Samedi 12 mai 2046, Assez tôt le matin, Première année.

Reducio [quote] Sowyn Chouette Chevêche d'Athéna Mâle

Charlotte se levait de bonne humeur. Elle était contente que son anniversaire tombe un samedi cette année. Elle allait pouvoir avoir la journée pour elle sans aucun cours et pouvoir faire tout ce qu'elle voulait. Comme tous les samedi matins, elle s'était levé relativement tôt pour aller s'entrainer à jeter des sortilèges dans le parc. Il semblait qu'il faisait assez beau et qu'elle n'aurait pas besoin de chercher un abri. Un petit sourire se dessinait sur son visage et elle n'avait qu'une hâte c'était de savoir si elle était capable d'effectuer avec perfection le sortilège qu'elle avait choisi d'étudier. Alors qu'elle se dirigeait vers la grande porte qui permettait d'accéder au parc. Elle vit un mouvement brusque arrivant d'en haut de l'ouverture. C'était une sorte de petite tache mouvante qui arrivait à toute vitesse.

Un peu ébahie, elle regardait le vol chaotique de l'oiseau qui virevoltait devant ses yeux. Elle ne savait pas vraiment comment décrire cela mais on aurait pu penser que l'oiseau était un peu bourré. En effet, il volait tellement de travers qu'on avait un sursaut à chaque fois qu'il s'approchait d'un mur en craignant qu'il ne rentre dedans. Un peu fascinée par l'apparition, elle s'était arrêtée en plein milieu du Hall. C'était étrange de voir un hibou ici. En général, ils arrivaient dans la Grande Salle pour délivrer le courriel. Peut-être que celui-ci s'était perdu et était arrivé en retard ?

Perplexe devant ce spectacle, elle finit tout de même par reconnaitre l'espèce de chouette qu'elle avait métamorphosée avec Deryn. C'était une petite chouette chevêche ! Alors qu'elle allait se remettre en marche laissant l'étrange créature de côté, elle vit la boule de plume lui foncer dessus à une vitesse loin d'être maitrisée.



La petite sentit le choc contre son front. Elle avait juste eu le temps de se protéger de ses deux bras que la créature s'écrabouillait sur sa face. L'animal se reprit et s'agrippa bien vite à son vêtement en criant des espèces de miaulements stridents qui lui cassèrent les oreilles. Un peu sous le choc, elle secoua la tête de droite à gauche pour se remettre et attrapa la créature avec ses deux mains. Celle-ci s'était tellement agrippée à son haut qu'elle avait dû tirer assez fort pour la dégager. Elle était toute légère mais se débattait un peu ce qui rendait le problème un peu complexe. En fronçant un peu les sourcils devant les cris qui ne s'arrêtaient pas, elle remarqua assez rapidement la petite lettre accrochée à sa patte.

- Mais... Mais qu'est-ce que t'as la chouette ? Vas falloir que tu te calmes parce que là j'comprends rien du tout.

Ce RP est un RP libre. Si vous souhaitez me rejoindre avec ma petiote et sa mini chouette, c'est avec plaisir ! Envoyez moi juste un petit hibou avant Je n'attends qu'une personne, quand cela sera le cas il deviendra privé En espérant voir du monde !

Elle broie du noir. Il n'y a pas d'autre mot pour décrire ses sentiments, son *soi-disant spleen*. L'enfant s'enferme dans ses idées sombres, se réfugie derrière les remparts de son corps pour échapper au reste du monde. Elle broie du noir et le soleil illumine le ciel comme il ne l'a pas fait depuis longtemps. Comme en une provocation, il disloque le verre des vitres du hall en mille éclats de miel alors que son esprit se recroqueville sur lui-même. Elle ignore royalement les rares élèves présents, aussi glaciale qu'un courant d'air du mois de Novembre.
Sa moue se renfrogne à vue d’œil et son regard reflète son état. Elle ne peut plus supporter cette journée juste commencée, ce soleil à peine levé. Ce samedi — *j'déteste les samedis* — était pourri avant même d'avoir commencé, elle en est certaine. C'était écrit.
Même le doux vent du dehors n'a pas apaisé ses pensées noires. Il les a attisées, soufflant dessus tel que sur un feu de rage. Un feu d'artifice qui attend d'exploser. Attend.
Ce samedi, la gamine le passera avec sa colère, prostrée à dix mille pieds sous la couette, elle en est certaine. Elle en veut à la Terre entière sans en avoir aucune raison. Qui sait quelle est la cause de ce bouillonnement intérieur si peu commun à sa personne ?

