Maddie n'avait pas revu ses parents depuis sa rentrée en Quatrième année. Les premiers temps, cette séparation avait été un déchirement pour la jeune fille. Elle savait sa maman au plus mal depuis le décès de son grand-père et la laisser ainsi avait été extrêmement dur. La mort de son papy avait été un grand choc. Maddie était extrêmement proche de lui, et en mourant, il faisait revenir Lauren à l'état d'orpheline. Une seconde fois dans sa vie, sa maman avait perdu ses deux parents. Elle n'osait pas imaginer la douleur que cela devait être. Comme famille, il ne restait à Lauren plus que Paul et elle sur cette Terre. Forcément, Maddie avait alors beaucoup culpabilisé au moment de remonter dans le Poudlard Express, même si elle n'avait pas eu d'autres choix que celui de retourner à l'école. Elle avait alors compensé en se montrant encore plus studieuse que d'ordinaire, en s'appliquant encore plus dans l'ensemble de ses responsabilités et en correspondant bien plus que les années passées avec ses parents.

Au fil des mois, Maddie avait remarqué que sa maman se montrait plus loquace dans ses lettres. Elle avait apparemment recommencé à sortir de la maison, à reprendre goût à son travail. Grâce à cela, l'adolescente s'était en quelque sorte sentie libérée d'un poids. Elle s'autorisait de nouveau à profiter de la vie, à prendre plaisir aux choses. Elle progressait dans son deuil. Elle se sentait à nouveau bien, cela ne lui était pas arrivé depuis bien longtemps.

Ainsi, c'est avec un sourire radieux qu'elle descendit du train. Elle constata avec bonheur que sa maman l'attendait sur le quai. C'était une belle surprise pour la jeune fille, Lauren n'ayant pas eu la force de l'accompagner le jour de la rentrée. Elle lui courut alors dans les bras, ne se préoccupant pas une seule seconde du monde autour d'elle. Elle la serra fort. Lauren lui rendit son étreinte et semblait elle aussi heureuse de retrouver son enfant. Elle prit ensuite en main la valise de sa fille et l'invita à prendre le chemin de la sortie. Maddie prit alors la main de sa maman dans la sienne. Elle avait besoin de ce contact, de se reconnecter à elle. Lauren accueillit cela avec un doux sourire et toutes deux se rendirent dans la partie moldue de Kings Cross.

Paul les attendait à l'extérieur. Il accueillit sa princesse les bras grands ouverts. Maddie ne se fit pas prier et alla se blottir. Quelle était contente ! Une fois ses affaires chargées dans la voiture, Paul démarra et la famille fit la route pour gagner leur domicile situé à Carshalton, dans la banlieue sud de Londres. Pendant le trajet, Maddie monopolisa la parole. Elle avait tant de choses à leur raconter malgré ses nombreuses lettres envoyées. Paul et Lauren, eux, réagissaient à peine, mais la Poufsouffle était bien trop embarquées dans ses histoires pour s'en rendre compte. Pour elle, le trajet passa à toute vitesse.

Une fois à destination, le soleil était couché et l'heure du dîner arrivé. Maddie avait toujours le même enthousiasme. Elle dressa la table avec plaisir puis mangea avec envie. Sa maman, elle, toucha à peine à son assiette. Quant à son père, il lui répondait essentiellement avec des sourires. Au bout, d'un moment, elle finit par s'en rendre compte. Après une gorgée de thé glacé, elle demanda :

"Pourquoi vous parlez pas ? Il y a un problème ?"

Une fois ses questions posées, Maddie regardait ses parents à tour de rôle. Elle remarqua bien le rapide coup d'œil gêné qu'ils venaient d'échanger l'un envers l'autre. Cela lui confirma directement qu'il y avait bel et bien un problème.

"Qu'est-ce qu'il y a ?" insista-t-elle.

