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20 févr. 2021, 18:57
L'œil de l'Ouragan  PV+ 
Alison, 2ème année
Vendredi 22 Décembre 2045, Vers 19h
Couloirs.

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Privé avec @Alyona Farrow et @Aelle Bristyle


Elle errait dans les couloirs, sans avoir vraiment de but.
Il faisait froid, même au sein du château, et son écharpe noire et jaune sagement enroulée autour de son cou ne lui permettait pas entièrement d'être isolée des attaques brutes de l'hiver.

On aurait pu la décrire ainsi : désœuvrée.
Sauf que désœuvrée, elle ne l'était pas.
Au contraire, c'est quand elle avait l'air la plus passive qu'elle était en réalité la plus active. Bouillonnante de mille pensées contenues, les doigts fourmillants d'envies à peine effleurées, les lèvres fleurissant de questions à peine formulées.

Elle aurait voulu se convaincre qu'elle était désœuvrée, qu'elle pouvait déambuler dans les couloirs en laissant librement divaguer ses pensées, qu'elles lui rapporteraient des bouquets de tournesols. Mais c'était sans compter qu'elle avait un cœur, qu'elle était hantée par des choses bien trop compliquées depuis septembre, et même avant.
Depuis le 28 Mai 2045 pour être honnête.

Un long frisson parcourut sa colonne vertébrale, la forçant à serrer les dents pour leur éviter de s'entrechoquer entre elles. Et ce n'était pas à cause du froid.

L'image douce et légèrement effacée d'Alyona s'imposa à son esprit.
Elle n'avait pas ressenti le besoin de se confier à la Bleue jusque-là. Elle avait peut-être voulu se convaincre qu'elle était là, prête à l'aider ou à parler de tout et de rien, mais qu'elle pouvait continuer son chemin sans elle. Sans que cela ne l'affecte. Ce qui était un mensonge très vilain, et très faux.

Elle replongea ses mains dans ses poches, sentant la chaleur de leur dernière étreinte se diffuser dans sa cage thoracique.
La vérité était que depuis quelque temps, elle était morte de trouille à l'idée que la Bleue mette son nom dans la fichue boîte qui trônait ironiquement dans la Grande Salle.
Elle avait essayé de se convaincre au plus profond d'elle-même que tout cela était stupide, qu'Alyona avait certainement autre chose à faire que de mettre un bout de papier avec son nom dessus dans l'urne, qu'elle tenait à sa famille, à ses amis, qu'elle n'avait pas envie d'aller à une mission suicide dans le Dominion.
Mais la crainte avait fait son chemin chaque nuit, prenant un peu plus de terrain à chaque fois, revenant et étant refoulée, par vagues.
Et ces derniers jours, les vagues commençaient foutrement à prendre le dessus.

Elle se rappelait les yeux bleus chauds, les mains douces, les cheveux couleurs flammes, leurs silences qui remplaçaient les mots, sa tête enfouie contre son épaule, leurs respirations saccadées s'emmêlant face à l'orage de juin.
Elle avait pardonné, elle avait trouvé un refuge, elle avait trouvé une raison de donner un de ses rares sourires.
C'était énorme.
Et elle avait peur. Une peur invisible, mais qui s'était logée quelque part au fond de ses yeux, transparaissant dans son sommeil agité *quand j'dors...* ou ses longues soirées passées éveillées à dessiner des spirales contre la cheminée des Jaunes.

Elle n'avait toujours pas réussi à s'en débarrasser, depuis Daï. Et ces foutus ronds infinis trouvaient toujours un moyen de ressurgir, dans un souffle de vent, une porte qui claque, une étoile cachée par un nuage ou un devoir à rendre et qu'elle n'avait pas encore relu.
Toujours, omniprésentes. Elles avaient presque étouffé tous ses autres dessins, elle qui avant noircissait des pages et des pages de visages, de mains, de regards, de sourires étranges, d'insectes trouvés au hasard dans le parc, de croquis des tableaux dans les couloirs, de Poudlard sous le soleil, le vent, la brume, la pluie, la lune. On aurait dit ces plantes parasites qui absorbent toute la vie des autres plantes aux alentours pour ne laisser que des feuilles desséchées, des troncs rassis et des fleurs mortes.

Son cœur se mit à battre plus vite. Peur s'amusait bien de ce contrôle permanent qu'elle avait sur sa personne. Tantôt, ses mains tremblaient. Tantôt, ses jambes semblaient sur le point de la lâcher.
Un pantin pitoyable entre les mains d'une Intangible.
Elle détestait ça.

Elle avait essayé de coincer la bleue avant le solstice d'hiver, pour entendre sa voix lui confirmer qu'elle n'avait pas fait quelque chose d'aussi idiot.
Mais le château était vaste, les vacances trop proches, elle trop timide de se mêler de ce qui ne la regardait pas.

Elle serra les poings.
Quelle idiote elle faisait ! Et si la Bleue, sans ses conseils, brutalement décidait d'aller avancer son rendez-vous avec la faucheuse?
Elle ne lui pardonnerait pas. Encore moins si elle était sélectionnée.

La Panique s'infiltra un peu plus profond dans ses veines, la forçant à accélérer le Pas.
Elle s'en retrouvait métamorphosée, se guidant uniquement à la vue, les oreilles bourdonnantes et se fichant bien de rentrer dans qui que ce soit qui passerait à sa portée. *Z'ont qu'à faire attention pour deux. Et pour toutes les fois où j'ai fait attention à leurs places.*
Ses pensées tourbillonnaient à une allure folle dans sa tête, ouragan qui emportait les débris de réticence qui lui restaient à poser sa question à Alyona.
*Si j'me souviens bien elle est en HDLM.*

Nulle pour retenir les prénoms, mais bonne mémoire pour les emplois du temps.
On ne pouvait pas tout avoir.

Ses talons claquèrent avec plus de force sur le sol alors que son corps se mettait à courir.
Elle ne pouvait pas se permettre de manquer la Bleue. Pas cette fois.

Elle n'eut qu'à peine le temps d'avoir peur d'être oubliée. La porte d'Histoire de la Magie se dressa devant elle.
Mais alors qu'elle reprenait son souffle, les murmures sournois reprirent leurs droits.
Une chanson lui revint en tête. Deux phrases, qui tournèrent en boucle dans son crâne, pivot de la spirale de ses pensées.

Remember, Remember,
Remember me under the sun


*Dis-moi qu'tu m'as pas oubliée...*
Dernière modification par Alison Morrow le 20 avr. 2021, 08:47, modifié 2 fois.

Je ne lâche jamais rien. Quand je commence une barre de chocolat, je la mange jusqu'au bout.

02 mars 2021, 19:57
L'œil de l'Ouragan  PV+ 
U : _ _ _ _ _ _ / _ _ _ _ / _ _ / _ _ _ _ _ _ _ _ / _ _ _ _ / _ _ _ / _ _ _ _ _ _ U _ / _ _ _ _ _ _ _ _




[TW : quelques pensées sur la mort]



— *inspiration* —

I'm always here to hold your hand, ok ? I will hold you throught the storm, and I won't even stop when the power comes back on.
inconnu.e




22 DECEMBRE 2045, 19h02,
COULOIRS, DEVANT LA SALLE D'HISTOIRE DE LA MAGIE

Alyona, 16 ans



Une journée s'est déjà écoulée depuis que j'ai été déposée mon nom dans la fente ténébreuse de cette *terrible* urne. Une seule journée, pourtant j'ai l'impression que cela fait des semaines. Penser est devenu difficile car penser signifie penser à l'urne. Or, penser à l'urne est simplement affreux. Penser à l'urne, c'est penser à la mort. À la mort des autres, la mort d'inconnus, la mort d'élèves que je croise tous les jours mais aussi ma mort — et c'est peut-être cela qui me terrifie le plus. Ma mort et toutes ces aventures que je n'aurais pas pu vivre si elle arrivait trop tôt. Plus de regards lourds d'émotion. Plus de bonheur à en faire fleurir le tournesol de mon cœur. Plus de doigts qui s'entremêlent et de moments hors du temps. Plus rien, tout simplement. Penser à l'urne, c'est penser aux Sept Lignées. Les Sept Lignées et Eva Sepulvada, ceux qui sont venus ravager notre routine si calme, paisible et douce. Ils ont construit nos cauchemars avec leur Magie noire, tissé grâce à la Mort nos peurs et nos craintes et arraché bien trop tôt à notre vie une partie de notre naïveté. Penser à l'urne rend mon corps tendu et mes jambes lourdes, comme si toutes mes pensées venaient se reposer non pas dans ma tête mais dans mon corps. Et alors, comme un piège tissé dans ma tête, une fois engagée dedans, je ne pouvais plus m'en sortir. Enfermée dans ma propre tête. Si on me l'avait dit, je ne l'aurais pas cru.

Au début, j'ai essayé de ne pas penser. Ah quelle idée foutrement stupide et inutile ! Je me suis concentrée sur cette simple idée pour tenter de chasser toutes les autres. Ne pas penser, voilà ce qui pourrait m'aider à faire fuir mes terreurs. J'ai tenté, vainement, d'effacer cette seule idée pour ne plus rien avoir à penser. Mais le seul fait de vouloir effacer l'idée consistait à penser. C'est comme une spirale infernale qui ne fait alors que se répéter à l'infini. J'essaye de ne pas penser alors je pense au simple fait de ne pas penser et continue ainsi à penser. Tout est toujours là, les pensées seront toujours là et essayer de ne pas penser c'était comme tenter de ne ressentir aucun sentiment. Alors j'ai abandonné cette idée stupide d'essayer de ne plus penser. Si j'étais obligée de penser mais que je ne voulais pas penser à l'urne, je devais m'arranger pour que mon esprit soit fixé sur une autre tâche. Oh bien sûr, cela n'a rien d'évident. Passer des heures à refouler ses pensées en se noyant dans les livres et le travail est plus désagréable que ce que l'on peut croire. Le travail devient alors vital. Toujours étudier, lire, comprendre, découvrir, être passionnée par les cours et ne penser qu'à cela. Alors, le soir, quand la nuit vient me chercher, je préfère m'enfermer dans la salle de bain du dortoir et lire, encore. C'est tellement plus simple de fixer mes pensées sur quelque chose tout le temps. Ne penser qu'à cela pour oublier de penser au reste. C'est devenu une routine. Cette journée, je l'ai passée à m'obliger à ne penser qu'au travail et à la Magie.

