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13 sept. 2016, 14:59
{PV} Au crépuscule de la Magie
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ARSENI STOYANOV





A son réveil, Arseni était couché dans un lit. Il lui semblait avoir peu dormi en raison de la fatigue qui l’habitait encore, mais les taches de soleil au plafond lui indiquèrent que la journée était déjà bien avancée. Il ferma les yeux et écouta les sons atténués par les murs d’une conversation dans le couloir. Une des voix lui parut familière.

« Ne faites pas semblant, dit une voix plus proche de lui. Je vous ai vu ouvrir les yeux. »

« Rien ne vous échappe, répondit Arseni en rouvrant les yeux. »

« Non, absolument rien. C’est pour cette raison qu’on me paie à surveiller l’évolution de votre état de santé. »

Arseni se palpa le front. Il était froid.

« Que dit la Gazette aujourd’hui ? demanda-t-il en se dressant en position assise. »

« Combien de fois comptez-vous me poser cette question ? J’ai ordre de ne pas vous laisser fourrer votre nez dans ces histoires, vous le savez très bien. Votre seule préoccupation doit être votre récupération. Oubliez le travail. Ils sauront se débrouiller sans vous pendant encore quelques semaines. »

Grace Sobel était une guérisseuse-en-chef coriace. Espérer négocier avec elle revenait plus ou moins à croire que le Père Noël existait et qu’il trouvait le moyen de nourrir une armée de lutins délurés. Arseni se réjouissait de pouvoir compter sur une personne à ce point investit par sa mission, quand bien même il ressentait une pointe d’agacement à se voir traité comme un infirme incapable de mettre un pied devant l’autre.

« Quelqu’un vous a laissé ceci, annonça-t-elle en brandissant une boîte élégante entourée d’un noeud rouge. Un certain Mikhail Teodorov. »

Arseni fixa momentanément son attention sur la boîte avant de croiser le regard suspicieux de la petite quinquagénaire.

« Je pensais qu’il avait cessé d’en fabriquer, dit-elle en posant la boîte au bord du lit. »

« Équiper un ministre de la Magie a du le convaincre de quitter sa retraite dorée, répondit Arseni en esquissant un sourire. »

Intérieurement, il remercia la guérisseuse d’avoir eu la présence d’esprit de déposer l’objet près de sa main droite. La seule dont il pouvait se servir depuis que sa main gauche avait été sacrifiée pour lui sauver la vie.

« On dit qu’il ne fabriquait que deux baguettes par an quand il exerçait, dit Sobel pour meubler la discussion. »

« C’est vrai. Il considère que ses baguettes magiques sont des œuvres d’art. »

Tandis qu’il disait cela, Arseni entreprit de défaire le noeud qui entourait la boîte. L’opération était si délicate à une seule main qu’il se surprit à maudire le fabriquant d’avoir songé à nouer un ruban autour de sa création. Une fantaisie dont Arseni se serait bien passé.

« Laissez-moi vous aider, dit Sobel. »

« Non ! s’écria Arseni. »

D’où lui était venu ce coup de sang, il l’ignorait lui-même ; il eut cependant honte de l’avoir employé contre une personne innocente. Qui plus est contre quelqu'un qui avait veillé sur lui depuis des semaines.

« Excusez-moi. Mais je dois apprendre à me débrouiller tout seul. »

Portant le noeud à sa bouche, il se servit de ses dents pour le défaire tandis que la guérisseuse détournait les yeux.

Le couvercle retiré, la boîte révéla un lit de soie sur lequel était posé une baguette magique finement taillée dans une branche de cèdre. Un papier cartonné accompagnait l’œuvre de Teodorov.


28,5 cm, bois de cèdre de l'Atlas, contenant un crin de Sombral.
Une œuvre digne d'un sorcier ayant déjoué la mort.
Bon rétablissement. MT.

Arseni repoussa le message du fabriquant en souriant de nouveau et caressa sa nouvelle baguette du bout des doigts. Il sentit aussitôt un puissant vent magique vibrer en lui. La saisissant fermement, il ne put s'empêcher un regard vers cette main noire et vieillie qui pendait, immobile, au bout de son bras gauche, avant de viser le pot de fleurs posé sur l'armoire en face de lui.

« Levitare ! »

Le pot voleta quelques centimètres avant de piquer du nez et de se briser par terre.

La porte de la chambre s'ouvrit alors sur la silhouette de Kristen dans un silence gêné. Arseni la regarda, le bras droit toujours tendu devant lui.


« Bonjour Kristen... »

Il se rendit compte de son ridicule et rangea la baguette dans sa boîte. La guérisseuse, comprenant qu'elle était de trop dans la chambre, répara le pot de fleurs d'un coup de baguette magique et se retira en saluant poliment la directrice de Poudlard.

« ... je commence à me demander s'il ne me faudra pas songer à retourner sur les bancs de l'école pour réapprendre à me servir de la magie, dit-il sur le ton de la plaisanterie en posant la boîte sur sa table de chevet. »

« Je suis content de vous revoir. Vous avez l'air en forme. »
Dernière modification par Arseni Stoyanov le 28 avr. 2017, 21:50, modifié 1 fois.
18 sept. 2016, 20:39
{PV} Au crépuscule de la Magie
Kristen se laissa tomber sur un fauteuil, balança sa tête vers l’arrière et laissa aller ses bras ballants sur les accoudoirs molletonnés. Elle leva ses mains vers le plafond et les observa longuement : l’une était d’aspect tout à fait normal, tandis que l’autre était pleine de cicatrices circulaires, légèrement grises ou marron, et la séparation entre cette main et son poignet était marquée par une autre cicatrice très nette et toute droite, cette fois, d’une couleur bien blanche. Elle sourit. Elle se disait que sa main droite était bien amochée, et elle pensa à Arseni, dont la main gauche était complètement morte. A eux deux, ils faisaient la paire…

Le Ministère avait interdit les visites à Arseni – qui était pourtant le Ministre, donc le Ministère – et le gardait comme un bébé à qui on n’oserait montrer la froideur du monde extérieur. Comme un enfant, il était gardé dans un jardin blanc qui sentait bon les draps propres et le nettoyant pour le sol. Ces mesures avaient passablement exaspéré la directrice de Poudlard, qui trouvait gonflé que le Ministre en personne soit traité ainsi – même si Arseni était impulsif et qu’il aurait pu sauter de son lit au moindre appel du devoir, ce qui aurait été vraiment imprudent. Mais et alors ? Qui avait le droit de l’empêcher de faire ce qu’il voulait, puisque ce serait nécessairement juste ?

