Inscription
Connexion
26 déc. 2014, 22:48
Un verre pour deux  PV 
Nous étions un samedi de décembre. À en juger les nuages qui commençaient à se coucher, il ne devait pas être très tard, peut-être devait-il être dix-sept heures... Enfin, quelque chose dans ces eaux-là. Comme à son habitude, Holly Collins traînait au Chaudron Baveur. Depuis qu'elle était arrivée au château, soit depuis quatre mois, elle ne cessait de venir. Elle s'installait toujours à la même table, et commandait toujours la même chose : du Whisky-Pur-Feu. Il fallait dire que son rôle de professeur était une chose qu'elle avait un peu trop prise à la légère, cette tâche s'avérait être beaucoup plus importante qu'il n'y paraissait, et à présent qu'elle vivait à Poudlard, elle en avait bien conscience. De plus, les professeurs qui partageaient le même espace qu'elle, lui tapaient sur le système. À l'exception d'une ou deux personnes, évidemment. Même si Holly était une personne qui refusait la compagnie, elle avait tout de même une ou deux personnes sur qui elle pouvait compter.

Assise sur sa chaise près de l'une des fenêtres du pub, le professeur Collins observait ce qu'il se passait dehors. Comme elle l'avait déjà constaté, la rue était sombre ce qui rendait la vue plus difficile. À son grand étonnement, la neige tombait. Depuis le début de l'hiver, elle n'avait pas vu un seul flocon jusqu'à aujourd'hui. Peut-être que ce n'était pas la première fois qu'il neigeait, après tout le professeur Collins détestait sortir... Enfin, elle détestait avoir froid, surtout. Ce n'était vraiment pas la meilleure période pour elle.

Holly sentait un courant d'air arriver vers elle, sûrement quelqu'un qui entrait dans le Chaudron Baveur. De là où elle se trouvait, la jeune femme ne pouvait pas voir de qui il s'agissait et de toute façon, elle ne voulait pas le savoir. D'un signe de main, elle appela un serveur en buvant d'une traite la dernière goûte d'alcool. Encore un, ou peut-être deux verres, et elle rentrerait à Poudlard. Heureusement qu'elle savait à quoi s'en tenir, à vrai dire, elle s'imaginait très mal rentrer à Poudlard complètement ivre. Alors qu'elle s'égarait dans ses pensées, une personne s'approcha d'elle la faisant légèrement sursauter. Il s'agissait-là du serveur qui lui apportait son verre, brave homme. La jeune femme se saisit dudit verre et remarqua qu'une autre personne se dirigeait vers elle. Elle n'avait pourtant pas appelé le serveur...

« Le courage c'est de comprendre sa propre vie... Le courage c'est d'aimer la vie et de regarder la mort d'un regard tranquille... Le courage c'est d'aller à l'idéal et de comprendre le réel. »
~ Vive les nouilles *-*
11 janv. 2015, 16:46
Un verre pour deux  PV 
La neige tombait sur Londres en ce soir de décembre, revêtant la capitale d'un manteau blanc qui n'était pas pour déplaire à Ellen. Si seulement Londres n'était pas aussi... Londonien, alors peut-être prendrait-elle un réel plaisir à s'y promener, et ce malgré l'air indubitablement frisquet. C'était plus fort qu'elle, elle n'avait jamais aimé les grandes villes, celles-là mêmes qui la faisaient rêver alors qu'elle vivait, enfant, avec ses parents, dans cette campagne perdue au milieu de rien. S'y être installée en vue de ses études des années plus tard, lui avait prouvé qu'elle n'était décidément pas moulée pour le rôle de citadine. Non, sa place était à la campagne, là où elle pouvait étudier en toute tranquillité, loin des tracas urbains. Il y avait évidemment des inconvénients à cette existence marginale, mais ils ne posaient que peu de problème à la botaniste, qui s'en accommodait, mieux, s'en satisfaisait pleinement. Et le matraquage publicitaire, propre aux fêtes de fin d'année, dont étaient victimes les rues londoniennes, lui prouvait par a plus b que la vie ici était absolument impossible. Certes, les illuminations étaient des plus réussies, mais pourquoi cette profusion de panneaux publicitaires dont la présence n'était destiné qu'à entraîner une surconsommation de la part des gens ? Un concept parmi tant d'autres qu'elle n'arriverait jamais à comprendre.