Puis, l'heure d'Histoire de la Magie est arrivée. L'astronomie dans l'Histoire de la Magie. Ah ! Merlin sait que je déteste l'Astronomie. Comment donc aurais-je pu me concentrer sur le cours ? Comment, par la barbe de Dumbledore ?! Aurais-je dû me forcer ? Tenter de toutes mes forces de m'intéresser au cours ? M'accrocher aux mots et aux phrases comme on s'accroche à la fine branche qui nous empêche de se faire emporter par le courant ? Ou alors, penser à papa et maman qui devaient eux aussi certainement penser aux étoiles et non à moi ? Devais-je m'obliger à m'intéresser à ce qui ne m'intéressait pas ? Non, c'était impossible. Je ne pouvais pas, tout simplement. Alors elles sont revenues, les pensées noires.

J'attrape mon sac et mes affaires. La fin du cours vient de sonner. Miss Montmort nous a distribué le travail pour les vacances. Ah, les vacances, un bon moyen de me faire penser à autre chose. J'enverrai peut-être un hibou à Grand-Mère ce soir. J'ai besoin d'air ; j'ai besoin d'elle pour me changer les idées. Comment pourrai-je passer les vacances ici alors que l'urne recrachera probablement les noms ? J'ai terriblement besoin de penser à autre chose et de fuir — oui, je dois fuir, et pour une fois, je n'en ressens aucune honte — ma routine de ces derniers temps. L'air frais et les serres pleines de beaux souvenirs de Grand-Mère sauront me réconforter. De plus, ce sont les vacances de Noël, Papa et Maman seront heureux de me revoir et peut-être que Zhenya sera là. Machinalement, je range mon encrier, ma plume et mes feuilles de parchemin restées blanches. Je ne fais attention à rien autour de moi. Les regards de mes camarades ne peuvent plus me toucher. Les paroles ne peuvent plus m'atteindre, elles glissent sur moi sans que je n'y prête attention. Je quitte la salle sans un regard en arrière, essayant comme entre chaque cours de penser à la prochaine chose que j'irai faire.

Il doit être un peu plus de dix-neuf heures. Je pourrai aller dîner vers dix-neuf heures trente ou vingt heures, ce n'est pas si important. Dehors, il doit presque faire noir. Ecco a dû rentrer, peut-être devrais-je le rejoindre dans la salle commune et lire un peu à ses côtés ? Oui, lire est une belle option. Oh, je dois aussi envoyer un hibou à Grand-Mère. Je devrai peut-être faire cela avant alors, c'est plus important. J'aurais tout le temps de lire après, quand Nyx aura déposé son voile sombre sur le Ciel et que le dîner sera passé. Décidée, je tourne à gauche en sortant de la pièce pour me diriger vers les escaliers et monter à la volière. Cependant, comme un soudain instinct ou une sorte d'évidence, je relève la tête pour regarder en face de moi.

Deux yeux d'un vert que je reconnaitrais entre mille me fixent intensément.
Sous la surprise, mon coeur en loupe un battement.
Dernière modification par Alyona Farrow le 20 nov. 2022, 15:45, modifié 1 fois.

#466962Étudiante à l'Institut de Médicomagie et des Sciences Magiques — spécialité botanique

13 mars 2021, 18:05
L'œil de l'Ouragan  PV+ 
There are worse games to play
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Peut-être que si elle avait eu la force, l'envie, le courage de le faire, elle aurait sifflé une chanson.
Elle s'était réfugiée contre les pierres froides, les laissant soutenir son corps et se presser contre ses omoplates qui commençaient à crier grâce.
Les soulageant momentanément, son corps se décolla de la paroi, aidé de son pied droit plaqué contre le mur, puis le laissa retomber légèrement, vers les rocs.
Avant, arrière, avant, arrière.
A chaque fois un petit bruit étouffé retentissait, à chaque fois ses os grognaient, à chaque fois elle maudissait le temps qui passait trop lentement.
Il ne devait rester que quelques minutes pourtant, avant la fin des cours, mais elles semblaient s'étirer éternellement, se moquant bien de son impatience et de son inquiétude grandissante. Car, quoi? Après tout, elle n'avait pas reparlé vraiment à Alyona depuis l'année dernière.
Oh, bien sûr, elles s'étaient croisées dans les couloirs comme tellement d'inconnus, elles avaient parfois échangé un regard, un sourire, certainement, mais elles n'avaient jamais Osé faire le premier Pas, se retrouver pour de vrai, ne rien dire pour laisser le silence parler à leurs places. Elles étaient platement devenues des copies dans leurs agissements de tous les Autres du château. Fades. Insipides. Effacées. Mais cela voulait bien dire qu'elles ne s'étaient pas oubliées, non?

Avant, arrière, avant, arrière.
Ses mains s'efforçaient de ralentir la rencontre entre les pierres et le frêle esquif de son corps, sans succès.
Bientôt, dans quelques grappes de secondes, les portes s'ouvriraient pour laisser passer un flot d'élèves, pressés, qui s'enfuiraient en babillant vers leurs salles communes, ou plus probablement, vers la Grande Salle pour manger.
Elle était presque persuadée qu'Alyona ne ferait pas ça. Elle l'imaginait, sa tête rousse penchée sur ses parchemins, écrivant méticuleusement les derniers mots jaillissant des lèvres du professeur. Un petit sourire s'esquissa sur ses lèvres au fur et à mesure qu'elle rajoutait des détails à cette image chimérique.
La couleur de l'encre. Le grattement de la Plume. Des fioritures autour des lettres. Des points appliqués. Ou peut-être qu'Alyona écrivait d'une façon penchée? Ou bien des lettres très rondes? Des mots serrés, minuscules, se bousculant les uns les autres, de larges majuscules qui débordaient hors du parchemin? Comment écrivait-elle seulement?
*C'est bien l'moment d'penser à ça.*
Après tout, la Rousse Bleue faisait sa vie, elle écrivait, elle respirait, elle mangeait, comme tout le monde, et surtout, elle avait peut-être fait la plus grosse bourde de sa vie en ajoutant négligemment son nom dans une boîte maudite. Ça, c'était moins "comme-tout-le-monde".

Refusant de se laisser croire que le choix d'Alyona était fait, elle se remit à attendre, lorsqu'enfin, les portes s'ouvrirent.
Elle s'arracha brutalement au mur, se dressant dans le couloir, sortie de sa carapace du mur. Elle était visible à présent, dévoilée aux yeux de tous.
Elle n'eut pas besoin de ce que l'on qualifie parfois de "temps nécessaire" pour reconnaître Alyona. Peut-être parce que l'illusion qu'elle s'était imaginée était encore imprimée sur sa rétine. Ou parce que sa détermination, qui menaçait à présent de flancher, était inébranlable. *Beau paradoxe.*

Mais la Rousse semblait aspirée dans une contemplation sans fin envers le sol. Elle se dirigeait pourtant droit sur elle, mais elle ne la voyait pas. Ou alors, elle ne voulait pas la voir? Ou alors, elle l'évitait car elle la trouvait trop collante? Trop sur son dos? Allant jusqu'à la traquer à la fin de ses cours? Insupportable, complètement folle depuis Juin, une gamine qu'elle avait rassurée comme elle avait pu mais qu'elle avait détesté dans le fond?

Sans qu'elle n'ait réussi à se fixer sur une pensée, la Bleue leva la tête vers elle.
Pendant un instant, elle resta ainsi à la regarder, un animal effarouché dont toute l'assurance s'était envolée vers des cieux meilleurs.
Serrant les mains, elle se rencogna contre le mur, trouvant un réconfort certain à sentir les pierres lisses sous ses omoplates. Il lui fallait au moins ça pour ne pas courir se réfugier dans une salle vide, et se taper la tête contre le mur pour avoir eu l'idée stupide de vouloir dissuader la Rousse, qui était libre, avait un peu de jugeote, et probablement de bonnes raisons pour foutre son nom, ou pas, dans l'urne.

Elle aurait voulu rester ici indéfiniment, se laisser tomber contre le mur, serrer sa sacoche contre son corps, se fondre dans les pierres pour voir les couloirs se vider. Peut-être qu'ainsi, roulée en boule, elle finirait par se réveiller? Car, quoi ? A présent, la fuite était impossible. Elle ne pouvait décemment pas s'enfuir. Et elle se sentait à peu près aussi prête à commencer une conversation normale que d'apprendre à parler le fourchelangue. Soit, pas.

Se forçant à regarder droit devant elle, elle reprit son petit manège, se refusant fermement de flancher, fixant quelque chose devant elle, entre les tableaux et les fissures dans les pierres. Si seulement l'un des personnages encadré pouvait lui faire un signe, justifier qu'elle laisse son regard plonger dans les méandres des peintures. Mais ils ne bougèrent pas d'un muscle, sauf pour circuler d'un cadre à un autre, laissant celui qu'elle regardait complètement vide, aussi vide que sa tête.

Elle jeta un coup d’œil anxieux vers Alyona, comme pour s'assurer qu'elle n'était pas partie. Elle ne pouvait pas partir, maintenant, n'est-ce pas?
Elle avait lu dans ses yeux qu'elle se souvenait d'elle, probablement aussi fort qu'elle-même se souvenait de la Rousse.
Elles étaient bloquées. Quelqu'un là-haut, Merlin peut-être, avait écrit cette scène, chacune de leurs respirations, de leurs hésitations, de leurs regards dérobés. Peut-être même était-ce écrit qu'elle allait s'effondrer dans les minutes à venir.

Haussant négligemment les épaules, elle se força à avoir un visage neutre. Après tout, si elle devait s'écrouler sous peu, autant ne pas laisser voir que cela allait se produire. Elle serait de toute façon à terre avant d'avoir pu prononcer le mot "quidditch". Laissons le temps faire son chemin.
Tournant lentement la tête à nouveau pour trouver le regard bleu d'Alyona, elle se sentit retenir son souffle, concentrant tout son courage et toute la fatigue et l'inquiétude de ses nuits blanches pour pousser ses lèvres à s'ouvrir et sa langue à se mouvoir.

"Salut." murmura-t-elle tout juste assez haut pour entendre le mot lui retentir dans les oreilles.
Sa voix était saccadée, un peu tremblante, parfait miroir des vents contraires soufflant dans son esprit brouillé. L'accent irlandais était prononcé, fort, déformant presque ce simple mot. *Tu parles de courage...* Songea-t-elle, amère.

