait pu dire que c'était la faute des Autres. Qu'ils étaient toujours Trop alors qu'elle était Pas Assez.
Mais quoi? Se jeter dans les bras de son frère qui l'avait toujours ignoré?
Leur mentir pendant tout l'hiver? Continuer à jouer la Comédie sans faire tomber les masques?
Tout pouvait virer au vinaigre.
C'était comme un orage qu'on regardait de loin. On le sentait calme, beau, puissant, stable.
Puis tout d'un coup, il y avait une étincelle qui venait d'on-ne-sait-où.
Une étincelle qui venait tout foutre en l'air, qui déchirait le ciel en deux et faisait commencer la Tempête.

Noël, c'était un peu comme Poufsouffle au final. On devait être gentil, sincère, attentionné, généreux... Tout ce qu'elle ne savait pas faire.
Comme si à la naissance, on devait recevoir un mode d'emploi avec des schémas, des croquis en couleurs, des explications surlignées.
Comme si elle n'avait pas reçu ce mode d'emploi, ou alors qu'il avait été fabriqué à la hâte, sans les schémas et les couleurs. Des demi-expériences pour réussir à faire ce que tout le monde semblait réaliser facilement.

Souvent, ce n'étaient pas les cours qui la dérangeaient.
Ce n'étaient pas les sorts qu'elle réussissait, dès fois vite, dès fois un peu moins.
C'étaient les exclamations de joie des Autres, leurs "Mon Papa va être trop fière de moi" ou leurs "Ma Maman va être tellement contente! Je vais pouvoir lui montrer ça à Noël!"
Car à Noël, elle n'aurait presque rien à montrer.
Quoi, est-ce qu'ils s'intéressaient au moins à sa scolarité? Probablement que tant qu'ils ne recevaient pas de hiboux, cela devait leur convenir. Si elle avait le malheur de faire des bêtises, et de se faire prendre...

Ils en avaient déjà reçu des hiboux de Poudlard, pourtant. Mais c'était du Directeur de maison de Gryffondor. Et certainement pas de celui de Poufsouffle.

« Peut-être que les gens préfèrent l'illusion. C'est plus facile. »

Elle hocha la tête, bien trop d'accord avec la Rouge.
C'était si simple de se laisser bercer par ses espoirs lui murmurant que deux semaines n'étaient rien du tout.
Qu'aucune lettre compromettante n'arriveraient. Que sa tante ne viendrait pas fouiner comme c'était son habitude. Que son oncle ne lui ferait pas de commentaires sur sa baguette. Que sa sœur lui laisserait emprunter ses livres. Que son frère lui ferait un cadeau à Noël. Que sa grand-mère serait là pour le réveillon.
Trop simple, trop facile, trop Trop.
C'était impossible.
Le monde c'était compliqué depuis son arrivée sur cette planète. Elle ne voyait pas pourquoi aujourd'hui, il serait plus Clément.

Puis elle l'entendit, en plus de voir les cheveux roux trancher dans la foule.
Comme un battement sourd. Comme si tout d'un coup, le train se remettait en marche.
*Clac clac.*
Elle frissonna malgré la chaleur qui émanait du colosse de ferraille. Ce bruit, il l'avait accompagné lorsque les portières s'étaient fermées.
*Clac clac.*
Il ne l'avait pas encore repéré. Il ne viendrait pas la chercher si elle ne se faisait pas remarquer.

*Clac clac*
Elle aurait voulu disparaître, Merlin.
Ne plus bouger, ne plus respirer, s'enfermer dans un beau havre de paix...
Impossible.
*Clac clac*.
La poignée de sa malle lui coupait la circulation tellement elle était lourde.
Elle se sentait entraînée vers le sol par le poids de ses affaires. Chopée. Impossible de s'enfuir.

"A-ary, il arrive..." Bégaya-t-elle, des tremblements audibles jusque dans sa voix.

Ses jambes menaçaient de la laisser tomber tellement elle avait peur.
Être forte et le rester? À quoi bon à présent?
Jack était là, sur le quai. Elle sentit son regard bleu la passer au scalpel. Comme s'il s'assurait que c'était bien elle.
Puis il fit un Pas vers elles. Puis deux.

*Merlin.*
*Clac clac.*
*J'veux pas !*
*Clac clac.*


Plume, je te dois un tas d'excuses pour cet horrible retard.
Je ne m'étais même pas rendue compte que le temps avait filé au point de me faire accumuler un mois de retard...
J'espère que tu me pardonneras pour cette longue attente...

Je ne lâche jamais rien. Quand je commence une barre de chocolat, je la mange jusqu'au bout.