Si Ellen se trouvait dans la capitale ce samedi, ce n'était donc pas pour faire du lèche-vitrines dans Oxford Street. Elle se rendait au Chaudron Baveur, animée d'une résolution qu'elle n'arriverait elle-même pas à assumer. Elle n'était pas encore sûre d'aller jusqu'au bout, et pourtant elle était là, devant la devanture crasseuse du célèbre pub. Elle avait entendu dire que c'était Victoria Pidloux, une ancienne élève de Serpentard, qui avait repris les rênes de l'établissement. Peut-être la croiserait-elle, alors qu'elle serait en train de mettre à bas tous ces principes ? Poussant un soupir, elle entra résolument, le froid du dehors cédant à l'ambiance chaleureuse du Chaudron. Alors qu'elle s'avançait vers le bar, la justesse de son entreprise lui semblait de plus en plus évidente : avec tout ce qu'elle devait porter sur ses épaules, de sa fonction de professeur à son statut de directrice de Maison, et ses démons qui subsistaient malgré tout en toile de fond, elle avait bien le droit de se laisser aller au moins une fois. Juste une, ce n'était pas trop demandé. Elle s'accouda donc au comptoir et commanda d'emblée un whisky pur feu, déposant d'ores et déjà les cinq gallions demandés.

Ça y était. Elle avait franchi le pas.

Alors qu'elle attendait qu'on lui serve sa commande, son regard dérivant lentement, une vision s'imposa à elle : sa collègue Holly Collins se tenait juste à sa gauche, avec devant elle un verre contenant vraisemblablement du whisky pur feu. Et, à son air, ce n'était pas le premier. On aurait dit qu'elle portait, à la manière d'Atlas, tout le poids du ciel sur ses épaules. A dire vrai, Ellen n'était pas vraiment surprise de la voir ici : elle se doutait depuis quelques temps que la demoiselle ne s'absentait pas régulièrement pour autre chose qu'aller s'oublier au Chaudron, et ce, même si elle ne se le serait jamais avoué, surtout parce qu'elle savait ce que c'était que d'être tenté par cette perspective. Elle avait souvent effleuré ce gouffre, et aujourd'hui, y était tombée. De toute façon, cela devait bien arriver un jour.

Ne sachant comment réagir, la Muller baissa un instant le regard, se demandant quelle conduite adopter envers la jeune femme assise à côté d'elle. Parler de la pluie et du beau temps n'aurait aucun intérêt. Toutes deux savait pourquoi l'autre était là, et aucune ne supporterait ce genre de futilités. D'autant plus qu'à ce qu'Ellen en savait, Holly restait quelqu'un d'excessivement taciturne, en totale opposition à sa collègue de Gryffondor Blanche Tourmaline. Comment parvenaient-elles à s'entendre, cela restait un mystère. Toujours est-il qu'elle ne pouvait décemment pas rester muette, pas plus que faire comme si de rien n'était...


« Bonsoir. déclara-t-elle avec un sourire forcé, ne sachant quoi faire d'autre que jouer la comédie. Un temps, puis : J'espère que je ne vous dérange pas. »

Elle ne savait pas pourquoi elle avait dit ça. Elle aurait pu sortir une réplique bien pensante, parler de quelque chose recelant une dose au moins infinitésimale d'intelligence ; au lieu de quoi elle avait lâché cette phrase toute faite, dans laquelle Holly aurait raison de trouver une once de provocation évidemment toute sauf intentionnelle. Se maudissant intérieurement, Ellen chercha un quelconque moyen de rectifier le tir, en vain. *Je n'ai pas bu une goutte que je suis déjà aussi bête qu'un ivrogne...*

« La vérité est toujours belle et terrible, c'est pourquoi il faut l'aborder avec beaucoup de précautions. »
03 févr. 2015, 00:39
Un verre pour deux  PV 
« Bonsoir. Déclara une voix qui n'était pas inconnue à la jeune femme, J'espère que je ne vous dérange pas. »

