Froid, sombreur et pas de feuille aux arbres. Voilà les trois raisons pour lesquelles elle a le moral au plus bas. Le froid, c'est bien mais quand elle a l'impression d'être un glaçon ambulant, non merci. La sombreur, c'est parfois bien aussi, mais là elle en a ras la casquette. Quant à l'absence de feuilles, c'est nul dans tous les cas. J'aime bien l'automne quand elles sont toutes rouges, oranges et jaunes et qu'elles tombent, parce que ça fait de chouettes couleurs, mais là... Et bien là, il n'y a plus de chouettes couleurs. C'est gris, c'est noir, terne, sans vie. Si encore il y avait de la neige partout, elle dirait "OK, pas de problème", mais cette bougresse de neige à semble-t-il décidé de ne pas montrer tout de suite le bout de son museau. Et c'est chiant ! La jeune fille veut un Noël avec de la neige, elle ! Quand bien même cette fête lui rappelle de mauvais souvenirs. Ah oui, et il y a ça, aussi. Elle avait presque oublié. Raison de plus pour faire une tête de six pieds de long et de shooter dans la moindre motte d'herbe qui a le malheur de croiser le bout de sa chaussure. Un nouveau coup de pied maussade martyrise une nouvelle motte, tandis qu'elle poursuit son chemin vers... elle ne sait pas trop. On dit que l'air frais met de bonne humeur. Sauf qu'elle est actuellement bien plus tristounette que quand elle se baladait dans les couloirs. Vu son antipathie envers le froid, elle aurait dû se douter que ça n'allait pas le faire. Sauf que non. Et du coup, tant qu'à faire, autant continuer sa bêtise. Comme si j'avais autre chose à faire. Ses devoirs sont finis, le livre qu'elle a commencé hier est terminé, ses sauterelles ont bien eu à manger et son coin dans son dortoir est rangé comme il faut.

L'adolescente est couverte autant que possible. Doudoune, bonnet, écharpe et comme elle n'a pas de gants — c'est bête ! — ses mains sont vissées bien au fond de ses poches. Elle a l'impression d'être congelée de partout, mais c'est son nez qui l'a fait le plus souffrir. On est même pas encore en hiver que déjà... Brrrr ! Elle qui voulait abolir l'hiver et l'été, voilà qu'elle va devoir le faire aussi pour une partie de l'automne ! Scandaleux ! Enfin... se geler les orteils ou choper une insolation rien qu'en mettant le nez dehors, ça permet de mieux apprécier les autres saisons. Mouais.
La mine peu réjouie, elle s'affale contre un arbre, les bras ballants, contemplant le sol comme si il allait soudain lui révéler le secret de la bonne humeur. Sauf qu'un sol, ça parle pas. Et quand même il daignerait lui dire quelque chose, elle est prête à parier que ce serait plutôt des insultes au vu de tous les coups de pieds qu'il s'est prit.
Bon... Qu'est-ce que je fais ? Bonne question. Elle se mordille la lèvre, comme affligée. Joue avec ses doigts. Et se laisse glisser au sol. Lentement, comme découragée. L'est-elle ? Peut-être, peut-être pas. Toujours est-il qu'elle n'a plus envie de bouger le petit doigt, même pour rentrer se mettre au chaud. Flemme, énervement ou morosité, telle est la question... Les trois ? Ou rien de tout cela, une émotion impossible à définir ? Dieu ce que c'est compliqué ! Le temps est triste, moi je suis triste... c'est d'une... tristesse !

L'idée de devenir Magizoologiste un jour était de plus en plus présente dans l'esprit de Dawn. C'est donc pour cette raison que, vêtue des vêtements les plus chauds qu'elle a pu trouver dans sa garde-robe, elle saisit un carnet, une plume ainsi qu'une paire de jumelles et se dirigea vers l'extérieur du château. Elle s'arrêta d'abord sous le pont couvert. La jeune fille savait, grâce aux cours de Soins aux Créatures Magiques, que certaines espèces vivaient entre les rochers de la vallée. Elle balaya le secteur un travers des verres de ses jumelles mais ne voyait rien. Il fallait être patient, c'est l'une des qualités principales du Magizoologiste et une de celles qui manquaient à Dawn. L'exercice était donc parfait pour y travailler. Pendant un moment, elle soufflait, se dandinait sur ses pieds, trouvait le temps long. Il faut dire que le froid de l'hiver approchant, ne convainquait pas les créatures de sortir de leur cachette.

