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20 janv. 2021, 17:06
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Samedi 20 janvier 2046


Les massifs sont vides à cette époque de l’année, seule la terre rompt avec la couleur terne d’une pelouse d’hiver.
Quand il s’est agi de trouver une activité permettant sa rééducation fonctionnelle, très vite elle a découvert la pureté de ce lieu. Abercorn Park, petit carré de verdure à l’est de la ville. Un endroit peu fréquenté par les enfants, on ne joue pas impunément sur les pelouses publiques en Ecosse. Et les moldus ont la discipline de s’y tenir. Autour, quelques arbustes masquent les murs sensés protéger l’ensemble des lapins dévoreurs en sous-sol. Et des centaines de maisons identiques, reliquat d’une période passée, la monotonie des quartiers populaires. Se promener en toute discrétion parmi les moldus est ce qu’elle a trouvé de mieux. Il suffit de ne pas avoir de tenue trop excentrique, de celles qui trahissent un sorcier au premier coup d’oeil. En fait, sa démarche claudicante retient toute l’attention des passants, de même le teint de sa peau, par moments verdâtre par moments blanc mortel, clarifient son état mais sans que l’on puisse lui attribuer une origine magique. Une petite heure, voilà le temps nécessaire pour parvenir là. Et dans les bons jours, elle prolonge le parcours. Quatre heures de marche, quantité déraisonnable selon les soignants mais on n’arrête pas Circéia en chemin.
L’air est frais, la neige ne devrait pas tarder. Prévoir est une seconde nature quand on déteste avoir froid. Des petits gants noirs, magiquement renforcés pour parer à toute occurrence d’un blizzard hypothétique. Le reste à l’avenant, manteau en laine écossaise, pelage uni pour éviter de devoir choisir un clan. Risqué, on n’est rien si l’on ne vient pas de quelque part mais elle préfère. Eternel tissu vert foncé, manteau long interdisant la vue de ses jambes saucissonnées dans ces bandages insupportables. Et pourtant. Il le faut, mieux vaut ne pas y penser.
Assise, pour reprendre des forces mais elle ne l’avouera pas, elle observe. Les brins d’herbe blanchis annoncent qu’elle tiendra quand elle tombera. Demain Edimbourg sera sous une épaisse couche blanche. Nikita ne va pas aimer devoir poser ses coussins félins sur des toits neigeux. Nous agissons tous à contre-coeur certains jours…
Ses mains posées sur les cuisses, assise sur un banc, elle tente d’oublier l’élancement soudain. Toujours aussi imprévisible, toujours aussi violent, elle ne se demande plus quand cela disparaîtra. S’il faut vivre avec… L’écho qui la traverse lui rappelle son infirmité. Oublier est possible mais souffrir balaie les efforts en un instant. Le sourire de façade est bien incarné, on y croirait. Et l’écouter nier la réalité est encore plus probant car l’étudiante a désormais des armes spontanées, l’éloquence, la force de conviction. Et cela fonctionne, elle en prend la mesure à chaque fois.
Cette balade de fin de semaine est devenue très vite une institution, la cérémonie dominicale, transition entre deux temps de travail, passé et futur immédiats. Aujourd’hui lui viennent des pensées familiales, Neptuna, Ivanovna. Même ses parents… Un cormoran se pose non loin d’elle, picore mais les cailloux d’ici ne valent pas mieux que ceux d’ailleurs. L’oiseau cherche une pitance. Et donne à penser qu’il la regarde. L’instinct ? La curiosité ? Juste le hasard ? Elle s’amuse de la vie mais lui pas. La faim est plus terrible que toutes les douleurs. L’instant d’après, un mouvement l’a chassé, elle est seule de nouveau. Les vieilles personnes qui souvent lui disputent une place sur le banc central côté Nord ont déserté. Trop de froid, mauvais pour leurs rhumatismes. Le petit square lui appartient, si elle y tenait, elle pourrait en faire le tour sans se retenir de boiter. La marche serait plus rapide, et bien moins douloureuse. Mais dénuée d’élégance, indécente à ses yeux. Il faut se retenir de la facilité. Et après tout, elle est heureuse d’être ici, en cet instant, seule, sans personne pour la réprimander ou la cajoler. Circéia ne veut plus y penser, la vie normale d’une sorcière de son âge.


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Elle se prend à rêver, divague, s’envole avec lui pour quitter un sol moldu. Être dans les airs lui manque. Il est trop tôt pour cela. Fixer le lointain pour ne pas perdre de vue demain, deux billes noires enflammées mais éteintes à ce qui vient de l’extérieur. La vraie chaleur brûle au dedans. Apaisée, les gens plus âgés parleraient de méditation si ce n’était les vingt ans. Et elle ne les a même pas. Conscience de son existence, ignorance de sa beauté. Croire que l’on est sans âge trahit une incompétence sociale. Avoir laissé souiller son corps ne lui a rien appris. Les agressions extérieures ont tenu ce rôle, elle n’en avait pas décidé, pas celle du 28 Août. Ce coeur battant, reposé, elle lui donne trop peu d’importance à l’ordinaire. Il faut vivre, se nourrir. Une goutte fond sur son nez, le premier flocon. Chatouille, sensation de froid, en essuyant les traces, elle se prend à vouloir en capturer d’autres. Et se lève.
Dans ce parc, une jeune femme, debout, bras tendus, semble statufiée par sa propre volonté. La pluie tombe en suivant des lignes parfaites mais la neige ne peut être apeurée, sinon elle vous file entre les doigts. Un perchoir à flocons. Tournant ses mains vers le ciel, Circéia rêve de blanchir comme une Vénus de son monde. Mais avec ses bras elle peut ce que l’autre a perdu. Prendre. Donner. Il lui faut davantage, elle retire son bonnet, libère des cheveux anciennement rectilignes, depuis inclinés aux courbes. Et tend le visage aux nuages. En prière. «  Donnez-moi la force ». Impression de quitter le sol, s’affranchir du réel. En voilà un, puis un autre, aimantés par sa peau ou juste venus là par hasard. La stase.

- Mmmmmmmmmmmmmmmmmm…

Vient alors la piqûre de rappel. Un élancement. Pas si puissant. Mais en tel décalage avec l’avant, cela désarçonne la sorcière. Qui s’effondre, de douleur, de surprise aussi. Cueillie alors qu’elle n’y pensait plus, elle a senti ses jambes ne plus la retenir. Et comme la canne avait été laissée posée contre le banc, elle n’a pas pu se rattraper. Tant pis, se relever, sans rien dire ni maudire. Se relever. Se relever, souriante.


