Cela fait maintenant quelques jours que tu es de retour à Poudlard et, avec la rentrée, tu n'as pas vraiment eu le temps de retourner jouer un peu de musique en salle de répétition et tu comptes bien te rattraper aujourd'hui. La veille, tu as disputé un duel avec Lydia, une Serdaigle de seconde année et, aujourd'hui, tu avais besoin de te vider la tête. Heureusement, la plupart de tes devoirs sont faits et, au niveau de tes responsabilités, tout va bien pour le moment, tu peux donc consacrer un petit moment rien que pour toi sans avoir un seul remord.

En ce dimanche après-midi, te voilà donc en train de rejoindre assez rapidement le quatrième étage, on voit bien que tu as envie de jouer quelques notes au piano. Evidemment, tu as pu en jouer un peu pendant les vacances puisque vous en avez un chez toi mais tu dois avouer que la salle de répétitions t'a bien manquée, surtout que tu as un peu négligé ces petits moments avant les vacances, en grande partie par manque de temps et par fatigue. Tout juste arrivée devant la pièce, tu ouvres doucement la porte et la refermes un peu plus rapidement, contente d'apercevoir que la salle est inoccupée. Tu poses tes affaires – ton cahier avec tes propres productions, une plume, de l'encre et un cahier de partitions que tu as reçu à Noël de la part de ton frère – sur le piano, puis tu t'assieds et commences par faire quelques gammes pour te réhabituer à cet instrument qui n'est pas tout à fait le même que celui qui se trouve chez tes grands-parents.

Faire ces quelques échauffements te rappellent tout le parcours que tu as fait depuis que tu as appris à jouer du piano avec ta maman. Dire qu'il y a quelques années à peine, tu devais avoir un cahier avec ces mêmes gammes pour t'en souvenir et ta mère se chargeait de t'indiquer les endroits où te faisais des fautes et, là, tu te débrouilles toute seule, sans cahier et à l'oreille. D'un coup, ton regard, rivé sur tes mains, s'emplit de fierté.

Une fois que tu retrouves tes marques, tu attrapes ton nouveau cahier de partitions et tu choisis un morceau parmi les premiers pour le jouer. Ce sont ceux que tu as commencé à travailler lors des vacances, dès le lendemain de Noël, et ce sont aussi les plus simples du cahier, cela te semble donc le plus logique d'en choisir un parmi ceux-ci. Dès que tu as fait ton choix, tu commences par le jouer à ton rythme et tu fais de ton mieux pour éviter de faire des fausses notes.

Après un bon quart d'heure, ce premier morceau semble être maitrisé, tu prends donc le temps de le jouer, de plus en plus par coeur à force d'en avoir lu la partition et d'avoir mémorisé la position de tes mains. Tu esquisses un large sourire, ravie d'avoir pris le temps de venir jusqu'ici aujourd'hui. La musique est une grande passion pour toi, cela te permet de te libérer autrement qu'en parlant et en laissant parler ta créativité et cela te fait beaucoup de bien. Cela est d'autant plus vrai lorsque tu as la satisfaction d'avoir réussi à maitriser un morceau, tout comme maintenant, alors que tu es en train de le jouer.

Nous étions dimanche, j'aimais bien les dimanche à Poudlard, c'était le jour pour apprendre de nouvelles choses, faire de nouvelles rencontres, ou simplement prendre le temps d'observer les alentours et les élèves. Aujourd'hui, je n'avais rien de prévu au programme, j'avais simplement l'intention de me laisser porter par le destin.

Ce matin là, je m'étais levée relativement tôt sans vraiment savoir pourquoi. J'avais simplement ouvert les yeux. La chambre était silencieuse alors j'avais pris soin de ne pas faire trop de bruit en me levant puis, j'étais directement partie en direction des douches. J'étais ensuite partie en direction de la grande salle pour prendre un bon petit déjeuner copieux. Il était assez tôt et la grande salle était pratiquement vide mais, ce n'était pas plus mal pour se réveiller en douceur.

