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23 avr. 2020, 23:07
 Irlande  Refus Irrévocable
[Hors-Temps]

Espoir est vain.


Tout savoir pour anticiper. Quelles seraient les textures, quelles seraient les couleurs, quelles seraient leurs flagrances, quelles seraient leurs vibrations. Admirablement, Opa avait tenté de satisfaire ses pressantes interrogations pour le rassurer, transcrivant avec les plus exacts détails les sensations qu’il avait connues, celles dont il avait été témoin. Chacun de ces fragments de perceptible, Hjúki l’absorbait pour parvenir à le comprendre, à en faire l’expérience. Quand sa voix s’était tarie, un nouvel univers étranger flottait encore dans sa tête, de milles sensations qu’il ne s’était pas appropriées, si dissemblables de celles qu’il ressentait, comme si ce n’étaient plus ses propres Sens qui recevaient ce flux vagabond de Couleurs qu’il ne connaissait pas. Son esprit titubait encore entre de troublants écueils d’inconnu quand l’enfant plongea doucement dans un sommeil agité, imprégné de l’écho des derniers mots entretenus avec son grand-père.

Ce n’est pas la grandeur qui hantait cette salle d’effroi. Plutôt une rustre immensité de géant. Un géant qui pourtant accueillait en son antre de petits enfants, insouciants, inconscients de la fétide ambiance, de son souffle puissant provoquant le frisson de la méfiance en Hjúki. Une Vie-Monstre. Des adultes certainement tout autant enfants, que faisaient-ils là autrement ? Opa, s’il était à ses côtés, saurait sentir l’âme malfaisante qui hantait ces pierres frémissantes. Malfaisante, oui. Comparé à son foyer, le cocon qui l’avait toujours protégé, aucune résonance de sécurité en ces lieux.

Ces lumières, ces lumières crues qui aveuglent, qui entêtent, qui enivrent. Elles brûlent, elles consument. Affaiblissement certain des Sens par les attaques si fréquentes, si violentes. Rien n’est épargné. Pourquoi parlent-ils ? Tous ! Fort ! Leurs mots n’ont pas de sens, ils s’accumulent, résonnances sifflantes. Ce sont des aiguilles qui s’enfoncent dans son crâne et le transpercent avec délectation. Bousculades, empressements, resserrement, diable de tous ces gens ! Déjà de cette prise en tenailles par l’addition des éléments constituant ce sacral moment appelé répartition coulaient les premières larmes de l’élève en ce château. Tous ces corps et tout ce qu’ils émettaient le heurtait profondément.

Ce fut un enfant larmoyant, haletant, les mains placées comme un bouclier devant son visage, que l’on vit s’extraire du paquet compact de semblables si dissemblables. Il loua en silence les Anciens d’avoir dessiné dès le commencement ce symbole qui ornait dans sa version moderne le début de son nom. De la perspective du tabouret posé en avant de la salle, les mirages aux traits marqués par l’âge disparaissaient au profit de ces bouilles abominables. Il leur jeta un regard d’encre, aussi sombre qu’il le pouvait. Vous ne toucherez pas à ma Nuit, semblait-il dire.

Un petit être farouche, interpréta alors le morceau de tissu qui avait été posé sur sa tête aux traits fins. Fixant un point qu’il était seul à voir, il s’assit sitôt la sentence proclamée à l’extrémité d’un banc et fit de sa veste un C, une petite muraille protectrice qu’il défendait quiconque de franchir par sa simple attitude. À présent un alphabet entier devait passer, le jeune étudiant en profita pour calmer sa respiration et s’isoler. La concentration qu’il mit en cet exercice effaça l’essentiel du plus agressif qui l’entourait.

Apaisé il ouvrit les yeux, un silence s’était étrangement établi, perçu plus comme un revers suspect qu’une libération. Sa garde était toujours levée, et ce n’était pas à tort. Pourtant elle ne parvint à faire preuve de la résistance nécessaire. Alors que le lancement du festin venait d’être annoncée, tout explosa. Littéralement. Avec une force inédite. Les odeurs mêlées, les cris des échanges, la sensation d’étouffement s’accroissant toujours plus. Quelques heures à être enfermés dans un train justifiaient-elles tel relâchement, un étalement flasque et envahissant jeune et sans tenue.

D’un geste il se trouva à l’horizontale, tremblant, la bouche entrouverte filtrant ses saccades.


« Assez, par pitié ! »

Ces quelques syllabes rapidement prononcées résonnèrent comme un éclatement, si fugitif, à peine remarqué avant que les couverts ne replongent dans ces gamelles bien garnies. Un hurlement parmi ses semblables, toujours si dissemblables. Alors que la majorité finissait dans la gaieté ce repas de fête, Hjúki avait déserté la table des Rouges.