Au bout d’un moment, la gryffone décida qu'il était temps de changer d'emplacement. Elle ne sait pas exactement combien d'heures ou même de minutes elle était restée sur le pont, mais cela lui a paru une éternité. Elle avança jusqu'au bout du pont et marcha vers le parc dans l'espoir de pouvoir observer les oiseaux qui devraient bientôt partir vers les pays chauds. Toujours affublée de ses jumelles, Dawn vagabondait lentement les yeux tournés vers le ciel où elle manqua plusieurs fois de trébucher. Un volatile s'envola d'un arbre et survola une partie du parc. En suivant l'animal à travers ses lunettes, elle aperçut au loin une jeune fille aux couleurs de gryffondor posée contre un arbre. Cette fille était de dos mais Dawn pouvait voir qu'elle regardait vers le sol. Elle avait la position d'une personne étant plutôt abattue. La gryffone fit mine de se promener dans le parc tout en observant la jeune fille. Elle reconnut Katherine, une gryffone une année plus jeune que la quatrième année. Elle était gentille, du moins, Dawn n'avait jamais eu de problème face à Katherine. L'autre gryffonne était peut-être simplement pensive et nous souhaitait pas qu'on la dérange. Si tel était le cas, Dawn continuerait son chemin, les jumelles vissées au-dessus de son nez. Mais sinon, que ferait-elle?

Dawn fit le tour de l'arbre contre lequel Katherine était appuyée, ne sachant trop si elle devait aller la voir ou la laisser tranquille. Ayant fait un tour complet et ne voulant pas paraitre idiote d'en faire un deuxième, elle se décida enfin à aller lui parler. Elle réduit à quelques pas la distance qui la séparait de la jeune fille maussade et resta plantée là sans savoir que dire. Elle n'était clairement pas douée pour rassurer ou même réconforter les autres et c'est pour cela que, généralement, elle s'abstient. Mais cette fois, sans aucune raison, elle sentait que c'était ce qu'elle devait faire. D'autant plus, qu'il n'y avait qu'elles deux dans le parc. Elle fit comme si elle n'avait pas remarqué l'humeur de sa camarade gryffone et lui lança:

- Bonjour Katherine, comment ça va?

Dawn ne savait jamais si elle devait se présenter ou non dans ces cas-là. Étant très discrète, elle avait pour habitude de connaître des gens qui ne la reconnaissent pas. Dans tous les cas, la gryffone lui demanderais sûrement son identité si elle avait un doute.

@Katherine Bailey

Au départ, c'est à peine si elle fait attention à sa camarade. Elle l'observe du coin de l’œil, mais sans plus. Son cerveau enregistre les détails physiques de la fille, assez pour connaître son année — quatrième — et sa maison — Gryffondor. Elle ne lui a cependant jamais parlé, ça elle en est certaine. Je crois qu'elle me regarde. Non pas que ce soit important, bien entendu. Les gens ont tout à fait le droit de regarder d'autres gens, aux dernières nouvelles. La preuve, elle-même le fait. La jeune fille faire genre que non, mais n'importe quelle personne à moins d'un mètre d'elle est capable de s'en rendre compte. Et si la luminosité était meilleure, l'objet de sa faible curiosité s'en apercevrait également. Est-ce qu'on peut dire de moi que je suis une voyeuse ? Peut-être bien. Haussement d'épaules et détournement d'yeux. De toute façon, c'est pas ça qui va m'empêcher de zieuter si je veux. Certes oui. Mais pour l'instant, elle n'a plus envie. Peut-être plus tard, si l'autre gryffonne reste dans le coin. Oui, plus tard.
Ou pas. Car après avoir tournicoté — elle a juste tourné, pas tournicoté — autour de l'arbre, l'autre se plante devant elle, la salue par son prénom et lui demande comment elle va. On s'est déjà vues ? Ailleurs qu'en salle commune, elle entend. Elle ne voit pas trop comment son interlocutrice peut connaître son prénom, en tout cas. C'est pas comme si elle avait beaucoup d'amis qui pouvaient l’appeler haut et fort, et que tout le monde puisse l'entendre. Il doit peut-être avoir des rumeurs sur elle, pour ce qu'elle en sait. Je me demande bien lesquelles. Parce qu'à part pour ses bonnes notes et son changement de coupe l'année précédente, les gens ne doivent pas avoir grand chose à raconter à son sujet. Enfin je crois. La voilà donc à se creuser les méninges, alors que la quatrième année doit attendre une réponse. Elle met quelques secondes à s'en rendre compte. Ah, oui, euh... C'est quoi son nom à elle, déjà ? Elle s'est jurée de faire un peu plus attention aux autres et de retenir des trucs sur eux, mais vu le nombre d'élèves à Poudlard, il est évident qu'elle n'a pas pu se renseigner sur tous. En tout cas, les yeux vairons ne sont pas communs. Ça devrait peut-être l'aider. Ou pas. L'adolescente se souvient qu'il y en a au moins deux autres à Gryffondor. Nom d'une dame de pique ! J'ai aucune idée que comment elle peut s’appeler ! Un truc en D ? Oui, c'est cela. Froncement intensif de sourcils. Dawn ?