En tout cas, en ce jour du quatre juillet, les papas-poules du sacro-saint Ministère avaient autorisé leur enfant béni à recevoir de la visite d’individus du monde cruel qui se trouvait de l’autre côté d’une porte d’hôpital. Kristen, donc, n’avait pas souhaité attendre un jour de plus pour lui rendre visite. Ainsi, elle se trouverait à son chevet comme il l’avait fait pour elle deux ans auparavant, et la boucle serait bouclée. Cessant d’observer ses mains, elle remit ses gants et soupira.

Lorsqu’elle transplana jusqu’à l’hôpital pour sorciers Sainte Mangouste, elle ne se demanda guère si sa visite serait réellement la bienvenue. Elle ne se souciait, en cet instant, que de savoir si Arseni se portait bien, et elle voulait le découvrir de ses propres yeux. Elle se dépêcha d’arriver jusque devant sa chambre après avoir demandé des renseignements sur l’endroit à l’accueil de l’hôpital. Elle posa sa main sur la poignée de la porte. Alors qu’elle s’apprêtait à entrer, elle entendit le bruit de quelque chose qui se brisait de l’autre côté de la porte. Elle appuya lentement sur la poignée et ouvrit la porte dans un grincement gênant. Kristen vit Arseni, baguette pointée vers rien du tout, avec l’air de quelqu’un qui est pris sur le fait. Il salua donc la directrice de Poudlard et rangea sa baguette dans une boîte qu’il posa sur sa table de chevet. N’importe qui aurait tout de suite pensé à la façon dont Arseni Stoyanov avait physiquement changé. Le changement le plus visible étant ses cheveux, désormais coupés court, mais Kristen n’y prêta pas la moindre attention. Elle s’attarda plutôt sur son visage, dont l’expression avait quelque chose d'un peu différent.

Kristen regarda chacun des mouvements d’Arseni avec attention, cherchant par ce biais à savoir si le Ministre se portait bien. Elle conclut que tant que tentative d’humour il y avait, cela pouvait aller plus mal. Cette conclusion tirée, elle s’autorisa à sourire à Arseni, un petit sourire mi-désolé, mi-rassuré, mais un sourire tout de même. Elle baissa les yeux sur la main noircie du Ministre et repensa à ce qu’il s’était passé ce jour-là. Etait-ce vraiment nécessaire, d’en être arrivé là ? A quoi Lynch pensait-il, quelles étaient ses réelles intentions en sauvant Arseni de cette façon ? Y avait-il eu un autre moyen, que Kristen ignorait ? Devait-elle se sentir coupable de la situation dans laquelle son ami se trouvait à présent ? Elle décida de balayer cette multitude de questions d’un revers de main pour le moment.


« Tous les élèves ont enfin regagné leurs foyers respectifs… J'imagine que c’est une bonne raison pour avoir l’air en forme. »

« S’ils meurent pendant l’été, personne ne pourra dire que c’est de ma faute, au moins. » n’était pas tout à fait ce qu’elle pensait, car évidemment, elle ne souhaitait le décès de personne, mais il fallait bien avouer que c’était une sacrée charge en moins. Elle expira un petit rire discret et s’avança vers Arseni.

« Je suis contente de vous revoir, moi aussi. J'étais presque vexée de ne pas avoir l'autorisation de venir plus tôt. »

Elle le regarda droit dans les yeux et fut gênée de constater qu’elle ne savait ni quoi dire, ni quoi faire.

Nécromancienne - Mère du dragon - Détentrice de la Baguette de Sureau et du Retourneur de Temps
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25 sept. 2016, 11:13
{PV} Au crépuscule de la Magie
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ARSENI STOYANOV


Arseni soutint le regard de Kristen sans rien dire, comme il l’avait fait à de si nombreuses reprises au cours de leur histoire commune. C’était une façon pour lui de l’observer en profondeur, d’évaluer son état, et de prendre une décision plus ou moins tranchée sur les mots qu’il devait employer en sa présence. Kristen n’était pas n’importe qui. Sa renommée n’avait cessé de grandir depuis qu’Arseni avait quitté le giron de Poudlard. Aux yeux de ce dernier, ce n’était pas le fruit d’un hasard. Il avait acquis la conviction que les capacités de Kristen s’étaient affinées avec le temps, tant sur le plan magique que sur le plan du raisonnement. Le poste de directrice du collège lui avait naturellement donné de la hauteur, mais Arseni doutait de cette seule explication. Quelque chose de plus personnelle s’était invitée dans son évolution. Quelque chose dont il n’entendrait très probablement jamais parlé, connaissant la réserve naturelle de son amie. Reste qu’il s’apprêtait à discuter avec une femme qui pouvait désormais décortiquer son discours et y dénicher ce qu’il essayait tant bien que mal de cacher. Seulement, avait-il encore le droit de garder le secret sur certaines choses après les derniers évènements survenus ?

Il baissa les yeux. S’il ne pouvait résolument pas faire étalage de sa vie privée aussi aisément que d’autres, il reconnaissait qu’un effort était nécessaire en cette occasion. Kristen méritait de connaître les fondations de l’édifice, les raisons qui l’avaient placé dans la situation si délicate à laquelle il avait abouti. Arseni sentait tout du moins qu’il lui devait bien ça à défaut de pouvoir la remercier autrement.


« Asseyez-vous. »

Cela sonnait moins comme un ordre qu’une invitation. Arseni estimait que la discussion risquait fort de les occuper durant un bon moment.

