Un silence de mort régnait dans un des couloirs de Poudlard. Aucun signe de vie à l'horizon. Ou presque. En effet, une petite tignasse blonde vénitienne s'y affairait avec beaucoup d'attention. Un petit sourire diabolique avait pris place sur le visage d'Eileen Adams. Les derniers mois avaient été calmes, beaucoup trop calmes. Il était temps que ça change. Elle n'avait pas non plus été un ange, loin de là, mais la jeune Serpent s'était tenu à carreaux. Pour y remédier, elle avait réussi à porter un seau d'eau jusqu'à ce couloir sans se faire remarquer et cela la rendit fière. Désormais, il ne restait plus qu'à trouver sa victime. Ou plutôt, que sa victime la trouve. Elle disposa le seau à l'opposé d'elle avant de se cacher derrière un mur, au coin du couloir.

La raison de ce soudain besoin d'aller à l'encontre des normes, Eileen ne la connaissait. Faire des bêtises était inhérent à sa personne et elle ne s'en lassait jamais. Que cela se traduise par détourner le règlement, ne pas obéir ou tout simplement piéger quelqu'un, elle aimait l'art de la sottise et ne se considérait pas comme une novice dans la matière. Et après tout, si cela la faisait rire, est-ce que les conséquences avaient réellement de l'importance ? N'est-ce pas l'endorphine nécéssaire pour vivre ? Dans le coeur d'Eileen, c'était une drogue.

Guettant avec attention chaque bruit qui pouvait se rapprocher du couloir, elle s'entraina une dernière fois à lancer le sortilège de Lévitation. Appris il y a peu en cours de sortilèges, il était temps de le mettre à profit et d'en faire profiter les autres. Un peu d'eau n'avait jamais tué personne, si ? Le but de la blonde n'était pas de blesser quelqu'un, que ce soit physiquement ou dans leur fierté, raison pour laquelle elle avait décidé de faire cela dans un endroit plutôt désert à un moment de la journée où peu de passages survenaient. De plus, elle avait même apporté une serviette pour aider la victime de ses folies après coup, n'est-ce donc pas là le geste de quelqu'un d'attentionné ? Doucement, elle prononça distinctement et avec détermination l'incantation magique puis elle tourna et abaissa sa baguette, le poignet souple :

"- Wingardium Leviosa !, chuchota-t-elle."

Le seau se souleva en douceur du sol, et le sourire d'Eileen, quant à lui, décolla vers le Septième Ciel. Bien concentrée, elle fit monter le seau à une certaine hauteur. Heureusement, la couleur cuivrée du récipient se fondait bien dans le décor, sinon sa supercherie ne marcherait pas. Il ne restait plus qu'à attendre quelqu'un d'assez crédule pour se laisser avoir.

Il n'eut pas besoin de longtemps pour que ses prières soient exaucées car un son de pas se fit entendre un peu plus loin dans le couloir. L'excitation secouait les entrailles de la blonde. Elle était fin prête. C'était un garçon qui avait tourné au coin du couloir. Les cheveux d'une couleur châtain, elle ne le connaissait pas mais elle reconnut les couleurs de Poufsouffle sur ses vêtements. "Pff encore plus simple.", pensa-t-elle avec arrogance. Il se rapprochait de plus en plus, ne sachant pas encore que d'une seconde à l'autre, il allait se faire arroser.

"- Avance, mon petit, conti-"

Il était proche, si proche...

Coup de théâtre.

Le garçon s'arrêta, leva les yeux vers le seau et un rictus moqueur s'installa sur ses lèvres. Le sourire d'Eileen retomba. Non, il ne pouvait pas. Pas aussi simplement. Pas après tous les efforts de la blonde. Mais il fallait croire que si. Un froncement de sourcils creusa son visage qui s'était renfermé d'un coup.

"- Bien essayé, dit le garçon à l'attention de la présence invisible de la jeune Serpentard."

Eileen sortit de sa cachette, tapant légèrement du pied avant de rediriger doucement le seau vers le sol.

"- Alors là ! C'est vraiment pas cool ! Le but était de continuer ton chemin sans lever les yeux, grommela-t-elle. Tu aurais au moins pu faire semblant, continua-t-elle sur un ton désespéré."