J'étais ensuite retournée à mon dortoir pour me brosser les dents avant de me rendre à la bibliothèque. La bas, j'avais terminé mes devoirs et appris quelques leçons. J'avais passé ma matinée entre les quatre murs de la bibliothèque à me débattre avec mon devoir de sortilège mais j'avais finalement réussi à en venir à bout pour mon plus grand plaisir. J'espérais que la professeure de sortilège verrait mes efforts et mon envie de réussir malgré mes difficultés. J'en avais marre d'avoir des notes basses en théorie et pas trop trop mal en pratique. J'avais l'impression de ne pas réussir à mettre de mot sur mes actions, c'était frustrant.

Après cette matinée plutôt productive, j'avais décidé de déambuler dans les couloirs de l'école. J'avais fait le tour du rez de chaussé mais il n'y avait rien de bien intéressant... J'avais alors décidé de monter dans les étages, je passais devant les différentes salle de classe qui étaient fermées puis, je me retrouvais rapidement au deuxième étage. Je passais devant les toilettes abandonnés mais je ne pris pas la peine de rentrer à l'intérieur. Je voulais faire quelque chose d'intéressant pour occuper mon après midi alors hors de question pour moi de passer une après-midi assise sur le trône des toilettes abandonnées.

Alors que j'étais au quatrième étage, un son résonna dans mes oreilles. C'était plaisant et agréable, j'avais perdu l'habitude d'entendre de la musique ailleurs que lorsque la chorale de l'école donnait un concert. Ici, aucun appareil électrique moldu ne passait alors les réveilles en musique je pouvais les oublier. Je trouvais ça dommage. Alors, attendre ce son était pour moi un moment de bonheur. Je me laissais guider par le son jusqu'à arriver dans une pièce qui semblait être une salle de répétition. A l'intérieur il y avait plein d'instrument de tous types et il y avait là une brune qui jouait du piano. J'entrais discrètement dans la pièce en attendant qu'elle termine son morceau. Puis, alors qu'elle était concentrée sur son morceau je la reconnu. Il s'agissait de Lili Cooper, la préfète de Serpentard. Je l'avais rencontré l'année dernière alors qu'elle n'était pas encore préfète. Je lui avais d'ailleurs prêté un livre.

Ne voulant pas la déranger, je pris place non loin du piano en attendant qu'elle termine de jouer son morceau. Je fermais les yeux et me laissais bercer par le son enivrant qui se dégageait du piano. Je m'imaginais dans un lieu calme et apaisant, la montagne.

Lorsque tu fais quelque chose, tu es du genre à donner le meilleur de toi-même et à ne pas penser à autre chose dans ces moments-là, ou du moins à te poser moins de questions que d’habitude. La musique ne fait pas exception à ce trait de caractère qui est tien, d’autant plus que, quand tu joues, tu ne penses à rien d’autre qu’à ce que tu joues, ce qui est plutôt rare au quotidien pour toi. C’est pour cette raison que tu n’as pas remarqué qu’une élève est entrée dans la pièce. Pourtant, tu l’as déjà vue puisqu’elle fait partie de ta maison et tu lui as même déjà parlé mais rien ne peut te déconcentrer lorsque tu joues un morceau, du moins tant que la personne en question est silencieuse comme l’est Kelly actuellement.

Tes doigts glissent sur les différentes touches du piano et ce, jusqu’à ce que tu joues le dernier accord. Une fois que tu as fait résonner les dernières notes, tu ramènes tes mains le long de ton corps et tu fermes les yeux, comme pour apprécier pleinement le moment que tu viens de vivre. Cela peut sembler bête comme tout mais la musique te fait vraiment du bien et t’apaise. Lors de ce moment, tu apprends aussi à être satisfaite de toi-même : après un bon moment à avoir travaillé le morceau, tu le maitrises suffisamment pour le jouer du début à la fin et ce, sans accrochage. Tu as parfois du mal à te dire que tu peux être fière de ce que tu fais alors tu prends le temps de te rendre compte de ce que tu as accompli aujourd’hui, musicalement parlant.