Par où devait-il commencer ? La question était d’autant plus délicate qu’il ne savait pas tout à fait quand l’engrenage avait débuté. La mort de Serafina par le baiser d’un Détraqueur constituait un point d’encrage évident pour cette histoire, mais depuis longtemps Arseni s’interrogeait sur la légitimité de ce point de repère. Les évidences, il le savait, étaient trop souvent trompeuses et constituaient le plus clair du temps des analyses simplettes d’évènements infiniment plus complexes. Imputer ses décisions au cours tragique de cet évènement lui semblait mensonger ; un raccourci facile qu’il ne voulait pas présenter à Kristen. Il avait le sentiment qu’elle y décèlerait tout de suite la part d’incohérences que proposaient à peu près toutes les explications faciles. L’appel de la magie noire n’était résolument pas quelque chose qu’on pouvait expliquer facilement, et certainement pas quelque chose qu’on pouvait négliger devant une personne qui en avait fait l’expérience.

Arseni posa son regard sur la main gantée de Kristen.


« La quête du bonheur est une épopée qui très vite se fane si elle atteint son objectif… Ma mère n’imaginait pas à quel point elle avait raison en disant ça. A ce jour, ma quête se poursuit grâce à votre intervention, mais je doute qu’elle réussisse à trouver une issue favorable. En un sens, je ne l’espère pas. Il me semble que les personnes de notre constitution ne sont pas vouées à vivre dans l’insouciance d’un lendemain semblable à tous les autres jours. C’est peut-être pourquoi il m’a été si facile d’étudier la magie noire durant toutes ces années. Pourquoi j’ai pu l’utiliser sans me demander jusqu’où je pouvais aller. »

Maintenant qu’il était lancé, Arseni avait la sensation que les mots lui venaient plus facilement. Comme si son esprit avait constitué ses aveux depuis très longtemps déjà dans un recoin de sa tête, en attendant le jour béni où ils seraient livrés à la bonne personne.


« Beaucoup de légendes placent Durmstrang au centre d’un monde ou cet enseignement interdit règne en maître absolu, mais le commun des sorciers n’est doué que pour tisser des fables pour enfants en mal de sensations fortes. A la vérité, je doute que la magie noire s’acquiert par la lecture d’un vieux grimoire oublié ou par l’enseignement d’un mage noir prétendument aguerri… vous et moi savons que ça n’a pas de sens. La magie noire n’est pas moins vertueuse que la blanche, ce sont les sacrifices qu’elle requiert qui en fait une force redoutable et redoutée. Ces sacrifices ne se cèdent pas à la lecture d’une page raturée ou à l’écoute d’un maître chanteur… ces sacrifices sont consentit par un besoin propre à chacun. Un besoin viscéral. »

Le regard d’Arseni délaissa Kristen pour se braquer sur la fenêtre, plus loin sur sa gauche. Il contempla un moment les briques rouges du bâtiment qui se dressait de l’autre côté de la rue, la façon dont les rayons du soleil les polissaient au point de les rendre brillants. Arseni avait la sensation étrange que le temps était figé ou tout du moins qu’il s’écoulait beaucoup plus lentement pour leur permettre, à lui et à Kristen, de s’entendre sur de nombreux points qu’il restait encore à définir.

« Celui de Stanislav est de dominer toute vie. La mienne parmi toutes les autres. Je reconnais qu’il a déjà essayé de me tuer, mais il m’apparaît désormais que c’était un accident. Son besoin est plus subtile que ça. Il ressent le désir d’écraser les autres par la supériorité de son être. Une supériorité que sa naissance ne lui a pas donné sur moi, selon ce que j’ai pu glané auprès de ma mère qui était peu bavarde sur le sujet. Pour ce que j’en sais, ma Vélane de mère a eu deux hommes dans sa vie. Un qu’elle n’a pas eu besoin d’ensorceler et dont Stanislav est issu ainsi que ma soeur la plus âgée. Un autre qu’elle a noyé d’élixirs pour m’obtenir moi et mes soeurs les plus jeunes. Le premier était un sorcier raté, alcoolique, à peine capable de mettre en joug un objet quelconque avec sa baguette magique. Le second un moldu de sang royal. Un Romanov de Russie. Quelle ironie que mon frère, si attaché à la prétendue pureté de sang des sorciers, ait vu dans le mien un sang de plus haute lignée que le sien. »

Arseni ramena son regard sur Kristen.


« Une folie. »
Dernière modification par Arseni Stoyanov le 28 avr. 2017, 21:50, modifié 1 fois.
25 sept. 2016, 14:45
{PV} Au crépuscule de la Magie
Un moment, Arseni sembla jauger Kristen de son regard, et il finit par baisser les yeux, comme fatigué de cette brève inspection, se disant qu’il était temps de se lancer ; et il se lança. Kristen s’assit sur un petit siège moyennement confortable qui était là, d’un goût assez douteux, et croisa les jambes. Alors, elle ne fit plus rien d’autre qu’écouter Arseni Stoyanov se livrant. Il parlait bien, d’ailleurs, et ce n’en était pas moins naturel. Ses paroles étaient bien faites, et l’on aurait pu croire qu’il lui avait suffi d’ouvrir la bouche pour que son discours se déroule de lui-même. Ces mots-là avaient dû attendre de pouvoir se libérer de sa cavité buccale depuis des jours, des semaines, des mois ou des années, et ils étaient le fruit d’une profonde réflexion.

Kristen imprima chaque mot dans son esprit, les retourna en tous sens, plissant parfois les yeux, haussant un sourcil puis les fronçant. Elle conclut alors que Stanislav Stoyanov était quelqu’un qui paraissait étonnement simple, au final, et c’en était presque décevant. Lui, certainement, devait se trouver très complexe, mais il était probable que ses pensées suivent en réalité une logique assez évidente.

Elle repensa alors aux paroles du frère d’Arseni dans le Dominion, avant qu’il ne disparaisse comme il était apparu. Sur le moment, elle n’avait pas pensé à transmettre le message de Stanislav Stoyanov à son frère, et par la suite, elle n’avait tout simplement pas jugé utile de le faire, et s’était dit que cela pourrait même être dangereux. Maintenant, elle se remettait à peser le pour et le contre, sondant le visage d’Arseni. Elle prit une inspiration, ouvrit la bouche, hésita, la referma. Finalement, elle osa, et parla avec l'honnêteté un peu brusque qu'elle réservait aux gens qu'elle considérait sérieusement.