Tête baissée pour éviter le scintillement brûlant du soleil dans ses yeux , elle traverse le lieu à grands pas souples, silencieuse mais vibrante d'une colère incontenue. Elle en veut aux êres qui parcourent le château, au parc où elle vagabonde toujours, aux eaux insondables du Lac, à l'air même qu'elle inspire. Expire. *...* Elle en veut à tout ce qui existe et à tout ce qui ne vit pas, elle en veut... aux oiseaux qui troublent sa fureur.
Une boule de plumes passe le hall en piaillant de toutes ses maigres forces ; elle frôle le sommet de son crâne avant de — BOUM — s'écraser sur la figure d'une *p'tite* Poufsouffle sur son chemin.*La fille déroule la nuque pour mieux observer la scène, dépitée d'être tirée de son égocentrique apitoiement.; accablée d'être interrompue dans ses plaintes intérieures. Pourtant, elle aime les oiseaux. Elle les admire, même ; mais pas ici, pas maintenant. Il semble que ces maléfiques créatures font tout pour s'attirer ses foudres.
la bestiole dont le cri transperce le hall s'agrippe fermement au visage de la blondinette de première année, dangereusement. *'complètement tarée*, elle pense, sans savoir si elle parle de la chouette, de la gamine ou des deux confondues.
Malgré elle, malgré sa colère sans fond dirigée contre tous et personne à la fois, la Rouge s'avance. De quelques pas seulement ; uniquement pour faire taire ce *fichu volatile*. Mais l'oiseau se calme sans elle, peu à peu s'apaise ; elle discerne pourtant quelque chose, une lettre liée à la patte de *c't'oiseau d'malheur* par un ruban de ficelle.
La fille s'approche encore un peu, les tourbillons qui la secouent ralentissent leur ronde. Indépendamment de sa volonté, mue par un étrange réflexe de curiosité, elle lance un

— Ça va ?

plus sèchement qu'elle n'aurait du le faire, mais néanmoins bien moins acerbe que ce qu'elle a souhaité. Elle scrute la peau rougie de la petite Jaune, le temps d'un battement de paupières. Son empathie revient au grand galop, confusément mêlée à la colère butée.

Et voilà ! Si je m'y attendais, tiens ; je ne m'imaginai pas qu'elle serait de si mauvaise humeur

L'oiseau se débattait toujours un peu entre ses mains et elle eut peur de se faire griffer trop fort. Toute concentrée qu'elle était, elle n'avait pas remarqué qu'il s'était accroché à un bout de peau. C'était quelque chose de vraiment superficiel qui disparaitrait simplement, comme une petite pression qui aurait rougit la peau. Elle n'avait pas mal.

La petite chouette criait encore quelques piaillements plaintifs. Plein de pensées passèrent dans l'esprit de Charlotte. Qu'est-ce qu'elle avait c'était étrange... Ce n'était pas le hibou Grand Duc qui lui amenait les lettre de la famille généralement ni la belle chouette effraie de son grand-père. Alors qui pouvait-elle être ? Cette chouette folle qui venait de la percuter si violemment et qui semblait si peu douée pour le vol ? Un mélange d'émotions résonnait au fond de sa tête, elle était un peu ébahie devant ce qu'il se passait sous ses yeux mais aussi... Elle était tant heureuse sans vraiment savoir pourquoi.

Une ombre se rapprocha d'elle, une grande ombre. Et alors, Charlotte tourna la tête assez vite en sa direction. Le hibou en profita pour lui échapper dans un cri strident et se poser sur le dessus de son crâne. Elle n'était pas certaine de savoir ce qu'elle ressentait au moment même, de l'exaspération ou de l'excitation. Elle ne le savait pas encore mais la chouette chevêche allait lui en faire voir de toutes les couleurs. un peu distraitement, occupée à tenter de faire descendre l'oiseau de sa tête, elle répondit assez distraitement à la fille qu'elle ne connaissait pas qui venait de l'aborder.