"Rien du tout !" répondit Lauren, un brin sur la défensive. Maddie dévisageait ses parents. Paul, le ton bien plus serein, intervint à son tour :

"Il n'y a rien de négatif en tout cas. On a une surprise pour toi, c'est tout. Te voilà au courant, alors maintenant ne torture pas plus tes pauvres parents et attends de voir ce que c'est." dit-il en adressant un sourire à sa fille.

C'était donc ça ! Maddie lui rendit son sourire et se sentit bien soulagée. Elle prenait cette annonce pour argent content, puisqu'il était impensable pour elle que ses parents puissent lui mentir. Elle laissa donc son sentiment négatif partir bien au loin de son esprit et répondit avec enthousiasme :

"Ohhh cool ! Je peux au moins savoir quand aura lieu cette surprise ?"

"Demain, ma chérie." répondit Lauren avec un léger sourire rapide avant de dévier le regard. Sa voix était loin de respirer l'engouement et son attitude ne correspondait pas à celle d'une personne préparant une surprise à son enfant. Cela fit à nouveau tiquer Maddie, qui fronça les sourcils.

"Ta mère est fatiguée. Elle a eu beaucoup de travail ces derniers temps." dit Paul, sans que Maddie n'ait eu à poser la moindre de question. Elle se contenta d'un simple : "Ohh" en guise de réponse, tout en adressant un regard inquiet en direction de sa maman. Le reste du repas se passa sans autres paroles prononcées et c'est avec une inquiétude naissante que Maddie monta à l'étage après avoir débarrassé son assiette. Elle était éreintée et ne se fit pas prier pour rejoindre son lit. Cependant, cette inquiétude ne quittait pas son esprit. Elle n'arrivait même pas à s'enthousiasmer pour la surprise annoncée. Elle avait comme une sorte de mauvais pressentiment, l'impression qu'on ne lui disait pas tout.

C'est l'esprit inquiet qu'elle se glissa dans son lit et, après de longues minutes d'essai, elle se rendit à l'évidence : elle ne parviendrait pas à dormir de si tôt. Elle soupira d'agacement en se retournant une énième fois, puis remarqua un son. Des voix. Celles de ses parents. Elle essayait de se concentrer mais elle ne parvenait pas à distinguer les mots prononcés. En tout cas, cela n'annonçait rien de bon. Jamais Maddie n'avait entendu des conversations venant du rez de chaussée depuis sa chambre. Cela ne pouvait être qu'une dispute. Soucieuse, elle voulait savoir ce qu'il se passait. Elle sortit alors de son lit et marcha à pas de loup jusqu'à sa porte. Elle tourna la poignée tout doucement et l'entrouvrit. Le silence semblait revenu alors qu'elle se glissait en dehors de la pièce. Mais, à peine avait elle fait un pas, qu'elle sursauta en entendant sa maman crier :

"Oh, arrête un peu Paul !"

La boule au ventre, elle avança jusqu'à la première marche des escaliers et s'y assit. Jamais elle ne s'était retrouvée dans une telle position et jamais elle n'avait été si mal à l'aise. Elle n'avait pas envie d'entendre ses parents se disputer, mais elle ne pouvait pas non plus s'en empêcher. Recroquevillée, les larmes au bord des yeux, elle écoutait :

"J'en ai marre de tes conneries, Lauren ! Tu pouvais pas faire un effort ? En même pas un repas, t'as flanqué en l'air ce qu'on s'était dit ! Bravo !"

Maddie enfouit sa tête dans ses genoux qu'elle serrait fort en enfonçant ses ongles dans ses mollets. Elle maintenait ses yeux fermés avec la même force. Son visage était crispé comme jamais après avoir entendu ces mots. Elle vivait un cauchemar éveillée. Jamais Paul ne s'était adressé de la sorte à sa maman. Jamais. Les disputes n'avaient pas leur place dans leur quotidien. Maddie n'en avait pas le moindre souvenir d'une seule, à vrai dire. Son monde s'écroulait sous le poids de ces mots durs échangés. Les larmes coulaient désormais et elle ne savait pas quoi faire. Devait-elle intervenir et défendre sa maman, bien qu'elle ne savait pas ce que son papa lui reprochait ? Sa nature la poussait vers cette option, cependant, l'arrivée de sa maman dans la cage d'escalier lui fit prendre la poudre d'escampette.

