- T'as bien compris ? Tu restes là pour faire le guet et si jamais quelqu'un se pointe, tu te débrouilles pour me prévenir. Tu dois juste tenir dix minutes, ça ira ?

Au coin de la portion d'escalier reliant la salle d'étude des runes et le bureau du concierge de la tour Nord, un œil rivé sur les marches qui le mènerait au lieu convoité, Rey chuchota une dernière fois le plan à Eliott qu'il avait rejoint en vitesse après son cours de Soin aux créatures magiques. Avec lui, valait mieux dix fois qu'une. Son meilleur ami avait souvent tendance à mettre en pièce chacune de ses stratégies, avec la plus grande innocence de surcroit. Impossible de lui en vouloir du coup. Mais là, si il se faisait chopper, il allait passer un sale quart d'heure. Le poufsouffle n'avait pas intérêt à le lâcher. Ils avaient quand même jouer un minimum la sécurité. La salle de divination était vide et celle d'étude de runes remplies d'élèves auxquels ils pourraient se mêler pour s'échapper ni vu ni connu lors de la fin du cours. Voilà pourquoi le timing était important. Normalement, personne ne devrait venir les déranger.

Un frisson d'excitation parcourut le corps du capitaine des Hel's, qui, comme s'il était sur le terrain de quidditch, sentit tous ses sens s'électriser. Cela semblait faire une éternité qu'il n'avait pas collaborer avec Eliott pour venir en aide à quelqu'un. L'année dernière avait été bien difficile à gérer pour l'un comme pour l'autre et même si la seconde moitié de l'année les avait vu se serrer les coudes et se soutenir l'un l'autre, le cœur n'était pas aux folles entreprises.

Les sourcils froncés, la mine concentrée, Rey abandonna là son ami et s'aventura dans les escaliers prudemment en guettant le moindre mouvement spectral qui tendrait à traverser un bout de mur. Rien, pas âme qui vive ou non, ne l'empêcha cependant d'accéder à la porte voulu. Il était face au bureau du concierge. C'était maintenant que tout commençait. Il toqua légèrement, attendit quelques secondes. Le silence lui répondit. Il abaissa la poignet, au cas où par miracle la porte serait restée ouverte. Sans surprise, elle ne l'était pas. Il s'accroupit alors et tenta de crocheter la serrure qui ne pouvait s'ouvrir avec un sortilège, avec le couteau à beurre qu'il avait subtiliser lors du petit déjeuner et un bout de fil de fer. Très concentré sur sa tâche bien laborieuse, - et, même s'il ne le savait pas encore, impossible avec son matériel de touriste - il ne vit pas l'ombre se faufiler derrière lui.

" Essaye avec ça c'est plus simple." dit une voix dans son dos qui le fit sursauter tellement fort que le couteau à beurre se tordit dans la serrure et qu'il se cogna le front contre la porte. Son cœur sembla galoper comme des cheveux sauvage lancés au triple galop. Encore sous le choc, il se retourna lentement.

- A...A...Ali ?! Qu'est-ce... Pourq... Eliott n'est plus à son poste ?! s'exclama-t-il finalement paniqué se rendant tout à coup compte de ce que pouvait impliquer la présence de la jeune fille. Son meilleur ami n'avait-il encore rien compris au plan ?

Le rouquin pencha la tête pour voir derrière la poufsouffle et celle du cinquième année apparu au bas de l'escalier, un grand sourire aux lèvres et le pouce levé. Eliott était bien à son poste ce qui ne l'empêcha pas de grommeler un "peut pas se mêler de ses affaires lui". Un petit sourire en coin naquit toutefois sur ses lèvres. Il était heureux de retrouver son meilleur ami.

@Cassandre Mcwood comme promis

Check. Elle avait quasiment réglé ses comptes avec tout le château, nouvelle année, on devait faire le ménage, dépoussiérer les relations et repartir sur un bon pied après qu’elle se soit éteinte durant toute la fin de la troisième année. Mais il y avait une ombre au tableau et pas des moindres, quelqu’un avec qui elle n’avait pas partagé un moment depuis une éternité et qui pourtant représentait beaucoup pour elle auparavant. Maintenant ? Et bien elle n’en savait rien, c’était compliqué et elle n’aurait des réponses que si elle arrivait à aller lui parler. Bon c’était décidé ! Elle avait passé la fin de l’heure à guetter les faits et gestes de son capitaine, elle voulait le chopper à la fin du cours, si possible seul afin d’enfin avoir une discussion avec lui.