—Salut... Dawn ? Pardonne-moi si c'est pas ça, j'suis une buse pour ce qui est de la mémoire auditive. En tout cas, ça va. Enfin, j'suis pas malade et j'ai pas encore d'emmerdes — euh... pardon pour le gros mot — donc on peut dire que je me porte bien. Le moral ne va pas, mais ça bah... ça va s'améliorer, j'suppose. Et puis ça change pas trop, j'suis toujours d'une humeur d'souris en manque de fromage. 'Fin, pas toujours, mais souvent. Bref. Et toi, tu vas bien ?

C'était pas clair. Ça, pour sûr que non. Elle-même ne se rappelle plus avec précision les mots qui sont sortis de sa bouche tant elle a babillé. La troisième année déteste quand elle fait ça. Avant, ça n'aurait pas été du tout mon genre. Ça oui ! Habituellement elle a en horreur ce genre de personnes. Et maintenant j'en suis une. Quelle horreur ! Déjà qu'il lui arrive de ne plus se supporter, elle va à présent se mépriser quasi continuellement. Au moins, c'est bon pour l'égo et pour empêcher le gonflement de chevilles.

—S'cuze-moi pour cette avalanche de mots. Je cause beaucoup quand j'suis stressée. C'est fichtrement agaçant, mais je peux pas m'en empêcher. Faudrait me mettre une muselière.

Là, le nombre de phrases est bien plus raisonnable et ce qu'elle a dit bien plus compréhensible aussi. Elle en est presque fière. Presque. De nouveau, ses yeux se portent sur la sombreté des arbres et sa bougonnerie revient en force. Si elle pouvait avoir une batte et d'un coup envoyer valdinguer toute cette mauvaise humeur... Oui, mais t'as pas de batte. Parce que tu fais pas partie de l'équipe de Quidditch, banane. Comme l'année précédente, elle n'a nullement l'intention de passer les sélections. Pour sa deuxième année, elle avait une raison. Bien frêle, mais une raison quand même. Là, elle ne sait vraiment pas pourquoi elle ne veut pas. Parce qu'elle en rêverait, d'intégrer l'équipe. Elle en rêve depuis son arrivée à Poudlard. Je crois que je veux me punir. Maintenant qu'elle y pense, c'est évident. Mais me punir de quoi ?

Dawn fixait Katherine en attendant que cette dernière réponde à sa question mais cela tardait à venir. Remarquant que son regard devenait peut-être trop insistant, la jeune fille baissa soudainement la tête et observait les feuilles mortes étendues au sol. Qu'est-ce qu'il lui avait pris de faire ça? Cela ne ressemblait pas du tout à Dawn. En temps normal, elle n'était pas du genre à aller vers les gens. Surtout que quand elle était obligée de parler à un inconnu, elle se mettait à rougir et bafouiller, ce qui rendait la situation très gênante. C'est donc cela qui l'avait poussé à fuir toutes sortes d'interactions sociales.

Mais la griffonne voulait changer, c'était sa résolution pour la rentrée 2045. Et cette initiative s'inscrivait dans ce changement de comportement, s'en était même le point de départ. Mais pour l'instant, Dawn se sentait idiote et le moment semblait même encore plus gênant que les autres. Que pouvait-elle bien faire si sa camarade ne répondait pas? S'en irait-elle comme si de rien n'était ou tenterait-elle une autre forme d'approche? Elle n'avait aucune réponse à ces questions et restait là, attendant que celles-ci tombent du ciel.

