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03 déc. 2020, 16:34
{ Copeaux de Temps }  ++ 
Mes aiguilles rendent éphémère toute entité matérielle.
Je suis l'ennemie de l'Ecriture.
Qui suis-je?




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Le temps aux plus belles choses
Se plaît à faire affront
Il saura faner vos roses
Comme il a ridé mon front

Pierre Corneille, A la marquise




________________________________


@Alyona Farrow



Hannah, 11 ans
7 Octobre 2045 [Petit Déjeuner]
Grande Salle, Poudlard



L'instant d'Avant...

Ses doigts se promènent sur le vieux bois de la table — poli par ce rasoir qu'est le Temps — avec une grâce surprenante. Tu n'as à vrai dire jamais le loisir de pratiquer ce genre de manie aussi tôt dans la journée; ton corps refuse de sortir de son sommeil. Il faut attendre généralement une toilette à l'eau froide pour que tes muscles s'extirpent de leur couarde léthargie. Le petit déjeuner marque généralement la fin de ta Nuit: tu ne te souviens que très rarement de ce que tu y manges ou y fais. Aujourd'hui il semble difficile que la discussion *passionnante* que vous entretenez disparaisse de ta mémoire. Tes yeux, parfaitement ouverts, observent avec intérêt cette fille qui réfléchit avant de parler *pas comme l'autre idiot*, et qui d'une voix calme énonce des réponses concises. Tes épaules ne sont pas affaissées, une première, et ta posture est moins pitoyable qu'à l'accoutumée.
Et si tes bras cessent de se mouvoir, c'est seulement parce que ton estomac est satisfait et risquerait de se dérégler si par gourmandise tu saisissais une ultime part de brioche maculée de marmelade.

Elle fronce ses sourcils, plongée un instant dans ses pensées, puis offre une nouvelle phrase qui a pour effet de faire trembler légèrement les extrémités de ton corps. *La Vie est faite de questions insolubles*, répète mécaniquement ta tête trop remplie justement, de questions. Quand vient le mot charme un peu plus loin, cela achève de te terroriser. Dans ton esprit, questions insolubles et charme sont des Mots qui ne sont pas compatibles. *Les questions, elle m'envahissent comme un raz-de-marée incessant* Les questions détruisent tous les barrages, tous les murs, toutes les barricades bancales que tu poses inlassablement. Si elles n'étaient pas aussi nombreuses et lourdes pour ta tête d'Enfant, tu les accueillerais avec chaleur. Hélas ce n'est pas le cas.

« Je... J'aime pas trop les questions insolubles. », bégaies-tu faiblement. « Enfin... Surtout quand elles sont trop nombreuses. »

Le bruit infernal que produisent les autres élèves n'aide pas non plus à apaiser les flux qui te parcourent. Ils t'imposent une souffrance dont tu te passerais bien *égoïstes* et les sons qu'ils émettent tapent avec la puissance du Marteau ravageur sur ton crâne. Fort heureusement tout à l'heure ils s'en iront voir leur Quidditch et le Silence refera surface — pour l'instant ils sont plus occupés à se chamailler, à lancer des paris ou à se goinfrer des mets déposés sur les tables.

Lorsque son sourire gagne à nouveau son visage, le tien fleurit aussi, avec un peu de timidité. Les Mots qui accompagnent l'étirement de ses lèvres sont teintent pour de bon tes joues d'une couleur pourpre dont tu ne peux pas te débarrasser. Ces paroles sont embarrassantes: elle ne te connait quasiment pas et affirme sans hésitation dans sa voix que toi non plus ne sera pas une Adulte banale, et que tu prendras les décisions aux moments opportuns *Si elle savait...* Les lambeaux de la lettre de *Jones*, cachés au fond de ta valise, inondent tes pauvres pensées qui envoient un signal de détresse. *Bon sang, j'l'avais oubliée celle-là* Tu jures intérieurement qu'avant la fin de l'année tu lui rendras cette maudite lettre; légère dans ta valise, lourde dans ton cœur. En tout cas, ces paroles ont un étrange double-effet: d'un côté, tu es heureuse de voir que cette grande fille ait une telle confiance en ton avenir, mais d'un autre côté cette confiance te met une sorte de pression assez incompréhensible sur les épaules *Je ne comprends pas; je ne me comprends pas*


Recevoir un compliment n'est pas aussi facile qu'on ne le croit — il s'agit parfois même d'un Art! Il n'est pas facile de trouver le juste milieu entre orgueil et gêne. Alors certain.es se réfugient derrière un éclat de rire hypocrite et une phrase du type "Mais non, mais non voyons, vous exagérez..." Alors que dans leur tête résonne un "je suis lae plus grand.e, lae plus belleau et lae plus fort.e, je vous écrase tous, vauriens". Et les plus modestes souvent, lassé.es par cette rengaine, finissent par se persuader qu'iels ne méritent aucun de ces doux compliments; Ô Tristesse.
Fade Humanité, te lasseras-tu un jour de torturer les Esprits?