Et bien, il s'agissait là d'un échec cuisant. Elle était ridicule mais sa fierté en prenait un coup. Tout était ruiné, fini. Il n'y avait plus rien à faire, sa farce était tombée à l'eau. À moins que...

Toutes les actions de Chems ont été discutées par hiboux !
@Chems Daley J'espère que ça te convient.

À moins que personne ne dénonce la coupable. À moins qu’il y ait des choses à sauver de ce plan un poil léger mais loin d’être mauvais. Seulement, il n’y avait rien eu dans ce couloir pour amoindrir la vigilance du poufsouffle, rien pour retenir son attention et le faire marcher droit dans le piège. Au regard de la situation, il se retrouve donc bien incrédule face à l’audace de l’esprit malin tout juste sorti de son repaire alors qu’il est encore penché sur le contenu du seau pour s'assurer de la clarté de cette blague.

Pris en flagrant délit et elle avait la hardiesse de rouspéter. Sans trouver la moindre trace de gêne sur ce visage décidément bien contrarié, Chems se fait violence pour ne pas pouffer de rire. Il ne l'a pas en lui de faire semblant d'être offusqué alors que la situation est si loufoque.

- En quel honneur j'aurais fait ça? Là c’est de l’eau mais pour autant j’aurais pu me retrouver avec de la m... de la boue sur la tête.

Renchérit-il en remarquant la serviette, et ajoute comme on partage une confidence du bout d'un sourire sournois. « J’ai appris à me méfier c’est tout. Pas tout le monde a autant de scrupule que toi dans ce château. ».

Au résultat le plus embarrassant revenait la médaille, ce jeu savait se faire impitoyable. Fallait-il seulement que cette fillette s'intéresse aux prouesses de ses aînées chez Serpentard pour s'en apercevoir. Pour qui voulait évoluer sur ce terrain, l'école était une jungle, et face à cette aspirante honnête, le quatrième année ne savait pas si c'était lui rendre service que de réagir avec si peu de condescendance.

Il s'autorise un coup d'oeil sur le couloir désertique avant d'avancer son intention.

- Tu veux savoir comment je t'ai grillé ?

Un long soupir passa la barrière des lèvres audacieuses de la jeune Serpentard. Échec. Tombé à l'eau. Voilà ce qu'il restait de l'essai misérable de sa farce peu distinguée. Le naufrage de son idée n'étant pas déjà assez insupportable, le garçon en rajoutait une couche. La griller ? Avait-ce été donc si facile ? Est-ce que ce pauvre jeu qu'elle avait tenté de gagner montrait qu'elle avait perdu la main avant même de tirer ses cartes ?

Elle se gratta l'arrière de la tête, secouant ses boucles emmêlées et soupira à nouveau. Elle ne savait pas vraiment si elle avait envie d'entendre l'argument qui allait montrer qu'elle n'était pas faite pour cela. Elle n'avait pas envie que sa fierté soit poignardée sans douceur. À peine quelques mois qu'elle était là et voilà qu'elle ne pouvait même pas essayer de se trouver une place parmi l'élite des fauteurs de trouble. Mais dans sa tête, ses petits chevaliers de la raison lui rappelèrent bien assez tôt son jeune âge et qu'elle ne pouvait qu'apprendre en écoutant ce que l'élève plus âgé avait à dire.

"- Mmh, dit-elle en haussant les épaules."

Ses sourcils toujours froncés, elle détourna le regard en retroussant son nez, éprouvant son mécontentement. Elle croisa ses bras, accentuant son humeur. Comme c'était injuste de voir le semblant de rêve qu'elle avait esquissé se faire écrasé en une fraction de seconde. Les petits archers de sa conscience essayaient d'écraser les chevaliers mais ces derniers étaient tenaces et ne laissèrent pas son immaturité prendre le dessus. Après un énième soupir, elle finit par reposer ses yeux verts dans les iris de la même couleur du garçon. Son visage se tordit alors dans une expression plus embêtée, voire même embarrassée.

"- C'était vraiment si facile que ça ? J'avais fait attention pourtant, se plaignit-elle."

Un instant plutôt, elle ressemblait à une sale gamine geignarde mais désormais, son attitude s'était ravisé à celle d'un perdant humble. Elle pointa le mur derrière lequel elle s'était caché.

"- J'avais fait attention à bien me cacher."