« En vérité, c’est assez compréhensible. Votre frère aurait toutes les raisons du monde de vous détester, vous, plus que tous les autres. »

Elle se figura mentalement l’image de Stanislav, son regard et son sourire, tous deux animés par une haine non mesurée, une certaine catégorie de la rancœur. L’air qui avait été chargé de magie noire dans cette pièce du Dominion, et qui émanait plus encore de Stanislav que d’Arseni, même si ce dernier devait moins bien la contrôler et l’avait laissée jaillir à travers tout son être, cet air exhalait les échecs difficilement enfouis. Par rapport à Arseni, Stanislav était le fils aîné d'une union légitime, celui dont on devrait être fier en premier, mais qui pourtant n'avait peut-être pas eu ce privilège, car enfant d'un sorcier, certes, mais d'un sorcier raté ; et puisqu'il n'avait pas acquis ce privilège par sa naissance, peut-être voulait-il le prendre par la force, et donc être meilleur que n'importe qui ? Arseni, lui, fils d'une union factice mais adorée, qui était devenu l'enfant prodige de Durmstrang, aujourd'hui Ministre de la Magie d'un pays qui n'était même pas le sien... Était-ce vraiment ces différences dans les destins de chacun qui avaient attisé le feu qui séparait les deux frères ? Était-ce la jalousie ?

« La puissance de votre frère doit être proportionnelle aux échecs de sa vie. »

Kristen soupira et s’enfonça dans le siège qui produit un crissement aigu.

« Il manque pourtant un échec à sa liste. »

Elle regarda alternativement Arseni et la boîte posée sur sa table de chevet.

« Avant de quitter le Dominion, votre frère a eu un mot pour vous. Pour être honnête, j’ai longtemps pensé que je ne vous le transmettrai jamais, dit-elle avant de marquer une pause. Il vous recommande de choisir la voie qui vous rendra assez puissant pour pouvoir le "tuer une seconde fois"... »

Kristen réfléchit à ce à quoi Stanislav avait bien pu penser à ce moment-là. Y avait-il de l’ironie dans ces paroles, une ironie supérieure ? Ou bien avait-il justement fait passer ses réelles intentions pour de l’ironie ? Cherchait-il un adversaire à sa hauteur pour être vaincu noblement, ou pour au contraire, se prouver qu’il était plus puissant que les plus puissants ? N’était-ce alors que cela, une plate recherche de challenge, un défi que se donnerait un gamin ? Kristen abaissa rapidement ses yeux sur la main morte d'Arseni avant de regarder ailleurs, dans le vide.

« Vous avez bien constaté que la magie noire n’avait rien donné de bon. »

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28 sept. 2016, 22:08
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ARSENI STOYANOV


Arseni écouta attentivement chacun des mots que lui destina Kristen. Son regard glissa spontanément vers sa main noire, comme si l’évocation de son frère le poussait naturellement à observer le mal qu’il lui avait fait. Même si Arseni ne le tenait pas pour responsable de tout, il ne pouvait nier que les choix de son frère l’avaient en partie conduit à s’enfoncer plus profondément dans ce que la magie noire avait de plus puissant et en contrepartie de plus dangereux. Kristen avait probablement raison en soulignant que la puissance de Stanislav devait être proportionnelle à l’amertume laissée par une existence jalonnée d’échecs. Arseni n’avait jamais analysé les choses sous cet angle, mais il devait reconnaître que cette perspective mettait en lumière tout un pan de réflexion nouveau dans la psychologie tourmentée de son frère. Stanislav était peut-être plus primaire qu’il l’avait imaginé. Le message qu’il lui avait laissé semblait aller dans ce sens en tout cas et n’éveilla, par conséquent, pas la moindre surprise chez Arseni qui se contenta de hocher la tête. La nature du défi avait cependant de quoi l’interpeller. Depuis qu’il était de nouveau en état de raisonner, Arseni était arrivé à la conclusion que Stanislav avait acquis les connaissances nécessaires pour fabriquer un Horcruxe dès sa sortie de Durmstrang. Comment aurait-il pu survivre à son sortilège de la mort, autrement ? Mais le message qu’il lui avait laissé par l’intermédiaire de Kristen laissait planer un doute sur le nombre d’Horcruxes que son frère était parvenu à constituer. Stanislav était peut-être bien arrivé à un stade dont Arseni n’avait jamais eu à s’inquiéter jusqu’à présent. Il lui apparaissait désormais que le tuer une seconde fois ne servirait peut-être pas plus que la première, tout compte fait. Une théorie que les dernières paroles de Kristen finirent d’appuyer avec sobriété.

« Je suis désolé. Je vous ai causé beaucoup de soucis. »

Il en était conscient et bien qu’il sentit le regard de Kristen peser sur lui, il décida de ne pas la regarder dans les yeux. Il ne voulait pas qu’elle perçoive dans son regard la honte qu’il cherchait à dissimuler à ce sujet.

« J’espère que Stanislav ne cherchera pas à m’atteindre à travers vous. C’est un homme instable mais intelligent. Il cherchera de nouveau à me pousser dans mes retranchements pour mettre à mal les fossés magiques et idéologiques qui nous séparent. J’espère me tromper, mais j’ai le sentiment qu’il a réalisé dans le Dominion que nous n’étions pas n’importe qui l’un pour l’autre. Je me rassure en me disant qu’il n’a pas idée de votre force et qu’il la négligera toujours. Comme d’autres, il ne verra pas en vous la grande sorcière que vous êtes. Il ne verra pas ce que j’ai tout de suite remarqué chez vous la première fois que vous êtes entrée dans mon bureau. »

Il sourit au souvenir de ce qu’avait été ce moment tout en détournant son attention de sa main meurtrie. Un sourire qui s’estompa quelque peu lorsqu’il reprit la parole.