Mais c’est qui était rapide et surtout jamais seul ! Aliénor se leva à la fin du cours avant d’être attrapée par une Eileen qui lui demander elle ne sait quoi sur le cours, mais la jeune Delphillia ne l’écoutait pas et surtout… Purée il était en train de partir ! La batteuse des Hel’s s’excusa laissant son amie en plan pour suivre le rouquin à la trace. Il allait où comme ça ? Elle le suivit comme elle le put jusqu‘à la tour Nord. Mais il avait étude des Runes ? Oh non, ils ne s’étaient tellement pas parlé qu’elle ne connaissait même pas les options du garçon. Qu’elle cruche ! Et pourquoi il est tout le temps avec Eliott ? Mais alors qu’ils étaient en bas des escaliers de la tour nord, ils s’arrêtèrent et chuchotèrent. La jeune fille curieuse se plaqua contre un mur en tentant de comprendre ce qu’il se passait. Bien entendu elle n’entendait rien et ne savait pas lire sur les lèvres. Une espionne en carton. Mais celui qu’elle avait suivi de base monta les marches laissant son acolyte en bas. La jeune Delphillia arqua un sourcil en se décollant du mur. C’était bizarre ça, beaucoup trop pour ne pas mériter une investigation. Elle replaça son sac sur son épaule avant de se diriger vers le meilleur ami de son capitaine. Elle se racla la gorge pour s’annoncer et celui-ci se retourna. Elle s’attendait à se faire jeter. Mais il y avait une lueur étrange dans son regard.

-Euh… Faut que je parle à ton pote.

Et c’est après quelques mots qu’elle se retrouva en haut des marches. Beaucoup plus simple que prévu. Et le tableau valait le coup ! Rey devant la porte du bureau du concierge en train d’essayer de la crocheter. Ça ne lui allait pas vraiment et en plus il s’y prenait comme un manche. Un sourire moqueur s’installa sur les lèvres de la jeune fille. Elle attrapa son sac délaissant son épaule de son poids pour en sortir le vieux couteau de Sérurier de son père. Il était capricieux, mais il fonctionnerait bien mieux que ce qu’avait Rey en sa possession. Elle aurait pu le regarder faire jusqu’à ce qu’il abandonne, mais elle devait lui parler et elle ne comptait pas rester toute la journée ici.

-Essaye avec ça c’est plus simple.

Il sursauta ce qui finit d’achever Aliénor qui laissa échapper un rire franc en lui tendant le couteau. Il incrimina immédiatement son acolyte ce qui amusa la jeune fille, il n’était peut-être pas très fiable, mais Aliénor n’était pas n’importe qui quand même, elle était même vexée que son capitaine n’ait pas penser à lui parler de s’infiltrer dans le bureau du concierge, c’est drôle comme idée. Enfin en même temps elle l’évite depuis des mois et des mois. Ça doit jouer un rôle là-dedans.

-Allez tient ça ouvre presque toutes les portes en insistant un peu. Tu veux pas que je le fasse à ta place quand même ? T’façon t’as ruiné ton matériel. Même ce pauvre couteau a beurre y a laissé la vie.

Et puis qui n’était pas curieux de savoir ce qu’il y avait là-dedans ? Aliénor s’était déjà faite confisquer son essai de gnôle en début de troisième année. Une de ses expériences de ses vacances passées à l’école. Le tout était peut-être encore là-dedans !

Rey loucha sur le couteau un peu trop aiguisé que lui tendait la jeune fille avant de reporter son attention sur elle. Que pouvait-elle bien faire là ? Elle n’avait pas cours dans la tour aujourd’hui, ce pourrait-il que ce ne soit pas un hasard et qu’elle était là pour… lui ? Cela lui paraissait peu vraisemblable, il ne s’était pas parlé depuis une éternité. Il avait bien tenté d’aller la voir, mais elle semblait s’échapper comme une tentacule de calmar à chaque fois qu’il l’approchait. Le garçon en avait conclu qu’elle ne voulait plus rien avoir à faire avec lui. Cette conclusion l’avait beaucoup fait souffrir, et allumait un vrai brasier en lui lorsqu’il la voyait trainer avec Daley à la place. Mais au fond, il comprenait. Lui aussi l’avait blessé d’une certaine façon.