Son doigt montra l'ensemble du couloir désert.

"- J'avais fait attention à ce que le couloir ne soit pas fréquenté. Crois-moi, ce n'est pas chose facile à Poudlard, ajouta-t-elle dans un murmure sarcastique."

Elle finit par pointer le seau.

"- Et en plus, j'ai choisi un seau de la même couleur que le mur. Qu'est-ce j'ai mal fait alors ?"

Il apparaît que le dilemme est rude. Elle ne cache pas son insatisfaction et l’idée même de capituler la pousse à résister face à l’offre. Ce fort caractère ne plie pas vite mais Chems reste patient, pas étranger à la frustration de manquer un coup —manifestement bâti de mûres réflexions. Malheureusement, l'imprévu peut survenir dans chaque projet, même les mieux rodés. Ici, il prend la forme d’une étourderie entre les minutieuses mesures listé par la Serpentard qui font perdre son sourire malin au Poufsouffle lorsqu’il réalise qu’il n’a pas affaire à un hameçon jeté à l’eau sans précaution. Perplexe, l’irlandais s’en gratte distraitement le menton en détaillant cette grimace de déception levée vers lui. Comment apaiser cet inassouvissement brûlant? Le quatrième année le sait bien pourtant, il n’y a pas de solution acceptable sinon celle du succès.

Dans cet objectif, l’explication ne pouvait absolument pas couper.

- On échange, il lâche subitement à l’adresse de la blonde. Viens te mettre à ma place pour voir.

Aux maux, Chems opte ainsi pour une reproduction de la scène du crime interrompue en imitant la technique adoptée par la jeune fille. Bientôt, le seau est de nouveau en l’air sous l’effet de la magie du garçon, exactement à son emplacement précédent. « Et regarde bien partout ! » il lance par dessus son épaule en trottinant déjà derrière le mur désigné par la fillette.

Pendant quelques minutes dont il compte les secondes, il reste silencieux pour ne pas lui mâcher le travail, les yeux sur les chandelles du couloir adjacent —seules sources lumineuses de la zone délaissée par les attroupements d’élèves.

C'est la cent quatre-vingtième secondes qui a finalement raison de sa fine patience tandis qu’il sort juste la tête de derrière le mur.

- Alors c’est bon ? Tu vois l’ombre ?

Sans même prendre le temps de répondre à la question de la jeune fille, le garçon se lance dans la mise en scène de celle à laquelle il avait été confronté quelques minutes auparavant pour lui exposer toutes ses erreurs. Malgré le fait qu'elle voulait savoir là où elle avait fauté, il lui était toujours difficile d'admettre qu'elle n'avait pas été à la hauteur de ses attentes mais visiblement, le jeune homme savait de quoi il parlait alors elle se laissa faire. Il s'éloigna et alla se cacher derrière le mur qui lui avait servi de planque pour son misérable essai d'arrosage inattendu. Le seau monta doucement dans les airs et sa couleur rouille se fondit parfaitement dans le décor, ce qui continuait de décontenancer la petite. Comment avait-il fait ?

"- Mais il n'y a rien. Rien de rien !, se frustra-t-elle."

Et puis là, comme le nez au milieu du visage, elle l'aperçut. La traitresse. Le Judas. La délatrice. N'importe qui aurait pu l'apercevoir. Était-elle donc si bête ? L'ombre du garçon se reflétait sur le sol telle un déserteur qui se cachait de ses crimes. Il demanda si elle l'avait aperçue. Oh oui, elle l'avait vue. Si bien vue qu'elle en eut presque la nausée devant son manque de réfléchi. Sa bouche s'ouvrit en un énorme O étonné et déçu. La preuve du méfait qu'elle n'avait pas commis était trop évidente. Elle s'avança doucement et rejoignit le garçon, penaude. Quelle erreur. Une erreur impardonnable. Elle ne pouvait pas en rester là. D'un regard rempli d'espoir, elle posa ses deux billes vertes sur le garçon.

"- Comment tu aurais fait, toi ?"

C'était presque un supplice pour elle de demander de l'aide, mais c'était une plus grande torture encore de devoir sans cesse ressasser un échec à chaque fois qu'elle penserait à sa première tentative de guet-apens à Poudlard. Alors, sa fierté s'était faite toute petite pour essayer, peut-être, d'en apprendre plus sur l'art de la bêtise.

