Il avait changé de couleur. Elle essaie de le frotter, de le nettoyer, de l'enlever. Mais rien n'y fait. Les ronces ne sont plus noires, mais blanches, et toujours profondément encrées sur sa peau. Une faible partie d'elle espérait secrètement que cela signifiait qu'ils étaient libérés, que ce tournoi n'aurait pas lieu. La liberté. Que les adultes avaient trouvé comment empêcher cela. Mais elle dût rapidement se rendre à l'évidence. Le tournoi aurait bien lieu. Et de manière plutôt imminente a priori. C'était la seule chose que pouvait annoncer ce changement de couleur.

Elle s'allonge sur son lit, le corps encore tremblant. Serrant fort Jyal contre sa poitrine, elle se concentre sur la respiration de l'animal. Sur la douceur de son pelage et la chaleur de son corps. Elle se saisit du sachet de graine, gardé précieusement et contemplé chaque soir depuis son obtention. Bientôt elle va pouvoir s'en servir. Mais ce n'est pas de l'excitation qu'elle ressent. Bientôt elle va devoir s'en servir. Et cela lui fait peur.

Blanc ou noir finalement la sentence est la même.

Et alors qu'elle laisse tomber la tête sur l'oreiller, un petit objet attire son regard. Un petit hibou en bois sculpté. Ce n'est pas à elle. Il ne peut venir que de Deryn. Elle sourit faiblement. Ses yeux sont humides et l'émotion la submerge doucement. Elle sait que ce soir elle ne retiendra pas ses larmes. C'est trop.

C'était réel. Ce moment était bel et bien en train d'arriver. Au centre de la grande salle elle le réalisait. Elle regarde chacun des sélectionnés. Rassurée de ne pas être seule. Elle espère qu'ils vont être ensemble. Ensemble. C'est vraiment un mot qui lui tient à coeur à la Poufsouffle. Une des dernières choses qui la rassure quelque peu.

Elle prend une grande inspiration, longue et profonde, tentant désespérément de calmer les battements de son coeur. Son regard profite des murs du Château une dernière fois, balaie la Grande Salle comme pour la graver dans son esprit. Qui sait quand elle reviendra ? Et surtout si elle reviendra ? Elle prend bien soin de ne croiser aucun regard, surtout pas ceux des personnes qui lui sont chers. Cela rajouterait de la douleur à la douleur. Un tourbillon d'émotions s'empare d'elle et ce tournis lui donne envie de vomir. Et pourtant elle fait tout pour avoir l'air sure d'elle, ou du moins elle s'acharne à ne pas laisser transparaître cette peur qui lui déchire le ventre. Le dos droit, la tête relevée et la mâchoire serrée elle rentre dans son rôle. Ce rôle pour lequel elle a postulé, mais pour lequel elle n'a pas assez d'expérience. Et pourtant, rôle pour lequel elle a été choisie. Alors elle joue. Et il faudra en faire de même là-bas. Ne pas montrer ses faiblesses pourtant si nombreuses, ne pas se laisser déstabiliser. Etre forte. Et pas qu'en apparence si elle voulait survivre.

Survivre.

Ce mot a un goût amer.

Son tour de salle se termine sur Miss Loewy, chez qui elle cherche un signe d'espoir ou d'encouragement. Mais il n'en est rien. Son visage est dur, fermé. Comme une Snargalouf. Elle aurait presque envie de sourire maintenant. Presque. Impossible de savoir ce que l'adulte a en tête en cet instant précis. Alors elle décide de s'en inspirer. Il faudrait qu'elle soit comme elle là-bas. Mais face à l'adulte, elle se sentait comme un imposteur. Elle n'a pas une once de la puissance de sa Directrice. Et pourtant c'est l'adolescente, entre autres, qui va porter les couleurs de Poudlard. Elle en aurait presque honte.

Elle tente de cacher cette peur qui la dévore de l'intérieur. Sa mâchoire est crispée, son corps est tendu comme pour ne rien laisser s'échapper. Mais ses yeux sont légèrement humides, légèrement rouges, comme son visage sous le coup de cette émotion qui l’étouffe. Puis, n'ayant pas le choix, elle se saisit de la clé. Le contact froid, glacé contre sa paume. Un frisson.

Et pouf, plus d'enfants, plus de concurrents dans la Grande Salle de Poudlard.

Un grand tournis, du blanc, du vide. Et puis l'arrivée. Là-bas.

Pour combien de temps encore ?

Cette cellule lui donne des frissons. Aucun signe de l'extérieur. Cette impression d'enfermement lui est insupportable.

Elle scrute et observe rapidement ce qui l'entoure. Les chaînes. Le tunnel. Rien de bien inspirant. En même temps à quoi s'attendait-elle ? Le Dominion n'avait pas pour réputation d'être le lieu le plus accueillant qu'il soit pour les jeunes sorciers. Les cris et sortilèges lui glacent le sang. Heureusement, ou malheureusement elle ne pouvait encore le savoir, elle n'était pas seule. Juste devant sa cellule se trouvait d'autres candidats en pleine discussion. Sa baguette bien serrée au creux de sa main elle écoutait, avant de leur répondre quand ces derniers s'aperçoivent de sa présence.