Le rouquin ne savait pas trop quoi faire de la présence de Aliénor, il n’avait pas du tout prévu ça dans son plan. Mais un coup d’œil sur son propre couteau lui suffit pour se rendre à l’évidence qu’elle n’avait pas tord : son matériel était fouttu et le sien serait bien mieux. Il hésita encore quelques secondes, puis se saisit du couteau qu’elle lui tendait avec un « Ok » en réponse. Que répondre d’autre ? Ne sachant pas quoi dire de plus, il se tourna vers la serrure et un peu gêné, reprit son activité de crocheteur du dimanche. Un petit coup en bas, un autre sur le côté et… rien. Le garçon recommença sans plus de succès et il sentait que le temps avançait à toute allure. Un sortilège aurait été tellement plus simple !

- Merde. Jura t-il entre ses dents après un énième essai infructueux. Il devait bien se rendre à l’évidence que c’était bien plus compliqué que ce qu’il pensait.

Il jeta un coup d’œil en biais à Alienor. Si elle avait ce genre de couteau sur elle, peut-être savait-elle aussi s’en servir. Au point où il en était, ça valait le coup de tenter le coup sinon la mission risquait d’être un échec cuisant… encore. Il inspira en même temps qu’il ravala sa fierté et tandis à son tour le couteau à Delphillia.

- Tu veux essayer ? Demanda-t-il à le jeune fille, l’air de rien.

Celle-ci ne se fit pas prier, elle semblait même n’attendre que ça, se moquant probablement silencieusement de lui. A moins que Rey ne se faisse des idées et qu’elle voulait juste être une bonne patte ? Mouai, non. Elle lui prit le couteau des mains et il se décala précipitemment pour la laisser faire. Tandis qu’elle s’affairait sur sa tache, il l’observa. Alors qu’il contemplait se visage concentré dont il avait vu toutes les émotions y passer ; de la joie à la tristesse, de l’émerveillement à la fureur ; il se revit un peu moins d’an auparavant dans les toilettes abandonnées. La dernière fois qu’ils avaient vraiment été ensemble, amis. Il lui semblait que ça faisait une éternité. Un nœud se forma dans son estomac. Pourquoi était-elle là ?

Un déclic résonna dans l’escalier presque vide et la porte s’ouvrit. Rey reporta immédiatement son attention sur le bureau du concierge et se concentra sur sa mission.

- Bien joué Ali, dit-il avant d’entrer dans le bureau prudemment et de commencer à fouiller. Il n’avait pas une seconde à perdre.

Un sourire en coin se dessina sur ses lèvres alors que le garçon prit le couteau qu’elle lui tendait. Puis il se reconcentra sur sa tâche. Aliénor pencha la tête sur le côté observant sa façon de faire. Original, mais il n’y mettait pas assez d’ardeur, il fallait savoir dialoguer avec les serrures certes, mais le but c’était de la forcer pas de lui faire des chatouilles. La jeune fille laissa échapper un léger rire en secouant la tête de gauche à droite, décidément il était plus du genre gentil garçon, il ne devait pas avoir tenté ça de nombreuses fois. Bon Aliénor non plus en soi, mais elle c’était entrainée.

Alors quand il lui tendit le couteau pour qu’elle essaye, elle l’attrapa sure d’elle avant de s’accroupir devant la serrure. Elle enfonça le couteau avant de mettre sa main gauche à plat sur le bout du manche du couteau, puis elle envoya son poing droit dans sa main et la serrure claqua avant qu’Aliénor n’active la poignée et que la porte s’ouvre. Elle était assez fière d’elle et se releva en arquant un sourcil, observant le rouquin. Mais a peine se décala-t-elle qu’il entra dans le bureau. Et ben il était pressé le petit… Aliénor l’observa entrer dans la petite pièce avant de se positionner dans l’encadrement de la porte pour observer les faits et gestes du garçon. Mais son regard fut rapidement attiré par ce qui se trouvait dans ce bureau. C’était à la foi austère, mais ça donnait des impressions de caverne d’Alibaba. Il semblait y avoir de tout ce qui impressionnait la jeune fille. Mais elle était surtout là pour parler à Rey, elle ne devait pas l’oublier.

Elle referma la porte derrière elle avec prudence avant de se tourner vers Rey. Elle l’observa un moment avant de se lancer.

-Tu… Vas bien ?