La nuit avait été difficile pour Maddie, suite à l'altercation entre ses parents dont elle avait été la témoin clandestine. Inévitablement, elle se posait beaucoup de questions et n'avait pas vraiment la tête aux festivités qu'il fallait cependant préparer en ce jour de réveillon de Noël. Même la surprise que ses parents avaient évoquée la veille ne l'enthousiasmait pas.

Contrairement à ses habitudes, elle peina à sortir du lit et c'était avec la mine triste qu'elle descendit les escaliers pour aller prendre son petit-déjeuner. Elle trouva sa mère dans la cuisine et lui dit un rapide bonjour. Elle prit ensuite son bol et sa cuillère et se dirigea dans la salle à manger. Là, elle vit son père plongé dans la lecture de son journal, un café à la main.

"On prend pas le petit-déjeuner ensemble ?" demanda-t-elle à la vision de la tasse.

"Pas aujourd'hui. J'ai déjà pris le mien, mais ta mère t'a peut-être attendu. Demande lui."

Maddie souffla, agacée. D'ordinaire, ils prenaient toujours ce repas ensemble quand son père ne travaillait pas. Elle posa alors la même question à sa maman qui elle, lui dit qu'elle n'avait pas faim. Ils étaient décidément vraiment bizarres depuis son arrivée. Elle mangea alors seule, en silence.

Il était désormais temps de décorer la maison. Un moment très important dans la famille Joy où tout le monde participait de bon cœur avec, en fond, les chants de Noël où Maddie avait l'habitude de voir son père saisir Lauren par la taille pour l'inviter à danser. Une vision qui avait toujours plu à leur enfant qui rêvait un jour de vivre ça elle aussi quand elle serait plus grande. Cependant, aujourd'hui, Maddie dut forcer ses parents à se lancer dans la décoration et au lieu de participer tous ensemble, chacun semblait s'exécuter dans son coin. La chaleur était loin d'être présente. L'adolescente vivait mal la situation. Elle fit une ultime tentative en allant allumer la musique. Elle espérait que cela allait entraîner un rapprochement entre ses parents.

Lauren adressa un sourire à sa fille lorsque les premières notes du chant de Noël se firent entendre. Maddie reprit alors espoir et osa :

"Allez, dansez ensemble !"

Elle avait toujours le don de mettre les pieds dans le plat. Prendre des pincettes n'étaient pas vraiment son genre, mais ses intentions étaient toujours bonnes. Lauren sembla sensible à la demande de sa fille, comprenant certainement que la jeune fille avait remarqué que quelque chose ne tournait pas rond. Elle s'avança alors en direction de Paul et lui saisit la main. Ce dernier s'en dégagea aussitôt :

"Faut que je démêle la guirlande électrique." prétexta-t-il. Cette réponse fit sortir Maddie de ses gonds.

"Non, mais vous allez me dire ce que c'est le problème ?!"

"Arrête un peu avec ça, Maddie. On t'a déjà dit qu'il n'y avait rien. Alors tu te calmes maintenant !" tonna Paul. Dans sa vie, son père lui avait rarement crié dessus et le peu de fois où ça arrivait, cela faisait directement monter les larmes aux yeux de Maddie. Rouge de colère face au mensonge qu'elle pressentait, elle quitta la pièce et partit en courant dans sa chambre. Elle était prise d'une rage si bien qu'elle avait envie de casser tout ce qui lui tombait sous la main. Elle dû fortement se contenir pour ne pas passer à l'action. Elle noya cependant un cri en enfouissant la tête dans son matelas. Pourquoi ils ne lui disaient pas la vérité ? Qu'est-ce qui se passait entre ses parents ?

C'est alors que pour la seconde fois en moins de vingt-quatre heures, elle entendit des cris retentir du rez-de-chaussée.