Dans le coin d’une béance affreuse s’était réfugié le gamin prostré et affolé. Nullement il n’avait été préparé à ce Monde.


Il s’éveilla alors tout pantelant, sa poitrine se soulevant et s’abaissant à un rythme complètement chaotique. L’air lui apportait de quoi respirer, mais il était impossible de faire vibrer ses cordes vocales de sorte à produire un son, un appel. Le temps de recouvrir sa capacité de mouvement et de communication, l’enfant était livré aux pensées éparses qui formaient une toile étouffante autour de lui. C’était cette douleur qui l’attendait ? Pourquoi tous les autres auraient cette force qu’il n’avait pas ? Devrait-il sacrifier sa précieuse et rare Énergie à ces vortex si voraces ? Renoncer à tant… AaAh !

La conscience de son corps lui était peu à peu recouvrée, du moins assez pour glisser à petits pas le long du mur et essayer de rejoindre Opa, alors même qu’il se sentait traverser une brume si dense qu’elle parvenait à lui faire résistance. Le fracas provoqué par ses mouvements maladroits et mal dirigés ne tarda pas à inquiéter celui vers qui il se dirigeait avec peine. Une Silhouette familière, prête à redresser son chancelant protégé, se dessina à travers les voiles qui obscurcissaient ses Sens fragilisés par sa détresse. Seul un gémissement traversa la gorge de Hjúki qui sentait les soubresauts prendre le contrôle de son buste, tombant dans un espace dénué de repères, sans boussole, l’enfant était terriblement nauséeux. Une grande main douce et chaude se posa fermement sur son cœur et patiemment, son propriétaire attendit que ce contact familier absorbe les tremblements de son cher Enkel.

Ce ne sera pas simple pour toi, dit-il en regardant sombrement la lettre arrivée depuis peu sous ce toit qui avait toujours été leur sanctuaire protégé.

L’enfant prenait des goulées d’air en saccade et ne put que hocher horizontalement du chef, il se focalisait sur toutes les sensations qu’il connaissait et chassaient la violente tornade qui l’avait envahi. Progressivement il recouvrait un balancement régulier.

Tu as le droit de décliner, si tu ne veux pas de cet…

Hjúki, appréhendant de nouveau son organisme, retrouva le trajet déclencheur de la voix et le coupa.

Je ne PEUX pas. Pas veux… Je ne peux laisser ce Monde violer le mien. Jamais.

La crainte de décevoir mêlée à la confiance en son indéfectible soutien. Il comprendra, il l’aidera à grandir sans passer par l’effroyable cellule de pierre que les mots colorés de la lettre désignent. Et quand ses Larmes se lieront à l’encre, il se souviendra de cette Couleur qu’il abhorre.

[Hors-Poudlard]

Reducio
Date de rédaction : 24-04-2019 & 23-04-2020
Le Cycle du Soleil.
Étrange, oui.

16 déc. 2020, 00:14
 Irlande  Refus Irrévocable
Cycle d’Hypnos


Rêver lorsque l’Éveil dissimule
Sous l’égide de Morphée et Nótt


Le buste encore droit sur une assise asymétrique, un premier froncement tend son visage et son regard dans un papillonnement sonde les raisons de l’inconfort ou de la douleur, ses capacités introspectives sont encore trop faibles pour les distinguer. La vague est tombée, le temps d’achever le mouvement suspendu et de poursuivre la chorégraphie manuelle. Une seconde vague, peut-être, ce n’est pas sûr. Immobilisation prolongée avant de se lever puis de rapides oscillations pour s’éprouver. C’est… doux ? léger ? Présent du moins. C’est présent, oui, mais comme insaisissable. Le verrou s’enclenche, sans prévenir, et ses tentatives d’initiatives s’embrouillent. La tenue lâche et l’affaissement graduel laisse choir le corps, allongé sur le lit à la perpendiculaire.

Trop. Ferme les yeux. Un de moins. Les perceptions toujours anarchiques. Ses doigts peuvent remuer, alors ils tapotent. D’autres muscles paraissent tressautants, incertains. Sous les paupières, un défilé d’idées parmi lesquelles certaines sont plus attirantes, toutes fugaces néanmoins. Rêvera, reverra plus tard. Rêve contrôlé d’un sommeil non trouvé. *qu’est-il possible ? qu’est-il possible ?* La litanie vespérale s’enclenche sur un premier nœud. *L’herbe peut-elle me piquer ? Le vent me caresser ?* En appuyant, en sillonnant sa peau, en serrant les mains, rien. *Je m’illusionne.* Gourd. Un esprit gourd dans un corps gourd. Toucher, vide, toucher, vide. Tracer mes contours. Là.
pas de sens
Pas. De. Sens.
Non –
Sens
*qu’est-il possible ?* Griffure.