Tu ne trouves pas de réponse à ces belles phrases qui, tu en es persuadée, sont sincères. Les Mots qui se proposent à ta conscience sont invisibles voire inexistants *Ah, maudites pensées*. La dernière question qui vole jusqu'à toi te sauve d'une période affreusement vide de tes paroles. Et elle a le mérite d'être simple *Ouf!*. Ou plutôt semble être simple puisque deux secondes plus tard: *Mon nom ou mon prénom?*. Non, vraiment, il n'est aucune question sur terre qui soit véritablement simple lorsqu'on te la pose. Ton cerveau se noue avec bien trop de vivacité. C'est la voix d'*Aristid!* qui résonne dans ta tête, lorsqu'il t'avait glissé cet été: "Hannah, c'est bien triste comme prénom! Et si je t'appelais plutôt...

« Galina. Et toi, comment te nommes-tu? »

Comme ça, tu brilleras comme le Soleil."

*J'essaie, Aristid, j'essaie*

Tempus.

𐌔

02 févr. 2021, 19:14
{ Copeaux de Temps }  ++ 
COPEAUX DE TEMPS
ARRACHES A LA ROUE QUI NE S'ARRETE JAMAIS



— aeonian —

Le Temps est-il la roue qui tourne ou bien la trace qu'elle laisse derrière elle ?
Robin Hobb, Le Prophète blanc




7 OCTOBRE 2045, MATIN,
TABLE DES SERDAIGLE, GRANDE SALLE

Alyona, 15 ans



J'ai toujours cru que les adultes avaient toujours raison, qu'ils ne disaient que la vérité, sans mentir ou cacher des informations, sans exagérer ou s'imaginer des possibilités invraisemblables ; j'ai toujours cru que leur point de vue était le seul vraiment cohérent avec les faits. J'ai toujours cru que toutes les paroles qui sortaient de la bouche de ma mère étaient la Vérité, celle avec un grand V qui expliquait tout - ou qui n'expliquait rien. Durant toute mon enfance, je n'ai cessé de croire en tout ce que les adultes disaient, sans aucune exception. J'absorbais comme une éponge chaque paroles, m'abreuvant de ce que je pensais être la Vérité même si les adultes n'étaient pas d'accord entre eux et si cette vérité me semblait inexpliquée. J'ai toujours cru aux paroles des adultes, en particulier en celles de Maman. Maman me racontait sans cesse que les Moldus étaient méchants, dangereux, sournois et différents - après tout, pourquoi Maman mentirait ? Maman me conseillait toujours de ne pas m'approcher des enfants qui ne sont pas magiques, ceux qui sont souillés par le sang impropre des Moldus. Maman m'expliquait souvent que les Mots blessaient plus que les coups, que la douleur physique n'était rien face à celle que l'on pouvait infliger mentalement, que les regards signifiaient parfois plus que les actes et que je ne devais jamais m'abaisser face à quelqu'un qui n'avait pas le sang pur. Maman cherchait toujours à m'imposer sa vision du monde, celle qu'on lui avait apprise, celle qu'elle avait développée, celle qu'elle imaginait être vraie. J'ai longtemps bu ses paroles que je pensais justes sans me poser de questions, sans douter ; c'était tellement plus facile et sécurisant que de tout remettre en cause. Pourtant, aujourd'hui, me voilà assise ici, les sourcils froncés et le regard distant, me posant des questions sur ces paroles que je pensais être la Vérité. Et si tout ceci n'était que la vision du monde d'une personne aveugle et bornée ? Et si Maman avait tort ? Et si les adultes ne possédaient pas toujours la Vérité ? Et si tout ceci n'était que mensonges ? Ébranlement.

Je détourne le regard de ce point lointain que je fixais. Peut-être que Maman a tort. Peut-être que tout ce qu'elle m'a dit est faux. Peut-être que personne n'a la Vérité que je recherche tant. Peut-être que Maman mentait. À ce jour, je sais que ses paroles n'avaient pas toujours le goût de la Vérité et étaient parfois perverties par un avis extrême et limité de notre société. Cette gamine en face de moi, qu'elle soit Sang-Mêlée, Née-Moldue, Sang-Pur ou Née-Sorcière, est-ce que cela change quelque chose ? Est-ce possible qu'elle soit Née-Moldue ou Sang-Mêlée mais si mature et intelligente ? Est-ce imaginable qu'elle ait du sang moldu dans les veines mais que parler avec elle soit si agréable ? Est-ce que le sang vermeil qui coule dans ses veines, qu'il soit souillé ou non, définit ce qu'elle est ? Est-ce qu'elle a besoin d'avoir le sang pur pour que je puisse lui parler et la trouver intéressante ? Est-ce que, comme Maman le racontait, notre sang change quelque chose à nos prédispositions et à nos capacités ?

Je pose mes yeux sur la Bleue et Bronze en face de moi. Mon regard est encore distant, un peu hésitant et résigné.