(j’ai tant aimé écrire aujourd’hui, merci)
Dernière modification par Circéia Alekhina le 31 janv. 2021, 18:49, modifié 2 fois.

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20 janv. 2021, 21:10
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Les pans de son manteau lui battaient les flancs sous la force du vent hivernal, d’autant plus que les rabats n’en étaient fermés, ce qui donnait au tissu de voleter en amples ailes autour du jeune adulte. Ses pensées n’avaient pas encore quitté le chevet de son aïeul, à cause duquel un bouillonnement l’agitait et ballotait de l’intérieur. Comment avait-il pu tenter de le lui cacher ? Toutes les dernières semaines se redéroulaient sous une eau trouble, sous un filtre de culpabilité, d’amertume, de ressentiment. Opa lui avait fait croire qu’il cheminait encore sans peine au travers de la vie, alors que son affaiblissement était tel qu’il avait fallu le renouveler en partie. Qu’adviendra-t-il lorsque ce ne sera plus remplaçable, réparable ? La conscience de l’altération progressive du corps de son aîné avait de quoi faire frissonner son Enkel. Mille et mille raisons au tourment. Vouloir se penser indépendant et l’être…si lointain.

Ses doigts nus et glacés remontèrent pour tapoter ses joues car, à l’inverse du reste de son corps, sa tête surchauffait. L’entre-brûlure de ses propres glace et feu crispa les muscles de son visage qui se relâchèrent ensuite alors que l’écart se faisait moins douloureux. Il goûta au semblant de fraîcheur recouverte en redescendant lentement ses bras. Son cou circulait en ondulations pour happer les rues qui l’environnaient. Il sentait dans ses fibres tressautantes qu’il lui faudrait calmer sa houle avant de songer à se reglisser dans les affres de l’exigeant monde du devoir. Ses prestes pas l’attirèrent vers un parc, sentant que c’était un lieu où ses papillonnements pourraient s’étendre…le temps nécessaire.

Avisant une droite limite en deux textures de sol, Hjúki avança une jambe, puis l’autre, et commença une démarche funambulesque, qui rappelait ses plus jeunes années, quand Opa pouvait encore lui tenir la main pour tenir la ligne. Ses bras oscillaient autour de son corps dans une tentative de contenir sa démarche tanguante. Il était encore en balancements enfantins – son équilibre ne s’était beaucoup amélioré avec l’âge – lorsque la présence d’un banc le força à interrompre le tracé, ne souhaitant pas importuner. D’un minuscule saut, sans trop d’audace, il quitta son chemin. Il s’était un instant senti seul et tout à fois accompagné de la plus chaleureuse présence et la réalité l’embrassait alors de sa chape.

Son champ de vision s’ouvrit soudainement pour prendre conscience de la statuaire Silhouette qui d’ombre vivante prenait des contours de plus en plus marqués. Elle… *Porcelaine* Quelques pas supplémentaires pour l’embrasser vraiment de sa vue. Plié. Déplié… Relevée ? Comme la danse, mais dans une version outrément plus horrifiante. *Qui vous a cassée ?* Ses pensées le conduisirent au village de porcelaine de Baum, il pouvait suffire d’une imp[r]udente enfant. Ses Perles-de-Nótt s’arrêtèrent sur son teint, sur la canne, la Silhouette enfin qui l’hypnotisait. Elle n’était pas vulnérable, tout au contraire elle transperçait d’une force déterminée, ce n’était pas n’importe quelle danseuse qui pouvait accomplir son relevé avec telle élégance, comme elle venait de le faire.

Son teint qui donnait par les veines l’illusion du vert lui rappelait sa propre pâleur qui pouvait rendre ce genre de nuances, bien que sur le moment, ce soit le pourpre qui envahissait sa peau. En comparant leurs nuances de sang et de veinure, il se surprit à penser aux couleurs serpentaires et félines. *Absurde.* Non, leurs Couleurs étaient outre cela. Noire d’Encre. La plus décisive et pure, bien sûr. Elle ne pouvait que convenir au Bleu-Nuit de Hjúki. Sa main rougie par la vigueur hivernale avança en direction du visage qui abritait ces sombres Gouttes d’Encre.


« Mon Opa m’a appris à comprendre mes nuances. Il me disait blanc veiné quand… »

Il griffa de ses dents ses lèvres tout en les humectant après avoir senti la brûlure du froid dans sa bouche, alors que les flocons au contact de ses joues, ceux-ci brûlaient. Son expression se fronça alors qu’il reconsidérait son intervention. Il serait présomptueux de croire qu’elle, la puissante danseuse qui savait à l’évidence où tirer la force dont les jambes de la farouche noblesse avaient besoin, quêterait le soutien d’un adolescent incapable de papillonner sans penser à son grand-père. Cette hésitation ne l’arrêta pas pour autant alors que Hjúki avisa la canne, contempla quelques secondes ses souvenirs qui affleuraient rapidement. Baissa la tête vers ses propres jambes et ce qui était nécessairement invisible derrière les couches de tissu.

« Je… j’ai appris à marcher tard. Je tombais. Beaucoup. Mes genoux sont des cicatrices, pour l’enfant malhabile que j’étais. J’avais développé une telle crainte de choir encore, au point de refuser de courir, de sauter, d’oser. Seulement marcher. »

Heureusement qu’il était déjà empourpré, il aurait peiné à assumer le carmin qui ornait, plus vif, son visage, alors qu’il se confiait sur ses difficiles apprentissages. Il parvint toutefois à retenir l’évocation d’Opa, qui l’avait toujours soutenu, grâce auquel même cet écueil avait été dépassé. Le jeune adulte se sentait mis en échec devant *Porcelaine* le paradoxe de fragilité et de puissante résistance qui lui faisait face. *Noire d’Encre.*

« Les oscillations sont belles, c’est ce qu’il m’était le plus important d’apprendre. Il nous est permis de sinuer si le rectiligne se refuse à nous. »

*Noire d’Encre.* De plus en plus la tentation le poussait à s’insinuer vers son Encre. *Pas encore.*

« Vous… »

*Ce n’est pas à moi d’avoir mal.* Incapable de déterminer ce qu’elle pourrait faire de sa sollicitude, incapable de déterminer ce qu’il pourrait absorber de sa douleur. Résistant encore pour un temps il leva la tête et se fixa à hauteur du nez *Presque* et tenta d’offrir un sourire empathique sans toutefois cacher qu’il percevait bien que la princesse était blessée. Leurs Couleurs étaient donc mêlées.