Elle se força à relever la tête et à dessiner un sourire tremblotant comme la flamme d'une bougie sur ses lèvres.
Flammèche immédiatement soufflée par les orbes bleus qui s'entrechoquèrent aux siens.

Je ne lâche jamais rien. Quand je commence une barre de chocolat, je la mange jusqu'au bout.

26 mars 2021, 16:57
L'œil de l'Ouragan  PV+ 
En moi résonnent des milliers d'Échos.
D'abord si faibles comme de lointaines présences laissées à l'abandon à la bordure de l'Être ou des murmures ennuyeux qu'on chasse d'un geste évasif, les voilà devenus Tonnerre. Qui auraient cru en la puissance des échos ? Ne sont-ils pas fait que pour se répéter à l'infini ? Ils me martyrisent de leur présence et me noient par leur nombre. Je ne suis qu'une poussière emportée dans l'ouragan qu'ils forment ensemble ; un grain de sable englouti dans leur océan si puissant. Ils me laissent incapable de bouger ou de changer quoi que ce soit à ma situation. Ils Sont et je ne peux plus les chasser d'un geste sans force tant ils m'emplissent entièrement. Me voici emportée par leur puissance sournoise, incapable de changer de direction et de me battre pour sortir de leur étreinte. Je me laisse aller petit à petit. *Emportez-moi là voir le beau Monde.*
Mes Échos résonnent en Moi, laissant mon Moi se transformer en Eux.



Des Échos de pensées, tout d'abord. Des pensées éparpillées, sans lien logique, sans raison, des pourquoi par centaine et des comment par dizaine. Ensemble, ils forment une tapisserie bien colorée.
Pourquoi cette arrivée soudaine ? Ce regard m'est-il désigné ? Est-elle seulement là pour moi ? Suis-je si terrifiante pour qu'elle n'ose pas me parler ? *Chut...* Et pourquoi maintenant ? Quelque chose s'est-il passé ? Lui a-t-on fait mal ? A-t-elle pleuré depuis notre dernier échange-de-regards ? A-t-elle eu peur pour sa sécurité à Poudlard ? *Pensées paralysantes, vous m'faites mal* Pourquoi n'est-elle pas venue plus tôt ? Pourquoi n'ai-je pas été la voir ? Comment a-t-elle fait pour me retrouver et pour savoir quand et où je serais ? M'espionne-t-elle ? *Illusions persistantes* Regrette-t-elle ses paroles de juin ? Pensait-elle à moi ? *Trop-de-questions* Comment s'est passée sa rentrée ? Connaît-elle quelqu'un qui va mettre son nom dans l'urne ? Sa visite a-t-elle un rapport avec l'urne ? Et par Merlin, pourquoi... *STOP*
Mes Échos de pensées sont les plus terribles. Ils me noient sous leur poids comme les loups s'attaquant à l'arrière-train du chevreuil pour le clouer au sol et l'immobiliser ; alors, le voilà incapable de s'échapper. Je suis la proie de mes Échos de pensées et ils sont de terribles prédateurs dévastant ma conscience et mon équilibre. Tout bascule sous mes Échos terrifiants. Suis-je moi-même en train de basculer ?

Les Échos de souvenirs sont tout aussi fort. Comme des flash imprévus, ils illuminent par intermittence mon esprit de leur lumière aveuglante. Avec eux viennent toujours la nostalgie et les regrets, comme trois amis inséparables même dans les êtres. Quand mon regard se pose sur ses mains, un premier flash vient bouleverser mes sens. Je revois ses mains dans les miennes. Je ressens de nouveau le froid se dégageant de ses petites paumes encore lisses. Terrible lumière aveuglante. Viennent ensuite les souvenirs de ses cheveux épais et noirs si près de moi. Puis, le contact de sa peau froide et blanche comme la mienne. Je me souviendrai presque de son cœur battant près du mien et de l'odeur de sa peau. Un nouveau flash illumine mon esprit perdu au milieu de tous ces souvenirs. Je suis assaillie de souvenirs de cette nuit terrible. Le grondement sourd des orages semble résonner encore une fois dans mes oreilles comme un ultime refrain. Je suis sur un bateau naviguant en solitaire au centre d'une pensine. Un autre flash vient aveugler mon esprit déjà embué par le brouillard de mes souvenirs. Ses yeux verts qui me regardent semblent maintenant omniprésents face à moi. Les voilà qui occupent tout mon champ de vision et qui comblent l'espace qui nous sépare. Ses yeux sont vraiment beaux, si colorés parmi les visages ternes et les murs gris de Poudlard. J'ai l'impression qu'ils aspirent une partie de mes pensées. Est-ce seulement possible ?

Enfin, la voilà qui ouvre la bouche. Je m'attends à des explications, de longues phrases difficiles à écouter, des reproches, peut-être, des questions ou des mots plus clairs qu'un simple « Salut. ». Tandis que j'ouvre moi aussi la bouche pour répliquer, voilà que la Jaune quitte brusquement le contact visuel entre nos yeux. Je détourne donc moi aussi la tête et referme la bouche. Elle n'est pas venue là simplement pour me dire « Salut. ». Cela semble si incohérent ! Alors pourquoi ne pas s'exprimer ? Pourquoi ne rien me dire ? Certaines personnes sont si difficiles à comprendre !

Une étrange peur semblait percer dans sa voix. Mais de quoi la Jaune aurait-elle peur ? Est-ce à cause de cette crainte qu'elle est venue me voir ? *J'chasserai sa peur* Mais tout peut aussi être une question de hasard. Peut-être n'a-t-elle pas voulu me croiser mais quand cela a été fait, alors elle a préféré rester. Cependant, un hasard aujourd'hui alors qu'il y a eu tant d'autres hasards semble si improbable et étrange ! Pourquoi penser à un hasard ? Elle était là, appuyée contre le mur comme en attente de quelque chose ou de quelqu'un. Et n'est-ce pas à moi qu'elle a adressé la parole ? Alors, pourquoi chercher une raison à cette étrange rencontre, elle me cherchait pour me parler et la voilà face à moi. Ne sommes-nous nous donc fait que pour nous retrouver dans d'étranges conditions ?

Je fais un petit pas vers elle, ne serait-ce que pour que les Autres ne s'immiscent pas entre ses yeux et les miens. Je veux pouvoir la voir et comprendre. Je veux savoir pourquoi elle est venue. Tout chez elle indique une certaine peur ou angoisse. La question est donc : peur de quoi ? Certes, les raisons d'avoir peur ne manquent pas à Poudlard. Moi-même je suis terrorisée en ce moment. Terrorisée par les Sept Lignées. Terrorisée par l'urne. Terrorisée par ce que le futur me réserve et réserve aux autres élèves de ce château. Terrorisée à l'idée que certaines personnes – dont peut-être moi ! – passent leurs derniers mois à Poudlard à cause de ce *maudit* défi. Je suis terrorisée à l'idée de ne pouvoir agir pour changer les choses et de n'avoir aucun poids dans les événements. Je suis sacrément terrifiée par un tas de raisons. Alors, elle aussi doit être grandement apeurée pour venir me retrouver après six mois sans un mot.

Je repose mes yeux sur elle. Pourquoi ne veut-elle pas m'expliquer la raison de sa peur ? Je ne pourrai pas l'aider si elle ne me dit rien. Serais-je seulement capable de l'aider à vaincre sa peur ?

« Ça va ? »

Et mes océans rencontrent de nouveau ses forêts. Cependant, le bleu de mes yeux trahi inéluctablement mon inquiétude.



Ce Pas est assez différent de ce que j'ai l'habitude d'écrire. Je n'en suis pas extrêmement fière mais les Mots me sont venus ainsi.
J'espère qu'il vous plaira tout de même.

#466962Étudiante à l'Institut de Médicomagie et des Sciences Magiques — spécialité botanique

08 avr. 2021, 14:39
L'œil de l'Ouragan  PV+ 
Brumes et Pluies
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Un jeu de lumière, des ombres mêlées d'ondes.
Se perdre dans les méandres des pierres, dans leurs interstices. Les imaginer grandir, s'ouvrir, voir mentalement les arbres fleurir de ces interstices, envahir les murs, les racines soulever les pierres, les branches enlacer les tableaux.
C'était si simple de se perdre dans les rêves. Si simple, tellement plus doux, plus puissant. Oublier pendant un instant, ici, dans ce couloir nimbé de soleil, oublier les heures, les devoirs, les morts, les peurs. Retrouver l'éclat de l'Orage de juin, s'immerger dans les souvenirs.
Ne se souvenir que de la chaleur, que du réconfort contre le vacarme de l'orage qui s'estompait.

Fixer un mur vide est toujours plus facile que de contempler un regard frémissant de vie.
Les pierres étaient redevenues nues sous ses yeux.
Elle laissa tomber sa tête vers le bas, fixant le bout de sa bottine gauche, la droite tapant toujours régulièrement contre le mur. Un moyen de se persuader qu'il n'y avait pas que le silence entre elles deux. Il y avait toujours un battement fort, irrégulier, mais qui leur permettait de se comprendre.

Merlin, c'était trop stupide !
Elles... Elles, quoi? Elles s'étaient vues, elles s'étaient enlacées, elles s'étaient réconfortées, elles avaient été un bouclier contre l'orage, elles s'étaient comprises, emmêlées, dissoutes l'une dans l'autre, elles avaient rayonné, elles avaient Vécu, pendant un instant, un instant seulement, Elles avaient Vécu plus fort que jamais.
Et elles étaient à présent incapables de se dire plus de deux mots? Elles se fuyaient? On aurait dit deux êtres apeurées par leurs ombres. Ou bien était-ce justement parce qu'elles étaient des Ombres, chacune à leur façon, et qu'elles avaient peur de la lumière de l'autre?

Elle l'a vue, cette hésitation. Ce moment où les mots allaient se déverser, où elles allaient peut-être se faire du mal. Mais la Bleue a aussi flanché. Ne voulait pas être la première à faire le premier pas.