« J'crois que t'as raison finalement. » Je pose mes couverts sur le côté gauche de mon assiette avant de reposer mes yeux sur la Serdaigle face à moi. « Les questions insolubles sont étouffantes quand elles sont trop nombreuses. Et quand elles commencent à nous étouffer, elles n'ont plus rien d'intéressant. »

Peut-être qu'elle aussi n'aime pas ces questions insolubles à cause de l'incapacité qu'elle ressent à pouvoir y répondre. J'aimerai tant posséder les réponses des questions insolubles. Savoir ce qui se passera pour ceux qui mettront leur nom dans l'urne. Savoir si Anaë s'en veut de s'être disputée avec moi. Savoir pourquoi il y a une si grande différence entre les adultes et les gens de mon âge – vais-je vivre des événements affreux, avant de devenir adulte, qui me changeront ? Les adultes sont-ils si différents de moi ? Pourquoi ? Qu'est-ce qui marque un passage à l'âge adulte ? Est-ce qu'être adulte change notre façon d'être et de penser ? J'aimerai savoir tant de choses. Répondre à ces questions insolubles me semble parfois vital, comme si une partie de mon esprit vivait pour chercher ces réponses. Pourtant, ce sont des questions insolubles, je ne peux pas connaitre la réponse à ces questions, en tout cas, pas à cette heure-ci. Personne ne peut connaître la réponse à ces questions, ni la fille en face de moi, ni même moi, ni Miss Loewy. Alors cette sensation de ne pas savoir, de ne pas pouvoir savoir, est terriblement insoutenable et étouffante. Parce que, qu'y a-t-il de pire que ne pas savoir ? Rester dans le flou comme perdue au milieu d'un épais brouillard, la question tournant en boucle dans notre esprit et les réponses inatteignables s'envolant au loin. Les réponses des questions insolubles ne se trouvent pas dans les livres ni dans notre tête. Personne ne sait où trouver les réponses aux questions insolubles. Et nous sommes pris dans une spirale inarrêtable qui nous étouffe avec le temps.

Galina. Le son de sa voix vient de nouveau me tirer de ma rêverie. Je lève mes yeux vers elle. Galina. C'est *joli*. Jamais je n'avais entendu ce prénom auparavant ; il ne doit pas être très courant. Elle semble avoir mis quelques secondes avant de répondre mais je n'y fais pas attention, elle a peut-être été surprise par ma question, cela arrive. Les pensées nous emmènent parfois si loin que le retour à l'instant présent en devient difficile.

« Alyona. Alyona Farrow. » Je marque une pause un bref instant. « Enchantée de faire ta connaissance Galina ! »


Je suis absolument navrée pour ce retard... Mais tu le sais déjà.
Dernière modification par Alyona Farrow le 05 déc. 2022, 22:16, modifié 2 fois.

#466962Étudiante à l'Institut de Médicomagie et des Sciences Magiques — spécialité botanique

04 mars 2021, 09:24
{ Copeaux de Temps }  ++ 
« J'crois que t'as raison finalement. ». *Oh* Tes yeux brûlants d'intérêt fouillèrent le regard de ton aînée. Cette dernière formulait une phrase qu'il n'est pas courant d'entendre. Chacun.e pense qu'iel a raison. Les opinions sont comme des blocs de glace ; embourbés dans l'immobilité. C'est ainsi que nous devenons de prodigieux.e.s ignares. Tel est le genre humain — dans sa globalité. Car la fille qui te faisait face était parvenue à briser la chaîne maudite qui constituait la menotte de l'Humanité. Qu'avait-il fallu pour cela ? Réfléchir. La réflexion n'est-elle pas ce qui est censé élever l'Homme au-dessus des autres qu'humains ? Nous pourrions logiquement en déduire que cellui qui ne réfléchit pas n'a d'humain.e que le nom.

Peut-être que ta question avait remué un couteau dans une plaie, ou pire un ulcère, car la Bleue dirigea vers toi un regard un peu chancelant. Car il était peu probable que ce fût toi, adolescente de treize ans, qui puisse lui inspirer la Peur. Tu dus museler ta curiosité qui s'apprêtait à bondir de sa cage (dont elle s'extirpait quand bon lui semblait) ; il était hors de question de gâcher cette belle harmonie qui s'était tissée peu à peu. Quand on ne la fait pas taire, la Curiosité est ravageuse.

Tu ne savais pas ce qui agitait son esprit, mais une certitude éclatait : elle songeait. Quelle merveille que ces instants où la réflexion prend le pas sur l'Action. Maudits soient ces impatient.e.s qui s'agacent pour quelques secondes où l'on plonge dans nos pensées ; le Temps n'est rien ! Le cheminement intérieur est l'étape qui précède la défense d'une idée, d'un rêve, d'une valeur. Si l'on mélange l'ordre, terrible sera la sanction.

Et après quelques secondes tu obtins un prénom. *Alyona*. Ces quelques lettres formaient un alliage mélodieux. *C'est beau* murmura ton Cœur.
Vous aviez toutes deux livré un fragment de vos Contours. Mais à tes yeux cela n'avait point d'importance. A quoi bon masquer la Vérité à une personne *... de confiance* ? Par les dieux de l'Olympe, cette pensée était arrivée sans prévenir. Ta surprise ne fut heureusement pas visible ; quelle aurait été la réaction d'Alyona face à ceci ? Qu'aurait-elle déduit d'un tressautement ? L'Harmonie aurait-elle été brisée ? Ou pire, est-ce que — *j'en peux plus !* L'étau de questions était asphyxiant, et surtout bien difficile à desserrer. Les forces obscures manquent rarement de puissance.