L'ahurissement remplace la conviction insolente sur le visage de la Serpentard en un clin d'œil. Chems ne peut s'empêcher de le narguer à son apparition. « C'était quoi juste maintenant ? Tu peux répéter ? » retourne-t-il le couteau avec un air suffisant, testant les limites de sa détermination.

Mais dans tout ça, la question soulevée reste légitime. Les épines du plan de la jeune fille brûlaient toujours, haut sur le mur, hors de leur portée. Spontanément, Chems essaye d'attraper une des torches problématiques en sautant mais la fourbe le surplombait de trop loin, merci à la hauteur sous plafond interminable du château. Les yeux en l'air et le poing serré, il tape superficiellement le mur —si seulement ça aurait pu l'affaisser un peu— bourgeonnant :

- Elles sont beaucoup trop en hauteur. En retirer quelques unes aurait bien arrangé nos affaires...

Surtout celle-là juste ici, à l’intersection entre le passage choisi par la blonde pour se dissimuler et le couloir de passage qui avait éveillé la suspicion du garçon depuis son implication dans le complot. Sa lumière est la plus embêtante de toute, se diffusant seulement pour révéler les coulisses de la manigance. « Faut trouver un moyen d'en éteindre certaines. » Le regard relevé de Chems passe de la torche au seau. Et quoi de mieux pour combattre le feu que l'eau ? Quelle chance qu'ils en aient un fond juste là.

Ses yeux s'abaissèrent enfin, au même rythme que l'objet se défaisant doucement de l'emprise de sa magie.

- Tu vas devoir sacrifier un peu d'eau si tu veux aller au bout de ton idée.

Omettant volontairement de mentionner qu'il connaissait un sortilège pour en appeler tout un flot, Chems pensait que son intervention aurait le pouvoir d'amoindrir la satisfaction déjà bien entachée de la malicieuse. Il pouvait se séparer de quelques conseils mais les rênes ne lui revenaient pas. C'était mieux d'arriver à bon port sans avoir cessé de tenir la barre, surtout lorsqu'on avait prévu un voyage sans passager clandestin.

- À quel point tu maîtrises ton sort ? il demande en rapprochant le seau près de la torche cible. Tu arriverais à le basculer un tout petit peu pour laisser couler une goutte pile au-dessus de cette flamme ?

Et il la pointe du doigt quand bien même il se trouve juste en dessous et que la position qu'il a donné au seau est évidente. « Attention, faut bien viser si tu veux avoir assez d'eau pour bien mouiller le prochain qui passe » provoque-t-il la jeune fille en montrant les dents. La pression de se faire mettre au défi était une méthode qui marchait bien sur lui, mais était-ce le cas pour elle ?

Le garçon afficha un sourire insolent. Il la provoquait légèrement. Elle savait qu'elle n'avait pas été assez maligne, l'ombre du garçon le lui avait confirmé son manque d'expérience. Elle plissa les yeux à son commentaire, mais avant qu'elle ne puisse répliquer une excuse bidon sur un ton cinglant, il détourna le sujet sur les parjures de la blonde. Elle ne put néanmoins s'empêcher de pouffer en le voyant sauter pour atteindre l'une des torches. Il semblait que doucement, le jeu qui se jouait entre les deux élèves était à celui qui arriverait à être le plus persifleur envers l'autre.

Elle tourna la tête vers les petites sources de lumières traitresses et réfléchit mais le maitre de ses vices était plus rapide à la réflexion. Elle hocha la tête. S'il fallait sacrifier de l'eau pour sauver son idée, elle le ferait. Elle avait bien abandonné sa dignité pour lui demander de l'aide, un peu d'eau ne pouvait pas lui faire encore plus de mal.

"- Tu parles quand même à celle qui a essayé de t'asperger, j'espère bien que je le maitrise, ce sort !, dit-elle sur un ton railleur."

Elle était confiante. Peut-être un peu trop, c'est sûr. Mais elle ne pouvait pas se permettre de lui donner des raisons de plus pour se montrer encore plus goguenard qu'il ne l'était déjà. Elle se demanda brièvement pourquoi il ne l'avait pas fait immédiatement par lui-même mais bien vite, elle comprit qu'elle se faisait tester pour vérifier qu'elle était à la hauteur des savoirs du Poufsouffle. Elle s'étira. C'était un spectacle assez comique de voir ainsi une jeune fille sembler s'échauffer pour un marathon alors qu'il ne s'agissait que d'une simple épreuve pour montrer ses capacités naissantes.