Elle se rendit soudainement compte qu'elle se mordillait la lèvre inférieure. Furieuse contre elle-même, elle arrêta d'un coup, ne voulant pas laisser trahir une autre émotion.
Un coup dans sa poitrine résonna.
Quoi? Elle dissimulait maintenant tout à l'une des rares personnes en qui elle avait confiance à Poudlard?
*Confiance, tu fais mal.*
Tu es délicate, tu es fragile, on doit t'avoir après beaucoup de temps.
Alyona... Alyona l'avait abandonnée au tout début. Puis elle était revenue vers elle, à un moment qu'elle n'attendait pas. Elle lui avait dit des mots couleur soleil, des mots couleur outremer, et elle avait senti un air nouveau s'infiltrer dans ses poumons. Elle lui avait appris la force du soleil dans la nuit, la puissance des âmes, la beauté du silence, la Grandeur des non-dits. Elle lui avait offert beaucoup, trop peut-être, dans cette salle de miroirs où se reflétait l'orage.

Elle releva la tête, orientant enfin ses yeux vers ceux de la Rousse, les dents toujours enfoncées dans sa lèvre. Un réflexe pour les empêcher de trembler. Les empêcher de s'ouvrir et de poser une question dont elle ne voulait même pas connaître la réponse.
*Est-c'que tu vas... Encore... M'aband...Me...M'aban...Hein? Est-c'que tu vas me laisser ici, seule, à avoir peur? Est-c'que tu vas trahir c'que j'ai appelé Confiance? Est-c'que tu vas faire tout ça? Est-c'que tu as choisi de détacher tes Pas des miens? Est-c'que tu l'as fait exprès? Est-c'que j'ai eu tort en Juin, de t'dire tout? Est-c'que...Tu vas...Partir? Encore? Trop loin pour que j'puisse te rejoindre?*

La bleue se rapproche, elle le voit du coin de l'oeil. Mais soutenir ce regard est trop dur. Trop dur quand on a encore trop de questions dans l'esprit.
Alyona veut probablement la sonder, la fixer, la mettre à nue. Elle y arriverait, si elle se donnait la peine d'essayer, de vraiment essayer. Mais peut-être que la Bleue a peur de ce qu'elle pourrait découvrir? Le courage de découvrir pourquoi elle était ici, pourquoi est-ce qu'elle l'avait attendue après des mois et des mois de silence, peut-être était-il trop dur à trouver?

" Ça va ? "

Elle est anxieuse, c'est trop facile de le lire dans ses yeux.
Se forçant à ne pas détourner le regard (bien que Merlin, elle en avait tellement envie!), elle resta un instant ainsi, tête contre le mur, orbes fichés dans les siens, y voyant les tourmentes de l'angoisse. Elle sentit son souffle s'accélérer sans qu'elle ne pût lui intimer quoi que ce soit.

Sa bouche s'ouvrit une fois. Deux. Mais ce n'étaient que ces inspirations qui signifient qu'on veut parler, sans pour autant laisser les mots s'extirper.
Plissant les lèvres, elle détourna les yeux pour fixer à nouveau le sol. Bien trop dur.

Puis finalement, un murmure franchit la limite entre ses dents et le Réel.

"J'sais pas."

Elle avait envie de pleurer. De lui dire que tout allait bien, qu'elle suivait son conseil, que le soleil brillait toujours, que le monde s'était vêtu de lumière depuis la rentrée, mais ce serait un mensonge énorme, tellement gros qu'il n'arriverait même pas à dépasser ses lèvres, même si elle le voulait de toutes ses forces.

Grimaçant un sourire et rejetant la tête en arrière pour fixer le plafond, ses mains se tordant silencieusement dans son dos, elle se redressa brutalement, stoppant son pied en un dernier coup plus violent que les autres comme pour se donner de l'assurance, et rétorqua
brusquement :

"Et toi? T'as quel âge, d'abord?"

C'était agressif, mais elle s'en foutait.
Bordel, Alyona, elle ne savait même pas ton âge ! T'es plus grande, assez grande pour avoir le droit de faire toutes les conneries qui te passent par la tête ! Et cela lui faisait mortellement peur, tu comprends, au moins?
Le rictus disparut brusquement, elle se décrocha du mur, empoigna les épaules de la Bleue et la flanqua contre le mur.
Ongles dans ses épaules, elle la regarda, les larmes faisant miroiter ses yeux.

"Bordel, Alyona Farrow ! Est-ce que t'as mis ton putain d'nom dans l'urne?"

Elle ficha ses orbes étincelants dans ceux de la Bleue, la forçant à la regarder, agrippant ses épaules avec la force du désespoir.
*Mais merde, j'suis conne! Si ça se trouve, elle a rien fait, elle-elle, j'sais pas, elle va croire que j'débloque, elle va me gueuler dessus et je l'aurais mérité, j'suis conne, je...*
Mais si ça se trouvait? Elle avait raison?

Je l'ai beaucoup aimé, Plume.
Et oh, doux Merlin. Je ne pensais pas qu'Alison allait réagir aussi brutalement.
Je vous laisse avec cette musique qui m'a guidée tout du long de ce Pas.

Je ne lâche jamais rien. Quand je commence une barre de chocolat, je la mange jusqu'au bout.

15 avr. 2021, 14:21
L'œil de l'Ouragan  PV+ 
*Et si elle me dit que ça ne va pas ?* L'angoisse est accrochée à mon coeur comme cette pensée est ancrée dans mon esprit. Elle m'obsède, cette terrible pensée, comme si elle était le centre de mon Moi et que je tournais autour d'elle. Cette idée vient rythmer mes réflexions, les faisant vibrer plus fort ; elles vibrent avec tant de puissance ! J'ai la sensation d'être une cuve remplie de pensées — à moins que je ne sois une jarre pleine de Maux ? — que l'extérieur secoue avec violence. Tout en moi est bousculé, secoué, brutalisé, par cette seule pensée. Elle se répète dans mon esprit inlassablement, comme le refrain d'une chanson que personne n'arrive à oublier. *Et si...* Je pourrai me noyer dans cette pensée tant elle me semble gigantesque par rapport à moi. Je suis ridicule face à cette pensée qui me malmène. Elle a tant de pouvoir sur moi ! Le simple fait de l'entendre se répéter ainsi me rend malade et me bouleverse. *... elle m'dit...* Pourtant, je me dois d'y réfléchir. Cette pensée n'est qu'une pensée, aucune phrase, quelle qu'elle soit, n'a le pouvoir d'hypnotiser et de retourner ainsi une personne — à moins que... Ce n'est qu'un ensemble de mots. Pourquoi m'abîment-ils ainsi ? *... qu'ça va...* Mais je réfléchis trop pour trouver la logique de ce problème. Ce n'est pas n'importe quel problème qu'un peu de réflexion peut résoudre, c'est une putain de pensée ! Pourquoi donc se répète-t-elle ainsi ? Pourquoi ne veut-elle pas me quitter ? Et pourquoi la réponse à cette question a tant d'importance pour moi ? *... pas ?* Si elle me répond non, ma promesse est rompue. Je n'aurais pas été là pour empêcher ce non de franchir ses lèvres. Je n'aurais été que la spectatrice de son malheur, celle qui n'a pas su être là quand il le fallait, celle qui a trahi sa propre promesse.
*Merlin*, je suis terrifiée.
Si elle va mal, comment pourrai-je aller bien ?

Je reste, quelques secondes, minutes ou heures — peu importe ! — mon regard plongé dans le sien ; le temps semble prendre un malin plaisir à s'étirer. *Et si elle me dit que ça ne va pas ?* J'aperçois, comme si les mouvements étaient plus lents et lointains, ses lèvres s'entrouvrir. Deux fois. Aucun son ne s'échappe.

Qui suis-je pour l'avoir laissé tomber durant ces derniers mois ? pour jamais n'être venue la voir ? pour ne jamais lui avoir adressé la parole depuis ce jour ? Nous ne sommes plus des inconnues ; nous n'étions plus des inconnues. Je le pensais, mais qu'en est-il maintenant ? Hier, nos regards s'évitaient, nous étions une nouvelle fois deux Inconnues séparées par le Silence et mille autres raisons qui ne valent rien. Et aujourd'hui ? Je n'en sais rien. Elle est devant moi, avec sa peur au fond des yeux, son corps appuyé contre le mur et sans m'expliquer quoi que ce soit. Aujourd'hui, il semblerait qu'elle soit venue me voir car quelque chose ne va pas, et je n'ai pas pu empêcher cette chose de faire son apparition dans sa vie. *J'aurais dû. J'avais promis.*

« J'sais pas. »

Mes pensées tanguent.
Ce n'est pas un non, mais ce n'est pas un oui. Pourtant, elle ne me réconforte pas, cette réponse. Elle ne desserre en rien l'emprise qu'a mon inquiétude sur mon coeur. Non, ces paroles ne font que renforcer cette emprise pour la rendre plus solide, plus dure, plus forte. La Jaune n'a pas dit qu'elle allait bien, ni qu'elle allait mal, elle a dit qu'elle ne savait pas. Existe-t-il une réponse plus terrible ? Le fait qu'elle ne sache pas me donne l'impression que cela ne va pas. Certes, ce n'est pas ce qu'elle m'a répondu, mais pour moi cela n'en est pas si loin. Elle ne va pas aussi bien que lorsque nous nous sommes quittées et cela me déchire le coeur. *Qu'est-ce qu'il lui est arrivé ? Qu'ai-je loupé ?* Elle rejette sa tête en arrière et je l'observe faire, la mine inquiète. Sans m'en rendre compte et comme pour me rassurer, je porte mes doigts à ma bouche et commence à ronger mon index. Pourquoi ne va-t-elle pas bien ? Depuis quand ne va-t-elle pas bien ? Est-ce ma faute ? Je n'aurais jamais dû la laisser ainsi, elle a besoin de moi.

La *ma ?* Jaune se redresse brusquement avant d'arrêter de battre un rythme avec ses pieds. Je ne dis rien, le regard braqué dans le sien, l'inquiétude paralysant mon corps.

« Et toi ? T'as quel âge, d'abord ? »

La brutalité avec laquelle ses mots m'agressent me prend par surprise. J'ai l'impression qu'elle m'attaque avec ses mots comme j'ai déjà tant entendu Maman le faire avec les gens. Elle m'attaque et je n'ai pas le courage de me défendre. Je ne veux pas me défendre. Je mérite cette violence si elle va mal. Elle n'aurait jamais eu mal si j'étais restée avec elle. Mais je l'ai laissée, et la voilà maintenant avec sa douleur qu'elle projette contre moi et que, doux Merlin, je mérite bien. Je retire ma main posée contre mes lèvres pour agripper de toutes mes forces la bretelle de ma salopette. Mes yeux laissent les siens pour venir fixer le sol.