« J'en suis tout aussi enchantée. Je n'ai qu'un seul regret, que nous ne nous soyons pas rencontrées plus tôt. J'aurais pu éviter quelques... Tourments. »

Ta voix trembla un peu avant de prononcer le dernier mot de ta phrase. Tu regrettas de t'être avancée aussi loin dans ton Âme ; tu avait trébuché sur des souvenirs qui avaient longtemps alimenté — et pour certains, alimentaient encore — tes cauchemars et provoqué tes insomnies. Des images se superposaient, pernicieuses. L'arcade sourcilière ensanglantée, il y a presque un an, au détour d'un couloir *Non..*. La tête plongée dans la neige autant que dans la Mort, en janvier dernier *Non !*. Une inconnue, striée par des flèches *Non !* Une gifle matérielle fouettant ta joue, en juin. *Non !* Et cette Lettre déchirée... *NON !*

Ces quelques secondes de chute dans ton for intérieur avait changé ton visage en un masque de frayeur. Ce n'était pas contrôlable ; on ne dompte pas un Souvenir, surtout s'il est douloureux. Un soupir s'échappa de tes lèvres.

« Je... J-j'suis désolée. J-je... »

*Bon sang, j'y arrive plus !*

Des perles salées s'échappèrent. Ta façade stoïque avait cédé sous le poids de l'Horreur, au moment où tu t'y attendais le moins. Cette Grande Salle, théâtre de drames successifs, n'aidait pas à chasser les Marques funèbres du passé. Tu n'avais jusqu'à présent craqué qu'une seule fois depuis la mort de Dai, et c'était à Ashurst ; loin du regard des Semblables donc. Cette fois-ci, il y avait une myriade de regards pouvant se poser sur toi — à commencer par celui d'Alyona. Mais impossible de retenir ce déferlement pareil à l'Ouragan. La Douleur, ça nous marque au fer rouge.

Il y avait trop de remords en une seule Âme ; il y avait trop de coups sur un seul Corps. Ton Être ployait sous les heurts incessants. Tes mains virent soutenir ta tête et sécher tes larmes. Puis tes billes marrons se relevèrent en direction d'Alyona.

« Rien de grave. Juste quelques souvenirs fâcheux. »

Tu dessinas l'ébauche d'un sourire, mais il ne fleurissait pas ; il fanait. Il est grave de sous-estimer la peine qui nous écorche. Cela ne panse pas les blessures, cela les infecte. L'Oubli, ou plutôt la candide tentative de chasser des éléments de notre mémoire, se retourne toujours contre nous. Ce que tu venais d'exprimer avait un nom : mensonge. Mensonge a souvent un synonyme : faille.

« Enfin si, c'est grave. »

« La Vérité sort de la bouche des enfants » ; les Adultes mentent.
Toi, tu n'étais ni adulte ni enfant ; tu avais menti et énoncé la Vérité.

Je viens à l'Instant de vomir le Temps. Cette fois-ci je le piétine ; piétinons-le.

𐌔

18 juin 2021, 14:16
{ Copeaux de Temps }  ++ 
— “I rise from my worst disasters, I turn, I change. ” —
Virgina Woolf



Autour de nous *c'est si beau, Nous*, les autres continuent à discuter bruyamment comme si la matinée était tout à fait normale. Pourtant, ce repas n'a rien de banal. Une gamine juste en face de moi étincelle dans la pièce par ses mots et sa présence, elle semble si grande cette fille, comme si la Vie avait décidé qu'elle devait prendre son Envol plus tôt que prévu. Mais les autres élèves sont aveugles à cela, ils ne voient pas plus loin que le bout de leur nez. “L'Essentiel est invisible pour les yeux.” Peut-être Wilson est-il encore le sujet principal de leurs échanges et de leurs paroles. C'est étrange, tout est parti de lui. Cette conversation, cette rencontre, ces réflexions, elles n'auraient jamais été possibles sans les actions stupides de Wilson. Le Monde est déconcertant, il nous montre l'absurdité des personnes irréfléchies pour nous mener vers des discussions passionnantes avec des personnes intrigantes qui nous poussent à réfléchir. Doux Merlin, que serais-je sans le Monde et ses jolies surprises ? J'espère que les belles rencontres pourront faire pencher ma balance émotionnelle pour me permettre d'oublier la menace permanente de l'urne voilant mes pensées et faire grandir un peu plus le Tournesol de mon bonheur. L'Espoir est le seul à faire vivre mes Rêves. Que seraient-ils sans lui qui les nourrit et les garde près de moi, comme une lueur après laquelle on court mais qui ne disparaît jamais ?

Je suis tirée de mes pensées par Galina. *Oh* Je ne peux m'empêcher d'être surprise par ses paroles. Pense-t-elle réellement ce qu'elle dit ? Aurait-elle vraiment aimé me rencontrer plus tôt ? Un sourire gêné grignote mon visage. Jamais on ne m'avait offert une telle réponse lors d'une première rencontre. Je ne sais pas que penser et que répondre à cela. Alors, je me contente de baisser les yeux, la demi-lune me servant de sourire me permettant d'afficher ma gratitude. *Moi aussi j'aurais aimé, Galina ; j'aurais tellement aimé* Merlin, le Monde est si doux avec moi ce matin ! Cette Bleue m'intrigue et j'ai l'étrange impression que nous étions faites pour nous rencontrer aujourd'hui, lors de cet éclat irritant de Kingson.