Ce n'était pas tant le défi qui avait poussé Dawn à entamer la conversation. Elle ne connaissait que trop bien ce sentiment de solitude et de tristesse. Ces derniers temps, elle avait souhaité de nombreuses fois qu'une personne, inconnue ou non, lui prête une oreille attentive quand son moral était au plus bas. Elle aurait voulu avoir une personne à qui elle pouvait se confier. Un ami ou une amie qui lui donnerait des conseils et l'aiderait à se sentir mieux. Alors si Dawn pouvait être cette personne pour quelqu'un, pourquoi ne pas tenter l'expérience. Au moins, si sa démarche ne fonctionne pas, elle aura au moins l'esprit tranquille d'avoir essayé d'y faire quelque chose.

Alors qu'elle ne s'attendait plus à rien de la part de l'autre gryffonne et qu'elle allait la laisser tranquille, celle-ci répondit et Dawn en fût très surprise. D'une part, elle ne pensait pas que Katherine puisse connaitre son prénom même si elle était peu sûre d'elle. D'autre part, elle imaginait plutôt la troisième année lui sortir un "ça va" mou et morose. Au lieu de ça, on aurait dit qu'elle n'arrivait plus à s'arrêter de parler. Elle lui annonça ce que Dawn savait déjà: qu'elle n'avait pas le moral et lui retourna la question avant de lui expliquer pourquoi elle avait disserté si longuement sur son état.

- Moi, ça peut aller.

C'était exactement le genre de réponse dont elle s'attendait de la part de Katherine. Peut-être devait-elle développer un peu…

- Enfin, moi non plus je ne suis pas malade et je ne saurais pas m'attirer d'emmerdes, comme tu dis. Pour le moral, disons que j'ai mes petits tracas. Et oui, je m'appelle bien Dawn. Ta mémoire n'est pas si mauvaise que ça. Pour ce qui est de la muselière, je suis sûre que ça ne t'irait pas au teint.

Elle eut un petit rire car oui c'était de l'humour et marqua une pause avant de déclarer:

- Je sais qu'on ne se connait pas vraiment mais… Tu veux qu'on discute? Ou alors, on peut faire quelque chose pour se changer les idées et profiter du parc.

Désolée pour le petit retard, j'avais oublié d'activer la cloche

La troisième année se rend compte — un peu tard, pile au moment où les paroles sortent de sa bouche — que son silence met sa camarade mal à l'aise. Elle fronce légèrement les sourcils. A-t-elle mit plus de temps que prévu à parler ? Sans doute que oui, mais elle n'a pas dû s'en rendre compte. D'habitude, même quand ses pensées sont longues et tortueuses dans son esprit, elle ne durent qu'un instant dans la vraie vie. Là, j'ai dû me laisser aller. Et en plus, Dawn — si c'est bien son nom — a l'air bien surprise. Parce qu'elle ne pensait pas recevoir de réponse ou parce que ladite réponse lui parait étrange ? C'est sûr que c'est étrange. Mais la jeune fille ne l'est-elle pas un peu. Nan. À peine.
Ce qui s'échappe en premier des lèvres de son interlocutrice est relativement court. Pendant un instant, elle se dit qu'elle l'a vraiment vexée à mettre trop plombes pour dire quoi que ce soit. Mais la suite arrive vite et elle se rassure. Manquerait plus qu'elle se fasse une ennemie et sa journée sera vraiment m*erdique. En tout cas, elle est contente de ne pas s'être gourée de nom. Son ouïe ne l'a donc pas trompée, de même que sa mémoire. Un léger sourire l'a gagne suite à la tentative d'humour de Dawn. Tentative d'ailleurs plutôt réussie, la gryffonne aux cheveux noirs décide de la garder en mémoire pour la ressortir plus tard.

—Tout me va au teint, voyons ! J'suis parfaite.