- Salut ! Mmh ça va ça va...

Une fois qu'elle eut réussi à le détacher délicatement de ses cheveux désormais tout emmêlés, elle put attraper la lettre attachée à la patte de l'animal. Avec un sourire, toute échevelée, elle planta son regard dans celui de sa camarade.

- Pfiouuu ! Je sais pas ce qu'elle a cette chouette mais elle est toute folle ! Tu t'appelles comment ? Moi c'est Charlotte !

Une fois cela dit, la créature s'enfuit en volant juste au dessus de leurs têtes avant d'aller se poser un peu plus loin, sur une rambarde d'un escalier qui ne bougeait pas vraiment.

Eh ben dis ! C'est sur qu'elle est d'une humeur

*Et voilà* Elle est coincée, à présent. Pourquoi les mots ont-ils franchi la barrière de sa bouche ? Elle n'a rien à voir avec la fillette qui lui fait face. Elle n'a rien à faire ici. Et pourtant, si. Elle a parlé et s'enfonce à présent dans un entre-deux sans fond. Elle oscille sur ses deux jambes, frottant la pierre brute de la pointe de sa bottine. Elle hésite...entre sourire et partir. Rester et s'enfuir — encore une fois. Elle a beau avoir mûri ces années-ci, elle est toujours incapable de s'éclairer lorsqu'elle est butée. Mais cette fois, elle ne cédera pas à ses envies égoïstes de solitude. Elle ne s'enfermera pas dans sa tête — de toute façon, elle manque d'oxygène dans ce lieu trop étroit. Autant respirer la réalité avant de plonger et s'effacer dans ses pensées ; de nouvelles perspectives s'ouvrent à elle, ce matin. Il faut croire que le noir se dilue doucement dans le ciel bleu.

Elle arrête de fixer indéfiniment les rainures formées par le temps dans le sol pour planter son regard sombre dans celui, limpide de la *Poufsoufflette*. Elle parait vraiment un modèle de petit fille innocente, cette Jaune — en apparence du moins. Avec ses grands yeux pétillants et son uniforme sage, malgré le léger quelque chose malicieux sur son visage. Elle semble déjà tout à fait remise de l'attaque de l'oiseau, qui a visiblement décidé que la rambarde de l'escalier ferait un excellent perchoir — l'enfant aimerait aller le cueillir là où il se trouve, pour l'admirer un peu plus.
La gamine prononce quelques mots, auxquels l'enfant se doit de répondre :

— Un peu trop excitée, 't-être. Felicia. Laconiquement, certes. Elle est sans doute plus attirée par l'étrange volatile atteint de folie que par d'infinies palabres. Sa curiosité est irrésistiblement attisée, alors elle revoit sa décision pour continuer sur son propos.

— T'la connais, cette chouette ? J'pense qu'elle devait seulement vouloir te transmettre... ça, après une infime hésitation pour désigner la lettre pliée qu'elle tient entre ses mains. Elle retient de justesse les mots qui devraient suivre, au bord de ses lèvres.J'espère qu'c'est pas une mauvaise nouvelle pour toi, en tout cas.
Compassion et pessimisme résument son état à la perfection.

L'oiseau doit avoir un message important à passer pour ne pas avoir attendu le lendemain. Cette tradition du 'courrier matinal' et la volée de bêtes à plumes qui l'accompagnent avec un mépris visible pour la quiétude des habitants du château a beau agacer considérablement l'enfant, elle la préfère tout de même à la simple idée d'hiboux allant et venant en tous sens à toute heure, du jour ou de la nuit — comme a choisi de faire celui-ci, en somme.

Les yeux grands ouverts, Charlotte regardait en alternant entre sa camarade et la chouette posée sur la rambarde. Presque à chaque regard, la chouette penchait la tête un peu plus. Quel animal étrange ! Elle ne comprenait pas vraiment ce qu'elle faisait ici. Un peu interrogatrice, elle détailla sa camarade. Elle ne l'avait jamais vraiment vue mais elle lui paraissait un peu ronchonne. M'enfin, elle s'en fichait, de toute manière que les gens soient ronchons ou non, ils étaient toujours très intéressants.