Holly observait le verre qu'on venait de lui servir. Pour le moment, elle n'y avait pas touché. Se demandant si finalement, elle allait vraiment ingurgiter le liquide qui se trouvait à l'intérieur de son verre. Il ne lui fallut qu'une seconde pour relever ses yeux verts, globuleux. Ces derniers ne devaient pas être très beaux à voir, à vrai dire, dès lors qu'elle entamait à peine son second verre, ses yeux commençaient à faire n'importe quoi. Ils devenaient hideux, aussi gros que des billes. C'était tout simplement affreux. Enfin, heureusement que la jeune femme n'en avait que faire de son apparence physique. Elle n'était pas une Tourmaline, à s'inquiéter si oui ou non ses cheveux étaient bien coiffés ou si sa robe n'était pas trop froissée. Holly pouvait sortir dans la rue en pyjama, les cheveux en bataille, ou que sais-je encore, elle n'en avait rien à faire. Elle s'en fichait pas mal de l'opinion des gens, et c'était très bien ainsi.

L'historienne ne répondit pas tout de suite aux paroles de sa chère collègue, tout simplement parce qu'elle n'avait pas envie de lui répondre maintenant. C'était fou de constater qu'elle ne pouvait jamais être tranquille quelques heures. Il fallait toujours qu'elle se retrouve avec des gens qu'elle ne voulait pas voir. Non parce que voir tous ces collègues à Poudlard la dérangeait, mais en plus s'ils commençaient à la « suivre » partout où elle allait, elle n'avait pas fini... Enfin, heureusement pour cette Miss Muller, la jeune femme n'était pas d'humeur à envoyer bouler. Elle n'avait pas envie aujourd'hui. Pourquoi ? Elle n'en avait pas la moindre idée.


« Non, vous ne me dérangez pas. »

Holly ne savait pas quoi ajouter d'autre. Elle n'avait pas l'habitude de parler aux gens, elle était plutôt du genre solitaire à partir dans un autre monde, à penser à tout et à rien à la fois. La compagnie, elle ne connaissait plus. En fait, peut-être même qu'elle n'avait jamais connu... Ou alors dans un passé très, très, trèès lointain. Un passé tellement loin qu'elle ne parvenait même plus à se souvenir. Miss Collins n'était pas douée pour parler, elle n'était douée en rien d'ailleurs. Ou peut-être que si, à enseigner l'histoire à des jeunes qui n'écoutent pas en cours. M'enfin, même s'ils n'écoutaient pas en cours, ces jeunes étaient cool. C'était même les seuls être qu'elle pouvait qualifier de « cool ». Les autres (les adultes), elle les haïssait d'une telle puissance que c'en était presque inconcevable. Enfin, ce soir faisait exception : elle avait laissé sa haine de côté. Bah oui, elle n'aurait pas adressé la parole à Muller si ça n'avait pas été le cas.

« Je vous en prie, asseyez-vous... »

« Le courage c'est de comprendre sa propre vie... Le courage c'est d'aimer la vie et de regarder la mort d'un regard tranquille... Le courage c'est d'aller à l'idéal et de comprendre le réel. »
~ Vive les nouilles *-*
18 févr. 2015, 19:48
Un verre pour deux  PV 
A la grande surprise d'Ellen, sa collègue ne prit pas mal ses propos, pourtant on ne peut plus maladroits. Au contraire ! Elle fit comme si de rien n'était, lui répondant d'une manière qu'on ne qualifierait pas de sympathique certes, mais bien plus aimable que ce qu'escomptait la Muller. Et, comme Holly Collins l'invitait à s'asseoir à ses côtés, elle pensa soudain que l'historienne avait peut-être un peu trop bu, ou du moins assez, pour ne pas se formaliser, voire déceler un quelconque double sens dans la conversation de ses interlocuteurs. Elle s'était inquiétée pour rien finalement – comme d'habitude en fait, Ellen étant, sans exagération, un peu paranoïaque sur les bords. Et bien trop exigeante envers elle-même, ce qui expliquait sa capacité à se sermonner toute seule pour de vulgaires broutilles. Quoi qu'en l'occurrence, elle n'était pas contente d'elle, et ce malgré le fait que Holly n'ait pas saisi la nuance que toute personne un tant soit peu sensée, et surtout ayant l'esprit clair, aurait pu cerner.