Ouverture de la prochaine fenêtre.
*Ce qui est inauthentique à l’un peut-il être authentique à l’autre ?* Être soi, sous quelle limites… Nous pouvons tous. Vraiment ? Non, les pensées-rêve qui coulent ici s’étendent et prennent leur place, si ‘tous’, alors ‘tous’ les écraseraient sous un poids de richesse et d’altérité. Être toi. Se forcer, se forcer, à la perte de repères. Vertige. Nausée. Se gaver de ton carburant, mon poison, et ne plus être soi. *Ce qui est authentique à l’un est inauthentique à l’autre.*
.srevne’l À
‘rev’

Rêverie, continue. *Ai-je réellement mal ?* Brûlure, toujours. Torpeur, toujours. Élancement, toujours. Garder les yeux clos, serrer plus fort. Impression d’un corps-cœur, qui gonfle et se rétracte en son entier. Souffler, tout doucement, se languissant d’une brise.
Marcher, en feu.
L’eau se consume.

*Oh* Acre évidence, de ne pas être sorcier dans une telle condition. Une capacité de fonctionnement sans doute trop restreinte, le point de saturation atteint avant la fin de la journée, comme son corps gisant le prouve. Et ces timides sursauts songeurs, alourdis par la fatigue.

Ouvrant les yeux et plissant les yeux vers les aiguilles, elles n’indiquent que quelques minutes d’écoulées. La fulgurance des pensées-rêve est toujours aussi déroutante. Prudemment, ses lèvres craquelées se décollent et la ligne fermée se casse, quelques gouttes d’eau s’immiscent avant de parler.

Dans un gémissement : Opa…

L’appelé se présente à la porte de son Enkel, annoncé par le craquement de ses pas, pour aussitôt s’enquérir de son état. La main de l’enfant fait un vague geste entourant sa tête qui pourrait arborer le cramoisi de l’échauffement ou le livide de l’éreintement. Quelques secondes pour identifier le ton, sans masquer les rides d’inquiétude creusant habituellement son front.

Blanc veiné.

Les articulations craquètent au sortir de la posture subie. Cette fois, une invitation à sentir sa stabilité. Ils s’entrecroisent, et l’aîné sonde un court instant avant d’adresser un hochement rassurant. L’enfant se libère avant de se redresser, presque confiant en son équilibre. *Comment ferais-je sans Opa ?* Tuteur ? Guide ? En tout cas toujours présent pour apporter son éclairage sur les pans les plus ombreux. D’une bienveillance de laquelle Hjúki s’imagine si éloigné, étant incapable de croire qu’il est possible d’offrir le monde. *Le monde n’a rien à t’offrir, il te prendra, il t’épuisera. Qu’alors lui offriras-tu ?* Le monde est vorace, oui.

Je … je crois…

Sa voix est amère et parle par une gorge asséchée de silence, d’un accent venu d’ailleurs. Quel don ?

Quelle que soit la nature de mon ichor, je dois trouver mon nectar et mon ambroisie.

13 janv. 2021, 00:33
 Irlande  Refus Irrévocable
S’il l’on peut oublier sa naissance, l’on n’oublie sans doute pas la Vie donnée. Ces lettres régulières étaient toujours de la même Couleur, celle de l’… Point de mot comportant la complexité qui envahissait désormais l’enfant à la vue de cette Couleur : Eux. Ils pouvaient se faire connaître, il refusait de s’offrir à Eux. Pourtant la conscience vive en soi que son Opa ne pouvait se retenir de leur confier quelques mots. Au moins lui l’aimait, et il le leur montrait. La Verte lui avait fourni une diversion, mais une plus sombre tempête l’attendait. Le calme intermédiaire barbotait mollement en son esprit alors que la première Vague et son encre s’étaient diluées. La seconde était alors prête à dégainer avec toute la potentialité de son tranchant.