Merci à vous de croire en l’impossible, ma Reine.

22 janv. 2021, 14:36
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Qui est-il ? A quoi ressemble-t-il ? Circéia a sans doute été trop vive, se relever si rapidement peut en certaines circonstances provoquer une forme d’étourdissement, question de pression sanguine paraît-il… Sa tête tourne, et les yeux ne distinguent pas bien. Une ivresse, sans le mal au ventre. Est-ce cela qui provoque ses premiers mots ?

-…. ne comprends rien à ce que vous dites.

Et dans l’instant se déroule une situation inconnue. « J’ai déjà vécu ça, le souvenir me traverse ». Une sorcière douée comme elle sait faire la différence, l’origine de cet arrêt du temps ne se trouve pas dans la magie même si elle en connaît le principe. Son cerveau a combiné présent et passé, un passé en apparence étranger, et s’il s’agissait d’un rêve ? Du genre assez intense pour laisser une empreinte ? Une pièce sombre, non lumineuse, entre deux, impossible… Et le sable ne s’est pas interrompu dans la clepsydre, son esprit le perçoit. Les flocons n’en sont pas à se multiplier sans limite, la météo est encore clémente. Mais déjà le soleil baisse, il faut agir pour reprendre la main sur une réalité qu’elle préfère à l’incertitude.

- J’ai…. Et si on allait à la plage ?

Sa canne, vite la canne, sans tenir compte d’un émoi qu’elle ne saisit pas. Un garçon lui parle, c’est assez rare. Ordinairement, les hommes ont une approche plus brutale, ils se croient subtils mais aucune équivoque au sujet de leurs intentions.

- Circéia Serguéïeva Alekhina.

En tendant sa main, elle ne réfléchit pas au sens protocolaire de la chose. Placer la relation sur un plan… professionnel lui vient spontanément. Juste une chose… elle a pris soin de retirer le gant, non qu’il ait touché le sol, maculé d’elle ne sait quoi… On ne présente pas une main gantée, en tout cas pas elle. Peau contre peau, sinon autant s’embrasser, ce qui ne saurait être une alternative. Alors sa nouvelle coiffure prend sens, sous le couvre chef, ils suivent en désordre le mouvement. En désordre… apparent…

- Vous connaissez la plage de Portobello ?

Une initiative bien stupide… Cet homme est d’ici, forcément le lieu lui est connu. Et comme elle regarde approximativement, à moins que le trouble ne perdure, elle ne saurait confirmer l’insignifiance de sa précipitation. Il ne connaît pas. Et s’il connaît, elle lui fera ouvrir les yeux sur ce qu’elle voit elle. Aucune autre possibilité.

- Venez, allons nous y promener ensemble.

Quand on vous dit qu’elle a pris en assurance, enfant d’études brillantes, quand il faut admettre qu’elle est désormais imprévisible, et audacieuse… mais cela, l’envie de vivre à fond peut seule l‘expliquer… Faire oublier la première impression, la chute. Rebondir de suite, avec le sourire. Comme si de rien n’était. Tout se combine afin de permettre aux flocons de gommer la souillure d’une simple chute de plus. Elle a tendu la main, lui peut s’en saisir, pour saluer par respect, ou choisir le voyage.

Nouvel instant de pause, se rend-elle bien compte du dynamisme en elle ? Un éclair, oui, un éclair fendant le ciel, capable de perler les gouttes d’eau pendues aux branches, sur des kilomètres. Humidifier les sols d’été, rompre les monotonies.
Et s’il était l’oiseau aperçu juste avant ? Est-il moldu d’ailleurs ? Ou bien sorcier ? Elle n’y réfléchit pas, après tout ce n’est pas un critère. Qu’il accepte ou refuse le sera mille fois plus. Indifférente à ce qui l’environne, Circéia joue l’audace, la stratégie qui lui convient le mieux. Point de Karpov ou de ces joueurs tuant à petit feu les adversaires laxistes. Ne jamais se laisser prendre un pion, préserver l’équilibre si l’on ne peut faire mieux. La moindre reculade vous accule tôt ou tard. Attaquer, férocement. Ici, le combat n’a de sens qu’une brise ponctuée de neige, les pieds dans le sable. S’il veut bien.

Appliquer la variante de la chasse ne se pratique plus, à moins que l’on ne souhaite attirer l’autre dans un rideau de suffisance. Déjà, cette défense-là est peu courue mais la chasse… Attaquer pour défendre, se préserver. Comment déterminer notre propre évolution ? D’où viennent nos décisions ? L’hiver, le verger est un désert, la glycine garde ses parfums. Tout alors dépend de nous.
Dernière modification par Circéia Alekhina le 06 mars 2021, 17:59, modifié 3 fois.

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22 janv. 2021, 19:04
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Voiles sur voiles… qu’est-il à voir ? L’image lisse mais ferme ne se perce, son drapé est complexe. Quand deux créatures se rencontrent, se jaugent, le calcul derrière chaque avancée, chaque recul remet toujours en question la position de l’épicentre de la balance. S’immiscer dans un pas de deux, mais avec toute mesure, savoir interpréter l’humeur de Kairos. La promesse de patienter. Nul besoin d’aborder par la virtuosité, toutefois les premiers déliés captivent ou délaissent. Hjúki attend donc que la princesse s’épanouisse et esquisse les gestes de son ouverture. Une patience immobile, prudente. Un trébuchage, et il choirait dans les tumultueux flots qu’il appréhende encore.