"Tu m'as reproché hier de pas avoir su sauver les apparences et toi, qu'est-ce que tu fais ? C'était trop te demander que de danser avec ta femme pour faire plaisir à ta fille ?"

"Ma femme ? Mais elle est plus là, ma femme. MA femme n'aurait jamais balancé son boulot du jour au lendemain sans m'en parler. Elle n'aurait pas non plus commencé des démarches incohérentes et dangereuses pour changer de vie. Aller vivre dans une ville sorcière avec tout ce qui s'est passé ces dernières années ? T'es devenue complètement folle. Accepte le fait que tu n'ailles pas bien depuis le décès de ton père et va te faire aider, ensuite tu pourras me faire la morale."

Maddie se prit ces informations de plein fouet. Elle connaissait enfin la raison de toutes ces tensions et aurait, en fin de compte, préféré ne rien savoir. Elle était perdue, bouleversée. Elle n'arrivait même plus à penser. Elle voulait juste fuir. Elle ouvrit alors brusquement la porte de sa chambre et saisit le téléphone qui se trouvait dans le couloir de l'étage. Tremblante, elle composa un des seuls numéros qu'elle connaissait par cœur. Les sonneries lui purent durer une éternité.

"Mamie, tu peux venir me chercher ?" dit-elle avec difficulté, ses sanglots lui faisant manquer d'air

- Toc toc toc -

"Maman ! Mais... Qu'est-ce que vous faites déjà là ?" demanda Paul en voyant Rose et Henry, ses parents qu'il n'attendait pas avant que dix-sept heures ne sonnent. La grand-mère de Maddie avait les lèvres pincées et força le passage pour entrer dans la maison avant de s'exprimer.

"Maddie nous a demandé de venir. La pauvre enfant semblait totalement paniquée. Qu'est-ce qu'il se passe ici, Paul ?" demanda-t-elle en foudroyant son fils du regard. Si Maddie avait une très belle relation avec ses grands-parents, il n'en était pas de même en ce qui concernait son père. Il avait fuit dés que possible l'éducation stricte que ses parents lui avaient imposé et cela avait toujours créé une sorte de distance entre eux, si bien que Paul ne s'était pas tourné vers eux pour parler de ses problèmes conjugaux. Il ne voulait d'ailleurs surtout pas les mêler à cela, présageant déjà leur réaction.

Pendant que Paul tâchait d'apaiser sa mère, Lauren avait filé tout droit jusqu'à l'étage pour aller parler à sa fille. Elle savait bien qu'elle aurait dû aller la voir et non la laisser se calmer toute seule comme son mari lui avait plus que suggéré de faire. Elle ouvrit d'un coup sec la porte et surprit Maddie en train de jeter ses manuels de classe par dessus ses vêtements engouffrés dans sa valise.

"Hey, mais qu'est-ce que tu fais ?" dit-elle en attrapant le poignet de sa fille. Le geste était brusque, mais la voix elle, était douce. Elle avait réellement envie de communiquer avec sa fille, voyant bien qu'elle était bouleversée. Maddie se retourna alors face à elle, les yeux injectés de sang, les joues totalement mouillées et le nez encombré.

"Vous m'avez menti pendant tout ce temps !" cria-t-elle entre deux sanglots. Elle se sentait trahie par toutes ces lettres qu'elle avait reçues ces derniers mois qui lui racontaient à quel point tout allait mieux pour sa mère, qu'elle n'avait plus de souci à se faire. Ce n'était que des foutaises. Elle était en colère. Elle était bouleversée. Elle était perdue. Elle ne voulait plus rien entendre.