Ouais elle ne savait pas vraiment quoi lui dire en fait ! Après tout ce temps sans lui avoir parlé, c’est comme si elle devait totalement découvrir un inconnu ! Elle poussa un soupire devant sa nullité quand son regard se posa sur un bocal contenant une espèce de charbon noir et brillant. C’était beau et intrigant, la jeune fille avait une irrésistible envie de savoir ce que c’était. Elle se désintéressa alors totalement de Rey et attrapa le bocal pour l’observer de plus près. Mais alors qu’elle était absorbée dans son observation, un bruit la fit sursauter. Elle lâcha brutalement le bocal qui s’éclata au sol. Soudain tout fut noir dans la pièce et Aliénor toussota sous l’effet de cette poudre fine et opaque. Elle tendit les bras devant elle pour se repérer et ne manqua pas de mettre un coup à Rey.

-Pardon pardon !

Elle croisa les bras sur ses épaules pour ne pas de nouveau le frapper alors que la fumée s’avanouissant dans le lieu.

-Putain quelle idée de garder des trucs pareils !

Rey parcourut les étagères du regard avant de s’approcher du bureau et d’en explorer le contenu. Il était en pleine recherche lorsque la voix d’Alienor l’interpella. Le garçon s’interrompit et fronça les sourcils, surpris, avant de lever la tête en direction de la jeune fille. Il hésita anxieux, ne sachant pas trop si elle voulait connaître son état actuel ou si elle faisait référence à une situation bien plus précise, celle pour laquelle ils s’étaient éloignés. Il réfléchissait probablement trop. Il ouvrit la bouche pour lui répondre simplement mais la poufsouffle avait déjà détourné son attention de lui et fixait à présent un bocal avec une substance noire à l’intérieur. C’était donc une simple forme de politesse, la réponse ne semblait pas l’intéresser plus que ça.

Un peu vexé, il laissa la sorcière de côté et continua ses recherches. Où cette balle de tennis dédicacée pouvait-elle bien être ? Pas sur les étagères en tout cas, ni dans les tiroirs du bureau qu’il venait de vérifier. Elle ne pouvait pas être bien loin pourtant et vu la couleur, impossible de la louper. Une malle dans le coin de la pièce attira son attention. Il s’en approcha, enclencha le mécanisme d’ouverture et souleva le lourd couvercle. Un objet inidentifiable bondit de la malle le faisant reculer et se fracassa contre le bureau ce qui provoqua un enchainement d’actions que le garçon n’avait absolument pas envisagé. Il eut tout juste le temps d’entendre du verre qui se brise et de faire quelques pas avant que la pièce entière ne soit plongée dans le noir le plus opaque qu’il n’eut jamais expérimenté.

- Ali ! Tu n’a rie… AIE ! S’écria-t-il douloureusement en portant sa main à son œil qui se mit à pleurer suite au coup qu’il venait de recevoir.

Déjà qu’il n’y voyait rien, voilà maintenant que Ali, à priori, venait de réduire encore plus sa vision. Il resta immobile le temps que la douleur s’atténue et que la lumière revienne. Il avisa alors le bocal qui avait détourné l’attention de la sorcière quelques brèves minutes auparavant. Si il mettait les éléments bout à bout, il soupçonnait là l’effet de la poudre d’obscurité instantanée du Pérou dont il ne connaissait que la théorie.

- C’est le but de ce bureau de garder les trucs comme ça ! Touche plus à rien ou on va se faire repérer, grommela-t-il sa main toujours collée contre son œil.

Il retourna à sa malle dont il s’était éloigné sans s’en apercevoir lorsqu’il s’était inquiété, pour rien, pour la batteuse, de plus en plus perdu. Il se pencha avec la volonté de la fouiller mais se redressa une seconde après. Sa tête était pleine d’interrogations sur la présence d’Alienor qu’il n’arrivait plus à occulter maintenant que son globe oculaire pulsait de douleur. Le garçon ne cessait de se demander ce qu’elle faisait réellement ici.

- Pourquoi t’es là Ali ? Demanda-t-il brusquement, n’y tenant plus.

Il vrilla sa prunelle d’ambre sur la poufsouffle, l’autre œil endoloris restant fermé comme une réminiscence d’un pirate qu’on aurait préféré oublier.