*Tourments* Le mot vient se répéter dans mes pensées, écho surprenant. Quels tourments ? Je relève les yeux pour scruter le regard de Galina. Sa voix a tremblé sur sa dernière phrase. Par Circé, elle semble vraiment bouleversée par ces Tourments. J'ai l'impression qu'elle se perd en elle-même, dans ses pensées, loin de la Grande Salle et de ses discussions bruyantes, se retrouvant peut-être face à ses terreurs. Que puis-je faire pour l'aider ? Elle semble si mal à cet instant, et moi je me contente seulement de cligner des yeux, complètement surprise par cette chute soudaine. J'aimerais agir pour l'aider, la sortir de ses pensées et de ce qui la chamboule tant, la rassurer d'une manière ou d'une autre, lui dire que tout ira mieux, si ce n'est bien, mais je ne sais pas comment ! Anaë a toujours été celle intervenant dans de telles situations. Elle trouvait les mots justes, chassait les mauvais souvenirs et les problèmes, refaisait apparaître les sourires et calmait les esprits bouleversés *'faut qu'j'arrête de penser à elle*. Moi, je n'ai jamais à faire cela, et je sais que trouver les mots justes m'est impossible. Alors, je ne peux que rester là, les bras ballants, incapable de changer quoi que ce soit à l'état de Galina.

La Bleue s'excuse. *Mais il ne faut pas t'excuser, c'n'est pas ta faute !* Aucune parole ne franchit mes lèvres qui s'ouvrent pourtant, comme pour les laisser passer. Que puis-je lui dire de toute manière ? « Oh, ne t'en fais pas, je te promets que tout ira bientôt mieux. » Ah ! Quelle stupidité ! Parler pour dire cela, c'est inutile. De plus, comment puis-je lui promettre que cela ira mieux ? L'urne est toujours en suspension dans la Grande Salle, l'Avenir semble terrifiant, les Tourments de Galina paraissent difficiles à surmonter pour une enfant de son âge et je n'ai aucune parole assez utile pour la réconforter. Que je suis absurde et futile !

La Bleue pleure un peu, laissant des perles luisantes dévaler ses joues avant de les essuyer. Puis, elle me regarde et mes yeux se font un peu plus inquiets. *Elle a l'air tellement mal...* Des « souvenirs fâcheux » alors ? Les souvenirs, c'est tuant. Cela ne s'oublie pas et chaque seconde passée à les revivre est un supplice. Enfin, elle essaye de sourire mais sa tentative est vaine. J'aimerais tellement chasser ses souvenirs douloureux d'un revers de la main et dessiner un vrai sourire sur son visage. Galina semble sincèrement blessée et je ne sais pas comment arrêter son hémorragie soudaine. Son « c'est grave » résonne dans mon crâne, se cognant contre mes pensées. Comment arrêter les larmes, hein ? Comment faire fuir la souffrance et revenir la douceur ? Merlin, si tu m'entends et que possèdes cette réponse, aide-moi, je t'en prie.

Je réfléchis, cherchant des moyens pour réparer son cœur et revoir son joli sourire. Peut-être suffit-il que je lui fasse penser à autre chose en détournant la conversation ? Mais alors, vers quoi ? Et puis, n'est-ce pas aussi une façon de lui dire que je ne veux pas entendre ses tourments, et donc que je ne veux pas l'aider ? Ce serait une impression totalement fausse ! Peut-être a-t-elle simplement besoin d'un « je comprends » et d'un sourire compatissant. Mais cela semble inutile et faux ! Je ne comprends pas ce qui lui arrive, je ne peux pas comprendre, je ne connais pas ses souvenirs. Alors, des promesses intenables ? Des mensonges ? Un petit sourire gêné et plus rien ? Un « ça va aller » jeté comme une bouée bien sommaire ? Merlin, je cherche et ne trouve rien qui aille ! Que faire, par Circé, que faire ? Cependant, parfois, réfléchir est bien inutile. Certains moments ne demandent pas une réflexion trop poussée. Il suffit quelques fois de laisser notre instinct nous guider et nous emporter. Je crois que c'est ce que je m'apprête à faire. Mon instinct semble bien plus sûr que toutes ces solutions qui tentent de se dessiner dans ma tête sans mener à quelque chose de bien. Ce n'est pas mon habitude de ne pas réfléchir à mes prochaines actions avant d'agir, mais toutes les choses connaissent des exceptions.