Elle flotte…ou floute ? Insaisissable d’abord, comme désynchronisée de ses contours. Opacité à translucidité. Une étrange familiarité. *Et si… ?* Le jeune homme était ramené à ses propres questions, à ses propres objections. Pourtant, cela ne ressemblait pas à une objection. Déjà, quelque dérivation s’était emparée de ses pensées. Il songe à ces minuscules grains qui roulent, dégringolent sous les pas. Osé. Glisses. Enfoncement. La plage, le lac, une mer quand les frontières s’estompent. Une nouvelle houle, autre à celle de son Océan. Un décor dramatique, romantique, à la russe. Digne de Tchaïkovsky. Terpsichore s’est faite maîtresse de son esprit. Alors que Hjúki glisse et s’enfonce dans cette mer *Noire d’Encre*, le défilement le conduit à une Janus : *Odile ou Odette ?*. Croisée. A-t-elle conscience d’être double et si déchirante pour qui croise son Regard ? S’il pouvait percer sa vérité, plutôt que de tanguer dans une vertigineuse incertitude… Est-ce Odile qui dupa le prince, ou est-ce le prince qui trompa Odette ? Est-ce Gutrune qui dupa le Wälsung, ou est-ce le Wälsung qui trompa Brünnhilde ? L’identité du nom avait recondensé son doute sous cette dernière forme, ramené à ses racines allemandes. Les derniers sons qui percent la brume en laquelle il navigue, *Circéia Sergéïva*, accentuant cette impression de double nature de Janus, font céder l’adolescent qui, cherchant à réprimander ses pensées, souffle entre ses lèvres.

« Je ne suis pas Siegfried ! »

Ses dents se recollent, attrapant un morceau intérieur de sa joue au passage. Trop engourdi pour le sentir. N’est-ce pas une confession ? Que ce soit l’immaculée princesse, ou la vierge du feu, elles avaient été bafouées. Et elle, une enchanteresse, prête à tout pour ne pas se laisser duper. Les enchanteresses sont exaltées de puissance, ne laissant jamais le lésant impuni. Les princes sont des ingrats dès lors qu’une princesse les sauve. Non, lui, n’est pas un prince. L’Astre Lunaire contemple ces jeux de dupe, il n’en est ni complice, ni hostile. C’est Hélios, le délateur, qui témoigne des tromperies pour en faire la risée des dieux. Éos, ladite aux doigts de rose, est aussi celle qui perce la protectrice Nyx, par les albas médiévales les amants doivent se séparer. Hjúki n’est ni un prince, ni l’aveuglant rayon qui tranche les intimes secrets. Mais le perçoit-il seulement, qui est-il ?

« Oubliez, je suis Hjúki. Anastase. »

Avisant la main tendue, il hésite. Sa glaceur pourrait être heurtante et s’il approche, leur contraste les pénétrera. De températures, de tailles, de natures, de tant et tant. Afin de limiter le contact, il n’avance que son auriculaire pour n’entourer qu’un doigt. Laisse le temps de quelques respirations pour méditer l’audacieuse proposition de la jeune femme. L’impératif, le nous qui le happe, avait-il le choix ? Son immobilité le glace : il faut qu’il bouge, qu’il s’échauffe, qu’il s’agite. Persistent… *Odile ou Odette ? Gutrune ou Brünnhilde ? Qu’importe, je ne suis pas Siegfried, elle ne me fait pas peur.* Si, mais il musèle l’effroi. Et il n’est pas lâche au point de faire volte-face à la Croisée de Janus, surtout devant une Circé-ia. Une issue de la lignée d’Hécate, la sombre Lune, qui offre plus encore que les deux seules voies de Janus. *Pas double… multiple.* Effroi encore plus dévorant, mais surtout curiosité et attraction encore plus dévorante. L’on dit qu’à la Croisée d’Hécate, une tierce voie serait celle du retour, mais Hjúki, se refusant à se dérober à son destin, s’avance et acquiesce.

« Nous… d’accord, présentez-moi votre mer. »

*Ou vos mers ?* La tentation d’explorer des mers nouvelles, des eaux inconnues, tout novice qu’il en est. De découvrir une nouvelle Couleur d’Encre.

Eau s’abreuve ;
Transmutation

23 janv. 2021, 18:23
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Rebutée. En d’autres temps elle l’aurait été, par ce doigt timide, cette extension non pudique, méfiante. Sans doute devrait-elle ouvrir un peu les yeux. L’énergie possède deux faces et rien n’indique qu’un tiers soit chargé de la même positivité. Ordinairement.
Mais sa nouvelle ligne de conduite la pousse à l’inaccoutumé. Il peut bien être ce qu’il veut, le laisser libre de son rythme, du chemin… oui, libre. La distance est courte d’ici à la plage. Encore ces maisons dont seul le jardin différencie une structure paresseuse. De tout et de rien, Circéia l’abreuve de phrases insignifiantes, le torrent. A lui, le temps venu, de comparer les flots et cette mer reculant.
A marée descendante, le sable est dur on peut s’avancer loin, quitter la ville et se croire en vacances. Oui, émettre tous les sons possibles afin de créer le vide, à propos. Traversant la rue les séparant des grains, elle défait leur lien infructueux. Ainsi pourra-t-il à sa guise comprendre.

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La neige ayant découragé les autres de s’aventurer si tard sur une plage aussi belle, ils sont dans les étoiles.

- Quand je viens ici, à chaque fois j’oublie que désormais mon pied gauche fait une marque plus nette que le droit. J’ai grandi à Wick mais là-bas, la plage est plus sauvage, son épure me gêne. Ici, c’est plus sobre.

Elle ne le voulait pas, pourquoi parler de ce qu’il faut masquer ? S’épancher ne lui ressemble pas, surtout auprès d’un inconnu. Il n’ a pas l’air méchant le bougre, partager ce fardeau avec lui est déplacé.

- Entendez-vous sa respiration ? Lente, régulière, Mère aurait dit « impavide ».

Le mot, approprié, centre de la cible. Voit-il ses lèvres écartées ? Amusées, elle dessinent un visage radieux, calme.

- Les matins d’hiver, on se réveille sourde, la neige absorbe tous les sons, dans le pays de mon père, on les nomme « matins de lait ». Pour dire qu’ils nourrissent les petits, au commencement.

Et ne pas dire Père, l’article change tous les paradigmes. Naturel devenu relatif. Il peut bien se refuser, elle est prête à tout de son côté, et tant pis s’il hésite. Un inconnu de plus sur la liste.

- Hjúki, c’est un joli prénom…

Au loin, on pourrait distinguer une voile, ou juste un chalutier, difficile de décider. Où vont-ils, ces marins indolents ? Vers les climats anciens nommés ainsi, au temps où les moldus ne savaient vraiment rien ? Le voyage impose le risque plus qu’il ne le suppose. On renaît car l’on se reconnaît. Dans le miroir ou par nos traces.