Alors qu’elle se plaignait comme a son habitude Rey la coupa déclarant une vérité qu’elle connaissait aussi. Mais qu’elle pouvait être bête parfois. Mais quand celui-ci lui intima de ne plus rien toucher la jeune fille arqua un sourcil ayant une folle envie de mettre un coup de pied dans une étagère. Mais elle croisa les bras sur sa poitrine en soupirant. Elle n’allait pas aller bien loin comme ça, ce n’est pas en se comportant de la sorte qu’elle allait régler ses problèmes avec Rey. Une envie soudaine de partir lui prit et elle se tourna vers la porte. Alors que sa main était suspendue au-dessus de la poignée, la voix que Rey l’arrêta. Tout son corps se paralysa, comme si chacun de ses muscles c’était stoppés. Les paroles de la Professeure de sortilège lui revinrent en tête. Elle devait lui parler, éclaircir leur relation, que ce soit amicale comme sentimentale d’après les dires de cette peste de Sparks.

Sa main retomba le long de son corps et elle pouvait sentir le regard du garçon sur elle. Ses yeux se fixèrent au sol durant quelques secondes avant de remonter et qu’elle ne se tourner pour planter son regard dans celui de son ancien ami.

-Je… On devrait parler non ? De ce qu’il s’est passé, pour toi, pour moi… Parce qu’il s’en est passé des choses…

Oh oui s’en était passé des choses. La jeune fille passa une main dans ses cheveux et ses dents se plantèrent dans sa lèvre inférieure geste qui se faisait habituel chez la jeune Delphillia, faisant que sa lèvre devenait plus fragile avec le temps, mais peu importe. Elle poussa un profond soupire avant de se laisser tomber contre la porte s’appuyant négligemment alors que son cerveau tournait bien trop rapidement à son gout. Il y avait des tas de façons de commencer cette discussion, mais rien ne lui paraissait satisfaisant. Elle était totalement désarmée face à ce garçon qu’elle connaissait pourtant bien et qui en savait bien trop sur elle pour qu’elle soit en sécurité. C’était ça le problème, elle était bien trop exposée face à lui et ça la désemparait, d’autant plus depuis qu’elle avait cette idée en tête qu’il pouvait éprouver pour elle autre chose que de l’amitié.

-On peut pas rester comme ça, j’aime pas ça, j’ai besoin de retrouver mon ami, mais si tu veux pas je peux comprendre, j’ai été assez chiante l’année dernière.

Elle ne savait pas vraiment comment se positionnait Rey face à cette promesse qu’ils c’étaient faite puis à l’éloignement stratégique de la part de la jeune fille et elle n’aimait pas rester dans le flou et encore moins ne plus du tout lui parler, du moins sans raison valable. S’ils c’étaient disputés, s’il lui disait qu’il ne pouvait vraiment pas la considérer comme une amie d’accord. Mais là, les limites qu’ils s’imposaient étaient futiles et stupides aux yeux de la jeune fille.

-Et euh, enfin pardon pour ton œil…

Ouais il y avait ça aussi, elle n’en loupait pas une.

Des choses, évidemment qu'il s'en était passé des choses. Tellement de choses qu'il aurait voulu partager avec elle et d'autres dont il l'avait éloigné sciemment. Mais quand il avait enfin pu s'arracher aux menaces de son père biologique, la jeune fille était restée inaccessible. Elle voulait parler maintenant ? Et pourquoi pas avant ? Les émotions de Rey se mélangeait, il n'arrivait pas à savoir ce qu'il devait penser de tout ça. Une part de lui espérait, l'autre était en colère. En colère contre elle pour ne pas être venue plus tôt, pour l'avoir évité avec bien trop d'efficacité, pour l'avoir remplacé. Espoir de peut-être renouer avec son ami. Mais Alienor ne voulait que parler, comme deux anciens amis qui se donnaient des nouvelles peut-être. Le jeune sorcier ne voulait pas faire ça. Ce n'était définitivement pas le moment de parler.

Rey ne dit donc rien. Par ailleurs, à la façon dont la sorcière se mordit la lèvre inférieure, il savait qu'elle n'avait pas fini. Qu'il y avait autre chose qu'elle avait du mal à dire. Alors il attendit. Quand elle lâcha enfin le morceau, le rouquin ne put cacher sa surprise qui se peignit sans état d'âme sur son visage. Elle avait besoin de retrouver son ami ? Et s'il ne voulait pas, elle pouvait comprendre ? Mais c'était elle qui n'avait pas voulu ! Le garçon ne comprenait pas et cela joua en la faveur de la colère. Il était agacé par les mots d'Alienor alors qu'un instant auparavant c'était tout ce qu'il aurait voulu entendre. Mais la façon de faire, de le dire ne lui plaisait pas du tout. Elle lui avait beaucoup manqué et revenait vers lui comme une fleur, comme si c'était lui qui l'avait repoussé. Ok, c'était vrai pour le début de l'année mais dès le retour des vacances de Noël il était aller vers elle, elle n'avait pas pu ne pas le remarquer !