- "Lilly. La voix légèrement tremblante elle se présente avant d’acquiescer d'un signe de tête. Je vous suis. Vous pouvez me faire confiance. J'espère que vous êtes OK aussi." Dit-elle en dévisageant chacun des trois candidats qui lui faisait face, sans savoir que penser de cette situation.

De toute façon ce n'est pas comme si elle avait un choix à faire. Pour rien au monde elle ne s'engouffrerait dans ce tunnel si peu inspirant. En tout cas pas seule.
Le danger semblait en effet être omniprésent et rester seule n'allait certainement pas augmenter ses chances de survie. Bien sûr elle aurait préféré être en compagnie des candidats de Poudlard. Mais ce n'était pas le cas. Elle avait donc envie de faire confiance au trio. Essayant de laisser sa peur de côté elle continue de les questionner, son regard alternativement posé sur chacun d'entre eux.

Un mot prononcé par le plus grand des garçons l'avait interpellé et elle voulait en avoir le coeur net.

- "Une autre c'est à dire ? Vous avez vus d'autres élèves de Poudlard? On peut leur faire confiance à eux! Et qui est Sky?" Un souffle d'espoir s'était engouffré en elle. Si seulement elle pouvait retrouver Jacob, Irene ou Elowen, elle se sentirait plus rassurée. Au moins elle serait certaine de pouvoir leur faire confiance. Un bruit de fond omniprésent d'affrontement continuait à se faire entendre. Rester là à discuter n'était pas forcément la meilleure des idées à ses yeux. Elle se rend compte qu'elle s'éparpille dans des questions beaucoup trop nombreuses et se concentre sur leur objectif du moment: Survivre. 

- "Faudrait bouger rapidement. Vous savez où aller? Si les deux côtés sont bloqués vous voulez qu'on tente le tunnel derrière?" Sa propre proposition ne l'enchantait guerre. Mais se prendre de plein fouet les sortilèges qu'elle entendait non plus. Pourquoi parlait-elle autant? Il fallait prendre une décision rapidement, peut importe la décision elle voulait bouger et vite.

En d'autres circonstances elle aurait eu tellement de questions à leur poser sur leurs écoles respectives et leur apprentissage de la Magie. Rien que leurs accents étaient dépaysants. Mais le moment était à la survie. Elle espérait avoir fait le bon choix en se joignant à eux.

Elle. Irene ou Elowen se trouvait là juste avant elle et avait choisit de prendre la direction du tunnel. Savoir qu'elles étaient là, peut-être pas loin la réchauffa un peu. Tenter de la rejoindre était tentant. Emprunter ce passage l'était cependant beaucoup moins. Surtout avec aucune certitude de retrouver sa camarade de Poudlard. Pour le moment être dans un groupe nombreux était ce qui la rassurait le plus. Elle espérait ne pas faire d'erreur en restant avec eux. S'aventurer seule dans cette arène labyrinthique était beaucoup trop effrayant. Elle n'était visiblement pas la seule à vouloir faire cet affrontement en groupe et prenait cela comme une opportunité. Mieux vaut être seul que mal accompagné, elle n'en était pas certaine.

Ivelmorny, Walmanba, Motutapu. Beaucoup de noms qui la faisaient rêver et dont elle ne connaissait finalement que peu de chose. C'était triste de voir les conditions dans lesquelles elle croisait des élèves d'autres écoles. Ces mêmes élèves avec qui elle aurait aimé échanger, discuter, apprendre et partager. Et contre lesquels elle devait se battre. Peut-être était-il possible d'inverser cette fatalité? Après tout, s'ils formaient un groupe assez grand où la confiance régnait, peut-être n'y aurait-il pas tant de combats que ça ? Si les élèves refusaient de se battre, qui pourrait les forcer ? Cette idée était bien sûr utopique, mais la Poufsouffle aimait à s'y attacher et à croire dans le petit groupe qu'ils venaient, elle l'espérait, de former.

Essayant de se concentrer sur la situation actuelle, elle écoutait les paroles de chacun. L'argument sur un possible effondrement du tunnel sur eux acheva de convaincre la Poufsouffle, déjà réticente, à vouloir emprunter ce tunnel.

Alors qu'elle s’apprête à répondre, le regard de l'adolescente est attiré par l'ocarina porté par un des garçons. Intriguée elle se demande quelle peu bien être l'utilité d'un tel objet, magique à n'en pas douter. Quand cela lui revient, elle sait la musique au centre de l'enseignement dans cette école. C'est à travers elle que les élèves expriment leur magie, avec elle qu'ils peuvent se battre ou se défendre. Il doit certainement s'en servir comme elle se sert de sa baguette. Pour autant elle ne questionne pas son propriétaire pour avoir plus de détails. L'urgence est de se mettre en mouvement. L'arrivée du nouveau venu semble avoir glissé un peu d'électricité dans l'air. L'avantage est qu'il connaît déjà une partie du groupe. Le désavantage est qu'il ne semble pas y avoir une très bonne entente entre eux. Il n'y avait plus qu'à espérer que lui aussi soit digne de confiance. Cela faisait de plus en plus inconnus dans l'équation.