Tu rouvres les yeux et retournes à la réalité en regardant autour de toi. Tu sursautes de surprise lorsque tu aperçois Kelly et tu te tournes vers elle, prête à engager la conversation avec elle, bien que tu sois un peu déboussolée de la voir tout d’un coup non loin de toi.

- Oh, coucou Kelly ! Je ne t’avais pas entendue arriver alors j’ai continué comme si j’étais toute seule.. Désolée.

Tu la regardes un peu embarrassée et c’est à ce moment précis que tu te demandes depuis quand elle pourrait être là à t’observer silencieusement. Tu espères que ce n’est pas depuis un long moment quand même, tu t’en voudrais de l’avoir ignorée involontairement pendant tout ce temps.

- Qu’est-ce qui t’amène ici ? Tu joues de la musique, toi aussi ?

Ce n’est pas la première fois que tu rencontres une camarade dans cette pièce et tu te demandes si cette fois aussi, tu auras l’occasion de jouer un peu avec Kelly, comme tu as déjà pu le faire avec d’autres élèves. Le problème, c’est que tu ne sais absolument pas si Kelly joue d’un instrument ou non.

Je venais de faire sursauté Lili, je ne voulais pas lui faire peur, je souhaitais simplement ne pas la déranger et l'écouter. Elle faisait de la belle musique, une musique que j'appréciais particulièrement, j'étais transportée dans un autre monde lorsque je l'écoutais. Les notes venaient jusqu'à mes oreilles et j'oubliais presque tout ce qui m'entourait, elle avait réussi à me transporter avec elle dans son voyage.
Pourtant, elle s'était excusée, comme si je n'avais pas apprécié ce moment. C'était plus à moi de la remercier ou de m'excuser de l'avoir dérangé dans un moment si précieux, si personnel.

- Non, ne t'excuses pas ! C'est plutôt à moi de m'excuser, je t'ai fait sursauté et je t'ai interrompu dans ton moment. Mais.. Cette musique que tu jouais... Wahou, elle m'a transporté et je n'ai pas pu me résoudre à quitter la pièce.

J'étais tout de même surprise qu'elle se souvienne de moi, de mon prénom. Je ne pensais pas, j'avais tout de suite pensé qu'elle ne se souviendrait pas de moi. Et, je ne lui en aurais pas voulu, je me serais présenter de nouveau et j'aurais compris. Après tout, elle est préfète et ne peut pas se souvenir de tout le monde.

- Je n'avais rien de spécial à faire aujourd'hui alors je vagabondais dans les couloirs mais je te promets que je n'ai pas fait de bêtise ! Je cherchais juste une activité faire, je te le jure...

Est ce qu'elle allait croire que je cherchais à faire une bêtise ? Non, je commençais à paniquer, je sentais mes joues devenir rose, ma respiration s'accélérais. J'avais tous les signes du coupable alors que je ne l'étais pas. Pas de chance.

- J'étais dans les couloirs et j'ai entendu le son du piano alors j'ai voulu d'ou ça provenait. En entrant ici je t'ai vu alors je me suis assise pour t'écouter jouer d'ailleurs, tu joues vraiment très bien ! Malheureusement non, je ne sais pas jouer d'un instrument. Je suis plutôt nulle pour tout ces trucs... Je ne suis pas du tout créative ou quoi que ce soit. C'était quoi le titre de la musique ? C'est de toi ?

Je me demandais si le talent de Lili lui permettait également de créer, d'inventer de nouveaux morceaux. J'aurais voulu avoir un tel talent, pouvoir m'évader en interprétant de nouvelles musiques, peut être même poser ma voix dessus. Dans la salle de bain, quand j'étais seule, j'aimais jouer à la star et me prendre pour une grande chanteuse. Malheureusement, je n'avais jamais osé pousser la chansonnette devant une personne, un public. C'était impossible pour moi, j'avais peur, j'avais honte, c'était l'un des pires sentiments au monde pour moi. C'était comme se jeter du haut de Big Ben sans élastique, sans parachute. IMPOSSIBLE. Peut être qu'un jour, j'aurais le courage de me livrer, peut être que j'aurais pu faire ça devant Carry... Aujourd'hui ce n'était plus le cas, aujourd'hui Carry n'était plus q'un lointain souvenir, une image, une voix, une pensée.