Il la taquina à nouveau. Évidemment. Elle ne s'attendait pas à des mots de motivation, elle avait assez vite compris que ce n'était pas son genre. Pour autant, cela sembla l'enthousiasmer. Il venait au contraire d'attiser un feu naissant désirant de montrer la hauteur de son ambition.

"- Gngngn, répliqua-t-elle en roulant ses yeux. Fais attention à toi, je pourrais faire exprès de confondre les flammes avec ta petite tête de linotte."

Elle ne put toutefois s'empêcher de pouffer à nouveau. La situation l'amusait. Au final, peut-être que ce petit échec allait mener à une réussite plus grande, en s'accompagnant de souvenirs agréables. Elle reprit sa baguette et pointa le seau. Le poignet souple, elle se reprit à lancer le sort de lévitation avec succès, heureusement pour elle. Quel embarras cela aurait été de rater en face du jeune homme qui brocardait sur chacun de ses faits et gestes. Elle prit une grande inspiration, fit doucement monter le seau au-dessus des petites torches encore allumées. Plus pour longtemps. Tellement impliquée, elle sortit même sa langue de concentration. Le seau bascula à une lenteur exténuante mais quelques gouttes finirent par atterrir sur les flammes qui s'éteignirent dans un léger son grave. Eileen relâcha l'air encore coincé dans sa cage thoracique en reprenant son aise. Elle leva les yeux vers le garçon, un rictus au coin des lèvres et les sourcils dansants :

"- Impressionnant, hein ?, fit-elle, le sarcasme dans l'air."

Elle ne s'attendait pas à ce qu'il le soit, alors il fallait le devancer à son propre jeu et jouer sur l'autodérision avant qu'il ne ricane. Elle regarda le couloir perpendiculaire qui semblait déjà bien plus sombre et laissait flotter désormais un brin d'espoir dans les yeux de la Vipère. La baguette toujours en l'air, elle reprit :

"- Je pense que ça peut se faire, maintenant, non ?, demanda-t-elle."

Elle n'attendit pas sa réponse et hocha la tête, posant un poing sur sa hanche.

"- Mais oui, ça va le faire, là."

Sa voix était enjouée. Ce n'était pas étonnant : son intempérance allait pouvoir se réaliser.

Mille excuses pour ce retard...

- DIT-ELLE -il s'insurge en sautant sur le côté pour échapper à la menace de cascade au dessus de sa tête. Et il n'en a cure si il grille quelques chances d'avoir le prochain flâneur de couloir. C'était lui la tête de linotte? L'audace.

Revenant aux côtés de la blonde, les mains impatiemment fourrées dans les poches centrales de son sweetshirt, il tente bien d'un peu saboter l'extinction des torches en donnant un coup de coude dans le bras qui manipule le sceau l'air de rien -ça ne fera que moins d'eau pour la victime désignée. Malheureusement, il ne parvient pas à en faire déborder une quantité satisfaisante pour que la manoeuvre de la fillette puisse être considéré comme un échec. Il s'en mâche la joue :

- Ouais ouais... Vite fait.

Maintenant, le terrain commence à être réellement opérationnel. À la demande de la serpentard, il ouvre la bouche pour le lui confirmer, retrouvant le sourire à l'idée de ce qui se profile, plus proche que jamais de la ligne d'arrivée. Peu savait-il qu'elle n'attendait pas du tout sa réponse pour se satisfaire de son travail. Cette fille. Le sourire de Chems se crispa quelque peu. « T'es épuisante » il tranche en piétinant son chemin jusqu'au milieu du couloir de passage. À quoi bon essayer d'opposer de la résistance aux derniers détails du plan pour se donner un air agacé alors qu'il avait vraiment été prêt à les approuver deux secondes plus tôt. S'efforçant de ne pas se laisser emporter par la conviction trop précoce et contagieuse de la blonde, il s'applique à observer le cadre final avec un oeil critique. Le couloir aurait pu lui paraître oppressant si il ne savait pas la serpentard présente derrière le coin de mur. Plissant un peu plus les yeux dans la direction du sceau, il constate que rien ne passe la couverture d'obscurité. L'ombre traitresse n'est plus, aucun éclat ne rebondit sur le métal de l'objet. Et pour ne rien gâcher, le wingardium leviosa de la première année est outrageusement bon et suffisamment stable pour éliminer le risque des clapotis de l'eau ou des claquements de la anse du seau.

