Dans la cour, assise en tailleur sur le bord de la fontaine, je profite de la solitude comme oxygène. Les lieux ne sont pas tellement occupés, seuls quelques élèves de passages ne viennent me croiser. Ouvert sur les genoux un livre que je parcours, telle est mon occupation habituelle en dehors des cours. L'arrivée du printemps permet enfin de troquer la calme bibliothèque, contre le bon air du dehors qui nous en ferait presque perdre la tête. Qu'il est bon de sortir à nouveau, bien loin de ces révisions de par derrière les carreaux. Trop nombreux sont les frileux, préférant la chaleur du château libérant l'espace aux plus audacieux. Par ce calme satisfaisant à nouveau cette décision, je reporte aussitôt pour plus tard mes réflexions. Loin de moi l'idée de sortir pour divaguer, c'est dans le travail que je dois me plonger. Plus choix de raison que de passion, je regrette presque la Botanique comme option. Après quelques secondes de retour à mon bouquin, mon visage perd rapidement son air serein. Sourcils froncés et lèvre mordillée, par mon index une mèche vient s'entortiller. Ma main droite restée sur le manuel en guise de marque page, je glisse mon crayon de bois entre les dents libérant ma main gauche pour un court voyage. Brève expédition mais importante, je ressorts de ma veste une patacitrouille, triomphante. Cette récompense entre les dents, mon attention, elle, s'envole définitivement.

Tout comme le printemps chassait l'hiver, Maddie commençait à prendre le dessus sur cette première moitié d'année scolaire difficile. Elle relevait la tête, petit à petit et parvenait à retrouver du plaisir dans ses activités. Ainsi, et même si le froid était encore mordant, la Poufsouffle ressentit l'envie de sortir, et même de jouer.

Elle passa alors dans son dortoir afin de récupérer son sac de bavboules. Avant tous ses soucis, elle aurait cherché à proposer une partie à une de ses amies, mais elle ne se sentait toujours pas le courage de passer du temps en tête-à-tête avec l'une d'entre elles. Elle n'avait pas envie d'affronter les questions et encore moins les possibles et légitimes reproches qu'elles pourraient lui faire, elle qui se montrait distante depuis des mois. Une fois de plus, elle préférait partager son temps avec quelqu'un de bien moins proche d'elle. C'était plus facile.

Sans un regard sur les personnes qui se trouvaient en salle commune, elle traversa la pièce et s'en échappa pour gagner le parc. L'air frais lui provoqua un frisson, mais il fallait bien plus que ça pour qu'elle rebrousse chemin. Elle continua d'avancer, sentant son nez et ses pommettes se glacer au fur et à mesure de ses pas. Elle se rendit dans une zone propice à son jeu et lorsque son souhait fut satisfait, elle regarda autour d'elle afin de voir quels potentiels partenaires de jeu s'offraient à elle.

Le choix était plus restreint qu'elle ne l'aurait pensé. *Quelle bande de frileux !* pensa-t-elle. Cependant, elle repéra bien vite La personne idéale. Nul besoin de quantité, elle avait la qualité. Un petit sourire sur le visage, elle se dirigea vers une camarade de promotion qui semblait être en train de grignoter. Elles n'avaient pas le souvenir d'avoir déjà eu de réelles conversations avec elle et cela était plutôt positif pour Maddie à cette période de sa vie. Elle ne risquait pas de lui parler de Jeffrey, elle au moins.

Décidée, elle se planta devant la Serdaigle et l'aborda directement :

"Ça te dirait une partie de Bavboules, Blaise ?" Ayant déjà vu la fille en cours le matin-même, elle s'était passée d'un bonjour ou tout autre formule d'entrée en matière. Elle leva juste son sac, pour lui indiquer qu'elle avait avec elle tout ce qu'il fallait pour jouer.