23 avr. 2021, 14:28
Retour en enfer  privé 
Pardon her Sanity in a world Insane



Le bruit ambiant résonnait comme un bourdonnement dans ses oreilles. Voilà, c'était exactement ça ; elle avait la sensation d'être entourée d'un essaim d'insectes qu'elle ne parvenait pas chasser. Ils s'infiltraient partout, dans ses oreilles, son nez, sa bouche. Son corps ne lui appartenait plus. La solitude et la tranquillité du compartiment lui manquait terriblement, confort dont elle n'avait pas su assez profiter à son goût. Ne pouvait-elle pas y retourner ? S'éloigner de ce vacarme et retrouver le calme, juste quelques temps ? Un retour en arrière n'était-il possible ?

Mais elle ne pouvait pas. Elle ne devait pas. Alison, à côté d'elle, se faisait tendue. Elle le sentait, elle tenait encore sa main dans la sienne. Pendant un instant, elle se demanda si elle désirait la même chose qu'elle, se cacher, se terrer loin de toute cette agitation et rester dissimulée pour toujours. Elle se plut à les imaginer fuir de là, main dans la main, droit vers la tranquillité et libérées de toute entrave.

Mais la véritable raison de l'angoisse d'Alison se révéla à elle lorsque celle-ci bégaya doucement qu' « il » arrivait. Pendant un instant, Arya crut qu'elle parlait d'un quelconque fantôme qui aurait de nouveau réussi à les atteindre, qui les aurait suivies en sortant du train. Elle regarda autour d'elle tout en essayant de rester calme, mais aucun fantôme ne venait à leur rencontre. C'était bien pire ; un véritable être humain approchait. Avec une tête, des bras et des jambes bien réels, imprévisibles et incontrôlables. Pendant un instant, la Gryffondor prit peur et son cœur s'emballa. La frayeur d'Alison était contagieuse et l'envahissait de tout son être.

Mais ses sœurs à elle n'étaient pas encore là. Elle n'avait pas à avoir peur, elle. Telles qu'elle les connaissait, elles attendraient que le quai se vide pour la rejoindre, car elle était trop petite pour être repérée dans une foule, comme elles le disaient souvent. Ou peut-être qu'elles ne désiraient simplement pas la voir. Toujours était-il qu'elle avait encore du temps devant elle, et encore du courage à revendre. Elle n'avait pas à rester figer ainsi, elle ne risquait rien. Elle prit une grande inspiration et serra encore un peu la main d'Alison, affectueusement. Les derniers relents de peur s'effaçaient. Elle se sentait capable d'accompagner Alison où qu'elle aille, à présent. Elle était Gryffondor, non ? Ça voulait certainement dire qu'elle pouvait vaincre la peur, n'est-ce pas ? Sinon le choixpeau n'aurait pas hésité à la lâcher à Serdaigle comme ses sœurs. Alors elle resterait droite. Elle ne pouvait faire face aux fantômes, car ils ne pouvaient se noyer. Mais les êtres humains n'étaient qu'humains.

« J'peux rester avec toi, si tu veux, murmura-t-elle dans un souffle. »

Jusqu'au bout du monde, s'il le fallait. Tout pour éviter ses propres problèmes. C'était terriblement égoïste, mais pour le moment, c'était la seule raison qui l'empêchait de trembler, de s'enfuir, de crier. Elle resterait, parce que rien ne la retenait, et qu'elle pouvait bien les soutenir toutes les deux. Si elle n'en était pas capable, elle ne vaudrait rien. Mais elle valait bien quelque chose, n'est-ce pas ?

Elle se demanda quelle était la relation entre Alison et l'inconnu qui s'avançait. Elle se demanda quel genre de personne il était, lui. Le seul homme qu'elle avait connu avait disparu, six pieds sous terre, comme un lâche. Comme s'il ne laissait personne derrière.



Désolée pour ce terrible retard !

Vous dites que c'est si beau la vie. Je veux savoir comment je m'y prendrai pour vivre.
~ Antigone, Anouilh
3èmeannée 2045/2046

07 mai 2021, 20:08
Retour en enfer  privé 
Puis, ce fut la Nuit.
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Encore deux pas. Deux immenses pas qui la firent se ratatiner un peu plus.
Elle avait écouté tous les conseils d'Ary, tous ces conseils qui sonnaient si bien dans sa bouche. Ils en devenaient presque tangibles, presque applicables.
Et au final, que restait-elle, une fois que l'Ombre de son frère s'écrasait sur elle? Une enfant encore apeurée du noir. *J'fais pitié.*
Ce fut presque une révélation.
Oui, elle faisait incroyablement, magistralement, royalement pitié. Et c'est bien pour ça qu'Ary avait dû tenter de l'aider. Perdre son temps, pour l'aider et la sortir du Noir où elle résidait.
Et malgré les heures passées dans le train (ou les jours? Elle avait perdu la notion du temps), malgré tous ces éclats de secondes qui entaillaient son cœur pour y enfoncer des graines de la Peur, les arroser et les laisser fleurir, rien n'avait changé.
Elle était toujours la gamine ridicule, minuscule, insignifiante qu'elle était au départ.
Pour la première fois, elle crut que les Mots étaient eux aussi des Mensonges. Et ça lui fit peur.