Tu souris lorsque Kelly te répond et t’explique les sensations que lui a fait vivre ton morceau et tu es sincèrement touchée par ce qu’elle te dit : tu joues de la musique depuis longtemps donc tu commences à savoir quelles intentions tu veux transmettre en jouant et comment t’y prendre mais tu as du mal à te dire que tu y arrives déjà, du moins suffisamment pour que quelqu’un d’autre se sente concerné par le morceau que tu joues. Lorsque tu interprètes un morceau, tu fais toujours de ton mieux pour te donner à 110% et voir que cela paie et que cela est remarqué par une personne extérieure, même si ce n’était pas le but, t’aide à te dire que tu dois continuer sur cette lancée.

Tu vois que la Serpentard s’emporte un peu en répondant à ta question mais tu fais en sorte de la stopper net pour éviter qu’elle ne pense qu’elle va avoir des ennuis, surtout que ta question était complètement innocente : il faut croire qu’être préfète pèse bien dans la balance et peut changer la donne, même pour une question de ce genre.

- Hé, t’inquiète, je sais que tu ne faisais rien de mal, je te demandais juste comme ça !

Elle t’explique ce qui l’a menée ici et tu l’écoutes attentivement. Tu apprends également qu’elle ne sait pas jouer d’un instrument puis la deuxième année te pose des questions liées à la musique. Ce qu’elle ne sait pas, c’est que tu pourrais littéralement lui faire un exposé sur la musique tellement cela te passionne mais heureusement, ses questions ciblées vont t’éviter de trop divaguer.

- C’est La Suite enchantée, de Musidora Barkwith, une musicienne sorcière du 16ème siècle. Enfin, c’est la version simplifiée de cette oeuvre au piano, elle était sensée être pour tout un orchestre, initialement.

Tu prends ton cahier de musique dans les mains et tu sors d’une pochette derrière la couverture la chocogrenouille à l’effigie de cette musicienne que tu tends à Kelly.

- Regarde, c’est elle ! Et ce cahier est composé de quelques oeuvres simples pour piano qu’elle a composée elle-même donc ce n’est pas de moi, ajoutes-tu dans un rire. Je l’ai reçu pour Noël donc je voulais continuer à m’entrainer un peu.

Après ces explications, tu te lèves tout en reposant ton cahier pour prendre l’autre cahier qui se trouve sur le piano. Tu hésites un peu mais tu te dis que, comme cela semble intéresser la Serpentard, pourquoi ne pas lui en parler ?

- Mais.. il m’arrive d’essayer d’écrire quelques petits morceaux, ça m’aide à sortir de ma tête les mélodies auxquelles je pense. C’est pas toujours concluant mais ça change de simplement lire une partition !

Tu feuillettes un peu ce cahier puis tu fais signe à Kelly pour qu’elle s’approche de toi. Tu n’as pas oublié ce qu’elle t’a dit sur son rapport avec la musique et, comme elle éprouve de l’intérêt pour ce que tu fais actuellement, pourquoi pas lui proposer de tenter ?

- Tu as dit que tu n’étais pas créative, moi je pense que ça se travaille. Ça te dit de tenter un petit truc ? Rien de bien compliqué, je te promets !

Ton but n’est pas de faire de ta passion la sienne mais bien de lui prouver que, si elle le souhaite, cela peut lui être accessible, il faut simplement persévérer et ne pas avoir peur des échecs qui font partie de tout apprentissage.

Heureusement, la préfète de ma maison avait l’air de m’avoir cru sur parole. Je n’avais peut-être pas une tête de coupable ou peut-être simplement qu’elle savait très bien que j’avais autre chose à faire que de préparer un mauvais coup.

Lili me donna ensuite la titre de la musique qu’elle était entrain de jouer. Comme je m’y attendais, elle jouait une musique que je ne connaissais pas, une musique sorcière. Je ne savais pas trop si je devais faire semblant de connaître ou si je devais lui dire que je n’y connaissais rien en musique sorcière. Après tout, elle est préfète, en tout logique elle ne devrait pas me faire de mal à la différence de l’autre folle. Et puis, tout en l’écoutant j’essayais de me souvenir si elle était présente le jour où Carry avait vomis sur le sol en apprenant mon statut de sang... Il me semblait que oui.