- J’ai un peu voyagé, au-delà des mers. Mais c’est d’ici que je vais le plus loin. J’avoue que c’est pratique, il me suffit de regarder, d’imaginer ces hommes, leurs raisons de partir.

Elle parlerait bien de choses magiques mais il n’est pas sûr qu’elle ait tenu le « doigt » d’un congénère.

- Les gens ont toujours des raisons, jamais leurs déplacements ne sont le fruit d’un pur hasard. On peut parler d’instinct. Je veux bien. Mais il est lui aussi dicté par un élan.

A quoi s’attendait-elle ? Etrangement, les garçons de 2046 sont hésitants. Farouches. Circéia le comprend, elle-même l’a été. Farouche dégingandée, elle ne peut s’empêcher d’éclater de rire.

- Pardon…

Deux mots, un mélange explosif à son avis.

- ...je viens d’avoir une pensée tellement appropriée… Vous voyez… je voyage, il ne reste que cela, partir tout en restant. C’est gentil de m’accompagner, ce n’est pas si fréquent d’éloigner la solitude. J’aime être ici.

S’il l’accepte, elle posera sa main sur le dessus de la sienne. Gantée cette fois, une main respectueuse, le geste suffisant, au sens du ni trop peu.

Odeur de sels et goût de miel


Mais juste avant, elle se tourne vers lui, avec ce même sourire si travaillé à masquer le sous-sol. C’est une gymnastique impossible que de recouvrir les ordures du temps quand elles sont à ce point méphitiques.

- J’aime être ici, dans le vent de l’hiver, au milieu de la neige.

La main, à nouveau. Et nous savons tous où elle est à cet instant précis.
Dernière modification par Circéia Alekhina le 25 janv. 2021, 20:25, modifié 1 fois.

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23 janv. 2021, 23:52
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Souplesse. Crispation. Une forme de dualité s’est emparée, insidieuse, de sa corporalité ; et il lui faut du temps pour en prendre mesure. Au dénouement, précisément. Une dureté, une tension immense tenait ses grips sur les muscles notamment de ses épaules et du dos. Car ils lançaient, il n’était plus possible de l’ignorer ; et suivant le fil de cette conscience, il tente progressivement de se débloquer, de dénouer sa rigidité que les pas souples de ses jambes déliées par la marche ne souffrent pas. Il profite de ses mains libres pour appuyer de façon croisée sur ses épaules quelques secondes afin de se relâcher et de se réaligner, tout en prêtant oreille à la musique plus riche, en mélodies et phrases plus longuement tenues, de sa partenaire de route. Essaie de déceler les consonances entre ces notes et les vibrations plus discrètes, implicites, qui se dégagent d’elle. Son contraste, il se dévoile. L’esprit de Hjúki assiste, avide, au déploiement susceptible de calmer son pincement d’audace. *…impavide…* Ainsi est-elle ? Contaminée par la respiration maritime. Une belle contamination, qui comble l’ébréchure. En écho il appuie ses doigts sur son cœur, se demandant si ce muscle aussi s’est relâché ; se synchroniser sinon au versant de douceur de la mer. Les battements de l’apaisement.

Il resonge à son protecteur, à sa tristesse cachée et protégée. Nous avons un Lac en nous que nous nourrissons de vitales sources et d’où nous tirons nos larmes, notre sueur ; ce sont nos efforts, nos peines qui nous é-puisent. Pourtant, Hjúki n’avait pu surprendre de ses yeux Opa en train pleurer l’absence de sa m… de sa fille. Plus douloureux encore que d’y puiser, se retrouver tari. Cela, son aïeul l’avait longtemps gardé pour lui avant de l’estimer suffisamment mûr pour comprendre ce qu’était la peine aride, alors que l’enfant dans sa jeunesse possède un Cœur encore imbibé de bienveillants flots. Pour autant le jeune homme n’est pas empêché de souhaiter parfois être…moins dégouttant de ses impulsions. Ses liquéfactions dégoulinantes manifestent des tumultes qui agitent la surface de son Lac, à l’opposé de la contenance dont il se voudrait capable. Elle lui offre un beau reflet, dans leur commune quête d’apaisement des eaux. Les ridules aqueuses, les troubles, les remous obscurcissent tout miroitement. Sourire. S’ils souhaitent se voir en l’un l’autre, leurs surfaces ont besoin d’être tranquilles.


« Alors, vous pulsez avec elle ? J’éprouve quelque envie envers les eaux calmes, quand les miennes connaissent quelque tourmente. »

Hjúki n’est pas un être bavard, et pour une myriade de pensées, il parvient souvent à n’en formuler qu’une infime parcelle, hésitant toujours entre gonfler ses paroles et laisser intactes ses premières limites. Les origines de la jeune femme s’étayent, et lui forme des échos phoniques, *Neige Ouatée, Voie Lactée*. Pourquoi Héra s’est-elle immiscée ? Bien vite, toutefois, d’autres images viennent se bousculer pour absorber ce que la prosodie féminine forge à ses oreilles. À l’évocation de son prénom, Hjúki se penche imperceptiblement, ce sont de syllabes rares, aussi rarement prononcées. Qu’il est étrange d’entendre cette nouvelle voix épouser la mélodie de ces deux notes. À son tour, il fait rouler dans sa bouche le rythme de l’enchanteresse.


« Circéia et Hjúki. Ne protégeons-nous pas le reliquat d’une force ancienne, d’un ancestral héritage ? »

Outre de jolis prénoms ; ils sont aussi lourds, puissants, chargés, explosifs d’évocations. Du moins, dans les ébullitions mentales de l’adolescent dont les Perles-de-Nótt se font guider par la mélodie sur les ondes et les courbes boisées qui les fendent. Aux septentrionales explorations, aux incroyables merveilles d’au-delà de… En éclair, Diogène et les contes de la Lune se présentent à lui : les retours de vague sont imprévisibles. L’horizon de Nord lui suscite une plus forte attraction : la source de fascinantes affabulations antiques, là où les routes maritimes y sont de moins en moins endiguées de glace depuis que le Monde, lui aussi é-puisé, s’évapore et brûle. En cela la neige-même qui s’offre au Ciel en cet hiver est un humble cadeau, une chance à chérir. La fraîcheur d’un rire, le relâchement. Elle paraît subitement plus vivante, plus accessible. La peur s’est définitivement muée.