Ton ironique et léger clin d’œil, quoique la joie de vivre n'atteigne pas du tout ses yeux. Elle a sorti ça par réflexe, plus concentrée sur la proposition de la brune aux yeux vairons. Elle penche la tête, comme pour y réfléchir. Est-ce que tu veux de la compagnie, déjà ? Dans l'idée, c'est ce qu'il lui faut pour l'égayer un peu. D'un autre côté, si ça ne marche pas, elle n'a pas envie de gâcher la journée de Dawn. Je gâche toujours tout. Elle ne compte plus le nombre de fois où cette pensée à gagnée son cerveau. Le nombre de fois où elle se l'est dite. Très souvent. À tort ou à raison, mais il n'empêche que cette phrase la suit partout. Le nombre de fois où elle s'est réalisée est assez conséquent, toutefois elle oublie généralement de compter quand rien de ce genre ne s'est produit. C'est moitié-moitié.
Ses sourcils se froncent un instant. Elle voudrait répondre que c'est gentil, mais que ça ne l'intéresse pas. Sauf que ce serait un énorme mensonge et qu'elle n'aime pas mentir. Enfin, pas trop. Seulement quand c'est nécessaire. Et là, est-ce que ça l'est ? Bonne question.

—J'veux bien. Pour les deux. Merci. Vraiment.

Trop tard pour reculer. Elle espère que Dawn ne tiendra pas compte de son hésitation, ou qu'au moins elle ne pense pas que ce soit parce qu'elle ne veuille pas de sa compagnie. Ça n'a rien à voir. C'est juste... Bah, c'est sans doute son moral, qui veut qu'elle reste toute seule. Parce que là, cette fois, elle ne va rien gâcher du tout, elle s'en fait la promesse.
Ça fait un an. Voilà une chose à laquelle elle n'aurait vraiment pas voulu songer. Elle l'a tenue éloignée autant que possible depuis une semaine. Sans doute ce qui l'a mine autant. Pas "sans doute". C'est exactement ça qui me met dans cet état.

Dawn ne peut s'empêcher de rire à la remarque de sa camarade concernant son teint. En y réfléchissant, elle n'était pas sûre que la muselière aille à qui que ce soit. Sa tentative d'humour avait plutôt bien réussi et les deux filles riaient de bon cœur. Les choses de déroulaient assez bien pour l'instant. Elle avait même repéré un clin d'œil de la part de son interlocutrice, c'était bon signe. Pourvu que Dawn ne dise pas une bêtise qui viendrait tout gâcher.

Encore une fois, le silence au milieu de la conversation lui parut une éternité. Dawn faisait mine de ne rien remarquer et continuait à sourire. Elle ne souhaitait pas que sa camarade pense qu'elle pouvait être mal à l'aise car ce n'était pas le cas. Dawn devait aussi bien souvent chercher ses mots et remettre de l'ordre dans ses idées avant de parler à quelqu'un. Katherine avait le regard vague, lointain et l'air pensif. Elle devait sans aucun doute peser le pour et le contre de passer du temps avec une parfaite inconnue dont on ne connait que le nom. La discrétion de Dawn la faisait peut-être passer pour une psychopathe aux yeux des autres élèves. Si tel était le cas, il faudrait qu'elle fasse quelque chose pour y remédier… D'un battement de cils, l'adolescente chassa cette idée de son esprit et se reconcentra sur le moment. Elle ne devait surtout pas penser à ce genre de choses dans l'immédiat.

Et puis soudain, comme sorti de nulle part, l'autre gryffonne accepte la proposition de Dawn. Toujours aussi surprise de la tournure de cette conversation, la jeune fille, qui pensait se faire repousser dès ses premiers mots, reste impassible. Elle avait remarqué que son étonnement avait légèrement perturbé Katherine tout à l'heure et ne voulait pas que cela se reproduise de peur de créer un malaise entre elles deux.

Il reste maintenant à savoir ce qu'elles peuvent faire toutes les deux. Dawn ne pouvait pas entrer directement dans le vif du sujet en demandant à l'autre fille de se confier à elle. C'était beaucoup trop tôt et elle ne voulait pas le brusquer. Même la fille aux yeux vairons ne se confierait pas à une personne qu'elle connaissait à peine. Son cerveau tournait à plein régime pour trouver la solution idéale.

- Voilà ce que je te propose. On fait d'abord une petite activité, histoire de briser la glace. Ensuite, si tu… Enfin, si ON se sent assez à l'aise, on discutera. Même si on ne fait que parler de la météo.

La quatrième année essayait de sonder l'esprit de la troisième année afin de savoir ce qu'elle en pensait.

- Bien, qu'est-ce que tu veux faire? Une partie de cache-cache? C'est peut-être un peu gamin… Un petit duel? Je ne sais pas si c'est autorisé dans la cour mais j'ai ma baguette et il n'y a personne. Ou tu as une autre idée?