*Pourquoi veut-elle savoir mon âge ?* Pensée déroutante. A-t-elle peur de connaître une personne plus âgée qu'elle ? Ses parents lui ont-ils dit qu'il ne fallait pas parler aux inconnus plus fort que soit ? Cette question semble stupide. En quoi savoir mon âge pourrait-il lui être utile ? Veut-elle apprendre un sort que je sais utiliser ? Oh. La solution me tombe dessus d'un seul coup, me troublant. Pourquoi n'y ai-je pas pensé plus tôt ? Elle veut savoir mon âge pour...

Ses ongles s'enfoncent dans mes épaules en même temps que celles-ci heurtent brutalement le mur. Je la regarde, les yeux écarquillés. Elle pleure.

« Bordel, Alyona Farrow ! Est-ce que t'as mis ton putain d'nom dans l'urne ? »

J'ai l'impression qu'un terrible poids s'abat sur mes épaules.
*L'urne*, cette putain d'urne. Tout tourne autour d'elle en ce moment : cauchemars, peurs, émotions, sourires, relations ; tout dépend d'elle. L'urne est comme un terrible Tsunami venu dévaster les côtes fragiles de Poudlard. Nous le voyons arriver depuis déjà tant de temps. Il est gigantesque et à la simple vue de cette vague haute, puissante et dévastatrice, les gens sont terrifiés. Nous avons cherché à l'éviter, ce Tsunami, mais qui sait empêcher une telle chose d'arriver ? Personne, c'est impossible. Le voilà qui se dresse devant nous et le temps semble s'être figé. Comment les gens réagiront quand ils apprendront que la vague ne s'est pas encore abattue sur le château ?
Elle est terrifiante, cette putain d'urne ; si terrifiante !

Ses yeux sont plongés dans les miens. Lire le désespoir dans ses iris verts fait se serrer davantage mon coeur comme si à travers mon regard, elle était venue insérer son désespoir dans mes veines. Si elle pleure, c'est à cause de moi, si elle ne sait pas comment elle va, c'est à cause de moi, si elle est terrifiée, c'est à cause de moi. Je suis responsable de tout cela, par Circé, c'est terrible. Comme si toute la douleur que je lui avais faite résonnait également en moi, je sens la peur et la détresse s'agripper plus fermement à mon esprit, leurs griffes me perçant le corps. La dernière fois aussi, c'était ma faute. Suis-je la seule à la faire pleurer ainsi ? Suis-je la seule responsable de tout son malheur ? Pourtant, je lui ai promis de ne plus jamais la laisser pleurer de tristesse et de ne plus jamais l'abandonner. Et, qu'ai-je fait aujourd'hui ? Je l'ai fait pleurer. Je suis seule à avoir provoqué ses larmes. *Ma faute* Mais qui suis-je pour lui faire cela ? Qui suis-je pour lui faire peur et la faire pleurer ? Je détourne mes yeux des siens ; je n'arrive plus à supporter son regard. Ma culpabilité est si grande que les perles translucides montent aussi à mes yeux. Je les fait disparaître grâce à plusieurs battements de paupières. Il y a dans mon cœur une douleur atroce, reflet de sa propre douleur. Une seule pensée tourne dans ma tête, bien différente de la première. *Ma faute* Le désespoir dans son regard, c'est moi qui l'ai apporté. Elle est venue vers moi inquiète et terrifiée et je ne peux lui apporter aucun réconfort. Non, pas cette fois. Aujourd'hui, c'est moi qui suis devenue le terrible Orage.

Pourtant, même malmenée par mes pensées, je me dois de lui répondre. Et la voilà, la terrible question : mentir ou dire la vérité ? Est-ce donc cela, un dilemme ? Peu importe le choix, je la perdrai. Si je mens, elle le découvrira et m'en voudra. Alors, il n'y aura plus de confiance, plus de promesse, plus de sourires-tournesols, il n'y aura plus rien. Si je choisis d'énoncer la vérité, elle me tournera le dos — qui veut s'attacher à quelqu'un qui pourrait passer ses derniers mois à Poudlard ? — et j'aurais rompu notre promesse. Si mon nom est tiré, je ne pourrai plus la soutenir et la protéger de ses terreurs, je ne serais alors pour elle qu'une connaissance qui l'a abandonnée lâchement. Merlin, je ne veux pas l'abandonner ! Je ne veux pas la laisser partir de ma vie ainsi. Je ne veux pas m'imaginer la croiser dans les couloirs sans un regard chaleureux pour elle. *J'veux pas la laisser tomber* Pourtant, ai-je vraiment le choix ? Lui mentir la rassurerait et la rendrait plus heureuse. Peut-être est-ce la bonne solution. Mentir contre nos promesses : celle que je me suis faite envers moi-même — ne plus jamais mentir — et celle faite envers elle. Mentir, c'est lâche. Mentir, c'est mal. Anaë ment, Maman ment, les moldus mentent, les autres mentent, les gouvernements mentent ; dois-je faire comme eux pour conserver l'innocence de la Jaune ? Dois-je mentir pour revoir un sourire sur son visage ? *Mentir !* Merlin, mentir ! Je ne veux pas mentir. Même si je suis coincée, prise au piège dans une impasse, avec son regard braqué sur le mien pour y chercher des réponses, jamais je ne pourrai lui mentir.
Que faire alors ?

Je pourrai fuir. Attraper ses mains, les détacher de mes épaules et me mettre à courir dans les couloirs. Je suis plus grande qu'elle et dois certainement courir plus vite. De plus, je connais mieux les couloirs et les différentes issues. Ah ! ce serait bien la pire option qui m'est offerte ! La fuir sans rien lui expliquer. Jamais je ne pourrai oser faire une chose aussi terrible.

Alors il ne me reste que la vérité, cette terrible vérité.

J'ose enfin lever mes yeux vers elle. *J'vais la perdre* Mon cœur se serre. Elle va me détester. Je l'ai abandonnée sans même y réfléchir. Comme une idiote, j'ai choisi de mettre mon nom dans cette urne sans penser aux gens que je laisserais derrière moi si mon nom était tiré. J'ai été stupide. Pourtant, je n'arrive pas à regretter ce geste, je me sentais obligée, ma conscience m'y obligeait. Je me devais de mettre mon nom, ne serait-ce que pour défendre les valeurs de Poudlard, mais encore plus pour tenter de sauver quelqu'un qui pourrait mourir au Dominion à ma place. C'était mon rôle, le minuscule geste que je devais faire pour agir et tenter de faire changer les choses. Mais cela, comment pourrai-je l'expliquer à la Jaune ? Elle ne verra dans mon geste qu'un abandon, et elle aura raison. Ce soir, j'ai l'impression de l'abandonner une deuxième fois en détournant le regard. Je n'arrive pas à supporter la détresse que je lis dans ses yeux. *J'l'ai abandonné en choisissant de mettre mon nom dans cette urne.* Ah ! Putain d'urne !

Le regard posé sur une main de la Jaune, je hoche positivement la tête. Aucun son n'a le courage de franchir mes lèvres.


Merci pour ta musique, Plume. Elle est très jolie.

#466962Étudiante à l'Institut de Médicomagie et des Sciences Magiques — spécialité botanique

01 mai 2021, 18:41
L'œil de l'Ouragan  PV+ 
Et les Masques tombèrent.
______________________________


Ses mots abrupts restaient, encore et encore dans ce qui semblait être le plus profond silence autour d'elle.
Figée devant Alyona, ses mains toujours agrippées à ses omoplates.
Le temps se dilatait, tout comme les bruits.
Ce n'est pas une de ces Absences, qui vient petit à petit, comme la Nuit lorsqu'elle chasse doucement le jour. C'est une vague totale de surdité qui la submerge, la force à s'immobiliser face à la Bleue.

Elle se sentait lourde, comme si elle était une statue.
De marbre, glacée, ses pensées s'entrechoquant violemment dans sa tête.
Et le Silence, Merlin ! Le Silence, il était pire que tout.
Il y avait bien évidemment les chahuts des Autres, au fond, des cris, des murmures de surprise, peut-être, des pas qui s'éloignaient en jetant un regard étonné à ces deux filles un peu étranges scotchées contre le mur.
Mais ce n'était rien à ses oreilles. La seule chose qui aurait pu la satisfaire en cet instant, annihiler le silence, c'était une réponse.
Réponse qui ne venait pas.
Évaporée, la simple idée qu'elle aurait pu se tromper. Qu'Alyona n'avait rien fait. *Parle plus. Parle plus, j't'en supplie.*

Elle avait envie de se relever, digne, se redresser, relâcher ces épaules qu'elle avait meurtries de ses doigts. Se relever, forte, hocher la tête comme si on venait de lui relever que le Monde ne lui ferait jamais de cadeaux. Accepter tout simplement, l'idée qu'Alyona ne voulait pas répondre. Ne pouvait pas répondre. *Même chose.*
Mais, était-ce ces yeux Bleus un peu effrayés qui la regardaient qui l'en empêchèrent?
Ou les battements sourds de son cœur, seule musique morbide cognant à tout rompre contre ses oreilles?
Ou bien, les remords qui la laisseraient haletante contre le mur, son visage qu'elle fuirait encore plus dans les miroirs, ses mains qu'elle ne pourrait que regarder avec dégoût?
Oui, si Alyona ne répondait pas, si elle s'enfuyait lâchement avant d'avoir pu uniquement connaître sa réponse *bordel, un Oui ou un Non, c'est pas long à dire, steuplé !*, elle s'en voudrait mortellement.

Alors elle restait ainsi, fixe dans le flux d'élèves, grande malgré la boule dans son ventre qui ne faisait que grandir, semblant assurée malgré la Peur qui se lisait jusqu'au plus profond de ses yeux.
Elle avait peut-être sorti les grandes phrases, les Mots qui ne se disent pas avec les parents, mais c'était des conneries tout ça. C'était juste un mur de façade pour empêcher Alyona d'aller creuser plus loin, de lui poser des questions, comme : "Depuis combien de temps t'y penses?" ou encore : "Pourquoi n'es-tu pas venue plus tôt, hein?". Ou, la pire de toute : "Mais... Je savais pas qu'tu voulais pas ! Pourquoi t'es pas venue me le dire, hein?"