- Oh tu sais moi les musiques sorcières... Fin’ tu comprends ? Non ?

Pour ne pas me laisser sur la touche Lili prit son cahier et en sorti une carte chocogrenouille à l’effigie de la fameuse musicienne. Au moins maintenant j’avais de quoi mettre un nom sur son visage ou plutôt un visage sur son nom.

Par la suite elle m’expliqua que le cahier contenait bon nombre de ces œuvres et qu’il s’agissait d’un cadeau qu’elle avait eu pour noël. Au moins elle avait eu un cadeau qui lui plaisait contrairement à moi. Je soupçonnais mes parents de l’avoir fait exprès. Depuis mon arrivée à Poudlard non, depuis l’arrivée du truc qui me sert de soeur il n’y en a que pour elle, l’enfant normal. Comme si moi, je n’étais pas normale.

Après quelques instants, Lili releva la tête, elle avait l’air de réfléchir. Avant de m’avouer que parfois, elle se plaisait à composer ses propres morceaux. C’était admirable pour moi, même si selon elle ça changeait de simplement lire une partition. Elle avait dit ça comme si c’était aussi facile que de lire un livre.

- Je trouve ça formidable de réussir à écrire ses propres morceaux ! Tu es auteur-compositeur et interprète ! Incroyable. Est-ce que tu es dans la chorale de l’école ? Tu fais ça pour devenir une artiste plus tard ou c’est simplement un loisir pour toi ?

J’avais temps de question à lui poser, je voulais savoir comment, pourquoi, quand... Je voulais savoir si un jour je pourrais dire à mes enfants « tu aimes bien ce morceau ? Eh bien je connais la fille qui le joue ».

Elle me fit signe de venir à côté d’elle, en temps normal j’aurais refusé mais là, j’avais envie d’essayer de nouvelles choses. Alors après avoir fait un large sourire à Lili je pris place à côté d’elle pour ma toute première leçon de piano. Je soufflais un bon coup pour évacuer le stress puis je lui fis un signe de tête pour lui faire comprendre que j’étais fin prête.

Lorsque Kelly te répond, tu penses rapidement au jour où Carry a appris le statut de sang de la deuxième année, c’est sûrement ce à quoi elle fait référence. Oups, ce n’était pas ton but mais tu sens que tu as un peu remué le couteau dans la plaie. Tu souris faiblement en essayant de trouver quelque chose de rassurant à dire mais tu es tellement prise de court en te remémorant tout ce qu’il s’est passé ce jour-là que tu n’es pas certaine de ce que tu t’apprêtes à dire.

- Oui, c’est vrai. En fait, je m’attendais à ce que tu ne la connaisses pas – non pas parce que tu ne connaissais pas ce monde avant hein ! – mais parce que c’est une compositrice que tu connais surtout si tu joues du piano, en fait.

Tu n’es pas très convaincue mais, heureusement, Kelly te permet de rebondir pour changer légèrement de sujet. Bon, ce sujet est en l’occurence toi, donc ce n’est pas ce dont tu préfères le plus parler mais, au moins, cela te permet de chasser tes pensées ou, en tout cas, de les mettre temporairement de côté. Le titre qu’elle te donne te semble un peu disproportionné pour ton âge et c’est pour cette raison que tu ris légèrement en l’entendant le dire.

- Non, je ne suis pas dans la chorale de l’école, ni dans l’orchestre. Je chante aussi mais je préfère être seule ou en petit comité lorsque j’ai envie de jouer, surtout que, si j’y étais, je n’aurais plus beaucoup de temps pour moi avec le cheerleading et mon rôle de préfète mais ça ne me dérange pas, à vrai dire. Je vois ça comme une passion, quelque chose où je peux me réfugier pour laisser parler mes pensées autrement ou faire le vide, je ne souhaite pas travailler là-dedans plus tard, j’ai vraiment envie que ça reste un loisir pour moi.