Je tends mes mains vers Galina, posant mes avant-bras contre le bois abîmé et sali, les paumes tournées vers le plafond. Mon regard se fait presque fort mais toujours inquiet. Je ne sais pas ce que fais et c'est terrifiant de se jeter ainsi dans le vide sans savoir si le sol est proche ou lointain. Pourtant, l'hésitation n'a pas le temps de s'installer sur mon cœur. Je la chasse sans pitié ; il me faut agir pour aider Galina. « Mais maintenant, je suis là. » *C'est si léger ça, si futile* « Si tu veux, tu peux attraper mes mains et les serrer jusqu'à ce que tu n'aies plus mal au cœur. Je ne sais pas si cela t'aidera, mais tu peux le faire. Serre-les comme si tu pouvais puiser de la force dedans pour chasser tes mauvais souvenirs. » Mon regard perd sa force et son inquiétude pour se faire réconfortant. *Galina, on les fera fuir tes souvenirs tu sais. Ils partiront en nous apercevant. Nous sommes fortes et prêtes à se battre contre les souvenirs difficiles* Je ne réfléchis pas à ce que je fais. J'ai arrêté de trop réfléchir et douter de mes actes. Je n'ai pas le choix aujourd'hui, je dois l'aider, impossible de ne rien faire. « Tu sais, tes souvenirs, s'ils essayent de te faire du tord, j'viendrai t'aider à les faire fuir. J'les laisserai pas te faire du mal. »

Un sourire vient illuminer mon visage. Sourire espoir, tu brilleras pour l'Éternité.


Piétinons-le jusqu'à ce qu'il ne reste de lui que des Poussières.
Repoussons Chronos de notre chemin pour atteindre nos Envies.

#466962Étudiante à l'Institut de Médicomagie et des Sciences Magiques — spécialité botanique

19 juin 2021, 10:08
{ Copeaux de Temps }  ++ 
Qui, ou plutôt quoi, étais la véritable cause de tes tourments ? *Rien* ; Tout. Tu te réfugias d'abord derrière l'horreur de ces derniers mois, par la Pluie de mauvaises nouvelles et d'encre rouge qui s'abattait sur l'Histoire ; ainsi que sur toi. Seulement, tu savais, au plus profond de ton cœur, qu'il n'était pas qu'un tourment extérieur, qu'il était aussi une tornade intérieure ; d'où le pluriel, inaudible certes. La Souffrance qui te guettait était pire qu'une unité ; elle était plusieurs. La plaie béante attirait hyènes et vautours, tous deux l’œil vif et acéré. Funeste spectacle que le Peintre vous offre là, violant les lois de Bienséance. Mais nous ne sommes pas au théâtre du XVIème siècle, lieu où la Vérité était celée derrière des lois et des masques. Ton masque tombait ; le Masque de la Société du sourire s'en retrouvait arraché ; Instant de Vérité.

Alyona fut quelque peu secouée par la gêne tout d'abord ; la sincérité est rare ; ce qui est rare surprend ; ce qui surprend gêne. Mais la Bonté du Cœur — *et de l'esprit* — de la Grande ne tarda pas à effacer cela, comme si il eût été possible de gommer les ébauches émotives incrustées sur son visage. Le plus terrible arrivait, la réponse face à l'Aveu. Tu t'en voulais tant, d'avoir, d'un coup, balancé cette Vérité un peu trop grave pour cet Instant. Qu'allait-elle faire ? Fuir, sans aucun doute. Ici vos chemins se séparaient, songeais-tu tristement. Il était des gens stables, qui parvenaient à esquiver l'écueil de la Tristesse même dans les moments les plus durs, et des personnes comme toi, *faibles, trop sensibles, lâches, menteuses, ...*. Point n'était besoin d'insister, tu savais déjà que tu avais tout gâté, *comme d'habitude*.

Et pourtant.

Il n'en fut rien. *Qu'est-ce que...* Deux lèvres, qui s'écartent, puis se referment comme le feraient des branchies ; peut-être est-ce un moyen de respirer. Perplexe sûrement ; bienveillante peut-être. Le plus frappant, ce fut sans doute l'absence d'agacement, de mépris. Tu te serais presque hasardée à dire qu'elle comprend. Non, ce serait trop beau. Que se passait-il donc ? On eût dit qu'une hypothétique fuite t'ait davantage mise en confort ; tu avais l'habitude. Or, ce qui se déroulait sous tes yeux était extrêmement inhabituel. Tes doigts, trouvant soudainement refuge sur la banc, s'y agrippaient en tremblotant ; le trouble était total. Et cela ne faisait que commencer.

Deux mains se tendirent, les paumes offertes au Ciel. *JE* Tu avais cru atteindre le pic de la déstabilisation ; tu avais eu tort. *NE* Les mots résonnaient comme si une messe alyonesque se déroulait au sein de ton crâne. *CONTRÔLE* Et les phrases s’enchaînaient, avec une douceur grandissante... *PLUS* Une invitation. Que restait-il de ta sérénité, de ta Façade, de ton Masque ? *RIEN*

Cette fois-ci, le pic était atteint. Ta bouche s'entrouvrit de surprise ; et d'une autre émotion peu habituelle que tu préféras refouler. Ta main lentement se redressa *Maintenant-elle-est-là-Maintenant-elle-est-là-Maintenant-elle-est-là* Et ces maudites phrases, d'une odieuse gentillesse ! Par l'Olympe, tu vacillais ! C'était ridicule, tu ne la connaissais pas, tu n'avais échangé que quelques mots avec elle, cela ne pouvait pas te faire perdre l'équilibre, bon dieu ! *Maintenant-elle-est-là*. Rien à faire. Cette lutte était vaine. Alyona avait pris une place royale dans tes pensées, et cette irruption était partie pour s'inscrire dans la durée. *Zeus...* Tes mains étaient à la hauteur de la table. Quelle distance restait-il ? Sûrement moins d'un mètre. Bref coup d’œil à la Grande Magnanime. Immobilisation, absence de Mouvement. Si proche ; si loin.