Presque imperceptiblement, elle secoua rapidement la tête pour essayer de faire déménager ses pensées hors de son crâne. Mais elles étaient comme d'innombrables petits insectes agaçants : trop petits pour être chassés, trop acharnés pour s'en aller.






*CHOC.*





Elle crut un instant qu'on l'avait frappée, par derrière. Ou était-ce par devant? Oui, par devant, un immense coup dans la poitrine qui la fit chanceler.
Ses mains se détachèrent toute seule des épaules d'Alyona alors que ses lèvres se tordirent en un de ces horribles sourires lorsque les larmes menacent de déborder.

Toutes ses pensées et ses hypothèses étaient retombées, noyées dans le Néant ténébreux de la Réalité.
Un simple hochement de tête. Pas même un mot. Un simple hochement de tête comme réponse avait suffi à tuer toute idée cohérente dans son esprit.

Elle se redressa, droite malgré le creux vertigineux dans sa poitrine, à gauche, là où résidait auparavant l'espoir.
Elle sentait sa respiration laborieuse se heurter à ses lèvres à peine ouvertes, ses mains qui pendaient mollement le long de son corps, le monde qui vacillait autour d'elle.
Puis, ce fut comme une étincelle. Un petit flash, dans son esprit, un reste de volonté, qui se remit à flamboyer.
*Non.*
Un mot, un seul mot désespéré dont la prononciation lui était mentalement familière. Un seul mot auquel elle se raccrocha de toutes ses forces, l'empêchant de rejoindre le maelström de lettres qui s'embrouillait dans son crâne.

Sa tête commença à bouger sur ses épaules.
*Gauche-droite. Gauche-droite.*
Non. Non, parce que c'était impossible.
Ce ne pouvait pas être vrai.
C'était une blague, une horrible blague. Mais bientôt, la Bleue allait sourire, lui tendre la main, s'excuser, lui confier qu'elle avait juste voulu s'amuser même si cette réaction avait été stupide. Qu'elle voulait juste voir son état si elle lui disait qu'elle avait fait cette bêtise.
Mais au fond, tout au fond, dans le vide abyssal de son corps, *à gauche*, elle savait que c'était faux.
Ce serait faux, car ce hochement de tête sonnait trop vrai.

*Non. Non, non, non, non, NON !*
Elle aurait voulu reculer d'un deuxième Pas, mais se rendit compte qu'elle risquait d'être happée par les remous des Autres qui circulaient dans le couloir.
Le visage défait, la bouche déformée par une supplique muette, ses bras se croisèrent devant son torse comme pour se protéger de coups.
Des coups, muets, silencieux.
Mais non, Alyona ne cognerait pas. Elle le savait. Elle avait frappé une fois, assez fort pour qu'elle ait envie de s'écrouler par terre. Mais pas une deuxième fois. Elle en serait incapable.

Et le Silence, toujours sirupeux, ce silence horrible qui lui collait au corps et aux oreilles, obstruait tout et l'empêchait de se détourner de la tête de la Bleue.
Bravo. Oui, Bravo, Silence. Elle t'avait toujours aimé, apprécié, considéré comme un compagnon agréable. Et tu venais de lui montrer majestueusement que tu pouvais être pire que toutes les Paroles du monde.

"Non."

Le mot était sorti tout seul. Elle se serait crue incapable de pouvoir en proférer un seul, mais visiblement, elle n'était plus en mesure de contrôler ses paroles et ses gestes.
Son squelette se mit à trembler, tandis que ses mains raffermissaient leurs prises sur ses bras.

"Tu m'mens."

Sa voix était méconnaissable. Un murmure rauque qui lui déchirait la gorge un peu plus à chaque frottement d'air contre ses cordes vocales.
Cela ne pouvait pas être vrai. Cela ne devait pas être vrai. Il le fallait. Pour elle. Pour Alyona. Pour Elles deux. Ce devait être faux, la Bleue devait forcément avoir menti. Ça ne lui ressemblait pas, d'agir avant de réfléchir, hein? *Mais j'la connais pas ! C'est ça l'plus con ! C'est que, quand elle s'ra morte, je s'rai incapable de dire ce qu'elle aimait, ce qu'elle faisait, ses défauts et ses habitudes ! J'devrais me souvenirs de lambeaux de fantômes, lui inventer ce que j'ignore d'Elle, et Elle s'ra plus jamais la même ! J'vais la déformer, la changer fondamentalement, j-je...*

"S'teuplaît..."

Dernier effort pour tenter de recoller la douce ignorance dans laquelle elle avait flotté jusque là.
Vérité, tu es laide quand tu te prends à te jouer des Hommes.

Je... Je ne sais pas si je m'attendais à mieux, ou à pire.
Un tout petit reste d'ironie après avoir écrit ceci me fait dire : "au moins, Alison est restée..."
Pauvre Alyona...><

NB : Quand Aelle va se pointer en plus... J'veux pas être là ! Comment ça, c'est trop tard ? :laugh:

Je ne lâche jamais rien. Quand je commence une barre de chocolat, je la mange jusqu'au bout.

02 mai 2021, 18:03
L'œil de l'Ouragan  PV+ 
Moui, je sais : c'est le pire moment pour qu'Aelle arrive. C'est p't-être pour cela qu'elle arrive maintenant ! J'espère que sa présence ne dérangera pas (nan, je blague !).

22 décembre 2045
Couloirs — Poudlard
5ème année



Impossible d’oublier ces yeux brillants de culpabilité. Impossible également d’oublier cette silhouette qui a traversé la Grande Salle, la veille au soir. J’ai toujours pris tellement de plaisir à ne penser qu’à moi et voilà qu’aujourd’hui, je n’arrive pas à me sortir Aodren et Thalia de la tête. Ils m’auront tout fait, ces deux-là ! Aodren, j’y suis habituée. Il est mon frère. N’est-ce pas une habitude pour lui, après tout, de me gâcher la vie ? Quoi que ces derniers temps, il avait cessé de me la gâcher et voilà qu’il décide de rester à Poudlard pendant les vacances et de mettre son nom dans cette fichue urne ! Mais ce n’est pas aussi terrible que ce qu’il se passe avec Thalia. *Thalia*. Penser à ce prénom suffit pour me faire crisper les poings et pour noyer mon coeur sous une vague de haine. Impossible de la regarder sans éprouver le vive besoin, la vive envie de lui envoyer un sortilège dans la tronche. C’est pour cela que je l’évite, parce qu’elle n’en vaut pas la peine et parce que la voir me rappelle qu’elle m’a trahit en mettant son nom dans l’urne.

Cela aurait dû être aisé de les détester. La haine est une vieille amie, j’ai toujours cru qu’il était facile de détester, d’en vouloir aux autres, de nourrir ma rancœur et de passer mon temps à insulter mentalement les victimes de ma haine. Haïr, c’est facile, c’est simple ; c’est le pardon qui est plus douloureux. Pourtant aujourd’hui, j’ai mal de haïr, j’ai mal de sentir mon coeur fondre sous la brûlure de la colère. J’ai mal, surtout, de m’être laissée à croire ces dernières semaines que la vie était belle et agréable. En une soirée, Thalia a réduit mon bonheur à rien du tout. Je me suis soudainement rappelée que c’était vraiment fatiguant de vivre.

Je sors de la salle de classe en dernière, ralentie par ma colère qui pèse des tonnes et par mes pensées qui prennent des couleurs étonnantes ; tout ça est de la faute de Thalia, c’est ce que je me répète depuis hier soir et j’y crois avec tant de force que j’en viens désormais à penser que tout aurait été beaucoup plus simple si je n’avais pas rencontré cette fille il y a presque deux ans. Oui, bien plus simple.

Toute drapée dans mon obscurité et ma tristesse *j’suis pas triste, j’suis en colère*, je traverse les couloirs, bousculée par le bruit des Autres. Ils sont si nombreux à cette heure de la journée. Je ne suis pas d’humeur à les voir. Je bouscule quelques élèves pour me frayer un passage jusqu’au mur, bien déterminée à le suivre pour me donner l’impression que je n’étouffe pas au beau milieu de cette masse d’êtres-humains inconfortable. Ce qu’il y a de bien avec les Autres, c’est qu’ils se massent comme des abrutis au milieu du couloir, comme s’ils appréciaient se frôler les uns les autres. Toute proche du mur, mon avancée est beaucoup plus rapide. Bientôt, je pourrais retrouver mon dortoir et m’enfermer dans le silence. J’espère que Zikomo et Nyakane ne seront pas là. Je n’ai pas envie de les voir.

Je ne m’attendais pas à rencontrer deux corps collés au mur. Je m’arrête soudainement et il me faut un moment pour voir que, contrairement à ce que je pensais, il ne s’agit pas d’un couple comme j’ai l’horreur d’en croiser, mais bien de deux filles qui semblent plongées dans une conversation houleuse — leurs traits crispés en est la preuve flagrante. Il me faut encore un temps plus long pour les reconnaître.

« Farrow, » relevé-je d’une voix un peu étonnée en reconnaissant la Serdaigle. Et bien trop naturellement, mes yeux se détournent d’elle pour se poser sur l’autre fille — mon air étonné est remplacé par une grimace oscillant entre le dégoût et la moquerie. « Et Morrow, » poursuivis-je d’une voix acide.

Merlin. Morrow. Le couloir est rempli d’une bonne cinquantaine d’Autres et voilà que je tombe sur cette horrible personne. Comme toujours, sa tête m’agresse. C’est plus fort que moi. Cette gamine réveille des pulsions étranges, chez moi. Quand je la vois, j’ai envie de la frapper. Je ne sais pas pourquoi. Elle m’est physiquement insupportable. C’est quelque chose sur son visage, ou alors dans ses yeux, ou peut-être est-ce seulement le souvenir de notre dernière conversation. Je ne sais pas ce que je n'aime pas exactement chez elle mais le fait est que je ne l’aime pas, comme je n’aime pas énormément de choses mais pour elle c’est comme une évidence : je ne peux pas me la voir.

J’étais déjà en colère avant de tomber sur ces deux-là mais cette rencontre n’arrange rien. Je me sens toute brouillonne à l’intérieur. Toute sale de tout un tas de vilaines pensées. J’ai envie de crier et de me rouler en boule dans mon lit en même temps. Je me sens trop, c’est désagréable *et c’est d’la faute de Thalia*, me rappellent mes pensées chaotiques.