La jaune détacha son regard de sa camarade et lui répondit avec un sourire qui lui montait jusqu'aux yeux.

- Oui certainement, il a l'air très excité, mais bon ! Je trouve ça super rigolo ! Et non, je connais pas cette chouette. Je me demande bien pourquoi elle reste par ici alors qu'elle a donné la lettre...

Un instant, elle se demanda si l'animal était ici pour qu'elle puisse le garder. Et alors, son attention se reporta sur la lettre qu'elle tenait entre ses mains. Elle observa d'abord l'extérieur. On pouvait trouver inscrit sur le dessus :

Chacha Dwight, Poudlard, Poufsouffle.

Un cri de joie s'échappa de sa bouche et ses yeux croisèrent ceux de sa camarade.

- C'est une lettre d'ma famille ! J'l'ouvre tout de suite !

Après un regard au hibou qui penchait toujours plus la tête, elle demanda, la joie étirant doucement ses lèvres.

- Dis, est-ce que ça te dérangerais de jeter un œil sur le ti hibou pendant que je lis la lettre ? J'ai un peu peur qu'il fasse des bêtises. Il penche le cou d'une manière beaucoup trop étrange... Tu crois qu'il va se faire un torticolis ?

Sans vraiment attendre de réponse, elle jeta un regard qu'elle voulut sévère à l'oiseau sans que cela ne le soit vraiment et se plongea dans la lecture de la lettre.

12 mai 2046

Bonjour Chacha !

JOYEUX ANNIVERSAIRE !!!

Nous t'écrivons ces mots pour te souhaiter une belle journée ! Tu grandis si vite ! Nous pensons que tu deviens assez grande pour t'occuper d'un animal. C'est pourquoi la petite chouette chevêche que tu vois certainement à tes côtés t'a emmené cette lettre. Il s'appelle Sowyn, je suis allé sur le Chemin de Traverse pour te le récupérer pendant le dernier mois. Je l'ai laissé s'acclimater un peu à la maison avant de te l'envoyer.

Je t'avoue que j'ai prié pour qu'il t'arrive en un seul morceau vu la manière dont il vole étrangement.

Aristée t'emmènera les miamhiboux dans la soirée. Je n'avais pas du tout envie qu'ils voyagent ensemble... Ta chouette aurait été capable de l'épuiser sur le trajet et malgré sa grand forme, son chargement était trop lourd pour que je laisse Sowyn faire n'importe quoi...

Nous espérons que tout se passe bien à Poudlard. Nous sommes inquiets par rapport aux précédents évènements. Réponds nous vite.

Bonne journée pour ton anniversaire ma chérie !
Papa et Maman qui t'aiment.

- Ooooh ! C'est ma chouette en fait !!

Son regard brillant de joie tomba sur le hibou, si sa camarde s'était un peu éloignée, elle accourrait vers elle. Toute proche de la rouge, elle brandit sa lettre devant ses yeux. Le "Joyeux anniversaire" était écrit en gros au milieu et impossible de le rater. Sa voix était un peu plus aiguë qu'habituellement au vu de son excitation.

- Regarde regarde Féli ! Ils disent que c'est ma chouette !

Son excitation était telle que la fin de la lettre était passée à la trappe, elle l'avait lue en diagonale.

Désolée pour le petit retard à mon tour ! Aristée est le hibou de famille, ce n'est pas encore sur ma fiche (c'était pour l'info !)

Elle est si vive, si débordante d'un torrent d'énergie que la trouver face à elle cause à l'enfant une curieuse impression. Comme si un invisible miroir lui renvoyait un reflet contraire *contrariant*. Elle a pourtant cette habitude, celle de souvent se découvrir avec d'autres de ses opposés ; mais cet étrange sentiment d'asymétrie lui est toujours aussi déconcertant. Elle se sent incomplète, lors de ces temps. Mais, évidement, elle n'aime pas y penser. Alors elle chasse ses idées grises de son cerveau pour se retourner *vers Charl*— vers la gamine, qui pétille de joie. Elle est très mignonne, tout de même, et l'esprit noir de la fillette s'éclaircit en l'observant. Rien qu'en l'observant. Si ses idées sombres s'étiolent si vite, c'est que quelque chose a changé. Le temps l'a changée ; elle-même ne se (re)connait plus. Désorientée, elle sait bien qu'elle devra ses mots dans l'ordre un jour, mais pas aujourd'hui. Lorsque les maux seront passés.