- O.K-ay, il s'enthousiasme en claquant une fois dans ses mains, s'autorisant enfin à croire aux chances de succès du stratagème de la jeune fille. Il prend position dans la "cachette" devenu obscure. « Bah on va voir. »

C'est un petit rire immature qui passa la barrière de ses lèvres lorsque le garçon laissa échapper sa fatigue causée par les faits et dires de la jeune fille. Épuisante ? Elle ? Quel faible mot. Elle qui était sans arrêt au pic de son énergie, elle n'essaya même pas de se défendre. Épuisante, elle l'était, ç'en était sûr. En un dernier claquements de main, le Poufsouffle signa définitivement le sort de la prochaine personne qui allait effleurer ces couloirs et Eileen trépignait d'impatience rien qu'à l'idée d'imaginer une telle chose arriver. Qu'est-ce qu'elle se sentait machiavélique...

"- Ouiii, fit-elle avec enthousiasme."

Sans la moindre hésitation, elle prit place aux côtés du garçon et, d'un mouvement sûr qui laissait à paraitre les heures d'entrainement pour maitriser le sortilège de lévitation à son paroxysme, elle fit glisser le seau dans les airs du bout de sa baguette jusqu'à au centre du couloir qui leur faisait face, de là où allait sortir leur victime. Qu'elle soit à Serpentard, Poufsouffle, Gryffondor ou encore Serdaigle n'avait pas d'importance car la seule chose qui comptait aux yeux de la fillette à écailles, présentement, c'était de ne plus se faire attraper et bien tremper le prochain passager de ce couloir déserté. Un petit rictus maléfique - du moins aussi maléfique qu'il pouvait paraitre sur le visage d'une enfant de onze ans - fit son apparition au coin des lèvres de la blonde vénitienne qui se languissait déjà de sa future action car elle savait que cette fois, cette fois ce serait la bonne.

"- Je le baisserai pas un peu ? Faudrait pas perdre de l'eau dans l'action, chuchota-t-elle."

Sans attendre, elle abaissa un peu le seau mais se ravisa rapidement. Il redevenait trop visible si elle faisait une telle chose et, pour elle, c'était maintenant hors de question qu'un nouveau traitre ne fasse partie de son plan.

"- Ouais, nan, j'ai rien dit..., dit-elle, légèrement mécontente."

Mais soudain, des pas au fond du couloirs se firent entendre. Eileen retint sa respiration. Elle fit rapidement dépasser le bout de ses yeux du mur et tout là bas, à l'orée du long passage de ses vices, une jeune fille aux cheveux bruns déambula. Pendant un instant, la Vipère faillit presque se sentir mal pour elle. Mais la satisfaction qui s'apprêtait à être était bien trop grande pour ne serait-ce que penser à culpabiliser. La fille n'avait pas l'air à l'affût, c'était la victime parfaite. Elle avança, avança et avança. Les secondes paraissaient comme des heures et l'excitation grimpait en flèche. Et alors que la proie de ses bêtises arrivait à eux, Eileen fit basculer le seau sans une once d'hésitation sur la tête de la jeune fille, l'aspergeant de la tête au pied. Ô comme la victoire est douce quand elle est dans la bonne équipe...

@Emily Baker

Jouer avec Zien, lire, dessiner, dormir, manger, arpenter les couloirs sombres en songeant à différentes choses. Telles sont les choses auxquelles je peux consacrer mon temps aujourd’hui, n’ayant pas la moindre heure de cours. Ma séance lecture dans le parc ayant fait de moi l’être vivant le plus gelé du château entier, il me tarde de retrouver la chaleur réconfortante du château, et plus encore : de la salle commune. Avant cela, une petite pause s’impose aux toilettes. Je suis glacée jusqu’au sang, si bien que j’en tremble. Je ne sens plus mes doigts, et mes dents claquent. Lire dans la neige, c’est bien beau, c’est reposant, inspirant, mais merlin ce que ça donne froid. Bras fermement croisés sur ma poitrine, au plus serré possible, afin de tenter de produire un minimum de chaleur, je déambule dans les couloirs.