J’arrache mes yeux de l’horrible face d’Alison Morrow pour les déposer sur celle de Farrow qui me laisse de marbre au même point que celle de tous les Autres que je rencontre. La seule chose de bien que je trouve chez elle, c’est le souvenir que j’ai de notre conversation, l’été précédent. Disons qu’elle n’avait pas tellement été désagréable. Si je suis vraiment la dernière capable de discerner les émotions des gens sur leur visage, je ne peux cependant pas ignorer que ce visage-là, celui de Farrow, est bouleversé. C’est d’une telle évidence ! Automatiquement, je me retourne vers Morrow parce que là aussi, je vois une évidence :

« Qu’est-c’tu lui as fait ? »

Et peu importe que le visage de la Poufsouffle soit aussi bousillé que celui de sa consoeur Bleue. Et peu importe que je me fiche complètement de ce qu’il se passe entre elles. Je ne sais même pas pourquoi je prends la peine de poser cette question. Elle m’a échappé avant même que je prenne conscience que je n’ai aucune envie de savoir ce que Morrow lui a fait exactement, avant même que je me rende compte qu’il est bien plus facile de diriger ma colère vers cette gosse qui m’est insupportable plutôt que d’affronter la fille qui mérite réellement mes reproches : Thalia Gil’Sayan.

28 juin 2021, 15:31
L'œil de l'Ouragan  PV+ 
Je n'ose pas la regarder ; j'ai peur que son regard parvienne à faire déborder les regrets de mon cœur et que ceux-ci ne s'échappent. Je n'ose pas non plus parler ; c'est comme si mes lèvres avaient été scellées pour ne plus jamais s'ouvrir, muette pour l'Éternité. Pourtant, au fond de moi, je désire m'exprimer pour lui expliquer, tenter de lui faire comprendre, m'excuser, aussi. J'ai mille mots qui se bousculent au bord de mes pensées sans qu'aucun de parvienne à s'échapper. Prisonniers de mes erreurs. Ce sont des vagues qui s'abattent contre les côtes de mes lèvres fermées. Si puissantes, elles ne demandent qu'à s'évader pour combler le vide qui éloigne petit à petit la Jaune de moi. Pourtant, je continue à garder les lèvres closes car rien ne pourrait apaiser mes regrets et la haine qu'elle doit ressentir pour moi, j'en suis certaine. Que pourrai-je lui dire d'assez puissant après un tel silence ? Comment ne pas passer pour celle qui l'abandonne à ses yeux ? Comment chasser la colère qui doit désormais se nicher dans son cœur ? Les pardons par milliers qui s'acharnent contre le silence que j'ai installé ne pourront rien changer. Des excuses, toujours des excuses, à croire que cela pourrait réussir à tout effacer ! Pourtant, je le sais bien, ces excuses et ces pardons que je désire lui offrir, ils ne serviront à rien. Ils seront bien inutiles face au choix que j'ai fait près de cette urne. Ces genres de choses ne réparent rien, elles s'élancent et s'écroulent sans même effleurer leur cible. Alors, pourquoi essayer ? Parfois, mieux vaut ne rien dire, surtout quand la force nécessaire pour agir semble avoir disparu.

Un soupir parvient à s'échapper entre mes lèvres. Il est si léger qu'à peine sorti, il s'évanouit. *Moi aussi j'aimerais m'échapper, comme lui, mais loin de tout cela.* Je suis tellement épuisée. Épuisée par ces problèmes difficiles, cette urne qui détruit tout et tout le monde, ces nuits dépossédées de sommeil qui me poursuivent et s'accrochent à moi, cette concentration que j'essaye de garder pour ne pas me retrouver face à ces soucis, ces pensées qui ne s'arrêtent plus — flux et reflux incessants — mais qui n'apportent aucune solution et ne font que me rendre plus mal et plus désespérée. Je suis épuisée par tout ce qui se déroule à Poudlard en ce moment, cette Tempête qui semble grandir éternellement pour tous nous emporter avec elle. Épuisée par un tout ravageant. Merlin, sors-moi de là, pitié.

« Non. » *Non ?* Sa voix me tire de mes pensées. Comme un réflexe, en l'entendant, je me tourne vers elle. Ses mains ont lâché mes épaules pour venir accrocher ses bras. Son visage est déformé par la tristesse — à moins que ce ne soit la colère ? Mon cœur et mon corps chavirent. La voir dans cet état me fait mal, si mal ; bien plus mal que tout le reste. La dernière fois que je l'ai vue ainsi, c'était encore à cause de moi. Suis-je la seule responsable de ses larmes ? La seule qui brise continuellement son cœur ? La seule qui l'abandonne à chaque fois ? Alors, Merlin, pourquoi revient-elle ? Pourquoi rester près de celle qui lui fait si mal ? Peut-être est-ce à moi de l'éviter désormais. Peut-être est-ce mieux que la Jaune reste loin de moi.

« Tu m'mens. » Et sa voix, Merlin, sa voix ! *J'aimerais tellement que ce soit un mensonge, si tu savais. J'aimerais tellement remonter le Temps et te parler avant l'urne pour que tu me dissuades d'y mettre mon nom.* Mais c'est trop tard, toujours trop tard.

Un dernier son franchit ses lèvres, me remplissant de remords par le même biais. J'aurais dû mentir, ne pas lui dire la vérité, lui cacher mon acte égoïste qui lui a fait tellement mal, afficher un grand sourire et assurer que je n'avais pas mis mon nom dans l'urne. Cependant, je n'ai pas menti. Je lui ai offert la vérité parce que mentir était hors de portée pour moi. M'en voudra-t-elle longtemps ? Aurait-elle préféré que je mente ? Cela aurait été plus facile sur le coup, mais bien plus compliqué quand elle aurait appris la vérité. Alors, ai-je fait le bon choix ? Par Circé, je n'en sais rien. Tout ce que je sais, c'est que je suis en train de la perdre, ce qui est peut-être une bonne nouvelle pour elle.

Mes yeux retombent sur son visage dévasté. Suis-je vraiment celle qui a fait apparaître cette grimace sur son visage ? Suis-je à l'origine de sa peine ? Je n'ai pas pensé à elle lors de mon choix. Je n'ai pas vraiment réfléchi, j'ai agi selon ce que mon instinct me dictait. Était-ce le bon choix ? Non, certainement pas, c'était un choix stupide ; il est déjà en train de bouleverser ma vie.

« Pardonne-moi... » Mes paroles sont presque inaudibles. Elles se sont échappées dans un souffle, sans que je ne puisse les retenir. Peut-être est-ce son visage qui, après m'avoir tant remué, a descellé mes lèvres ? À moins que ce ne soit son regard, miroir qui fait grandir ma culpabilité ? Peu importe, les mots sont sortis maintenant. J'aimerais tant qu'ils s'échappent encore maintes fois. Peut-être que si je lui disais des milliers de fois, elle comprendrait ma douleur ?

Je détourne une nouvelle fois le regard. Cependant, cette fois-ci, il ne se pose pas sur la main de la Jaune, mais sur quelqu'un d'autre. *Bristyle !* Un éclat de surprise brille dans mes yeux quand je la reconnais. *Mais, par Merlin, que nous veut-elle ?* Je n'ai pas le temps de me poser une autre question car sa voix brise le silence tout juste installé. Étrangement, je me sens mal à l'aise ainsi, comme une enfant surprise en train de commettre une erreur. Que fait Bristyle ici, arrêtée pour nous observer, nous et nos visages dévastés ? Je me redresse contre le mur, comme si j'avais besoin de faire bonne figure face à Bristyle et de montrer que je n'étais pas une gamine surprise au mauvais moment. Enfin, je la dévisage de mes yeux remplis de questions, tentant de faire abstraction des remords qui font balancer mon cœur, mais c'est bien difficile.

Bristyle se retourne vers la Jaune à mes côtés. Aussitôt, son regard semble se transformer, ce qui ne fait que m'étonner davantage. *Elles se connaissent !* Aelle prononce le nom de la Jaune avec une acidité palpable qui reflète bien le dégoût affiché sur son visage. Pourtant, ce n'est pas ce détail sur lequel mes pensées s'accrochent ; peut-être s'y accrocheront-elles plus tard. *Morrow* Son nom tourne en boucle dans ma tête tandis que je me tourne vers elle. Morrow. Alison Morrow. Merlin, j'avais oublié son nom depuis tant de temps ! Il s'était effacé de ma mémoire si brutalement — je déteste quand ma mémoire me joue ce tour — et le voici qui ressurgit grâce à Bristyle. C'est si inattendu ! Alison Morrow. Il est doux, ce nom. C'est agréable de le retrouver, c'est comme si je redécouvrais Alison. Une pointe de bonheur assez improbable vient me réchauffer délicatement, à croire que ma culpabilité, mes remords et ma surprise ont disparu. Alison Morrow. Merlin, je le promets, ce nom-là, je ne l'oublierai plus.

Pourtant, je n'ai pas le temps de savourer la douceur de ma retrouvaille. Je dois me concentrer sur deux détails bien plus importants : Alison et Bristyle se connaissent et ne semblent pas s'apprécier. Que s'est-il passé entre elles pour en arriver à un dégoût comme celui-ci ? Aelle a-t-elle fait du mal à Alison ? *J'espère pas...* La question se retourne étrangement dans mon crâne. Alison a-t-elle fait du mal à Aelle ? Non, c'est évident. Pourquoi Aelle se serait-elle arrêtée sur son chemin pour parler à Alison si celle-ci lui avait fait du mal ? Enfin, Alison ne ferait pas de mal à Aelle, celle-ci est bien plus grande et je suis sûre qu'Alison ne ferait pas de mal à un véracrasse. Et puis, Merlin, c'est Aelle Bristyle ! Il est facile de la déranger assez pour s'attirer son dégoût ou sa colère, Chu-Jung l'avait vite compris.