Enfin. Cela n'avait plus aucune importance maintenant, et la botaniste en eut la confirmation en voyant le serveur arriver avec son verre, qu'il posa devant elle sans un sourire. Si elle avait jeté un regard à ce dernier, elle aurait sûrement été agacée de ce détail, mais à ce moment, seul importait l'espèce de chope remplie d'une boisson ambrée, campée devant elle. Cette fois, elle n'attendit pas que la culpabilité fasse son chemin en elle, non. Elle saisit le verre et en prit une grande lampée, sentant le liquide brûlant descendre dans sa gorge, puis le reposa, un peu trop fort sans doute, avant de basculer la tête entre ses mains. Elle ne savait si sa collègue la regardait ou non, et sentait que cela lui était bien égal. Une sensation indéfinissable paraissait envahir tout son corps, se propageant dans ses membres, incarnant une onde nouvelle et pas forcément désagréable.


« Parfois, quand je pense à deux jeunes femmes en train de gâcher leur vie à boire, je me demande si la vie a réellement un sens, déclara Ellen, les yeux rivés sur ses mains, comme enlacées dans une étreinte éternelle autour de ce verre d'alcool. Quoique non. La vie n'a pas de sens, elle n'en a jamais eu. Mais dans ce cas, pourquoi ne pas jeter l'éponge tout de suite ? C'est idiot. »

Décidément, Ellen se distinguait par ses répliques ce soir. Elle et ses pensées tordues auraient sûrement pour tout effet d'effrayer Holly, mais elle s'en moquait royalement. Elle parlait davantage pour elle-même que pour quiconque, de toute façon.

« La vérité est toujours belle et terrible, c'est pourquoi il faut l'aborder avec beaucoup de précautions. »
10 mai 2015, 15:57
Un verre pour deux  PV 
Holly ne relevait pas, ou plutôt elle ne relevait plus. Ce soir, elle ne voulait pas se prendre la tête avec les personnes qui l'entouraient. De toute façon, elle n'en aurait sûrement pas la force. Sa tête se faisait de plus en plus lourde, une partie en elle savait qu'elle devait arrêter d'ingurgiter ce liquide brûlant qui faisait perdre la tête et pourtant, elle ne cessait en rien. Elle était comme obligée de finir son verre et de boire jusqu'à la dernière goutte pour ensuite en recommander un. Cela faisait pourtant plusieurs semaines qu'elle se disait qu'il fallait qu'elle arrête, qu'elle arrête de jouer à ce petit jeu stupide dans lequel elle s'était plongée, celui qui ne cessait de la détruire à petits feux chaque jour de son existence. Mais non, elle ne pouvait que succomber à la tentation, celle-ci étant bien trop forte pour qu'elle n'ose résister. Heureusement que la jeune femme savait tout de même poser des limites à ce jeu sans fin, autrement Poudlard ne serait qu'une partie de sa carrière passée. En réalité, elle s'imaginait très mal perdre son travail maintenant, alors qu'elle n'était arrivée qu'il y a très peu de temps.

Ellen Muller, qui s'était finalement installée à la table de la professeur d'Histoire n'attendit pas un seul instant lorsqu'on lui apporta son verre pour en vider un petite partie avant de se poser la tête dans les mains. La majorité des personnes étant dans la situation de Holly se seraient demandés pourquoi la grande Ellen Muller gaspillait son temps dans un pareil endroit, avec une tête déconfite et qui plus est accompagnée d'une femme qui détestait tout le temps tout le monde. À vrai dire, lorsque l'on regardait bien, il s'agissait quand même qu'une situation assez étrange. Habituellement l'historienne n'aurait pas tellement apprécié se retrouver coincée comme elle l'était actuellement -ayant proposé elle-même à Muller de s'installer à sa table-, pourtant, aujourd'hui semblait être un jour différent. Cela était d'ailleurs probablement dû à la quantité d'alcool qu'elle avait avalé.