« Je doute de vouloir le tuer une seconde fois. Nous n’avons aucune idée du nombre d’Horcruxes qu’il a réussi à créer, mais sa seule existence prouve qu’il en disposait au moins d’un quand je l’ai affronté pour la première fois. Cet éclairage me terrifie et me laisse perplexe au regard de certaines de mes décisions. »

La magie noire n’était pas la solution à ses problèmes. La magie noire n’était la solution à aucun problème de l’existence humaine. Ce n’était qu’un outil. Un outil qui pouvait s’avérer extrêmement néfaste entre de mauvaises mains, voir destructeur entre des mains tremblantes. Arseni avait conscience qu’il ne pouvait plus l’utiliser comme une arme. Rien ne lui avait encore été révélé à ce sujet, mais il lui semblait qu’il lui serait peut-être même fatal, la prochaine fois, d’en faire usage après tout ce qui avait été consentit pour le sauver. Le mal ne se guérissait pas par le mal. Il en était la preuve vivante. Ce n’était pas le mal qui l’avait sauvé de lui-même au coeur du Dominion, mais bel et bien l’attachement que lui portait certaines personnes.

Il tourna ses yeux vers Kristen…


« Ne vous préoccupez pas pour moi. Une partie de ce qui faisait ma magie résidait dans ma baguette et ce qu’elle représentait pour moi. Je dois désormais me reconstruire sans elle et sans les souvenirs qu’elle éveillait en moi. C’est peut-être mieux ainsi. »

… et se permit même de rire à l’anecdote qu’il s’apprêtait à lui énoncer.


« De l’aveu même de ma soeur ainée, ma magie était pure et belle du temps où cette baguette n’était pas encore en ma possession. Elle le redeviendra peut-être, maintenant que cette baguette n'est plus.»
Dernière modification par Arseni Stoyanov le 28 avr. 2017, 21:50, modifié 1 fois.
01 oct. 2016, 15:34
{PV} Au crépuscule de la Magie
Kristen, qui s’estimait moins que ce que l’on aurait pu penser de prime abord, et qui ne connaissait pas grand-chose aux relations humaines, se demandait bien comment Stanislav Stoyanov aurait pu atteindre son frère en l’atteignant, elle. Certes, il y avait un lien entre Kristen et Arseni, quelque chose qui devait être une sincère amitié, mais Kristen n’avait pas vraiment réfléchi plus loin que cela, et n’avait pas réalisé que cette amitié serait effectivement un bon moyen pour blesser. Pourtant, c'était peut-être bien aussi pour cela qu'elle avait jusque là gardé ses distances avec tout et tout le monde - ajouté à cela, évidemment, sa misanthropie naturelle et sans explication apparente. Par ailleurs, elle aurait trouvé trop lâche qu’un sorcier à peu près digne puisse songer à blesser les autres par tant de détours.

Lorsque le Ministre évoqua la « force » de Kristen, qu’il utilisa les mots de « grande sorcière », Kristen haussa un sourcil. La directrice de Poudlard croisa les bras et fixa ses genoux. Elle ne s’était jamais sentie « grande sorcière », même si cela avait longtemps été son but, étant plus jeune. Comme beaucoup de petits enfants, elle avait voulu être la plus forte, la meilleure, bref, la « plus mieux ». La particularité de ce but est qu’il est très difficile d’en tirer satisfaction, car il est assez compliqué de se rendre compte de sa propre valeur, surtout lorsqu’on aime travailler, que l’on a de cesse de vouloir s’améliorer, enrichir ses connaissances. Finalement, être la meilleure ne pouvait pas suffire, il fallait aller encore plus haut, s'élever jusqu'à la perfection ; et le principe-même de la perfection est qu'aucun humain ne peut l'atteindre. Donc, elle ne se considérerait comme une « grande sorcière » que le jour où elle aurait atteint la perfection, soit jamais. Certains appelleraient ce fait tout simplement "humilité", mais il s'agissait en réalité d'une exigence particulièrement démesurée.

Fallait-il interrompre la conversation ici, pour rétablir une vérité qu’Arseni ne pouvait connaître ? Car la première rencontre de ces deux personnages n’avait pas été tout à fait honnête ; elle avait été brouillée par le voile du mensonge. Arseni, à cette époque, n’avait pas tout à fait vu la Kristen qu’il voyait aujourd’hui, ni même une version régressée d’elle. C’était le même corps, mais à l’intérieur, une personne différente. Fallait-il lui dire, au risque de le décevoir ? Non, pour l’instant, l’attention devait rester sur lui, et lui seul.

Kristen releva subitement les yeux vers son ami lorsqu’elle entendit le mot « horcruxe » sortir de sa bouche. Son mouvement avait été rapide, ses yeux brillaient dans un mélange d’affolement et de très grande curiosité. C’était cela, alors, que signifiaient les mots « tuer une seconde fois ». Ce n’était pas une métaphore, comme Kristen l’avait d’abord cru. Elle se mordit l’intérieur des joues, se les creusant un peu plus, et elle déglutit. Arseni n’avait pas dû le voir, car il tourna ses yeux vers elle quelques secondes après cela.

Les derniers mots du fils de vélane absorbèrent la directrice, et elle ne pensa aussitôt presque plus aux horcruxes, objets d’étude qui devaient, par leur nature et par leur effet, la passionner – mais cela, ce n’était pas quelque chose qu’il fallait dire, même pas à ses amis et même si l’on n’avait pas l’intention d’en créer soi-même. C’était juste que cela ne se faisait pas, que cela pouvait paraître dangereux ; et dans cette situation précise, cela aurait été tout particulièrement inapproprié. Ce sujet, hautement intéressant, donc, avait malgré tout été partiellement éclipsé dans son esprit.

Kristen réfléchit beaucoup aux dernières paroles de d’Arseni, mesurant sa réponse, tournant les mots dans sa bouche encore et encore. Elle s’enfonça dans sa chaise, fronça les sourcils, et soupira. Elle baissa les yeux.


« Je ne suis pas d’accord. Ne reniez jamais vos souvenirs, car l’oubli est pernicieux. Ce sont vos souvenirs qui font de vous ce que vous êtes, les bons, comme les mauvais. Ils sont les fondations de votre être, et vous vous perdriez en les mettant tout simplement de côté. »

Elle repensa à toutes les erreurs de sa vie, tous ces horribles souvenirs qu’elle avait voulu oublier à tout jamais, au prix même de ne plus être tout à fait elle-même. Ce ne sont pas nos expériences qui font de nous ce que nous sommes, ce n'est pas vrai. C'est une idée reçue. Ce qui fait de nous ce que nous sommes, en vérité, ce sont les souvenirs que nous gardons des expériences que nous avons vécues. Oublier, c’est s’oublier.