Tu lui as répondu du mieux que tu le pouvais et maintenant, il est temps de passer à la leçon improvisée. Improvisée car tu n’avais pas prévu ça aujourd’hui mais aussi parce que c’est la première fois que tu vas tenter d’initier quelqu’un à la musique. Jusqu’à maintenant, lorsque tu croisais un élève ici, c’était toujours des personnes qui avaient déjà joué de la musique avant. Il faut bien une première fois à tout alors tu essaies de te demander ce que tu penses être essentiel pour jouer un peu de musique et ce, avec un apprentissage en accéléré, et tu te lances en faisant de ton mieux pour être la plus claire possible. Tout d’abord, tu commences par lui montrer les touches du piano.

- Tu vois, le piano est organisé par paquets de sept touches blanches et cinq touches noires, c’est reproduit plusieurs fois car ce sont en fait les mêmes notes, juste pas à la même hauteur. Si tu vas vers la gauche, ce sera plus grave, dis-tu en appuyant sur une touche grave. Et, si tu vas vers la droite, ce sera plus aigu.

Tu marques une pause pour t’assurer que la Serpentard ait tout bien compris jusqu’à maintenant. Pour cette fois, puisqu’elle ne sait pas lire une partition, tu te dis que tu ferais mieux de te concentrer uniquement sur l’instrument, tu espères ne pas faire fausse route.

Si on se concentre sur un seul paquet de 7 touches, tu as 7 notes différentes : do, ré, mi, fa, sol, la, si puis tu retombes sur un do lorsque tu arrives à un nouveau paquet, expliques-tu tout en appuyant sur chaque touche au fur et à mesure. Si tu compares le do qui se trouve ici et le suivant, tu peux voir que le second est plus aigu, tu comprends pourquoi ? Et les touches noires, ce sont en fait des notes intermédiaires entre les deux touches blanches où la touche noire se situe. Celle-ci, par exemple, se trouve entre le do et le ré. Si je la joue, elle sera légèrement plus aigüe que le do mais elle sera un peu plus grave que le ré. Cette note a deux noms : on dit que c’est un Do# ou bien un Ré♭car le dièse veut dire que la note est plus haute que la note de base et le bémol veut dire que la note est plus grave que la note initiale. Mais tu n’as pas besoin de retenir ça, c’est juste pour que tu saches !

Tu te rends compte que tu as expliqué beaucoup de choses donc tu te dis que vous pouvez sans doute passer à la pratique, à moins que Kelly ait des questions.

- Si tu veux, tu peux commencer par jouer tout ce qui te passe par la tête ! Ça t’aidera peut-être à te familiariser avec les hauteurs des notes, même si ça ne sera pas forcément très écoutable, laisse-toi aller, c’est l’important.

Tu trouves important de ne pas la lancer directement dans un morceau que tu lui dictes car la musique, ce n’est pas ça, pas pour toi en tout cas : il ne faut pas qu’elle ait peur de jouer ce qui lui vient, même si les notes toutes ensemble ne vont pas forcément donner quelque chose de mélodique. Petit à petit, tu es certaine qu’elle arrivera à voir quelles notes vont mieux ensemble et ce, même en jouant une minute ou deux. C’est aussi à ce moment-là qu’elle pourra comprendre comment elle préfère placer ses mains pour jouer et, si besoin, tu pourras la conseiller pour qu’elle puisse jouer le mieux possible.

Je n’avais pas vu venir ce pavé

Assise à côté de Lili je tremblais un peu à l'idée de ne pas y arriver, je me demandais si Lili avait vraiment eu une bonne idée en me laissant toucher à son piano. Est ce qu'il s'agissait de son piano ou du piano de l'école ? Alors que j'étais dans mes pensées Lili répondit à ma question concernant ses loisirs et son intégration dans la chorale. Puis, elle m'expliqua un peu l'ensemble de ses rôles, c'est vrai qu'avec tout ce qu'elle faisait en dehors de son rôle d'élève elle ne pouvait pas avoir le temps de chanter des chansons avec la chorale. Je me demandais si Lili se plaisait dans son rôle de préfète mais, je n'osais pas lui poser la question. Ainsi, je me contentais de la regarder sans dire un mot.