« Parfois, quand je pense à deux jeunes femmes en train de gâcher leur vie à boire, je me demande si la vie a réellement un sens. Quoique non. La vie n'a pas de sens, elle n'en a jamais eu. Mais dans ce cas, pourquoi ne pas jeter l'éponge tout de suite ? C'est idiot. »

Holly se demandait si Ellen Muller en était bien à son premier verre, il fallait dire qu'à ce moment précis, les paroles qu'elle venait de dire lui étaient complètement dénuées de sens. C'est ainsi qu'en tentant de réfléchir aux paroles dites par Ellen que la jeune femme constata qu'un homme moustachu et portant une salopette venait d'entrer dans le Pub. Celui-ci semblait avoir une triste mine, les autres clients -pour la majorité d'entre-eux- le regardaient d'un air assassin. Ne comprenant pas la réaction de tous ces gens, Holly replongea son regard dans son verre où le liquide qui lui brûlait la gorge depuis bien trop longtemps reposait. Ses pensées étaient toutes chamboulées, pensant à des choses et à d'autres, elle tentait de fuir au maximum le regard vert de sa collègue. D'autant plus que la jeune femme ne savait pas tellement quoi répondre à ce qu'Ellen venait de dire... C'était peut-être mieux, qu'elle observe, enfin pour elle.

C'est ainsi que l'historienne balaya la salle du regard, son verre au bord des lèvres amené presque automatiquement par ses mains. Au loin, elle voyait un homme qui mangeait quelques cacahuètes aux côtés d'une femme plutôt maigrichonne qui tenait entre ses mains un éventail, qui soit dit en passant n'était pas tellement beau. Holly n'aimait pas trop ce genre de personnes-là -quoiqu'elle n'aimait personne tout court-, cette femme était le genre de personne à vouloir que les hommes se prosternent devant elle et lui apportent de délicieux cocktails à la noix de coco. Pendant ce temps, madame serait assise tranquillement, jouant les paresseuses à tout va. Non, décidément, elle préférait de loin être en compagnie d'Ellen Muller.


« Vous savez, je pense que vous avez raison. Peut-être devrions-nous arrêter de jouer à ce jeu stupide qui nous plait tant et trouver un sens à notre vie. Je pense que c'est pour ça qu'on ne jette pas l'éponge, pour trouver notre véritable chemin. »

« Le courage c'est de comprendre sa propre vie... Le courage c'est d'aimer la vie et de regarder la mort d'un regard tranquille... Le courage c'est d'aller à l'idéal et de comprendre le réel. »
~ Vive les nouilles *-*
13 juin 2015, 18:15
Un verre pour deux  PV 
Si Ellen s'était retournée, elle aurait vu les flocons de plus en plus nombreux se précipiter sur les fenêtres du pub, transformant les passants en ombres grises, pressés d'échapper à cette météo capricieuse. Elle aurait aperçu un vieil homme, le visage creusé de rides, engoncé dans une salopette, de celle qu'on met pour aller travailler dans le jardin, entrer, amenant avec lui l'air frisquet du dehors. S'attirant les foudres des autres clients, à moins que son aspect miteux et fatigué en soit la cause ? Mais Ellen ne se retourna pas, son attention comme aspirée par le verre devant elle. Elle ne jeta pas un regard à la danse du serveur au visage impassible, entre les tables surchargées de gens hétéroclites, ni ne releva qu'un couple, à quelques mètres du comptoir, parlait un peu trop fort, assez pour percer le vacarme coutumier du Chaudron. Peut-être les deux allaient-ils se séparer suite à cette dispute, ou, à l'inverse, se rabibocher juste après, replongeant dans une idylle passionnée. Ou "faire une pause", comme le disent si bien les jeunes femmes, "pour réfléchir". Impossible de savoir si c'en était fini... ou pas encore. Je m'excuse de cette comparaison bien prosaïque, mais que ce soit en amour comme à la loterie, en jouant, on prend le risque de tout perdre. Ce couple, vous et moi ; nous sommes tous égaux, quoique le hasard laisse malheureusement peu de place à la justice.