*Et si...* Qu'est-ce que le contact de deux mains ? *Serre-les* Qu'est-ce que cela risquerait de produire ? *Serre-les* Quel était le risque de deux peaux en fusions ? *Serre-les*. Ébauche d'un envol, le Regard de nouveau en direction de celui d'Alyona. Vivait-elle la même tempête ? Connaissait-elle le doute, elle qui semble maîtriser toute situation ? Zeus ! Le dernier Pas est le plus dur à faire. Quelle douleur de voir des images dénuées de sens te traverser le crâne — le Sourire de Swann, les Mots de Swann, les Yeux de Swann — à toute allure ; car elle n'avaient aucun rapport avec cet Instant, n'est-ce pas ? *Bien sûr que non*. Pourtant, un picotement dans le bas du ventre te donna tort, comme une provocation. *Et merde !* Tes Mains s'échouèrent dans celles d'Alyona.

C'était exactement comme tu le redoutais ; agréable. Comment avais-tu succombé face à la tentation de ces deux mains pour s'y blottir. C'était tout à fait idiot, car ton corps tremblait de toutes parts à présent. Tes paupières se fermaient. Tu avais pleinement conscience que tu approchais l'Interdit — ton Interdit —, et pourtant un instinct pernicieux te poussais à profiter de cette superposition de tes mains avec celles d'Alyona. Son Sourire...

« Je... Merci » soufflas-tu d'une voix que le tu-ne-savais-quoi-horripilant avait étreint. « J'ai... *aucune envie de quitter tes mains, parce que j'en peux plus et que je ne veux plus rien d'autre que cette sensation de réconfort et de —* Je suis désolée, je voulais pas me plaindre. Mais... »

*Je suis perdue*


*J'ai besoin de ton aide*


*J'ai peur*


*Tes Mains...*


« Je — J'vais m'en sortir. » S'il y avais bien une chose pour laquelle tu n'avais pas de don, c'était le mensonge. Tes mots manquaient cruellement d'honnêteté, mais c'était plus fort que toi, tu avais cette irrépressible envie de faire illusion. Au risque de tout gâcher ; pour de bon. Tes lèvres se tordaient, secouées par le doute. Ton Âme était déchirée entre Vérité et Sécurité. Énième regard jeté à Alyona, presque désespéré, lourd d'émotion. Finalement, tu changeas encore d'avis ; c'était décidément un spectacle pitoyable.

« Pardon, pardon. Je veux pas mentir, je te jure. C'est juste que... J'ai... J'ai pas l'habitude de m’ Ouvrir, ni de recevoir autant de Douceur à la fois. Tes Mains, elles... »

Cette phrase resterait à jamais inachevée ; l'essentiel était déjà là. Le visage qui se présentait face à toi t'avait convaincue, après mille réflexions, d'ôter la cape d'Ombre qui te drapait et de dire exactement ce que tu pensais. Et c'était étrange, tout à coup. Comme si on 'avait insufflé un élan de Liberté.

*Maintenant Elle est là ; Moi aussi*


Mes Envies ont définitivement éteint Chronos.
Drôle de spectacle ; le Peintre frissonne.

𐌔

28 août 2021, 12:27
{ Copeaux de Temps }  ++ 


*Ai-je fait ce qu'il fallait ?* Mon regard passe avec rapidité de ma main droite à ma main gauche puis de ma main gauche à ma main droite. Je contemple mes paumes tournées vers le plafond avec de grands yeux surpris. Je doute, mon cœur lourd se serre et mon bateau tangue. Ai-je été trop loin, comme avec cette Rouge-fantôme croisée avant que tout bascule ? Galina peut très bien choisir de refuser mon aide ou la considérer comme offensante. Elle ne m'a rien demandé, rien expliqué ; peut-être aurais-je dû afficher un sourire gêné et changer de sujet pour ne pas nous mettre dans l'embarras. Il est probable qu'elle prenne mal mes deux paumes tendues vers elle, comme un signe de partage ; peut-être ne veut-elle rien partager avec moi. Ira-t-elle jusqu'à se mettre en colère à cause de mes paroles et de mes actes, comme Ashley ? Et si elle refuse d'attraper mes mains, devrai-je partir avant que l'embarras et la gêne prennent trop de place entre nous ? Devrais-je cacher ma honte derrière un faux sourire, me relever et m'excuser pour garder un peu de fierté ? La bêtise de mes actes me frappe avec violence. Tout ce que je viens de faire est idiot, j'aurais dû réfléchir au lieu de faire n'importe quoi. *Mais elle a besoin de mon aide !* Je relève mes yeux pour les poser sur la Bleue, en quête d'une réaction ou d'un indice sur la manière dont elle a pris mes actes. La surprise se lit sur son visage. Je détourne aussitôt mon regard et ferme mes paupières. Elle ne s'attendait certainement pas à cela. Nous sommes deux inconnues l'une pour l'autre ; je ne connais pas les raisons de ses tourments et elle doit se demander pourquoi je cherche tant à l'aider alors que rien ne m'y pousse. Mon malaise est aisément discernable sur mon visage. Je suis allée trop loin, j'en suis certaine.