Cache-cache ? Duel ? Le premier est gamin et l'autre peut-être interdit. N'empêche que l'un comme l'autre l'a tente. Je suis super douée pour me cacher. Personne m'a jamais trouvée. Sauf quand elle était petite, mais c'est parce qu'à cette époque, elle n'était pas très maligne. Se cacher les yeux en se disant que si on ne voit rien, personne ne peut nous voir n'est pas la meilleure technique pour ne pas être trouvée, apparemment. Elle se rappelle avoir pensé que ses parents avaient un sixième sens. Non, ils avaient juste une gamine idiote. Depuis, elle s'est vraiment améliorée. Tellement que plus personne n'a plus voulu jouer avec elle. Parents, grand-mère, frère et voisins. Rejouer à ce jeu la ferait replonger en enfance. Elle grimace. On oublie. Il y a de mauvais souvenirs dont elle ne veut pas se rappeler et des bons qui ne seront jamais plus et qui l'a rendront triste. Du coup, un duel semble être la meilleure idée. D'autant que ça l'a sortira de sa zone de confort. Habituellement, elle est l'une des meilleures de ses cours et ça finit par ne plus être marrant. Affronter quelqu'un de plus doué et qui connait d'autres sorts l'empêchera de se reposer sur ses lauriers et l’amènera à essayer de se dépasser. D'autant que si elle se prend un raclée et finit sur les fesses, ça sera plutôt amusant. Assez pour la rendre de meilleure humeur. C'est pas logique, mais je m'en fous. Pour elle, ça l'est et c'est tout ce qui compte.
Cette fois-ci, elle s'est assurée que son silence ne dure que dix secondes. Et que ses traits reflètent sa réflexion : sourcils froncés intensément, coin de la lèvre inférieure mordillé et yeux plissés. Si elle accentuait plus, elle aurait un air comique. Ou alors, je l'ai déjà. Peu importe.

—Un duel, ça me va. J'ai ma baguette aussi. D'habitude, j'la prends pas, donc c'est heureux.

Elle sort de l'encolure de sa veste le système ingénieux qu'elle a créé pour pouvoir transporter sa baguette sans l'abimer en s'asseyant dessus. Elle a donc noué une ficelle autour d'un des bout de l'objet, avant d'en faire une sorte de collier. Comme ça, à part si elle tombe à plat ventre, aucun risque que sa baguette si précieuse ne se casse. Y en a, là-dedans !
Bien qu'elle n'en laisse rien paraître, elle est très légèrement intimidée par l'idée du duel. Plus les secondes passent, plus elle réfléchit, plus elle se dit qu'elle a des chances de perdre tous ses cheveux par un Calvorio et moins elle a envie de lancer des sorts qui pourraient énerver Dawn. Même si cette dernière à l'air d'un naturel très calme. Ouais, bah oncle Arthur il a l'air très calme aussi et quand il s'est aperçu que Sinead faisait la misère aux enfants de leurs voisins, il a eu l'air tellement en colère que j'ai failli me cacher derrière un meuble alors que je n'étais même pas fautive, ni visée. La jeune anglaise s'est souvent dit que les gens ordinairement calmes étaient en fait ceux à ne jamais mettre en rogne. Avec Dawn, je devrais peut-être éviter ? Grande question.

Dawn allait de surprise en surprise. À vrai dire, elle ne s'attendait à rien de cette conversation qui a failli ne jamais avoir lieu. Elle pensait que Katherine serait de trop mauvaise humeur pour discuter et aurait coupé court à la conversation. Les deux filles auraient alors continué leur route chacune de leur côté. Dawn n'avait pas prévu la suite des évènements. Mais elle venait d'accepter la proposition de la quatrième année et les deux filles s'apprêtaient à prendre part à un duel de magie.

D'ailleurs, quelle mouche avait piqué Dawn ? Un duel ?! C'est dangereux et interdit. Elles risquaient toutes les deux d'avoir une punition. La gryffonne aurait préféré que sa camarade choisisse la partie de cache-cache même si cette activité est plus que puérile pour leur âge. Ça leur aurait causé moins de problème si elle se faisait prendre. Il est vrai que Dawn souhaitait s'émanciper de ses parents et de sa personnalité timide mais enfreindre le règlement ne faisait pas partie de ses plans et cela lui faisait très peur. D'autant plus qu'elle ne connaissait pas les intentions de la troisième année… Si ça se trouve, Katherine lui ferait vivre un cauchemar durant ce duel. Cela devait rester une activité amusante qui changerait les idées des deux gryffondors. La jeune fille se rendit compte que cette fois c'était elle qui créait un malaise silencieux. Elle se hâta alors de briser ce silence.