Dans une posture boudeuse, Hjúki laissa son aîné décacheter pour lui lire ces énièmes fadeurs desquelles il tentait depuis des années de s’émanciper. C’est aux moments les plus sombres, aux cruelles béances que leur réconfort avait été attendu, que pouvaient valoir quelques pensées aux anniversaires ? De ses jeunes années, la lucidité qu’à chaque écorchure, seule la rassurante figure à quelques pas de soi avait été présente, pas ceux qui se prétendaient ses parents et trouvaient je-ne-sais quelle merveille à l’autre bout du monde plus captivante que son existence. Quelques syllabes vinrent, justement, l’écorcher. Deux Vagues rugissantes maintenant se confrontaient, la première n’avait été parfaitement renfloué, et la seconde l’avait invoquée. *Ils savaient… Ils savent ?* L’hébétude.

*J’les déteste. Les déteste. Déteste.* Son trouble étant encore peu saillant, les notes continuaient mais tout son épiderme brûlait de frissons. La température de la pièce ploya à mesure que l’enfant enflait, l’air était exploité en un flux d’une densité nouvelle, chargé d’une lourdeur oppressante ; et le protecteur jetait un singulier regard. Sa nature n’était telle à la réprobation, elle offrait plutôt la promesse renouvelée d’une confiance. Ce n’est que lorsque le corps âgé du sénior faiblit et que son souffle se fit sifflant et inquiétant que la tension se relâcha et que, la pression tombée, Hjúki se précipita sur son Opa. Il sentait son cœur se compacter encore comme sous l’emprise d’un puissant poing et tenta de se détacher de soi autant que possible pour ne plus heurter davantage son aîné. Son flux lui avait échappé, ayant saturé son enveloppe au point qu’il n’avait pu que la dépasser. *Ce n’est pas toi qui devrais avoir mal, Opa. C’est moi. C’est Eux.* Se sentant se réabsorber, se ré-entourer de cette seconde peau poisseuse, contemplant alors son bordement. Dés-équilibre. *solé-solé-solé.* Une tristesse ancienne paraissait peser sur le vieil homme, toutefois ses généreuses pensées se tournèrent vers cet être qui lui était si cher alors qu’il se relevait, remis.

« Penses-tu qu’auprès de moi seul tu apprendras à être heureux ? »
*Je n’ai personne d’autre.* D’un accord tacite ni l’un ni l’autre n’avaient remué les bribes liées à son bref passage dans une classe de gosses. Hjúki en était semi-amnésique et trouvait presque cet oubli rassurant, salvateur ; tel le rappel-fantôme que sa place n’était parmi les semblables dont il était dissemblable. Ne restait donc qu’Opa seul. Ce cheminement n’était sans doute pas secret de son aîné qui continua.
« N’est-ce point la preuve que tu as besoin de… plus ? Plus que mon horizon. »
*De quel horizon ? Ne me laisse pas !* La direction prise était imprévisible mais après avoir perdu prise, il fallait écouter.
« Ressens-tu ta magie ? Incontrôlée… En connais-tu seulement les limites ? »
Oui… non… qu’est-ce que ça pouvait bien faire d’être magique ?! Cette magie, qui lui donnait la sensation de deux corps désynchronisés. Cet autre corps qui se taisait ou hurlait sans jamais s’accorder à l’hôte. Une dissonance mal placée.
« Elle me détraque… »
« Et si tes corps-des pouvaient être accordées ? »
« Et si… Qu’importe, je ne veux pas perdre des années où nous serions ensembles. »
« Tu vivras longtemps. Ne t’es-tu jamais questionné sur la longévité sorcière ? Un Monde dans un Monde, l’intra-Monde est nécessaire pour harmoniser ta nature magique, présente en surcroît, en quelques années de plus. Ensuite tu pourras le quitter, si souhaité. »
Un plissement contracta son jeune visage en réaction à l’information qui vira de bord parmi ses pensées.
« Eux aussi ? »
Son protecteur s’assombrit alors qu’il encourageait son Enkel à poursuivre, sentant que le noyau était encore de quelque sorte en fusion.
« Oui, Eux. Ils croient avoir le Temps. C’est pour ça ? Que je serai toujours là… plus tard. ILS CROIENT AVOIR LE TEMPS ! »
Ignorant l’inspiration présageant la réponse, l’enfant poursuivit, refroidissant au fil de ses paroles.
« Je-m’en-fiche. J’aurai mon Temps. Et ils ne m’y trouveront pas. Je proclame le commencement de l’ère Hjúki. »

En Cycle vaguement Lunaire
Dernière modification par Hjúki Anastase le 24 févr. 2022, 07:07, modifié 1 fois.