Voici où le mène le cheminement de ses pensées, tandis qu'elle écoute la petite demoiselle solaire, les yeux perdus quelque part aux confins de l'atmosphère. Elle écoute, ou plutôt, ce sont ses tympans qui perçoivent vaguement le flot cristallin de l'autre — cela s'approche bien plus de la réalité.
Aussi, c'est presque machinalement qu'elle suit la demande de la gamine, revenant sur ses pas pour s'avancer doucement, silencieusement auprès de la rambarde de l'escalier où l'attend un drôle d'oiseau.

Ce n'est qu'arrivée au centre de son passage qu'elle s'arrête, percutée par l'étonnement. Elle va pour obéir à une première année sans frémir, sans refuser, sans subir la tentation de la moindre contradiction. Mais qui est-elle devenue ?

*Silence*

Voici une question à laquelle il lui faudra apporter des fragments de réponses. Pour cet instant, elle se reprend simplement, un peu interloquée par elle-même ; elle presse son pas pour devancer ses pensées, encore une *énième* fois.

Deux grands yeux d'ambre lui font face, emplis de mystère. Le hibou n'est qu'une statue sur le marbre, un statue dont seule la nuque s'agite. Sa tête oscille ; à droite, puis à gauche, et encore à droite en un lent mouvement de balancier interrogateur.
D'un côté l'oiseau, de l'autre la fille. Celle-ci, curieuse, demeure campée sur ce douloureux face à face. Ses iris sombres, dans ceux, clairs, de la *bestiole*, ne disparaissent plus sous ses paupières. Elle fixe l'oiseau jusqu'à racler le fond de ses prunelles par sa vision.
Quel dialogue peut-il bien se lancer entre ces deux regards ? Si l'on distillait ceux-ci dans tout leur joli spectre d'impressions, cela deviendrait certainement très intéressant.
Seulement, la *p'tite* s'approche à vive allure, à grandes enjambées de son petit corps, rompant sans le savoir un lien invisible. Lorsque l'enfant, à regret, détourne sa vue pour la plonger dans les morceaux de ciel de la Poufsoufflette, ce qu'elle devine dans son ton émoustillée la laisse songeuse. Un instant, elle croit qu'il s'agit simplement de la lettre de ses proches — elle doit beaucoup tenir à eux, non ? Ce qui entraîne une liaison forcée par le mot 'famille', ce mot si terne et si triste pour elle. Une mère absente et un traitre pour père *j'ai pas de père*. La seule évocation de cette famille lui donnerait envie de senfuir en courant loin, très loin, dans un endroit où les mauvais souvenirs, les souvenirs désagréables qui vous restent comme une boule accrochée au ventre n'existent pas.
Mais non. Ce lieu n'est qu'un rêve, et la gamine parait plus heureuse par la présence d'un nouvel animal de compagnie — ce qui est si facile à comprendre, au fond. Les animaux se taisent lorsqu'il le faut, eux. —

Et puis, quelques lettres inscrites sur le parchemin brandi fièrement attirent son regard.
« Joyeux anniversaire. »

Évidemment. La joie visible sur le visage de l'enfant l'attendrirait presque. Presque.
Passant outre l'étrange surnom dont elle se voit affublée, elle prononce les paroles de circonstance sur un ton qu'elle s'efforce de rendre entraînant — mais pas trop enthousiaste, tout de même.

— Génial. Au moins, ça m'étonnerait que tu t'ennuies avec ce drôle d'oiseau.

Jolie paire, en vérité.

— Et bon anniversaire, au fait.

*Ça lui fait... Douze ans ?*
Douze ans. Quelle étrange idée que celle d'imaginer qu'elle a un jour eu douze ans.

Après avoir montré sa lettre à sa camarde, toute joyeuse, elle se balançait sur ses deux pieds. Un et deux, un et deux... C'était à s'en donner le mal de mer mais elle était tellement joyeuse qu'elle ne pouvait pas s'en empêcher. Fourrant le morceau de parchemin dans le fin fond de la poche de sa robe, elle s'approcha du hibou en remerciant Félicia.