- D'accord. Alors, le but n'est pas de se faire mal. Ce serait mieux si on n'utilisait que des sorts totalement inoffensifs.

Maintenant que ce point était clairement établi, Dawn se sentait plus légère. Elle espérait que sa camarade gryffonne joue vraiment le jeu. La dernière chose qu'elle voulait, était de terminer à l'infirmerie. Cela aurait alors l'effet tout à fait contraire de ce qu'elle souhaitait donner à ce jeu. Elle ne voulait pas non plus se faire une ennemie en la personne de Katherine. Dawn savait déjà quel sort utiliser pour commencer doucement et qui est bénin.

En y repensant, malgré sa crainte d'avoir une retenue, Dawn espérait presque se faire prendre la main dans le sac par un professeur. Cela mettrait certainement ses parents en colère et c'est ce qu'elle souhaitait : les décevoir pour une fois, faire l'inverse de ce qu'ils souhaitaient pour les filles, se démarquer de son comportement de petite ingénue. La quatrième ne voulait plus être celle qu'elle était. Cet été, elle avait reçu une sorte d'électro-choc qui ne demandait qu'à la changer du tout au tout. Le décès de son grand-père, tué par des moldus l'avait touchée plus qu'elle ne voulait bien l'admettre. Elle sortit la baguette de sa poche et la serra entre ses doigts. Elle était maintenant déterminée à mener à bien ce duel amical. Elle n'avait plus aucune crainte.

- Bien, je compte jusqu'à trois, on se salue et on commence. Un… Deux… Trois !

La troisième année note le silence de son ainée et se demande si cette dernière n'est pas en train de changer d'avis. Certes, elles risquent la punition et sans doute quelques bobos. Mais enfreindre le règlement à toujours un côté... amusant. Stressant, mais amusant. Elle a déjà envie de glousser alors même que le duel n'a pas commencé. Si il commence, parce que Dawn ne dit rien du tout. Elle essaie sûrement de trouver un moyen de refuser poliment sans lui faire de peine. Les épaules de la gamine s’affaissent, de même que son visage. Elle est un peu déçue. Mais après tout, rien ne l'a forçait à m'aider à me sentir bien. Le principal, c'est l'intention, n'est-ce pas ? Elle pourra toujours faire un duel plus tard, avec quelqu'un d'autre. Dans la salle appropriée ou bien dans le parc, peu importe.
Elle s'était faite à l'idée que sa camarade trouverait une excuse et lui proposerait une autre activité. Dans son esprit, c'était clair et elle commençait même à l'accepter. Et puis, voilà que Dawn se met à parler, pour signifier son accord et préciser qu'elles devront choisir des sorts peu dangereux. La jeune fille au carré noir manque de se mettre à sautiller pour montrer son contentement. À la place, elle hoche vigoureusement sa caboche.

—Pas d'problème. J'ai pas envie de te faire mal, de toute façon.