« Les explorateurs des confins. En nos temps où la glace se fait la source malheureuse à l’eau boréale, elle apporte toutefois la contradiction de l’attraction de pénétrer toujours plus loin parmi les eaux froides. Ce sont ces rêves que je vois. »

Silence songeur, le sourire adoucit ses tourbillons.

« Deux âmes brûlantes peuvent-elles s’apaiser ? Ou ne peut-il y avoir qu’un seul consolateur ? »

Un regard à sa mer Noire d'Encre, puis vers les douces eaux.


« Pulsons à son rythme. »

Il la Sent.

Frôlement ;
Frissons.

24 janv. 2021, 17:16
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Juste avant.

Personne ne peut gommer les radicelles. Croire le contraire relève du mensonge. En cet instant, alors qu’elle le regarde, de côté, ils font face à la mer, Circéia s’interroge. A quoi pense-t-il, cet homme assez étrange pour avoir mis les pieds dans le sable avec elle ? Il sera facile de nettoyer les souliers, la magie a des côté très pratiques mais lui, s’il est moldu, comment fera-t-il place nette ? Et surtout, comment parvient-il à de tel raisonnements ? Ce garçon est bizarre. Et pour en rajouter, il lui semble invisible, ses yeux sans couleur... sa tenue à l’avenant. Encore une fois le mystère. Elle lui proposerait bien de revenir samedi prochain, ce serait opportun. Audacieux aussi, pire… cavalier. Nous y voilà, quelle pièce est-il ? Noir et blanc n’ont rien de transparent, ils sont… extrêmes là où l’invisible est au centre. Elle est sans relief, pas même un petit rat. Surtout que désormais… Mais lui. Ne pas comprendre ce qu’il dit l’agace, un fait exprès. C’est malin, pour une fois qu’elle s’ouvre, à en perdre le fil en plus… Mais choisit-on nos instincts ? Que voit-il d’elle ? Bien sûr, ses yeux noirs, durs, ne montrant jamais rien, comme pour laisser penser au néant juste après. Entre vous et elle, il n’est rien, que vous, puisqu’elle ne pense rien. Et quand elle émerge, tout au plus y voit-on le fruit de son travail. Mais pas elle. Juste le travail, le rendu, le résultat. Fatiguée, intriguée, ses yeux plissés indiquent la quête d’une entraille cérébrale. Mais lui ne donne rien. J’oubliais. L’impatience. Tout. Tout de suite. Et sans retour. Tout … ou rien. Habituée à ne jamais avoir, quelle audace quand on pense à son amie Carry,  Sergéïeva est bien ingrate… elle fusionne de ne pas savoir plus. L’attraction. Au loin, étouffés par ces flocons tuant les sons du large, des mouettes se disputent les restes d’un hareng. Ou mieux, qui sait. Mais c’est au loin et la nuit approche, elle est là. Deux heures, au moins, depuis sa sortie de chez elle. Elle oublie sa posologie. Grâce à lui, à cause de lui. Ses mots n’ont pas de sens, elle les a oubliés, préférant regarder l’objet de ses questions. Et puis non, l’océan est plus joli, moins indocile. Les confessions se font de préférence en parallèle, le face à face conflictuel se fuit, par nature.

Juste avant.

Couler, ou laisser couler, interrompre, relancer. Le retrait est fait de remontées, et la montée de reculades. Ainsi va l’océan. Les mains sont restées proches. Mais pas de réelle accolade. Plutôt que de perdre la face, elle a fini par la ranger. Il n’est pas bien de profiter des gens dans l’obscurité. Eduquée comme il se doit, elle sait devoir laisser l’initiative. C’est à l’homme, toujours, que les blancs échoient. Circéia ne veut surtout pas le mettre mal à l’aise. On ne joue pas contre l’autre, pas ainsi qu’elle a grandi. Ensemble. Mais jamais contre. Patienter. Il finira bien par avancer. Elle inspire ce grand air frais, le sel, la neige, un jeu baroque. Posée sur sa canne, qui commence à sérieusement marquer le sable, elle comprend. De longs mois avant d’être autorisée à regarder l’avenir en face. Vivante, libérée, est-ce cela être adulte ? Ses poumons s’emplissent, se désemplissent. Leur forme discrète font d’elle une créature désirable, immuablement. Croyez-vous qu’elle soit revenue à l’avant ? Au contraire, apprécier les silences selon un mode de perception inédit revient à explorer un territoire vierge. Les inflexions ne se lisent pas qu’à l’extérieur. Mais lui ne saurait l’apprécier. Il ne la connaît pas.

- Merci Hjúki.

Les soleils qui nous habitent sont des entités sorcières, qui passent d’une pièce à l’autre en nos cerveaux sans prévenir, décidant pour nous de ce qui est bien, de ce qui l’est moins. Elle est heureuse, sur cette plage interface entre son passé et l’avenir. Il n’est peut-être qu’un conducteur, celui du bus magique conduisant les êtres perdus de leur mort à leur REBORN. Beaucoup. Et puis, le reste importe peu. Il suffit d’un trait de lumière dans un ciel d’orage pour savoir qu’il est là, le soleil.

C’était juste avant.
Dernière modification par Circéia Alekhina le 25 janv. 2021, 20:24, modifié 1 fois.

Diplômée de l’ISDM => naturellement charismatique.
Vivre sans faire de mal à personne qu'à moi-même...

25 janv. 2021, 02:17
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Exultante lenteur et douceur du métronome d’eau. L’air froid transforme quelques bouffées en volutes quand le souffle de la respiration se fait plus puissant, effet de l’exaltation. La froideur toutefois humide des embruns lui emplit les poumons avec force vitale, en une fraîcheur tout à fait vivifiante. Ses pulsations suivent le rythme modéré du renflouement. Il aimerait se rassurer en percevant l’écho de la majestueuse, mais cela ne lui paraît pas encore permis. Hjúki laisse d’abord le frémissement l’envahir, affleurer jusque sa peau. Dépassera-t-il ? Les fragiles digues érigées au cours de sa quête de contrôle des eaux les plus tumultueuses cèdent alors que l’adolescent éprouve son Élan. Le courant lui traverse les veines, cherche à atteindre les extrémités, ses propres confins. À la scission, qu’arrivera-t-il ? Il redoute déjà le débordement de cette poisseuse seconde peau. Savoir avant d’oser quoique ce soit outre. Le poing serré, comme s’il pouvait contenir cette force. Picotante, mais non collante. Qu’en penser ? Comme porter une armure hérissée de minuscules piquants, mais tournés vers soi. Loin d’un soin d’acupuncture, il en est tout raidi. La réconciliation n’est pas encore acquise, en dépit de ces années à se consumer pour la maîtrise. Pourtant, il faut bien reconnaître qu’il la contient, il n’a pas empoisonné l’air ni n’a asphyxié quiconque. Hjúki n’est plus l’enfant inquiet car il débordait de soi ; il est devenu le prisonnier, encagé précisément par ce qui débordait.