Finalement, Lili changea de sujet en revenant sur le piano, des touches blanches, des touches noirs, j'étais déjà perdue mais j'essayais de ne rien lui montrer. J'écoutais ses explications, j'avais donc compris que les touches noirs et les touches blanches n'étaient pas à la même hauteur... Mais concrètement je ne savais pas ce que ça voulait dire. Au moins j'avais compris que sur le côté droit c'était des sons aigus et sur le côté gauche, des sons graves.

Alors que j'avais à peine intégré ce qu'elle venait de me dire qu'elle me submergeait déjà de nouvelles interventions. Do ré mi fa sol... Ouais j'avais déjà entendu ça quelque part mais pour moi Lili parlait chinois et encore, j'avais quelques notions en chinois au moins. Mais, la préfète de la maison n'avait pas l'air de voir mon visage se décomposer à mesure que les mots sortaient de sa bouche. Enfin, Lili avait terminé de m'expliquer des choses incompréhensibles.

- Lili... Je n'ai absolument rien compris... Je suis vraiment navrée mais tu sais tout ces trucs là de dodo ou je ne sais pas quoi, c'est trop difficile.

Et enfin elle me proposa de jouer tout ce qu'il me passait par la tête le seul problème était que je n'avais absolument rien en tête à ce moment là. Ma tête était simplement vide. Ou devais je me contenter de rester là ? Et, de poser mes doigts sur les touches de couleurs différentes sans prêter attention à ce que je faisais, ne pas réfléchir c'était peut être ça, faire de la musique. Oh et puis zut, je n'avais absolument rien à perdre sauf peut être mes oreilles et celle de Lili.

Après avoir respiré bien profondément, je posais mes mains sur une touche blanche, un son bien aigu en sorti, ce n'était pas très agréable. Malgré tout, je ne me décourageais pas et je continuais à poser mes doigts sur les touches blanches puis sur les touches noirs, puis de nouveau des blanches. Je bougeais la tête comme si le son était mélodieux alors que savais très bien qu'il n'en était rien mais malgré tout, j'étais fière de moi.

- Lili, je peux te poser une question ?

Tu pensais t’en être plutôt bien sortie dans tes explications mais la réponse de Kelly casse cette impression d’une seule traite. Evidemment, elle n’y est pour rien, tu as dû sans doute lui donner trop d’informations d’un seul coup mais tu as fait de ton mieux pour expliquer les choses simplement, comme Dylan a pu le faire par le passé, tu es donc un peu déçue par toi-même.

Tu souris légèrement, embarrassée par la situation : que faire maintenant ? Faut-il tout lui réexpliquer ou tu laisses tomber et tu vas vers l’avant ? Tu ne sais pas vraiment, tu ne fais qu’improviser la chose puisque c’était loin d’être prévu. C’est la première fois que tu essaies d’expliquer la musique à quelqu’un donc tu fais comme tu le peux mais tu n’aurais pas cru que ça pourrait être aussi peu concluant. Cependant, tu sais que chaque personne est différente alors tu essaies de t’adapter à Kelly et à ce qu’elle peut saisir de tes explications.

- Oh.. Euh, et bien.. C’est pas grave, passons directement à la pratique, si tu le veux bien.

Apparemment, c’est le cas puisqu’elle tente quelques petites mélodies en baladant ses doigts sur le clavier. Evidemment, ce n’est pas du Mozart mais le fait qu’elle ose est déjà une belle avancée. Rares sont ceux qui auraient accepté de partir en improvisation alors qu’ils ne connaissent rien de la musique. Cela ne te dérange même pas d’écouter ce qu’elle produit puisqu’elle semble plus ou moins apprécier ce qu’elle fait à cet instant et c’est pour toi ce qui importe lorsque l’on joue de la musique.