Pas si je tiens à mes cheveux, en tout cas. Et à d'autres parties de son corps. La bagarre ne la dérange pas, elle adore même ça, mais cette "bagarre"-ci est amicale, si tant est qu'un duel puisse l'être. L'adolescente n'est pas dans le même état d'esprit que lorsqu'elle s'est battue avec la naine, ici-même. Elle est plus confiante, détendue. Prête à mordre la poussière, ce qu'elle n'aurait clairement pas accepté face à Arya. Plutôt crever.
Elle s'éloigne de quelques pas et dénoue le lien qui retient sa baguette, prenant bien en main cette dernière. Une tripotée de sorts lui viennent à l'esprit et elle décide de les trier, cherchant quel pourrait être le premier qu'elle lancerait. Quelque chose de simple, d'efficace et d'indolore. Elle a hâte de savoir ce que son adversaire à l'intention de lui réserver, d'évaluer son niveau. Forcément meilleur que le mien, mais avec de la chance, je peux peut-être me débrouiller. La gryffonne de treize ans a eu un sacré désavantage par rapport aux autres élèves lors de sa première année : le peu de temps qu'elle a pu avoir pour maîtriser sa magie. Si les autres l'ont déclenchée depuis longtemps, certains carrément au berceau, elle, elle n'a eu que deux semaines avant sa rentrée. C'est peu. Elle a donc bossé plus que les autres, étudié plus que les autres pour se maintenir au niveau. Si elle a lu un nombre incalculable de livres sur les sortilèges durant son enfance, être à l'aise avec ses capacités est toujours un plus. Sa première année n'a pas été vraiment brillante concernant ses notes. Pas dégueulasse, mais j'aurais pu être encore meilleure. Qu'à cela ne tienne, elle a fait mieux l'année suivante, buchant comme une damnée et réussissant à avoir quasiment les meilleures notes à chaque fois. Cet esprit de ne jamais abandonner lui est donc resté et elle espère qu'il pourra l'aider dans son duel à venir. Elle a l'intention de donner tout ce qu'elle a, de rivaliser en aptitude et en rapidité. La gamine a de grandes chances de perdre face à une personne plus âgée, mais elle n'a pas l'intention de se laisser faire. J'accepterais ma défaite, comme un grande. Mais rien n'est joué d'avance et tout peut se produire. Qu'elle gagne, par exemple. Ne vendons pas l'écaille du dragon avant de l'avoir tué.

Nouvel hochement de tête suite aux paroles de la quatrième année. Un... Deux... Trois ! Salut et... Mouvement de baguette en spirale, trait plus long...

—Expelliarmus !

Toutes mes excuses pour l'attente !

Dawn voit bien que Katherine est excitée par le duel à venir. Elle trépigne même d'impatience. Cela a plutôt tendance à monter le taux l'adrénaline chez la fille aux yeux vairons. Et son angoisse aussi. Heureusement l'excitation de la nouveauté fait rapidement disparaitre ce sentiment et Dawn prend place. Elle compte jusqu'à trois et se penche pour saluer son adversaire.

Après cela, la jeune fille n'a aucune idée de ce qui a bien pu se passer. En un instant, la baguette qu'elle tenait pourtant fermement un quart de seconde plus tôt, s'est retrouvée volant dans les airs. Dawn s'est redressée et aperçu sa baguette magique s'écraser sur le sol un peu plus loin. C'est la toute première fois qu'elle pratique la magie avec quelqu'un d'autre, son tout premier duel. Les rares fois où elle lance un sortilège, elle est soit en cours, soit elle s'entraine dans les dortoirs sur un objet, comme oreiller ou une couverture. Jamais sa cible ne lui a lancé un sort. Bizarrement, Dawn était déstabilisée. Elle se doutait pourtant que sa camarade n'allait pas rester les bras croisés à attendre que Dawn la mette K.O. Mais tout cela s'est passé si vite que la jeune fille n'a pas eu le temps de réagir.

Elle lança un regard interloqué à Katherine. Elle n'était pas en colère, bien loin de là. Elle était plutôt déboussolée mais amusée. Elle courut récupérer sa baguette et se remit en place afin de poursuivre le duel.

- Tout va bien.

Dawn dit ceci sans savoir si elle le disait plus pour rassurer Katherine ou pour elle. Et puis, Dawn eut un doute. Puisque l'évènement avait créé une pause forcée dans le duel, fallait-il qu'elles se saluent à nouveau ? Comment Katherine allait savoir que l'affrontement allait reprendre ? C'était trop de questions pour un simple duel et Dawn se prenait la tête pour rien. Elle devait agir et arrêter de réfléchir au risque de se retrouver à nouveau dépossédée de sa baguette.

Elle avait une idée très claire du sort qu'elle pouvait lance à son adversaire. Un sort totalement indolore et même très drôle. Celui-ci remontera sans aucun doute le moral de Katherine même contre son gré. Enfin, pour ça, il faut d'abord que Dawn atteigne sa cible mouvante, et ça ce n'était pas gagné. La quatrième année pouvait rater son sort ou mal viser. Son adversaire pouvait aussi dévier le sortilège… Encore une fois, Dawn allait trop loin dans sa réflexion. Elle secoua la tête et se recentra. De sa main droite, main dans laquelle elle tenait sa baguette, elle exécuta le geste adéquat et dit "Rictusempra !" en espérant que sa camarade allait bientôt se tordre de rire.

Pas de soucis