La question de la grande Jaune confirme mon hypothèse, à savoir qu'il s'est bien passé quelque chose entre Alison et Aelle. Sinon, pourquoi Bristyle poserait-elle cette question en se tournant vers Alison ? Elle part du principe qu'Alison est responsable de l'état dans lequel elle et moi sommes. Or, si elles ne s'étaient jamais parlé avant, pourquoi Bristyle aurait-elle pensé cela ? La conclusion est donc évidente. Pourtant, les questions semblent se faire plus nombreuses dans mon esprit. Que s'est-il passé entre elles ? Quand cela a-t-il eu lieu ? Se connaissent-elles bien ? Pourquoi Aelle semble détester Alison ? Pourquoi pense-t-elle qu'Alison est responsable de tout cela ? Soudain, je me rends compte que je ne les connais pas assez pour émettre des théories et comprendre. Bristyle n'est qu'une autre élève de mon âge que je croise depuis mon arrivée à Poudlard. Je ne connais d'elle que ce que j'ai pu voir, ce que notre courte conversation m'a appris et les rumeurs qui courent à son propos ; c'est-à-dire peu de choses. Je ne sais pas non plus qui est vraiment Alison. D'ailleurs, je n'aurais jamais pu prévoir qu'elle irait me retrouver aujourd'hui, tout simplement parce que je ne sais rien d'elle, ni qui je suis pour elle, ni qui elle est. Je nage dans l'inconnu et cette brusque prise de conscience me fait terriblement peur. Je déteste l'Inconnu ; moi je vis pour Comprendre, et là je ne comprends pas.

Si je le pouvais, j'aurais reculé, mais le mur est déjà derrière moi. J'aurais aimé sortir de cette zone qui entoure Alison et Aelle pour avoir une autre vision d'elles, une vision de l'extérieur et non de l'intérieur. Peut-être aurais-je pu comprendre. Cependant, de là où je suis, je ne peux pas bouger ni les regarder comme si j'étais juste une spectatrice. Alors, je me tourne moi aussi vers Alison, une nuée de questions dans le regard. *Explique-moi, par Merlin, je dois comprendre.* Un simple regard me suffira s'il exprime quelque chose de particulier. J'ai besoin d'indices pour saisir l'inconnu. Est-ce que tu m'en offriras, Alison ?


Je suis navrée, ce retard est terrible.

#466962Étudiante à l'Institut de Médicomagie et des Sciences Magiques — spécialité botanique

28 juil. 2021, 19:34
L'œil de l'Ouragan  PV+ 
Les souvenirs, tout comme la Colère,
Renaissent de leurs cendres.

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Elle expira et inspira plusieurs fois, lentement, pour se calmer.
Peu à peu, son front se détendit imperceptiblement. Ses paroles faisaient sens à l'intérieur de son corps, l'apaisaient, la persuadaient. Seul le ton trop brisé ne parvenait pas à effacer ses doutes. Pourtant, une hypothèse se démarquait des autres.
Bien sûr, c'était la seule solution.
Alyona Farrow voulait jouer.

Elle calma tant bien que mal les battements affolés de son cœur, qui semblait décidé à s’échapper de sa poitrine, et attendit.
Car bien évidemment, il ne lui restait que ça à faire.
Attendre que le miroir du mensonge se casse, que la Bleue lui offre un grand et beau sourire, ou un carnet de dessin en couleur comme celui d'Inconnue le 28 mai, avec les mots « ahah, je t’ai bien eue !!! » à l’intérieur.

Elle sentit le sournois espoir s’infiltrer comme un poison dans ses veines, doux-amer, hésitant encore entre se réjouir et fondre en larmes.

Une autre situation vint fleurir dans son esprit. Une scène d’été, qui s’opposait à celle-là, en plein cœur de la saison froide. Elles avaient déjà été aussi proches, même plus. Et ce qui s’était produit dépassait l’entendement.
Elle ferma les yeux pendant quelques secondes, les rouvrit sur le visage toujours bouleversé d’Alyona.

Elle ne comprenait pas. Elle ne voulait pas comprendre.
Enfin, merde ! Les secondes étaient passées, elle pouvait mettre fin à sa blague nulle ! *Qu’est-ce qu’elle attend, par la barbe de Merlin ??!*
Un air grave se peignit sur son visage, faisant à nouveau se froncer ses sourcils et trembler ses mains.
Elle ne comprenait pas.
Pourquoi est-ce qu’Alyona *Pourquoi Farrow. Plus Alyona.* s’obstinait dans sa blague ? Pourquoi est-ce qu’elle ne voulait pas y mettre fin d’un clin d’œil joueur, pourquoi est-ce qu’elle ne voulait pas l’entraîner plus loin, près du lac ou du soleil (elle s’en moquait), pourquoi est-ce qu'elle restait bêtement figée là, à attendre que le temps passe ? Hein ?
Elle ne comprenait pas. Elle ne comprenait pas. *J’comprends jamais rien, merde à la fin !*

Son regard s’était durci.
Sans le savoir, sans la reconnaître pour une fois, c’était la panique qui avait remplacé l’espoir. Le sale espoir. Elle le haïssait à présent. Elle voulait que tout s’arrête car non, dix mille fois non, infini de fois non, Alyona Farrow n’était pas assez stupide et naïve pour lui faire gober qu’elle avait mis son nom dans l’Urne, qu’elle espérait être choisie, et qu’elle l’avait bien sûr fait pour le bien de Poudlard. Ce n’était pas l’Alyona qu’elle connaissait, ce n’était pas sa Rousse Bleue, ce n’était pas elle, pas du tout, même pas son ombre, même pas les résidus de sa respiration.
*Mais qu’est-ce que j’en sais, d’elle, au fond ? On s’est même pas vues beaucoup ! Qu’est-ce que j’en sais d'sa couleur préférée ? De c'qu’elle aime lire ? Du gel douche qu’elle utilise pour se frotter la peau ? De ce(ux) qu’elle haït ? Qu’est-ce que j’en sais, moi, la Gamine qu’elle a vu trois fois et qu’elle a rassuré ? Hein ? À quoi je sers moi, dans tout ça ?*

Les vagues de la panique déferlaient sur son cœur qui se remettait à battre trop vite, trop fort, de manière trop désordonnée. Ses pensées formaient un raz-de-marée qui engloutissait le peu de raison qu’il lui restait.
Panique, elle avait ton goût acide dans la bouche.

Elle ne pouvait plus rien faire.
Elle restait plantée là, les yeux écarquillés, à attendre que la mer se calme (car elle se calmait toujours, après l’ouragan, n'est-ce pas ?), à attendre un sourire, des mots, des œillades tranquilles, des mains-papillons qui sauraient comment la rassurer et comment rattraper le temps perdu à se côtoyer et non pas à se connaître.

La bouche s'ouvre, son cœur cogne brutalement contre les parois trop petites de son corps. Sûr que si elle le laissait s'évader, il ne reviendrait pas de sitôt.
Pendant ce qui lui semble être une éternité, elle retint sa respiration, bloquant tout l'air du couloir dans ses poumons, les gonflant à en crever, les yeux noyés d'Espoir, tellement brillants qu'ils en deviennent effrayants, les mains crispées de toutes leurs forces à ses vêtements, ne voulant pas les lâcher.
Le Temps semble avoir suspendu son vol.

« Pardonne-moi... »

Ses poumons se vidèrent d'un coup. Elle se sentit perdre pied, à regarder sa Rousse Bleue, à essayer de comprendre le sens de ses mots parce que ce qu'ils signifiaient était bien trop dur pour être entendu, pour être accepté, pour être toléré.
Elle secoua la tête, lentement, puis s'arrêta.
Plus rien dans sa tête, si ce n'était cette foutue phrase, cet aveu malheureux, ce soupir désolé.
Et ils tournoient, ces deux pauvres mots, ces petits riens qui ne veulent pas s'en aller, qui se sont accrochés fermement dans sa tête et provoquent joyeusement un bordel sans nom à l'intérieur.

« Qu’est-c’tu lui as fait ? »

Électrochoc.
Elle n'avait pas besoin de se retourner pour découvrir à qui appartenait cette voix, cette voix de Février, qui l'avait coincée dans les dortoirs et qui lui avait promis de la retrouver pour la saccager, mettre en pièces ce qui lui restait actuellement de bon sens, parce que tout le reste avait foutu le camp.
*La Grande.*

Elle pivota sur ses talons, les yeux sombres, le visage fermé. Ses bras retombèrent le long de son corps, sa main droite alla nerveusement caresser le bois de sa baguette.
Parce que La Grande, elle ne pouvait pas la voir en peinture. La Grande au renard bleu et à l'égo surdimensionné, la Grande dont la taille était largement dépassé par son égoïsme, La Grande qui adorait certainement détruire tout ce qui passait à-côté de sa main par les Mots ou les poings.

"Dégage-tout-d'suite."

Elle avait craché ces mots avec toute l'acidité dont elle était capable, toute la rancœur qui hibernait dans sa poitrine, tous les souvenirs qu'elle avait refoulé, toute la colère attisée par le souvenir de ce que La Grande au renard lui avait sorti ce jour là.

"Ce-sont-pas-tes-putains-d'affaires."

Après tout, qu'est-ce qu'elle en avait à carrer, la Grande, de ce qu'il se passait dans le couloir ? Des tourments des Autres, qu'est-ce qu'elle en avait à faire ? Elle devait avoir les siens, non ? Ils ne lui suffisaient plus, c'était cela ? Elle devait s'approprier ceux des Autres, les remuer, les faire crépiter, puis les regarder exploser en gerbes de flammes ?
Alyona était derrière. Alyona et sa connerie grande comme Poudlard.
Mais en cet instant, elle s'en moquait, tournant catégoriquement le dos à la Bleue.
La Grande était venue la provoquer, elle en était certaine. Et elle allait se faire une joie de lui prouver que des fois, mieux vaut passer son chemin sans dire un mot.

Plumes, j'hésite entre être fière de voir que pile un mois s'est écoulé et en être terriblement navrée.
Enfin, la réponse d'Alison est là. Plume d'Alyona : ouch. Je ne sais pas ce qui se serait passé si Aelle n'était pas arrivée, et je crois que je peux la remercier pour cela. Au moins, Lil a une autre cible en mire. Et puis, faute avouée, faute à-demi pardonnée ? :unsure:
Plume d'Aelle : Dis... Pourrais-tu ne pas trop me l'abîmer ? J'ai écrit après cette Danse, et j'aimerais bien ne pas avoir à enterrer ma Gamine... :roll:

Je ne lâche jamais rien. Quand je commence une barre de chocolat, je la mange jusqu'au bout.