Ses Élans sont des ruisseaux corrosifs le rongeant de l’intérieur. Retour à la mer. Ralentissement. Repoussement. La lutte est éprouvante, mais les effets sont manifestes. Une couche ténue, fragile est ménagée tout autour de lui alors qu’il se ralentit. Il se félicite alors de s’être laissé présenter à cette mer qui l’enrobe instable et le renfloue, plus mesuré qu’auparavant. Une nouvelle source… Il se tourne vers la jeune femme tout en laissant résonner en lui cette redoutable question à laquelle il avait toujours repoussé la réponse *Qui sera ton héritage ?*. Lui serait-elle une inespérée source ? Son héritage était si précieux, il se savait au bord d’en être l’unique successeur, l’idée du partage lui paraissait précipitée, tout en sachant qu’il était en réalité encouragé depuis des années à le multiplier. Une main le long de son corps remue discrètement alors que de ses doigts il agite quelques premiers contours perceptibles autour de la jeune femme.

La reconnaissance, et son nom encore avalé entre ces lèvres. Étrange et douce confirmation. Sommes-nous synchronisés ? Non, accordés. *Quelle Consonance ?* La question qui toujours le hante. Au rare diapason peu de notes mêlées. Les mots ne suffiront toujours que difficilement, d’autant quand il ne parle pas encore la langue de Circéia…il pourra apprendre, si le temps daigne leur offrir de.

Pour le moment une possibilité monte et s’immisce parmi ses songes, en hésitation. Un seul savait lui offrir le réconfort de l’enlacement, Opa bien sûr. Corps contre corps, les battements s’entre-entendent, les chaleurs se partagent, les pressions forment un mystérieux langage. Hjúki avait l’habitude de se lover dans le creux du corps d’adulte plus imposant de son aîné, un enveloppement qui s’était récemment raréfié du fait d’une santé changeante. Dos contre buste, la position de la jeune pousse qui cherche l’ombre de son massif protecteur. En cette Nuit, deux adultes se font face, sur une plage. L’adolescent pressent que poitrine contre poitrine, les Cœurs se croisent. Et, primordialement, toujours la douceur doit être protégée. Reconnaissant à son tour de la sérénité de la mer partagée, il avale le remerciement pour le transmuer à travers sa voix.


« Merci à vous, ô douce Circéia. »

Planté en face de la jeune femme, il a tout accès à la gracile Silhouette, avance une main respectueuse vers les doigts blancs, hésite, recule, avance. Tend timidement les bras, comme en une esquisse de première position. Acceptera-t-elle de le connaître en sa langue, celle à laquelle les mots n’ont pas accès ? La proposition d’un singulier partage, le plus incisif. Ne jamais prendre par surprise, toujours laisser le choix, de s’y glisser ou de s’y dérober.

« M’autoriserez-vous ? »

Contraste embrasse :
Bascule,
Choyant

25 janv. 2021, 20:23
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
L’intérieur, l’extérieur, l’interface. Alors qu’elle entend les derniers mots du jeune homme, car ainsi qu’il agit Hjúki s’est métamorphosé, un peu, une morsure intervient. Bien plus puissante qu’à l’habitude, et peu importe si elle résulte de son excès de vie. Trop tard pour regretter, bien trop tard pour choisir de rentrer. Nikita attendra. Et sans doute un moment. Car cette fois elle est partie, pour de bon, évanouie, laissant voir les résultats du massacre : des jambes emmaillotées, l’une est bien tordue. Et la canne, dérisoire, tombe sur le côté, en dernier. L’élan, l’arrêt, imperturbablement. Rien ne lui permet de savoir comment il réagit, tout au plus peut-on s’en douter mais là où elle se trouve on ne revient pas pour enquêter. Entre les deux, il est possible que sa main ait touché le geste du garçon, possible mais pas certain.

Image


Combien croiront au calcul, effet de manche du destin. Mais juste avant, le futur déjà écrit perçait, innocemment. Elle est toujours malade. Toujours et il est cruel de les voir ainsi, séparés par l’ignorance des soignants. Circéia Alekhina respire, sans doute se relèvera-t-elle dans quelques instants. Mais en l’état, elle est livrée aux cendres qui n’ont qu’une élégance, s’habiller de la neige pour croire à la beauté des lieux. Cela pourrait offrir un joli tableau ; allongée, endormie comme un soldat dans la prairie. Mais si elle aussi meurt, alors à quoi bon peindre ?
Point de souffrance à masquer, c’est au moins ça. Le chaudron a explosé en un instant, disparu, expédié au-delà d’un mur fictif. L’image autorise le sourire d’ailleurs, grotesque. Un mot mal aimé, très mal. Pourtant si beau. Qui sonne comme il décrit. Un mot juste.
Si l’on poussait un peu, l’ironie poindrait. Douce ? Est-ce cela qu’il a dit ? Douce ? Par Merlin, il ne sait pas. Est-ce l’image qu’elle dégage ? Plus maintenant, certes. Dans le noir avéré d’une soirée commençante, elle serait plutôt … furieuse d’avoir cédé à sa nouvelle nature. A la merci des poisons africains.
Que se passe-t-il à l’interface ? Se sont-ils frôlés ? L’a-t-il retenue ? Juste essayé ? S’est il senti capable de la porter ? Ou seulement sidéré et personne ne lui en voudrait. Gisant sur le sable, terriblement fragile et belle, Circéia agit sur un mousse, à son corps défendant. Qui, de l’image et du mot soutient le mieux l’instant ? Faut-il les aligner pour justifier des situations ? Pénible. Et vain. Il suffirait d’attendre mais nous sommes tous pressés. Pressés de nouveauté, pressés de sensations, avides, alcooliques. Pire encore la situation du malade en besoin de morphine, de ce qui en tient lieu dans le monde des sorciers. Le repos n’est pas même recherché, seulement l’ivresse.