- J'ai essayé de te parler mais tu te barrais à chaque fois dit-il, ignorant ses excuses pour son œil. Je voulais être là quand il y a eu cette maudite photo mais impossible de t'approcher. J'ai fait ce que je croyais être le mieux pour ma famille mais toi, pourquoi tu m'évitais ? demanda-t-il ses yeux lançant des éclairs. Tu préférais aller retrouver Daley, lâcha-t-il du bout des lèvres.

Etait-ce la colère ou la jalousie qui lui bloqua tout à coup la respiration et l'obligea à détourner le regard et à s'obstiner dans l'objectif qu'il s'était fixé en entrant dans cette pièce : retrouver cette maudite balle. Il força son attention sur la malle qu'il recommença à fouiller.

- C'pas le moment ni le lieu pour parler. On va se faire punir si on nous trouve ici, dit-il, la raison se mettant au service de la mauvaise foi. Si tu veux parler, t'as qu'à m'attendre à l'extérieur.

En voilà une bonne idée ! Qu'elle aille donc rejoindre Eliott. De cette façon, il pourrait remettre ses idées au clair, remplir sa mission au plus vite sans être stressé par la jeune fille et éviter qu'on les grille. Ali dans la pièce, il n'était pas sûr d'en réchapper indemne.

La réaction de Rey, même si elle pouvait s’y attendre, figea la jeune fille sur place. Elle l’avait évité, d’abord parce qu’il lui avait demandé, puis a cause de cette histoire d’amour ou de flirt, puis pour cette maudite histoire et cette photo, qui l’avait humilié. Il avait raison, elle avait été véritable anguille avec lui durant la totalité de la troisième année et elle ne pouvait s’en vouloir qu’à elle-même. Seulement 3 personnes avaient pu l’approcher, Carry, Eileen et Chems. Mais quand le nom de ce dernier ressortit, la jeune Delphillia fronça les sourcils. Il avait quoi à voir là-dedans Chems ?
Et la goute d’eau qui fit déborder le vase Aliénor fut la suite. Ce n’était pas le moment pour parler ? Non sur, elle n’en avait rien à faire. Alors qu’il voulait qu’elle l’attendre à l’extérieur ? Mais jamais de la vie, si elle sort, elle n’allait pas l’attendre. Elle partirait et sa fierté aurait bien du mal à s’en remettre.

Aliénor toisa le garçon qui semblait chercher quelque chose. Elle campa sur ses appuis, ses pieds bien ancrés dans le sol, comme au karaté, et elle croisa les bras sur sa poitrine. Elle siffla entre ses dents alors que son regard était clairement assassin, au moins autant que celui que Rey lui avait lancé quelques secondes auparavant. Elle tourna la tête vers l’étagère sur laquelle se trouvait le caillou noir auparavant. Il y avait d’autres fioles, potion de babillage vu la couleur. Tiens, souvenir d’une époque où c’était lui qui l’évitait. Elle tendit son bras et caressa une des fioles du bout du doigt avant de la faire tomber au sol. Celle-ci se brisa en mille morceaux, dans un fracas qu’on connait bien au verre qui se brise. Elle devait parler avant qu’il ne l’insulte, sinon c’était clairement terminé pour leur amitié et au fond ce n’était pas ce qu’elle voulait.

-Tu crois quoi Rey, que je t’esquivais pour le plaisir ? T’es la personne qui me connait le mieux dans le château, mon premier ami, un de mes seuls amis durant longtemps ! Et tu m’as demandé de rayer ça je te rappelle. Tu crois que ça m’a fait quoi ?

Ses dents se plantèrent immédiatement dans sa lèvre inférieure. C’était des souvenirs douloureux pour la fillette, mais elle ne voulait pas laisser une larme couler le long de sa joue, pas tant qu’elle ne serait pas en terrain ami. Ce qui n’était pas le cas.