18 janv. 2021, 00:00
 Irlande  Refus Irrévocable
Les bras tendus en soutien à son équilibre, l’enfant tanguait et sautait entre des lignes d’herbe colorées. Quelques sautillements avant de se laisser retomber, flasque d’effort. La boucle venteuse arrachée à ses lèvres créait un cycle de renouvellement très entrecoupé.
« C’est trop peinant ! » gémit sa voix.
Les Spirales, c’était connu. Les lignes, c’était épuisant. L’herbe offrait la souplesse, que serait-ce alors, le sol de dureté d’un dallage pierreux ? Et pourquoi se forçait-il à apprendre à marcher, à funambuler entre ces cases ? Les Perles-de-Nótt se tournent en direction de l’adulte assis non loin, toujours dans cette ambivalence de l’inquiétude et de la bienveillance. Et l’échange remontait dans ses fragmentations.

Croissant de Lune

« Toi seul me connais. »
*Je-ne-veux-personne-d’autre.* Aussi bien sûr. Pourquoi quitter le molleton de l’existence protégée ?
« Pour combien de temps encore te serais-je ? »
Hjúki se crispa en identifiant la tristesse en son aîné, ce dernier essayait d’avancer cette inévitable considération en des moments graves, pour que son Enkel comprenne qu’il ne lui survivrait probablement pas, et surtout parce qu’il souhaitait de tout cœur ne pas laisser derrière soi un enfant désolé. Enfant qui redoutait tant de son côté la moindre oscillation et approcha d’un pas de plus, à presque de le toucher. Pourquoi la magie ne pouvait-elle pas le sauver ? La Vie était bien plus puissante et fragile à la fois, ouverte et fermée sans que la magie n’y ait son empire. Elle est si frivole, et tellement… crasseuse. Il n’aurait heurté son Opa sans, et l’imaginer étrangère lui était rassénérant. L’imperfection, l’approximation du quartz au césium. Comment synchroniser ses horloges ? D’autant avec un Cœur aussi chaotique au centre pour ruiner toute rigueur d’un mécanisme d’horlogerie. Ses mains se rejoignirent sur sa poitrine et pressèrent avec force, dans une tentative de se contenir en soi.
« Aussi longtemps… »
Sa voix devenait baveuse, saliveuse, alors qu’il tentait de déglutir sur les larmes qui perçaient leur route.
« Aussi longtemps que j’aurais besoin de toi. »
Au prix d’une émancipation, mais pas encore. Sa joue qui avait été maintenue sèche tressaillit au contact des doigts fermes et chauds du vieil homme.
« Tu seras mon héritage, Hjúki. Qui seras ton héritage ? »
*Qui me viendra ? Non. Qui saura me balancer ? Non. Quelle Consonnance ? Peut-être. *
« Qu’en sais-je ? Seront-ils… seront-ils… moins… comme ils l’étaient. J’ai peur ne pas être assez fort. »
Une engageante lueur s’éveilla chez Opa.
« Œuvrons donc en ce sens. J’aiderai à construire tes appuis nécessaires. »
L’adulte avait conscience que de nombreuses questions devaient être résolues. Son Enkel avait parfois besoin de solides ancrages, et il lui faudrait ruser pour lui offrir cela dans un nouvel environnement. Adapter ses robes sorcières, le guider dans l’appréhension de situations inédites, trouver des outils de relâchement sensoriel et une foultitude encore à penser. Il n’est malheureusement de Bouclier sans faille. Il comprenait bien l’inquiétude qui envahissait Hjúki, lui-même toujours cherchait à combler ou colmater les fissures qui craquelaient sous la peau de l’enfant, et il craignait tout autant une période avenir en laquelle ils seraient dissociés. Il leur faudrait sans doute plus que le délai premier accordé par la lettre pour lentement dénouer des pans du tissage qui les Entre-Mêlait.
« Et si, je… »
Les notes aiguës firent vibrer l’air alors que des petites mains jointes s’écartèrent brusquement avant de retomber en pluie pour figurer l’explosion et l’effondrement.
« Je m’en porte garant. »
Contrôle de soi

À

Perte de soi
Croissant de Lune

Le sénior s’accroupit auprès de Hjúki qui tremblait toujours d’épuisement. *Et si j’ai de trop petites jambes ? un éclopé…* La brûlure de son derme tranchait avait le picotement de la fraîcheur qui le frappait. Bien qu’allongé, ses jambes s’agitèrent alors qu’il frappait des talons, les enfonçant dans la terre molle ; comme voulant frapper le Monde de sa frustration. Qui enrobe ? Respiration. S’inclinant pour happer son Opa dans son champ de vision, l’enfant avisa le verre proposé et concéda, trempant ses lèvres dans le liquide réconfortant, alors que son corps se réalignait en frissons irréguliers.

Effroyable Dé-Tissage