« Ce qui doit changer, c’est votre façon d’appréhender ces souvenirs. »

Elle inspira longuement et recracha l’air qu’elle avait accumulé dans ses poumons. Elle n’osa pas regarder Arseni dans les yeux, de peur que celui-ci comprenne qu’elle ne disait pas cela sans raison, que ces conseils-là étaient issus de conclusions qu’elle avait tiré sur son propre vécu ; car un jour, elle s'était oubliée.

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24 oct. 2016, 22:36
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ARSENI STOYANOV


Changer ma façon d’appréhender mes propres souvenirs… ces quelques mots me restaient en travers de la gorge sans que je ne parvienne à comprendre pourquoi. Etait-ce mon ego qui s’en trouvait blessé ? Ma déroute qui m’aveuglait ? Je l’ignorais. Je restais silencieux, le regard baissé sur ma main gauche, partagé entre un sentiment de découragement et le devoir d’introspection. Comme pour me ramener à la difficile réalité, une douleur vive se manifestait soudain dans mon avant-bras et m’arrachait une grimace. Je n’osais regarder Kristen dans les yeux à cet instant, mais savais pertinemment qu’elle avait saisi la grimace au vol. Rien ne lui échappait et certainement pas ce genre de détails. Les traitements avaient beau améliorer mon quotidien, la douleur revenait invariablement me taquiner de jour comme de nuit. Je me massais tranquillement le bras, mes pensées volontairement tournées vers les conseils que Kristen avait jugés bon de me donner pour ne pas me focaliser sur la douleur. Et si, au fond, elle avait raison ? Si c’était bien ma façon d’appréhender mon passé qui m’avait conduit dans cette chambre ? Le seul fait d’en envisager la possibilité me déplaisais. J’écartais donc cette possibilité en cloisonnant mon esprit. Avec le recul, je me rends compte aujourd’hui combien cette réaction était indigne de moi.

« Vous semblez avoir longuement réfléchi à la question, dis-je en tournant mes yeux vers Kristen. »

Kristen ne regardait pas dans ma direction à cet instant. Ce qui me fit dire que j’avais visé juste. Étonnement, je ne tirais aucune gloire de cette petite victoire. Pire, j’éprouvais une pointe de honte saupoudrée d’une once de culpabilité en l’obligeant à se prononcer sur un sujet qui ne pouvait être que pénible et douloureux. Désireux de me racheter, je reprenais la parole là où je l’avais laissée.


« Je n’étais pas tout à fait le même autrefois. Comme tout un chacun, j’ai connu mon lot d’échecs et de réussites. Mais étrangement, ces dernières ne m’ont jamais aussi bien marquées que les premiers. Je crois que dans une certaine mesure, je me suis laissé corrompre aussi bien par nécessité que par facilité. Il m’était beaucoup plus simple de composer avec mes peines que de bâtir sur des victoires ; plus simple de jouer avec l’obscurité que de me tenir dans la lumière. Peut-être était-ce mon esprit un brin mélancolique qui justifiait cette posture. Peut-être juste le hasard. Aujourd’hui encore je n’ai pas les réponses. »

Je levais momentanément les yeux au plafond en pensant aux miens, partis trop tôt. Les souvenirs de leur visage m’arrachaient un sourire triste.

« Une chose est sûre. Au fond de moi, je voulais vivre. Jamais, je le jure, je n’avais imaginé pouvoir tomber si bas. »

L’avoué de vive voix fut comme une révélation pour moi. Je me demandais soudain si une partie de mon intellect avait conservé une trace de cet Arseni d’un autre temps : à la fois fougueux, insouciant, impertinent, mais je le crois aussi, attachant et rêveur. Le jeune homme que j’avais été jusqu’à mes quinze ans n’était peut-être pas tout à fait mort dans les ruines de la Tour Ombreuse. Peut-être que quelque part, au plus profond de moi-même, derrière maintes et maintes portes verrouillées, il restait encore un peu de ce que j’avais été. Ce n’était là qu’un mince filet d’espérance, mais un filet qui ne demandait qu’à être remonté pour, peut-être, découvrir un trésor que j’imaginais jusque-là perdu. Je prenais soudainement conscience que mon sourire ne s’était pas effacé alors que mon regard redescendait tranquillement se poser sur ma précieuse amie, dont les traits m’apparaissaient maintenant plus tirés. Etait-ce un nouveau tour de mon esprit ou bien la réalité que je n’avais pas réussi à saisir jusqu’à présent ?

« Kristen, hasardais-je. Tout va bien ? »
Dernière modification par Arseni Stoyanov le 28 avr. 2017, 21:50, modifié 1 fois.
25 oct. 2016, 00:46
{PV} Au crépuscule de la Magie
Kristen, dont les yeux étaient rivés vers la fenêtre, fut surprise par la première remarque d’Arseni. Elle ne put retenir un petit haussement de sourcils. Elle plissa ensuite les yeux et prit un air contrarié. Elle ne comprenait pas vraiment l’utilité de cette remarque, et en fut gênée. Etait-ce d’ailleurs son but ? La troubler ? Pourquoi, alors que Kristen lui parlait franchement, Arseni aurait-il eu ce besoin de montrer qu’il avait percé à jour quelque chose chez l’insondable Kristen Loewy ? Elle se sentait un peu mal à l’aise, et se dit qu’elle n’aurait peut-être pas dû lui donner tous ces conseils. Pas s’ils devaient être utilisés pour l’analyser, elle. Kristen croisa les bras et soupira.