D’un coup, tu te rappelles des premières fois où tu as touché à un piano. D’abord, c’était en regardant tes proches en jouer, tu aimais bien appuyer sur les touches les plus à l’extérieur du piano pour les accompagner, bien que cela ressemblait plus à un canon très mal joué, puis tu as commencé à avoir des cours avec une professeure de piano. Au début, tu étais loin d’imaginer qu’avec plusieurs heures d’entrainements par semaine, tu arriverais à un bon niveau, tu pensais que cela était réservé aux autres et que c’était même une exception. Tu souris bêtement en repensant à ces souvenirs mais tu te reprends net lorsque Kelly s’arrête :

- C’est super, c’est déjà un bon début !

Tu es sincère, tu ne cherches pas à ce qu’elle sache dès le départ quelles sont les notes qui vont le mieux ensemble ou autres, cela t’importait peu. Tu allais reprendre la parole lorsqu’elle te demande si elle peut te poser une question. Tu redoutes un peu la question qu’elle pourrait te poser : si elle te le demande, c’est sûrement que ça ne doit pas être quelque chose de simple à demander, non ?

- Oui, bien sûr !

Tu espères qu’elle ne va pas te demander où tu as appris à enseigner la musique parce que, sinon, tu sais que tu n’auras rien à lui répondre.

Je la regardais droit dans les yeux, je me demandais si elle avait un jour loupé quelque chose, j'avais cette impression qu'elle ne connaissait pas l'échec. Elle était toujours souriante, avenante et présente pour les autres. Je l'admirais pour ça et je me demandais si un jour je pourrais atteindre son niveau. Je l'avais connu l'année passé alors qu'elle n'était pas encore préfète mais déjà à ce moment là, je trouvais que ce rôle lui collait parfaitement à la peau. Elle était faite pour ça. Plus tard je la voyais bien professeur. Mais, en la voyant, je me demandais pourquoi elle ne m'était pas venue en aide, pourquoi avait elle laissé Carry prendre autant le dessus sur moi ? Est-ce qu'elle était elle aussi amie avec elle ? Faisait elle parti du même camp ? Le seul moyen de le savoir c'était de lui demander sans passer par 4 chemins.

- Je me demandais simplement si Carry était ton amie ?

Est ce que ce n'était pas trop lui en demander, est ce que ce n'était pas déplacé ou mal poli de demander une chose pareil ? Alors que j'avais posé ma question, je sentais mon cœur se serrer. Je n'aurais du demander, moi qui voulais à tout prix éviter Carry, je revenais à chaque fois sur le sujet, tous les jours, à chaque instant. Je ne faisais qu'y penser tout le temps. Et j'embarquais mon entourage avec moi sans le vouloir. Il fallait que j'apprenne à me détacher, que je me libère de son emprise mais c'était si dur. Je me posais tellement de question. Et si finalement Carry avait raison de ses propos, et si j'étais vraiment un déchet, un détritus. Après tout, ma famille pensait elle aussi ça de moi, peut être que si tout le monde pensait ça, c'était pour une raison précise. Je commençais à douter de moi, je me sentais paniquer, peu sur de moi. Mes mains commençaient à trembler, mon corps se mettait à transpirer.

- Tu sais quoi Lili, oublie ma question, je crois que c'est moi le véritable problème dans cette histoire. Je ne sais même pas pourquoi je t'ai demandé, je suis trop bête. En plus, tu dois avoir tellement de chose à gérer avec ton rôle de préfète et moi je viens t'embêter avec mes bêtises…. Je suis désolée.

Elle qui prenait le temps de m'apprendre la musique, qui était patiente avec moi, voilà que je l'agaçais avec mes problèmes. Comme si je pouvais la tenir responsable de tous mes malheurs alors qu'elle n'y était pour rien et que je le savais pertinemment. J'avais toujours cette tendance à vouloir trouver un coupable à tous mes problèmes, je n'étais donc pas si différente de ma famille en fin de compte et ce malgré moi. A noël j'avais eu l'honneur de rencontrer ma petite sœur, une enfant aimée de tous comme moi à l'époque. Mais, voir mes parents m'interdire de rester seule avec elle m'avait brisé le cœur. Pour eux, j'étais toujours la meurtrière, la coupable d'un crime dont je n'avais aucun souvenir.