- Héhé merci ! J'avoue que c'est l'premier anniv que j'passe sans mes parents mais j'suis sûre que ça va être quand même trop bien ! J'ai hâte de les revoir !

Puis, avec un instant d'hésitation, son sourire toujours plaqué sur son visage, elle déclara.

- Et toi, t'as quel âge ?

L'instant ne semblait pas la déranger. Cette année, elle avait pris encore plus en assurance qu'elle n'avait déjà, et chaque contact lui semblait bon à prendre. Elle était juste heureuse de connaitre plein de monde. C'est pourquoi elle ne s'était pas excusée d'accaparer sa camarade. Elle était contente de passer du temps à rencontrer de nouveaux amis le jour de son anniversaire.

C'est pour cette raison qu'elle piocha sans attendre un petit paquet qu'elle avait fini par sophistiquer un peu, elle aurait bien aimé connaitre un sortilège de froid pour que ses bonbons restent au frai pendant l'été. une fois la petite pochette extraite avec joie de sa poche, elle l'ouvrit sous le nez de la rouge et s'écria.

- Oh et t'en veut un ? C'est des caramels ! Ils sont très bons !

Son cri avait réveillé l'oiseau qui penchait la tête de travers. une bonne chose ou peut-être pas ? certainement pas une bonne chose. Celui-ci repartit de son pilier pour se mettre à voler autour de la jeune Charlotte. Son vol était assez chaotique et ses ailes battaient vraiment vite pour arriver à le maintenir en l'air. L'oiseau était vraiment fait bizarrement. La jaune avait déjà vu une chouette chevêche et c'était elle qu'elle appréciait métamorphoser mais elle n'en avait jamais vu une comme celle-ci. C'était à se demander de quelle manière ses parents l'avaient prise et pourquoi ils avaient choisi une chouette si étrange.

Excuse moi pour le retard...

Elle est sympa, cette gamine. On dirait *presque* que rien ne pourrait la départir de son enthousiasme pétillant, et si Felicia n'avait pas ce si morne état d'esprit ce matin, elle la qualifierait volontiers d'*adorable*. Et d'indémontable, parce que le sourire qui découvre quelques-unes de ses dents ne faiblit pas devant la triste attitude de la Rouge. La fillette ne serait pas si loin de penser que l'humeur étincelante de la Pousfoufflette se répand dans l'air comme un gaz inconnu, léger et doux ; libre à ceux qui le perçoivent de l'inhaler, d'en profiter — ou au contraire, de s'en écarter.
Felicia, elle, oscille, prête à céder à la vague de bonheur, à s'y engouffrer à pied joints sans conditions, tandis que de l'autre côté de la balance se déverse le noir, le terne qu'elle s'efforce d'éviter depuis un an. Le débat ne démonte pas son esprit ; le choix est pris, parce que la volonté de sombrer s'est enfuie sous l'éclat du reste. Toutes les choses qui s'offrent à elle par ce beau Jour de printemps, ce nouveau cycle qui s'ouvre à elle et qu'elle n'a qu'à cueillir pour embrasser, sont des merveilles trop rares pour être oubliées.

Alors ses lèvres à elle aussi s'écartent légèrement pour s'étirer aui travers de son visage ; très légèrement seulement mais cet écart aux ténèbres, infime victoire face à elles, lui suffit pour se sentir bien. Sourire.

Une fois ce pas franchi, le mur du son, celui qui retenait ses mots, s'effeuille en poussière pour qu'elle écoute de toutes ses oreilles, et alors elle peut suivre Cha' dans son allégresse. Un petit pincement tiraille un instant son cœur, à la mention du manque de la *famille*, autant par compassion que par amertume, mais vite, elle le refoule, s'interdisant de le laisser ternir son élan retrouvé.

— T'inquiète pas, c'est toujours génial de fêter son anniv' ici, tout le monde le fête avec toi ! J'ai passé parmi mes plus beaux anniversaires ici, moi. Un monde sépare ceux qu'elle a vécu au Château des autres, ceux qui se sont déroulés auparavant, dans la minuscule cuisine de Londres, mais elle les chérit tous, différemment. Quatorze anniversaires, chacun auréolé dans sa mémoire d'une lueur particulière.