Elle écouta ce qu’Arseni avoua ensuite. Elle reconnut alors dans ses paroles certaines facettes de sa propre expérience. On retient plus volontiers ses échecs que ses réussites, lorsque l’on est quelqu’un qui a une certaine tendance à douter. Kristen n’avait pas d'explication non plus à cette fâcheuse manie. En ce qui la concernait, elle s’était toujours tenue à l’écart de tout, s’était toujours tenue dans l’obscurité, elle aussi. Au départ, c’était simplement parce qu’elle ne voyait pas de différence entre l'ombre et la lumière : elle faisait sa vie dans son coin, sans se rendre compte qu'elle s'enfonçait dans l'obscurité. Elle vivait tout simplement dans cette solitude et dans cette noirceur sans y faire attention. Plus tard, cela devint une réelle habitude, voire une addiction. Cela faisait partie d’elle, et elle ne pouvait plus s’en détacher. Elle avait fini par devenir ce que les autres voyaient en elle, et correspondait maintenant, pour la plupart, à cette image assez simple que tout le monde se faisait plus ou moins d’elle. Cela ne la dérangeait pas outre mesure. Elle avait pourtant essayé, un jour, de se détacher de l'ombre. Cela n'avait pas été très concluant, alors l'idée avait été abandonnée dès que la conscience avait repris le dessus. Voir au-dessus de ce que tout le monde voyait chez Kristen, c'est-à-dire cette part d'ombre : « Elle est effrayante ! Elle est sévère, elle est stricte ! Elle a l'air méchante ! » , justement, devenait un privilège d'amis. Arseni pouvait-il réellement le voir ?

Plus elle écoutait Arseni, plus elle avait la sensation qu’il parlait pour la faire parler. Ce n'était probablement pas volontaire. Lorsqu’il lui demanda si tout allait bien, elle se mordit les joues et fit du piano avec ses doigts sur le bord de la chaise. Finalement, elle se leva d’un coup et regarda Arseni droit dans les yeux en fronçant les sourcils.


« Si vous tenez réellement à le savoir, j’ai en effet longuement réfléchi à la question. »

Elle se retourna pour ne plus affronter ce regard, car elle avait besoin de quelques secondes de répit avant de se lancer. Ce qu'elle allait dire, elle ne l'avait jamais dit à personne. Arseni serait le premier à effleurer ce secret qu'elle avait caché durant si longtemps.


« J’ai voulu croire, un jour, que je pouvais vivre dans la lumière. Moi aussi, je voulais vivre, mais moi, je voulais vivre bien. Contrairement à vous, j'ai eu la folie de penser que c'était plus facile d'être du côté des gentils. Je n'avais que des peines, et pas de victoires, ce qui était compliqué pour démarrer du côté des gens bien. J'ai donc effacé mes plus grands regrets et ai entrepris de me créer de fausses victoires. »

Ses lèvres formèrent un petit sourire ironique, comme si elle se moquait de sa stupidité passée. En fait, c'était un peu le cas. Elle ne trouvait même pas de réconfort à penser qu'elle ne s'était pas glissée d'elle-même dans cette idéologie utopiste ridicule, ou qui ne lui correspondait pas, en tout cas.

« Au moment où vous m’avez connue, j’étais cette personne qui se pensait très honorable, qui avait un but génial et un passé presque glorieux. J’aimais beaucoup ma position de martyr. »

Elle expira un rire et se tourna vers le Ministre.

« Quel choc cela a été lorsque j’ai appris que je n’étais pas si respectable que je le pensais ! »

Finalement, en se redressant et levant le menton - elle avait cet air de la femme qui a vaincu - elle conclut :

« Mais pour répondre à votre question : oui, tout va bien. J'ai accepté ce que j'étais. J'ai des remords, certes, mais je vis avec, dans l'espoir, bien sûr, que d'autres ne s'ajoutent pas à ma liste. Vous devriez en faire autant. Accepter votre passé, même ce qu'il y a de pire, et simplement aller de l'avant en vous jurant de ne pas refaire les mêmes erreurs. »

Nécromancienne - Mère du dragon - Détentrice de la Baguette de Sureau et du Retourneur de Temps
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29 oct. 2016, 18:45
{PV} Au crépuscule de la Magie
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ARSENI STOYANOV


Certaines réactions étaient imprévisibles. Mais au-delà de son imprévisibilité, la réaction de Kristen me désarçonna tandis que je la regardais me tourner le dos. Je comprenais qu’elle ne souhaitait pas affronter mon regard au moment où elle me faisait pénétrer dans ce qui avait été, jusque là, le jardin secret de sa vie ; quelque chose que mon imagination n’avait même pas pu effleurer à la lecture de son dossier quand j’étais encore le directeur de Poudlard. J’écoutais avec une attention totale le moindre de ses mots, en pesait le sens avant de les retourner dans ma tête et de les peser de nouveau pour m’assurer de leur signification. Je percevais dans ce processus inédit — à tel point qu’il devait me laisser sans voix — quelque chose de si intime pour Kristen qu’elle ne pouvait supporter la moindre interruption, fut-ce celle, involontaire, laissée par l’empreinte d’un seul de mes regards. Je baissais les yeux, coupable de l’incité à se livrer à moi alors que sa nature secrète le lui interdisait. N’avais-je pas moi-même des secrets que je souhaitais garder impénétrables ?

Je levais de nouveau mes yeux au moment où elle se retournait vers moi. Je découvrais soudain une autre femme, fière, certaine de ce qu’elle était, et encore davantage de ce qu’elle n’était pas. Son assurance me troublait, mais je ne laissais rien en paraître. Kristen n’était plus du tout cette femme hésitante et torturée qui avait cédé à la facilité au moment d’affronter Felipe Sampedro. Deux années, dont une à la tête de Poudlard, l’avaient radicalement changé. Je me trouvais face à une personne dont la nouvelle stature m’était si étrangère que j’en ressentais une pointe de crainte mêlée cependant à un soupçon de fierté. Parmi toutes les décisions que j’avais prises au cours de ces deux dernières années, celle d’éviter à Kristen un séjour à Azkaban était sans doute la plus aboutie ; celle qui avait produit les meilleurs résultats. Le parallèle était d’autant plus déstabilisant, que ma chute coïncidait trait pour trait avec son élévation. Tant est que pour la première fois, je prenais conscience de l’écart de puissance qui s’était naturellement creusé entre nous, à mon entière défaveur.


« J'ai le sentiment que mon temps est révolu, dis-je avec le plus grand sérieux. Celui que vous avez connu a disparu avec le Dominion, de même que la Kristen que j’ai connue a disparu avec les cadavres des Sampedro. Ce qu’il adviendra de moi désormais, je l’ignore, mais une chose est certaine, le passé est le passé. En ce sens, je ne peux qu’acquiescer à vos propos. Nous sommes ce que nous sommes. Il est parfaitement inutile de le fuir. »

J’eu un regard pour la boîte qui contenait ma nouvelle baguette, posée sur ma table de chevet, et ressenti un véritable pincement à l’idée de ne plus être le sorcier que j’étais autrefois. Je cherchais la perception de la moindre petite parcelle de magie en moi et riais en essuyant un échec retentissant.