"Sors de ma chambre !" tonna l'adolescente en pleine crise lorsque sa mère essaya de la prendre dans ses bras pour la calmer. "Laisse moi au moins t'expliquer !" dit Lauren sur un ton presque suppliant. Jamais elle n'avait vu sa fille dans un tel état si bien qu'elle ne sût pas comment réagir. "Non ! Je m'en fous, je veux plus jamais te voir !" dit la jeune fille en bouclant sa valise. Dans le même élan, Maddie sortit de sa chambre en claquant la porte, laissant sa mère seule à l'intérieur. Lauren tremblait et se laissa tomber sur le lit de son enfant. C'en était trop pour elle. Elle n'arrivait plus à gérer. *Qu'est-ce que j'ai fait ? Mais qu'est-ce que j'ai fait ?!* pensa-t-elle en s'effondrant en larmes. Elle qui pensait avoir trouvé la voie qui la ferait sortir de cette descente aux enfers qu'elle vivait depuis la mort de son père, ne put que constater qu'elle n'avait fait que du mal autour d'elle. Elle se dit que son mari avait raison. Tout ça, c'était de sa faute.

Pendant ce temps, Maddie dégringolait les escaliers, sa grosse valise à la main. Sans un mot à qui que ce soit, elle sortit de la maison sous le regard effaré de son père et inquiet de sa grand-mère. La jeune fille fila tout droit vers la voiture de ses grands-parents, où son grand-père Henry attendait loin de la tempête. Voyant sa petite fille arriver, il sortit du véhicule puis attrapa sa valise. "Mais qu'est-ce que tu fais ?" demanda-t-il, surpris. Cependant, il suivit la suite logique en ouvrant son coffre pour y glisser la grosse valise. "Je viens chez vous !" dit Maddie tout en ouvrant la portière pour s'asseoir à bord du véhicule. Henry n'en revenait pas. Il ne connaissait pas cette attitude chez sa petite-fille. Il se tourna en direction de la porte d'entrée de la maison de son fils et vit sa femme retenir Paul par le bras.

"Laisse la faire !" ordonna Rose à son fils.

Maddie attendait, assise dans la voiture, les bras croisés et le regard fixe droit devant elle. La colère avait pris le pas sur l'angoisse. Sa seule envie était de partir loin de ses parents et elle n'en démordrait pas. Sa décision était prise.

Quelques instants plus tard, Rose et Henry étaient montés à bord et le véhicule démarra. La jeune fille n'adressa aucun regard en arrière. Une fois que la voiture s'était éloignée de son domicile, elle commença à se détendre. Elle posa le côté droit de sa tête sur la vitre froide et ferma les yeux. Son rythme cardiaque ralentissait enfin. Elle resta dans cette même position durant tout le trajet qui séparait Carshalton de Mayfair, le quartier chic de Londres où ses grands-parents habitent. Personne n'avait osé prendre la parole. Seuls les légers raclements de gorge de Rose avaient par moments, rompu le silence. Maddie savait que c'était le signe que sa grand-mère était contrariée. Elle redoutait le moment où elle allait devoir s'expliquer.

Le trafic dense en cette veille de Noël avait aidé à faire reculer le moment fatidique, mais voilà qu'ils arrivèrent en bas de la résidence où Rose et Henry vivait. C'était un immeuble bourgeois en briques rouges, à quelques rues de Picaddilly. Maddie allait y retrouver une chambre dans laquelle elle n'avait plus séjourné depuis des années. Elle ne devait pas avoir plus neuf ans la dernière fois qu'elle avait passé des vacances chez eux. La vie en ville n'était pas ce qu'elle préférait. Elle finissait par vite s'y ennuyer. Pour l'heure, cela était loin d'être une de ces préoccupations.

"Bon et bien, je vais aller préparer ta chambre." dit Rose une fois qu'elle eut rangé son manteau.

"Non, c'est bon Mamie. Donne-moi juste le nécessaire et je vais me débrouiller." répondit Maddie d'un ton lasse qui ne lui ressemblait guère.

"T'es sûre ?"

"Oui, c'est bon. Tu sais dans mon école, on se débrouille tout seul. J'ai l'habitude" - et puis elle avait plus de quatorze ans désormais. Elle n'était plus la petite fille d'autrefois. Ses grands-parents avaient tendance à l'oublier tant ils se voyaient peu depuis son entrée à l'école de magie - "et puis, j'ai un peu envie d'être seule..."