Comme souvent, je fonce tête baissée, je fais au plus vite, sans prêter attention aux éclats de voix ici et là, aux chaussures dont les semelles incrustées de neige parcourent le château, au bruit que font les plumes au contact du parchemin de nombreux élèves studieux. Je fonce, tête baissée. De toute façon, j’ai si froid que j’ai l’impression de ne plus pouvoir bouger la moindre partie de mon corps. L’impression que si j’insiste un peu, je pourrais me casser un membre. Ce que je ne souhaite pas. Les couloirs sont pour la plupart plongés dans la pénombre, mais ça ne m’inquiète pas, parce que d’une part, je sais où je vais, et d’autre part, en fixant mes pieds comme je le fais, je ne risque pas de trébucher sur quoi que ce soit.

Le dernier escalier me séparant de ma destination n’est plus très loin, je n’ai plus qu’à tourner là, dans ce couloir sur la gauche, éclairé de petites bougies suspendues à une hauteur telle qu’à moins d’avoir eu recours à la magie, seul Hagrid aurait pu les accrocher. Je ne comprends d’ailleurs pas que nous n’ayons pas troqué les bougies contre les ampoules. En 2045, bientôt 2046, il serait grand temps d’évoluer un peu. Mais j’aurai tout le temps de penser à l’évolution plus tard, car mes pensées, aussi inintéressantes soient-elles sont brusquement interrompues, par la pire chose qui pouvait m’arriver à cet instant.

- AAAAAAAH ! Putain mais qu’est-ce que….?

Je suis trempée, de la tête aux pieds, inondée, ruisselante, mouillée, dégoulinante. Mon jean semble tenter de rentrer à l’intérieur de mes cuisses, mon écharpe a l’air de sortir tout droit d’une machine à laver arrêtée avant l'essorage, et mon manteau et mon pull, je préfère ne pas en parler. Mes chaussures pourraient servir d’aquarium, et mes cheveux...ils dégoulinent sous mes vêtements, et ma frange est complètement aplatie sur mon front. Après réflexion, je ne savais pas ce que signifiait “avoir froid” avant maintenant. Je ne comprends pas ce qu’il m’arrive, et je pense d’abord à Peeves. Après tout, la dernière fois que j’ai été trempée jusqu’à l’os dans un couloir, nous étions au mois de mai, et je m’étais trouvée au mauvais endroit au mauvais moment : au beau milieu d’une bataille d’eau entre Peeves et un serpentard qui n’a jamais daigné me donner son nom. Ni même dire quoi que ce soit, d’ailleurs. Je scrute les alentours, supposant que l’esprit frappeur y est une fois de plus pour quelque chose. Mais rien, il a visiblement d’autres chats à fouetter.

Je lève les yeux, il ne peut pas y avoir une fuite dans le château, c’est impossible. C’est donc...un seau, juste-là, qui lévite au-dessus de ma tête, et qui vient de se renverser sur moi. C’est pas possible. Il y a une chose dont je suis sûre : un seau rempli d’eau, ça ne vole pas. Soupirant afin de marquer mon mécontentement, mes yeux se posent sur non pas un mais deux coupables. Une tête blonde vénitienne et une autre châtain, que je reconnais très vite. Je fulmine. Que lui ai-je donc fait pour qu’il m’en veuille à ce point ?

-Chems ?! Dis-moi que je rêve. Mais qu'est-ce que vous foutez ici ? Vous êtes fiers de vous ? Je suis trempée, et totalement gelée. Par Merlin, vous n’avez rien de mieux à faire ?

Je suis furieuse. J’aurais préféré que cette mauvaise blague vienne d’un parfait inconnu, plutôt que de lui, et certes, d’une inconnue, visiblement de Serpentard. Points serrés sur les hanches, je suis fermement décidée à obtenir des excuses de leur part. Cette petite blague n'a rien de bien méchant, mais ils ne sont pas tombés sur la bonne personne. Dans d'autres circonstances, ou à une autre période de l'année, j'aurais éclaté de rire. Mais cette fois, impossible.

En espérant que ça vous convienne.