Dans la chute, une fiole qu’un sorcier reconnaîtra sans peine a cassé. S’il regarde comme il faut il comprendra, s’il en est. Et si c'est un moldu l’odeur le fera fuir. La canne, de son côté, a laissé s’envoler le sortilège, un autre moyen de savoir. Mais à quoi pense-t-il ? Quels trésors la vie nous pousse à contempler ? Le facile, l’imprévu ou le scénarisé. C’était pourtant écrit, elle ne tiendrait pas l’heur. Mais personne n’est fautif, ils n’y ont juste… plus pensé. Surtout elle, comment aurait-il su ? Impossible écossaise, tenace, dure au mal, irrépressible russe, torrent. Pour avoir les détails du présent, il va falloir attendre. Une minute ou une heure.
Et quand enfin elle sort de ses vapeurs, c’est pour sourire d’une réjouissante nuit.

- Où sommes-nous ?

Lecteur, tu dois savoir les conditions. Elle aurait aimé recevoir la main qui se tendait vers elle. Pourtant la destinée l’en empêchait, par nature ; elle devait choir, quoi qu’il dise ; ou fasse. Oui, apparence de l’aisance à créer le théâtre. Mais nous en somme loin. Les dés choisissent pour nous et nous suivons leurs plis. Sinon pourquoi jouer ? Les centaures décomposent les fils entortillés, ceux versés dans la divination brûlent les volutes. Et les choeurs analysent. Mais qui peut décider de la marche à tenir ? Quels mystères entretiennent la prédestination ?

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25 janv. 2021, 23:29
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Scission. L’exact point de bascule, l’exacte atteinte de la limite. Où est, quel est le masque tragique revêtu ? Conservé le long de l’épisode, il donne l’illusion d’une constance, rendant nécessaire d’observer au-delà pour capter les nuances inexprimables. Elle a trop longtemps conservé un masque de force résolue, jusqu’à en être trahie. Clac. Clac. Clac. Les fils qui la retiennent sont lâchés. Fulgurance. Temps, toutefois, s’amuse dans ses distorsions à faire durer la chute. Corps de mélasse. Celui de Circéia récidive, mais cette fois devant un témoin plus alerte que Hjúki ne l’a été la première fois. Revers. Bien que peu préparé, il pivote pour au moins retenir d’un seul bras, franchissant la barrière des contours de la Silhouette alors même qu’il ne la connaît pas, qu’il n’en est pas familier. Brusquerie d’un contact non mutuel. *Désolé !* Impact multiple. Son coude, ses genoux, il s’est bien égratigné par le sable qui gravillonne à travers ses vêtements. Au moins la jeune femme gît-elle en ordre, le dos doucement déposé sur la surface granuleuse.

Que se passe-t-il lorsqu’une danseuse échoue sur scène ? Cela n’arrive, tout comme le mystère des clignements qui cessent quand il est vital de contempler. Ou l’improbabilité d’un éternuement sur les planches. Le corps se dépasse quand on l’exige. Quand rompt-il ? Effervescence, étouffement, agitation pour comprendre ce qui n’aurait dû arriver. Hjúki n’est pas cette foule brouillonne, c’est elle qui est en lui. Qui est-il ? Le spectateur confus, le chorégraphe qui voit son œuvre s’éclater, le partenaire et égal qui se dit qu’il pourrait être à sa place ? Pas de remplaçante dans les coulisses : il la veut, Elle, et nulle autre. De cela il en a la certitude. L’âcre odeur de la magie s’élève dans les airs, ramenant l’adolescent à sa tourbe. *Contenance.* Pourtant, dans leur oscillations, ses Perles-de-Nótt comprennent alors une source étrangère. *Ma source…Elle aussi ?* Son ignorance le frappe douloureusement. Comment absorber sa peine ? Ses doigts font lentement glisser hors d’une poche son extrémité de branche. Si seulement il existait un sortilège pour extraire les peines. Tremblements de frustration. Il est tellement, tellement inutile. *Vulnera sanentur…les blessures sont soignées.* La magie, est-ce aussi simple que des injonctions latines ? Dans cette simplicité du moins s’accomplit l’ambigu Rogue. Cette énergie devrait pourtant être immensément plus originelle. De quoi a-t-elle réellement besoin ? *Crura sanentur…les jambes sont soignées. Non. Crure…Cruribus medeor. Je guéris la…les jambes.*

De retour déjà, sa mélodie est de retour, alors que le jeune homme est toujours accroupi auprès d’elle, les jointures blanchies par l’impitoyable force et pression exercées autour du bois. Au réveil, le masque est-il moins dissimulant que celui de la dramatique héroïne ? Nuancée. Il plonge sa main libre parmi les grains pour les laisser doucement filer.


« Nous jonchons le sable. »

Alors que Hjúki la contemple, il ne chasse son désir impérieux, impétueux de la sauver. Est-il si présomptueux ? Infiniment, sans doute. Tellement qu’il est prêt à y laisser une partie de soi. Un sacrifice, aurait-il pu avoir pensée plus prétentieuse ? La souffrance ne disparaît dans le néant, mais il serait prêt à en intégrer une partie. Est-ce seulement possible ? La magie pourrait-être réellement se montrer utile ? Pas de remplaçante. Elle. *Elle ?*

La majorité, qu’elle soit sorcière ou moldue, ne rime pas nécessairement avec la raison, avec la sagesse, avec le discernement. Loin de là. Sans réfléchir à la formulation, la voix de l’adolescent sort brute.


« Cela vous paraîtra si inconscient, mais je voudrais tellement servir à… »

Médite, médite encore son idée insensée, la tourne, en examine les facettes. L’enchanteresse l’a happé, intensément. Il aimerait percer la brume. La branche boisée n’est pas dissimulée, c’est inutile. Les émotions seront là, nécessairement. L’intention claire, cristallisée, limpide. Toutefois, une part d’impossible, l’indéniable danger de l’expérience, l’inconsidération. Là encore, le consentement, surtout quand il s’agit de proposer l’audace la plus immodérée.

« Vous ne le permettrez sans doute pas…Circæ medeor ? Mon vœu déraisonnable. »

Hjúki guérisseur, nul n’en aurait douté, et lui le dernier. La sombre mer l’a dévoré, sur quel rivage le renverra-t-elle ?