« Ma reconstruction sera longue, ajoutais-je en observant Kristen du coin de l’oeil. Ce qui nous pose un problème de taille. Faible, je ne suis d’aucune utilité au ministère. Mes opposants au Parlement se serviront de mon état pour remettre en question ma légitimité à la tête de notre communauté. Si je peux encaisser la pluie de critiques qui s’abattra promptement sur moi et tenter de maintenir mon mandat, il est une chose que je ne suis pour l’heure pas en mesure d’affronter. »

Je fronçais les sourcils presque sans le vouloir, le nom que je m’apprêtais à prononcer me brûlait la gorge.

« Aidan Bowers. »

Je guettais la réaction de Kristen et poursuivais sur ma lancée en me disant que la peur n’avait plus d’emprise sur elle.

« Je sais de sources sûres que vous vous connaissiez du temps où vous étiez tous deux élèves à Poudlard. Mais le Aidan dont vous vous souvenez peut-être n’est plus qu’une facette parmi toutes celles qu’il a utilisé pour parvenir à ses fins. Kristen, je crains que sa force de frappe n’ait dépassé tout ce que j’ai pu me figurer sur ce compte. Cet homme ne joue pas une simple partie d’échecs. Non… il joue en ayant plusieurs coups d’avance, comme si notre imprévisibilité n’avait finalement aucun secret pour lui. J’ai pu glaner ici et là quelques bribes d’informations à son sujet, mais rien qui ne me permette de le comprendre lui ou ses motivations. Il reste une menace permanente. Comme une épée de Damocles continuellement suspendue au-dessus de nos têtes. Ce qu’il veut, je l’ignore, mais je sais que bientôt il viendra le réclamer. Si cela se produit plus tôt que je ne le prévois, vous serez la seule à pouvoir contrecarrer ses plans à défaut de pouvoir le neutraliser. Puis-je compter sur vous ? »
Dernière modification par Arseni Stoyanov le 28 avr. 2017, 21:50, modifié 1 fois.
30 oct. 2016, 12:33
{PV} Au crépuscule de la Magie
Kristen regarda Arseni tirer ses propres conclusions sans réagir. Elle pensait surtout à ce qu’elle venait de faire, à comment elle avait osé laisser entrevoir une partie cachée de son âme, de ses tourments. Son esprit resta bloqué sur ses propres aveux durant les quelques secondes que dura le silence qui suivit la réponse d’Arseni. Ses pensées étaient encore dans le vague lorsque le Ministre parla de son état actuel, mais tout redevint bien réel quand il prononça le nom d’Aidan Bowers. Il sembla même à Kristen que si ses oreilles avaient pu se dresser pour mieux capter ce nom, elles l’auraient fait. Cependant, la directrice de Poudlard gardait les bras croisés et un air sérieux, implacable et inatteignable.

Elle se retourna lentement vers Arseni lorsque celui-ci lui annonça qu’il savait que Kristen avait connu Aidan. Ce n’était pas réellement un secret, mais ce n’était pas quelque chose que Kristen aimait crier sur les toits. Elle voulait se tenir le plus loin possible de cet homme, n’avoir absolument aucun rapport avec lui. Elle écouta attentivement les paroles du Ministre alité et plissa les yeux, ce qui trahissait un vif intérêt pour la conversation.


« Je constate que vous avez des sources très douées en calcul, Monsieur le Ministre.., ironisa-t-elle. »

Elle osa souffler un petit rire par ses narines et poursuivit, alors qu’elle se tenait droite, fière :

« J’ai connu Aidan Bowers, en effet, comme tout le monde le connaissait. Il était assez populaire. »

Elle haussa les épaules et avait sur le visage une expression qui voulait dire plus ou moins : « bof, pas intéressée ». Elle n’avait, en effet, jamais été attirée par les personnes populaires ou par la popularité en général. Être populaire, c’était laisser la porte ouverte aux vautours. Vouloir l’être, c’était avoir besoin de ces autres médiocres pour se sentir exister, comme si leurs regards admiratifs de babouins ahuris pouvaient vous rendre plus brillant. Ne pas s’intéresser aux personnes populaires, lorsque l'on est pourtant un adolescent, c’est faire preuve d’une sorte de résistance moqueuse. Un refus de se mêler à la foule de ces individus quelconques, attirés par un être qui a l’air un peu moins médiocre – mais qui l’est tout autant.


« Un insupportable voyou, pourtant. »

Kristen sembla repenser à certains événements de sa scolarité et s’en moquer intérieurement. « J’étais jeune ! », devait-elle se dire avec dédain, comme tout le monde a dû se le dire une fois dans sa vie. On pense dans ces moments-là non seulement que l’âge est une excuse, mais l’on a aussi tendance à détacher ce jeune moi du moi actuel, comme s’il était une tout autre personne.

En sortant de ses pensées, Kristen posa sur son ami un regard empreint d’une douceur protectrice mêlée à une espèce d'excitation narquoise.


« Le remettre à sa place me ferait grand plaisir. »

Elle avait pourtant conscience qu’Aidan était quelqu’un de dangereux. On l’avait toujours pressenti. Il avait de l’esprit et de la force, et aller contre lui ne serait pas tâche aisée. Pourtant, mettez le danger face à un Gryffondor, et il lui rira au nez, fonçant tête baissée, trop arrogant pour remarquer que l’échec peut tendre les bras au bout du chemin. Kristen ne pensait même pas que son trop-plein d’assurance puisse inquiéter qui que ce soit, en l’occurrence, Arseni. Elle se sentait capable d’affronter tout, si la cause était bonne, et c’est aussi ce qui lui permettait d’obtenir quelques succès. Avoir simplement l’air d’une inconsciente aux yeux d'un grand homme ne lui effleurait pas l’esprit.

Nécromancienne - Mère du dragon - Détentrice de la Baguette de Sureau et du Retourneur de Temps
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