— Quatorze,, répond-elle en écho à ses pensées. Quatorze ans. J'suis en troisième année, d'ailleurs...

L'apparition des caramels abrège ses paroles. Les bonbons collants, presque fondus les uns aux autres, ne l'attirent pas particulièrement par leur apparence, mais la saveur du caramel — de loin celle qu'elle préfère, pour le souvenir des années passées à observer le sucre se dissoudre dans l'eau bouillante du chaudron avant de le voir se cristalliser lentement, quand elle était gamine — la pousse à accepter, et à tendre la main afin d'y recevoir la friandise, *pour une fois*.

— Ou...i ? Oui, merci !

L'étrange oiseau s'élance dans une nouvelle ronde infernale tandis qu'une intrigante interrogation traverse l'esprit de l'enfant, éveillée par l'intérêt. Nombreuses sont les choses qui attisent son infinie curiosité ; cette curiosité dévorante, ce besoin de comprendre qui palpite au fond de son être, qui dévore son cœur, ne trouve jamais de repos avant d'être assouvi. Et elle veut le satisfaire, là, maintenant. Encore une fois. Parce que l'autre connait certainement la réponse.

— Dis... Comment tu fais pour faire sourire les gens ?

Charlotte souriait à la troisième année. Oh elle n'en doutait pas que cet anniversaire allait être particulier. Elle avait conscience que ses amis seraient contents de passer un moment avec elle et qu'elle adorerait passer du temps dans le château d'autant plus que son frère lui, était là. Seulement, elle était tout de même heureuse de savoir que ses parents avaient pensé à elle en lui offrant le plus beau des cadeaux. Elle était par ailleurs certaine que tout un tas de recommandations arriveraient dans le paquet où se trouverait le miamhibou pour l'animal.

Complètement perdue dans sa joie, elle remarqua à peine que la rouge avait l'air tant perdue. Toutefois ses hésitations pour tout faire attisaient sa compassion. Est-ce que la rouge n'avait pas confiance en elle au point de ne pas apprécier les relations sociales comme celles-ci ? Après tout elles ne se connaissaient pas et Charlotte était toujours à l'aise bien trop vite pour que cela ne corresponde à ce que tout le monde pouvait penser des premiers instants échangés entre deux personnes. Seulement... Sa dernière question la pris un peu au dépourvu alors que l'oiseau tournait sans cesse autour de sa tête.

Elle ne sut quoi répondre, regardant le vol de l'oiseau avant que celui-ci ne lui fonce dessus pour venir se poser sur son épaule en plantant ses serres dans son vêtement. Elle inspira fortement et posa la main sur son dos plein de plumes pour voir s'il appréciait son contact. Le roucoulement qu'il en résultat agrandit encore un peu son sourire. Et alors enfin, elle essaya de répondre.

- Je suis désolée je... C'est vraiment ce que tu penses ? Je... J'fais rien de spécial j'crois. J'veux juste être heureuse et que les gens vivent bien la vie alors je reste jamais sur les trucs tristes. Sinon j'y pense trop et j'aime pas être triste. Du coup j'fais des trucs qui m'font sourire. Mais... J'pense pas que je fasse sourire les gens... Enfin... J'sais pas trop.

Elle regardait avec un étonnement non feint sa camarade d'une année supérieure.

- J'sais pas c'est un peu naturel de sourire. Et puis ça fait du bien... Alors j'souris tout l'temps. Mais ça répond pas du tout à ta question en fait.

Un petit rire un peu gêné s'échappa de ses lèvres, puis une foule d'émotions passa sur son visage. Si la rouge lui demandait cela, elle devait vraiment être triste et le sentiment qu'elle avait ressenti quelques instants plus tôt se vérifiait finalement dans cette question. Peut-être ?

- Pourquoi tu m'poses cette question ?

Elle fronça un peu les sourcils, ne sachant pas vraiment quoi lui dire de plus. En plus de cela, plus elle discutait, plus le hibou serrait ses griffes dans son épaule traversant le vêtement. Une grimace lui fut arrachée et elle chuchota à l'animal toujours joyeuse en cette journée.

- Hé fais gaffe quand même...