-Et devine quoi ? Et ben le monde c’est pas arrêté de tourner après ! Il s’est passé des tas de choses et ouais j’avais la trouille de venir t’en parler c’est ça que tu veux entendre ?

Cette fois-ci la jeune fille se tourna vers la porte e, marchant sur le verre qu’elle venait de faire tomber. Détruire, c’était tout ce qu’elle savait faire, et elle avait piétiné son amitié avec Rey comme elle le faisait avec ce verre.

-Fait chier…

C’était à peine audible, sa voix se cassait dans sa gorge et elle perdait une nouvelle fois son ami. Sa fierté en prenait un coup, elle n’aurait jamais dû venir, surtout pour obtenir un résultat pire que celui auparavant. Elle ouvrit la porte et la passa en furie avant de la refermer derrière elle. Mais elle ne pouvait pas passer devant Eliott dans cet état, il allait lui parler, lui demander et elle n’avait pas la force d’affronter ça de suite. Alors elle se laissa glisser le long du mur juste à côté de la porte et enfouit sa tête entre ses bras ramenant ses genoux contre son buste. Se mettre dans sa bulle, respirer puis repartir, la tête haute. C’était son plan.

Alors qu'il s'attendait au bruit d'une porte qui claque, ce fut celui du verre brisé qui le tira à nouveau de sa recherche. Encore ! Qu'allait-il encore arrivé cette fois-ci ? Il regarda Alienor s'attendant au pire. Rien. A part un regard de défi semblant dire "Je suis là, regarde moi". Elle l'avait fait exprès cette fois-ci ?! Juste pour attirer son attention ? Elle avait perdu la tête ! C'était sûr et certain, ils allaient se faire chopper et elle semblait ne rien en avoir à faire, tête d'hypogriffe qu'elle était. Depuis quand était-elle devenue si pénible ? Furieux qu'elle ruine de manière si légère son entreprise, il ouvrit la bouche avec l'intention manifeste de lui dire de dégager. La poufsouffle ne lui en laissa cependant le temps.

Au fur et à mesure qu'elle parlait, la colère du garçon se calma. Alienor était ce qu'elle était. Volcanique, émotive, un peu égocentrique sur les bords, en témoignait le verre brisé à ses pieds juste pour le faire chier, mais d'une grande loyauté et une amie précieuse. Il ne se doutait pas qu'il représentait tout autant pour elle, ou plutôt il ne savait plus vraiment depuis les évènements de l'année passée. Ce qu'il savait déjà, en revanche, c'était qu'il l'avait blessé. Le garçon s'en voulu un peu d'avoir été dur, bien qu'il savait avoir raison. Il l'avait probablement blessée. D'un autre côté, elle avait tellement mal choisis son moment. Ce serait un miracle si personne ne surgissait du mur. Même s'il l'écoutait, il ne pouvait s'empêcher de jeter des coups d'œil anxieux autour de lui, redoutant la moindre trace un peu opalescente. Quelle plaie cette histoire, il aurait du faire plus attention en se rendant à la tour. Ou remettre à plus tard l'opération dès que la poufsouffle avait débarqué à côté de lui. Ou alors changer d'équipier, Eliott, le pire...

Après un dernier chuchotement furieux, Alienor sortit finalement de la pièce, le laissant là les bras ballants. Le rouquin poussa un profond soupir. La jeune fille avait raison, il fallait vraiment qu'ils discutent. Mais la connaissant, pas sûre qu'elle lui en laisserait encore l'occasion. Si elle était partie en colère et ne l'attendait pas derrière la porte, il allait encore devoir lui courir après. Pas sûr qu'il avait envie de recommencer le même manège que l'année dernière.

Un chuintement le fit sursauter et lui rappela qu'il était en terre hostile. Il jeta des coups d'œil affolé partout autour de lui mais rien à l'horizon. Il s'agissait probablement - il l'espérait fortement - d'un des objets confisqués. Avec tout le bazar qu'Ali avait fait, il n'avait néanmoins pas une seconde à perdre. Son instinct lui disait même qu'il valait mieux pour lui qu'il décampe sur le champs. Mais le garçon avait fait une promesse à ce premier année et il essayerait au mieux de la remplir. Pour la troisième fois en moins de quelques minutes, il se pencha sur la malle qu'il avait quasi-fini de fouiller. Ce fut là, tout au fond dans le coin droit, sous un chapeau à disparaître qu'il trouva la fameuse balle de tennis dédicacée. Enfin ! Si la pousfouffle ne l'avait pas interrompu, ils seraient déjà loin depuis longtemps.