- "Peu importe où on va du moment qu'on reste ensemble et qu'on peut se faire confiance cela devrait le faire. Dit-elle en dévisageant chacun des élèves. De toute façon on va pas rester là, on a qu'à avancer. Ensemble. Elle insistait bien sur le dernier mot qui était pour elle le plus important. Bien peu inspirée par l'idée de passer dans le tunnel c'était l'option qui lui semblait la moins pire. Puisque de là où ils venaient ce n'était visiblement pas la joie, autant se diriger dans une direction qui n'était pas encore certifiée comme dangereuse. Bien que le contraire serait étonnant, un peu d'espoir était toujours permis.
Toute façon faut choisir mais surtout se mettre en mouvement je pense."

Rester dans cette cellule commençait à lui peser. Elle tente donc d'en sortir afin de rejoindre le groupe.

Pour le rester ensemble on repassera. Peut-être aurait-elle du faire comme sa camarade de Poudlard et emprunter le tunnel. Il était trop tard pour avoir des regrets. Alors qu'ils commençaient à marcher, le chaos les rattrapait. Dur de garder une unité dans ces conditions. Surtout pour un groupe qui ne se connaissait pas. Les instincts de chacun reprenaient le dessus tout aussi rapidement que les dangers se présentaient. Le soulagement de Lilly d'être sortie de sa cellule fut de courte durée.

Elle ne savait expliquer ce qu'elle ressentait, mais ce n'était rien de bon. Oppressant, violent, un type de magie auquel elle n'avait jamais été confrontée jusqu'ici. Mais qu'elle s'attendait à découvrir, ou plutôt à subir.

Abril semblait avoir beaucoup de connaissances. Elle essayait de se rappeler de ce qu'elle savait sur une ou des écoles qui parlaient cette langue. Mais elle n'a pas le temps d'activer ses neurones que les événements s'enchaînent. Rapidement. Violemment. Ce qui avait touché les deux élèves était d'une violence indescriptible. Les battements de son cœur s'accéléraient. Elle était comme tétanisée.

Lilly se fige, comme pétrifiée par la peur et cette vision d'horreur. Un cri de terreur se coince dans sa gorge. Elle déglutit avec peine quand les paroles de Kieran lui font l'effet d'un électrochoc. Bien sûr qu'il faut les aider. Si tenter est qu'elles puissent encore être aidés. Sa baguette est fermement tenue dans son poing et elle imite le garçon, la pointant devant elle.

- "Flynn reste avec nous ! D'une voix presque suppliante. On essaie de les aider et on fait ce que tu as dis de l'autre côté. Aide nous, il faut qu'on reste ensemble !' Ensemble. Elle n'avait visiblement que ce mot à la bouche. Le seul qui lui permettait de garder un minimum espoir dans cet environnement plus que hostile. La panique commençait déjà à lui nouer le ventre. Il fallait qu'elle se ressaisisse. Et qu'elle réfléchisse.

Elle touche son petit sac de graines. Malheureusement l'environnement ne semble absolument pas adapté à n'importe quel végétal. Réfléchit Zarbi réfléchit. Entre son instinct de survie et son empathie son coeur balance. Mais un seul peut prendre le dessus dans cette situation. Alors qu'ils devraient écouter Flynn et fuir le plus vite possible, elle ne se voit pas laisser les deux élèves en proie à ces sortilèges destructeurs. Alors même qu'elle n'a absolument aucune idée de comment les aider.

Elle tente alors de lancer un "Finite Incantatem" sur l'un des deux élèves, n'ayant que peu d'espoir sur la réussite vis à vis de la puissance du sortilège subit. Elle sait de plus qu'à cette distance la chance de réussir son sortilège correctement est faible. Surtout dans ces conditions. Elle espère que le groupe aura de meilleurs moyens d'actions. Là encore le regret commençait à s'immiscer en elle sur le choix qu'elle avait fait. Mais tant pis. Ceux ci seront pour plus tard. Si elle pouvait encore en avoir. Pour l'instant il s'agissait d'agir. Rester spectatrice de cette horreur était une torture. Et bien que l'idée d'être attaqué comme ils l'avaient été, lui donne envie de pleurer, elle doit essayer de faire quelques chose.

Et puis, sur un coup de tête elle tente de lancer un sortilège au bout du couloir, à l'aveugle, espérant toucher celui ou celle qui était à l'origine de cette horreur. Elle lance alors un "Petrificus totalus". De toutes ses forces, de tout son coeur. Sans avoir réfléchi aux conséquences négatives que cela pourrait avoir.

Elle panique. Ses idées s'embrouillent. Il faut qu'elle se calme. Elle demande de l'aide. Il leur faut à tous de l'aide.

- "Si quelqu'un a une idée pour les aider c'est maintenant, sinon je suis pour qu'on suive l'idée de Flynn sans perdre de temps. J'ai pas envie qu'on se retrouve dans le même état que ces deux là." Dit-elle tout en se tenant prête à reculer vers Flynn au besoin.

Fuir. Comme un animal traqué son instinct lui hurlait de fuir.