Cela, Ellen se garda bien de le dire, évidemment. Elle avait assez abusé de propos fumeux, et le silence dans lequel s'enfermait Holly n'était pas sans signification. Et puis, elle ne se sentait pas la force de se lancer dans un tel sujet, et ne souhaitait pas plus faire savoir à sa collègue que sa vie amoureuse était un véritable fiasco. Bref, elle préférait stagner dans sa situation pathétique, plutôt que philosopher, ou, plus exactement, déblatérer des paroles prétendument profondes – et ce alors qu'elle venait de boire un demi verre de whisky pur-feu. Holly, elle n'était manifestement pas de cet avis, puisqu'elle enchaîna quelques minutes après :


« Vous savez, je pense que vous avez raison. Peut-être devrions-nous arrêter de jouer à ce jeu stupide qui nous plait tant et trouver un sens à notre vie. Je pense que c'est pour ça qu'on ne jette pas l'éponge, pour trouver notre véritable chemin. »

La Muller ne répondit pas. Il était admirable de voir qu'après plusieurs verres, cette Holly Collins réussissait à sortir un raisonnement construit, philosophique certes, mais intelligent tout de même. Et pourtant... Ce n'était pas une bonne raison, si ? Ce n'est pas parce que l'on réussit à garder l'esprit à peu près clair que l'on doit boire trois verres de suite. Diriger sa culpabilité vers la personne assise à côté d'elle, peut-être était-ce la technique d'Ellen à cet instant ; toujours est-il qu'elle sentit qu'un devoir lui incombait. Alors, avant que la Gryffondor ne puisse reprendre une nouvelle lampée, elle ôta délicatement les mains pâles du verre et le fit glisser sur le bois, l'éloignant symboliquement de Holly.

« Ça vaudra mieux. Croyez-moi. »

« La vérité est toujours belle et terrible, c'est pourquoi il faut l'aborder avec beaucoup de précautions. »
06 août 2015, 01:06
Un verre pour deux  PV 
Holly regardait son verre, puis le bar, puis les clients, puis Ellen, puis son verre... Elle ne savait plus où poser les yeux. Que devait-elle faire à présent ? Boire ? Parler ? Pleurer ? Ou tout simplement ne rien faire ? Elle ne savait pas. Lorsqu'elle venait dans ce bar, elle s'asseyait toujours à la même table, commandait toujours la même chose, réfléchissait aux mêmes problèmes qui l'embêtaient depuis toujours, se posait encore et encore les mêmes questions... C'était devenu comme une sorte de rituel pour elle, mais aujourd'hui, c'était différent. Différent, car pour une fois, elle n'était pas seule. Peut-être que finalement, c'était une bonne chose qu'Ellen soit là, auprès d'elle. Peut-être était-ce la solution aux problèmes qu'elle s'inventait, peut-être qu'il était temps pour elle de fissurer la carapace qu'elle s'était forgée pour laisser certaines personnes entrer dans son monde... Ou peut-être que c'était l'inverse, peut-être que l'apparition de la botaniste était en réalité un signe lui confirmant que les êtres humains, en particulier les adultes, n'étaient pas faits pour s'entendre avec elle. Ou plutôt que Holly n'était pas faite pour s'entendre avec eux !

Trop de questions qui se posaient dans sa tête... Malgré ce qu'elle venait de dire à sa collègue, la jeune femme ne pouvait pas s'en empêcher, c'était devenu comme un réflexe, un geste qui s'était emparé d'elle et qui resterait en elle jusqu'à ce que tout ce qui entrait dans sa bouche ne la fasse délirer complètement. Elle n'était pas obligée de le faire et pourtant, elle ne pouvait s'en empêcher. Il devenait de plus en plus difficile de résister. Lorsqu'elle souhaitait restreindre tout cela, son cerveau n'était pas d'accord et s'en qu'elle ne s'en rende compte réellement, elle se retrouvait assise à la même place que d'habitude à ingurgiter le breuvage qu'elle s'était tant de fois interdit. Alors que son bras allait, pour la énième fois, porter son verre jusqu'à ses lèvres, Ellen Muller l'en empêcha. Le verre de l'historienne glissa sur le bois de la table, l'éloignant le plus possible. Décidément, elle avait raison, c'était bien un signe. Mais était-il positif ou négatif ? La jeune femme ne parvenait pas à comprendre. Aussi, sans prononcer le moindre mot, Holly arqua un sourcil et regarda sa collègue, à quoi jouait-elle ? Peut-être que finalement, elle avait eu raison de faire ça, après tout, l'historienne avait assez bu pour la soirée. Et même pour les deux prochains jours.

« Le courage c'est de comprendre sa propre vie... Le courage c'est d'aimer la vie et de regarder la mort d'un regard tranquille... Le courage c'est d'aller à l'idéal et de comprendre le réel. »
~ Vive les nouilles *-*