Si ce avec quoi on communiquait était faux, pourris depuis la racine jusqu'à la dernière ramification où pendouillait une fleur couleur jais, si tout n'était qu'un Gros Mensonge, qu'on ne pouvait exprimer qu'en étalant une couche de Fausseté dessus, qu'était là Vérité? Un concept? Une abstraction aussi lointaine que les étoiles ? Une beauté éphémère comme les papillons, un mirage de la magie, une chimère cabossée?
*N-Non...*

Seule la main dans laquelle elle avait enfoui sa paume la rassurait un peu, allumait des légères étincelles dans son cœur, piquantes comme une brume d'hiver. *C'est ça, le Courage?*
La pression sur sa main s'accentua, comme pour donner un peu plus de force aux étincelles. Comme pour les empêcher de mourir à leur tour.

Puis,
Le Noir.


Ses poings se crispèrent lorsqu'elle sentit l'Ombre entière l'engloutir.
Il était grand. Trop grand, si grand, bien trop grand pour elle. Si Ary avait été la lumière qui chassait la Nuit, son frère était le Cavalier Noir qui la rapportait en bloc massif. Brut, pas même taillé. Elle était si petite, noyée et perdue au milieu de ce grand Rien. Une enfant encore trop jeune, qui ne savait qu'une seule chose pour que son monde tourne rond : elle ne devait rien dire quant à sa répartition. *Choixpeau stupide!*
Autant... Autant essayer de faire bonne mesure, en présentant Ary comme une camarade de dortoirs?
*Et mentir? Jamais.*
Et si ça te sauve?
*Jamais.*
T'es bornée et stupide.
*Je sais, merci. La ferme.*

Puis la main brutale s'abattit sur son épaule à la manière d'un hibou fondant sur sa proie.
Un sourire qu'elle trouva ignoble mais que d'autres auraient jugé "rassurant" vinrent étirer les lèvres de Jack, tandis que sa voix chaude articulait des mots cruellement faux.

"Coucou, Alison ! Contente d'être de retour?" *Non.*

Jack se tourna légèrement vers Ary, la dévisagea de haut en bas avant de s'arrêter sur vos mains nouées.
Le sourire-cauchemar s'accentua encore un peu. Il aurait pu être qualifié de "franc" et de "sociable". Elle le ressentait "mensonger" et "écrasant".

Elle aurait dû répondre quelque chose. Rien qu'un "non", ou un "oui", pour ne pas effrayer Ary. La laisser partir avec l'Illusion qu'elle était entre de bonnes mains. Qu'elle avait accompli sa part du travail. Mais ses cordes vocales semblaient avoir définitivement quitté son corps pour s'enterrer Merlin-savait-où.
Elle tenta un petit hochement de tête rêche, et lentement, déplia ses doigts de ceux d'Ary. *Envole-toi.*
Avec un sourire aussi vacillant qu'une flamme, elle plongea pendant un bref instant ses yeux dans ceux de la Rouge, espérant y faire passer tout ce que les Mots s'amusaient à dérober à ses lèvres.
*Merci. Pour tout.*

Puis une autre main *Jack* s'empara de la sienne. Avec à nouveau un ton cajoleur, elle l'entendit prononcer comme derrière une nappe de brouillard un : "Je suis vraiment désolé, j'aurais voulu vous laisser discuter un peu plus mais maman a ordonné que je ramène Alison le plus vite possible à la maison !"
Le ton enthousiaste était probablement de trop. Le sourire diminua de moitié sur ses propres lèvres, alors que celui de Jack grandissait, inversement proportionnel.

Les mains encombrées par sa malle et par la poigne de son frère elle ne put à nouveau que faire un battement de cil à l'intention d'Ary avant que son frère ne broie un peu plus sa main et l'entraîne dans la foule, rompant brutalement le contact visuel.

Elle eut l'impression d'une douche glacée la trempant jusqu'aux os.
*Ary? ARY !*
Plus de lueur, rien que la Nuit.

Plume : Wahou. Je crois bien que c'est la fin pour moi.
Merci énormément pour cette très longue Danse, elle aura fait beaucoup mûrir Alison. Et puis, merci beaucoup à ta Protégée pour ses Mots et sa réaction, elle aurait pu s'en aller dès la deuxième réplique échangée ! Mais il faut croire que la vie n'est que théâtre, et qu'elles devaient finir leur pièce ensemble jusqu'à la tombée du Rideau.
Je crois que Jack a tenté d'être sincère avec Arya. Mais il est compliqué à comprendre, ce garçon ! En tout cas, je suis presque persuadée qu'Ary ne parviendra pas à rejoindre Alison. Foule trop dense, Jack trop rapide...
Au plaisir néanmoins de se recroiser, dans un nouveau cadre et une autre atmosphère que celle des rencontres éphémères d'un train !

Je ne lâche jamais rien. Quand je commence une barre de chocolat, je la mange jusqu'au bout.