"D'accord. En tout cas, c'est bon de t'avoir à la maison." dit Rose en posant la main sur la joue de sa petite fille. La grand-mère était triste de la situation dont elle ne connaissait pas encore l'origine, mais pour l'heure, elle préférait se dire que c'était là l'occasion de partager un peu de temps avec sa petite-fille. Elle la dépassa ensuite pour aller chercher les draps. Maddie la suivit et se dirigea dans sa chambre. C'était anciennement celle de son père. Il y avait toujours quelques-unes de ses affaires d'étudiants, tels que des fanions de l'UCL, l'université qu'il avait fréquenté et où il avait rencontré Lauren. Il y avait également quelques jouets à Maddie, comme une grosse maison de poupées. Il n'y avait d'ailleurs qu'ici qu'elle jouait aux poupées. L'adolescente regarda tout cet ensemble et eu le sentiment que tout cela appartenait à une ancienne vie. Une vie sans magie. Une vie sans souci.

Le retour de sa grand-mère la sortit de ses mornes pensées. Une fois de nouveau seule, elle passa à l'action en faisant son lit et en déballant ses affaires. Après une bonne demi-heure, Rose l'appela pour manger. Manger, elle n'y avait même pas pensé. Elle ne s'était même pas rendu compte qu'il était déjà plus de treize heure. Elle n'avait pas faim, mais elle se força tout de même à venir à table. Elle devait bien ça à ses grands-parents. A table, un bol de soupe et une tranche de rosbif froid l'attendait.

"J'avais prévu léger vu le repas qui nous attendait, ce soir. Si tu veux, je peux te faire des pâtes en plus." dit Rose.

"Non, c'est gentil. J'ai pas très faim." dit Maddie en faisant tout de même l'effort d'immerger sa cuillère à soupe, puis de la porter à ses lèvres. Henry, lui, n'avait pas dit un mot depuis leur arrivée. Il observait la scène, attendant probablement le feu vert de son épouse. Il ne tarda d'ailleurs pas à arriver. Une fois la moitié de son bon consommé, Rose posa la question :

"Alors ma chérie, pourrais-tu nous dire pourquoi on a dû venir te chercher en catastrophe ?"

Maddie redressa alors la tête face à eux, délaissant sa cuillère. Elle ne savait pas comment se lancer et commençait à être gênée d'avoir mêlé ses grands-parents à tout cela. Elle se sentait un peu stupide d'avoir causé tout ce bouleversement de programme, mais d'un autre côté, sa colère envers ses parents était toujours aussi forte tout comme son envie d'être loin d'eux. En vérité, c'était à Poudlard qu'elle aurait voulu retourner. A sa vie à elle.

Elle entrouvrit la bouche pour se jeter à l'eau, mais à ce moment-là, la sonnette de l'interphone sonna. Henry se leva pour répondre. "Paul !" dit-il, surpris, mais également pour annoncer l'identité du visiteur à sa femme. "J'veux pas le voir !" chuchota Maddie à l'intention de sa grand-mère. Celle-ci fit alors un signe de négation à son époux. "Non, heu... Je descends." dit-il avant de raccrocher. Il se couvrit puis quitta l'appartement en soufflant.

Maddie se sentait de plus en plus mal à l'aise. Elle sentait ses intestins se tordre dans son ventre. Son stress était palpable. Son père, était-il en colère après elle ? Etait-il revenu dans le but de la récupérer et mettre fin à ce qu'il pourrait appeler une mascarade ? Elle le redoutait. Pourtant, elle avait toujours été proche de son père et l'aurait auparavant qualifié de papa parfait, tout comme sa mère d'ailleurs, mais l'autre visage qu'elle avait aperçu depuis la veille en était à l'opposé, si bien, qu'elle ne savait plus quoi penser de lui pour le moment. Elle craignait d'entendre la porte s'ouvrir de nouveau. Elle pressentait les cris et elle savait que ce ne serait pas son grand-père qui arriverait à le convaincre de faire demi-tour.