Rey remit en vrac les objets dans la masse, la referma, balaya avec le pied les bouts de verres brisés qu'il tenta maladroitement de cacher sous les étagères et sortit en vitesse. Ali était encore là, assise contre le mur la tête dans ses bras.

- Viens, faut pas rester ici, lui dit-il alors qu'elle levait la tête vers lui en lui lançant un regard mauvais.

Aie, c'était pas gagné. Elle était restée là mais la partie était loin d'être jouée. Elle se leva mais alors qu'il dévalait les escaliers quatre à quatre vers Eliott, elle trainait encore en haut des marches. Rey lâcha un nouveau lourd soupir de frustration. Il fit demi-tour en courant pour retourner à sa hauteur.

- Ali, je te promets de t'accorder du temps, je serai entièrement à toi et on parlera de tout ce que tu veux, mais par Merlin, dépêche toi, il faut qu'on se casse d'ici ! lui dit-il, la suppliant du regard.

Un autre l'aurait probablement abandonné sur place, ou encore l'aurait à forcer à courir pour protéger ses arrières. Rey lui, ne voyait que la possibilité qu'elle puisse se faire punir à cause de lui, et ça, il n'en était pas question.

La déception, la colère, elle se sentait nulle, blessée dans son égo, mais aussi dans son cœur. Elle en avait trop dit, elle aurait mieux fait de partir sans rien dire, maintenant il savait. Il savait qu’il comptait toujours pour elle et il pouvait s’infiltrer dans cette brèche. Elle se sentait vulnérable et elle n’aimait pas ça. Mais alors qu’elle se concentrait sur sa respiration pour se calmer, la porte du bureau du concierge s’ouvrit. Aliénor serra les dents, si elle ne bougeait pas, il ne la verrait peut-être pas ? C’est faux ça Aliénor, ça ne marche que dans les rêves d’enfants. Elle soupira quand il ouvrit la bouche pour déclarer une vérité générale. Immédiatement son visage se tourna vers lui et elle le foudroya du regard. Il ne voulait pas plus la voir ? Mais rester là était une mauvaise idée. Cependant elle n’avait pas la moindre envie de revenir sur ce qu’il venait de se passer, ne sachant absolument pas comment gérer la situation. Elle se leva, essuyant ses joues quand Rey fut de dos puis le suivit dans les escaliers, s’imposant une allure faible pour mettre de la distance entre elle et le garçon.

Cependant cela ne semblait pas être de l’avis du garçon qui pressa la jeune Delphillia. Aliénor ouvrit de grands yeux, s’arrêtant juste avant de tirer la langue.

-T’es pas le centre du monde, je peux descendre seule.

Elle accéléra le pas jusqu’à passer devant le garçon, ne manquant pas de lui heurter légèrement l’épaule au passage. Foutue fierté. Emballée dans sa course, elle manqua de percuter Eliott une fois arrivé en bas. Elle s’arrêta net à quelques centimètres de lui.

-Désolée.

Elle leva les mains devant son visage avant de le contourner. Puis elle continua sa route en direction du couloir le plus proche. Pourquoi faisait-elle ça ? Pourquoi elle le suivait après enfin avoir réussi à lui parler ? Elle se retourna pour le regarder, savoir ce qu’il faisait, son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine, à cause de cette course dans les escaliers, mais aussi parce qu’elle ressentait cette même pointe dans son cœur que lors de la dernière fois dans les toilettes abandonnées. Carton plein Aliénor, tu viens de le perdre une deuxième fois et cette fois t’as même pas eu besoin de son aide. Ses yeux s’embuèrent et elle détourna les yeux. Elle secoua la tête de gauche à droite fermant les yeux et penchant la tête vers le sol. Elle détruisait tout ce qui était bon pour elle où quoi ? Ses dents se serrèrent entre elle, si elle restait trop longtemps, il pourrait venir, la rattraper, elle n’était pas loin. Mais c’était ce qu’elle voulait ? Elle n’en avait aucune idée.

-Putain…

Pourquoi tout était si compliqué dans les relations humaines ?
Elle posa le plat de sa main contre le mur, perdue. Le froid de la pierre lui fit du bien, elle resta un moment comme cela, tentant de fait le point sur une chose qu'elle ne maitrisait absolument pas, ses sentiments.