J'aurais dû bafouiller des excuses, retirer mes mains vivement et m'en aller, je le sais. Cela aurait été mieux pour Galina et moi. Mes actions n'avaient rien arrangé, j'avais plutôt l'impression du contraire. C'était une erreur de ma part de ne pas avoir réfléchi avant d'agir et de m'avoir laissé faire... tout ça.
Enfin, c'était tout du moins ce que je croyais avant que deux mains chaudes ne viennent se poser sur les miennes.

*Ooh* L'étonnement éclot dans ma poitrine comme une fleur sauvage en hiver. Est-ce réel ? Galina a-t-elle vraiment posé ses mains sur les miennes ? J'ouvre brutalement mes yeux surpris pour les diriger vers Galina et nos mains, superposées. Merlin, je ne pensais pas qu'elle le ferait. Je croyais que tout ceci était complètement stupide mais... *mais non*, pas pour elle. Cela me soulage et me surprend de savoir que Galina n'a pas refusé cette suggestion pourtant inattendue. Étrangement, ce contact produit quelque chose que je n'avais pas imaginé en le proposant : de la douceur. C'est agréable de sentir des mains contre les miennes, de savoir qu'elles sont là, juste à côté, prêtes à me soutenir et à serrer mes doigts comme pour me dire que tout va bien. Je ne peux pas m'empêcher de profiter de la douceur offerte par ses mains et du sentiment de sécurité que cela m'apporte. Pourtant, je sais qu'à l'origine c'est pour chasser les tourments de la Bleue que j'ai proposé cela, non pour apaiser mes pensées et mon esprit. Cependant, j'ai l'impression que ce contact bouleverse plus Galina que prévu. Ses paupières fermées et les tremblements de son corps me troublent. Lui aurais-je apporté plus de souffrance que de douceur ? Je suis tentée de lui proposer de retirer mes mains si elle le souhaite mais ses paroles m'interpellent avant que je n'ouvre la bouche.

« Je... Merci » Alors, Galina ne souffre pas de ce contact ? Son merci me fait un drôle d'effet, il est agréable mais en même temps, j'ai l'impression qu'il me gêne. D'ailleurs, mes pommettes se colorent doucement en rose. Est-ce que je mérite vraiment ce remerciement ? Je n'ai rien fait de particulier pour l'aider pour l'instant, j'ai plus l'impression du contraire. Mon cœur se serre un peu à cette pensée ; j'aimerais tellement pouvoir soigner tous ces Maux, à elle et à tous ceux qui en possèdent, mais je sais que c'est impossible, personne ne le peut.

Galina semble complètement déstabilisée. Elle ne termine pas ses phrases et se confond soudainement en excuses. Je me demande si cela est dû à mon geste et à mes paroles. Peut-être l'ai-je surprise en tendant mes mains vers elle. Les gens qui tendent leurs mains vers les autres sont-ils donc si rares ? Vivons-nous donc dans un monde d'un si grande égoïsme prônant l'ignorance ? Non, je dois me tromper, d'autres personnes comme moi tendraient leurs mains dans de telles situations, j'en suis presque certaine. Peut-être Galina n'a-t-elle pas l'habitude de ce genre d'actions bienveillantes et douces. Oh Merlin, j'aimerais tant pouvoir lui donner beaucoup plus de douceur, elle semble vraiment en avoir besoin.

Ses paroles confirment mes peut-être, Galina ne souffre pas du contact entre nos mains mais simplement de la surprise due à cette invitation. Presque sans y réfléchir, je plie mes doigts pour serrer les siens et poser mes pouces sur les dos de ses mains. Mon sourire n'a pas disparu de mon visage, il s'y accroche avec l'espoir de voir son reflet sur le visage de la Bleue. Je ne sais pas comment Galina voulait terminer sa dernière phrase et une partie de moi s'en inquiète un peu — mes mains sont-elles étranges ? trop froides ? trop sèches ? moites ? — mais je chasse ces inquiétudes de mes pensées comme je suis parvenue à repousser un peu plus tôt la gêne qui colorait mes joues. Mon regard ne quitte pas les yeux de Galina, j'ai peur qu'elle ne se remette à pleurer ou que tous ces gestes aient été inutiles. Et si je ne pouvais pas l'aider ? Si ses Tourments ne disparaissaient jamais et venaient la hanter encore et encore avec toujours plus de force ? *Oh, Galina, quels sont les tourments qui te font tant souffrir ?*

« Ne t'excuses pas, s'il-te-plaît. » Le contact de ses mains auparavant tremblantes me donne la force dont j'avais besoin pour trouver en moi les mots qui me manquaient. « J'suis sûre que tu vas t'en sortir. » Est-ce un tremblement que je perçois dans ma voix ? Débordement de mes espoirs. La Jarre presque vide frémit-elle ? « Tu sais, je crois que c'est à cause de leurs problèmes et de leurs tourments que les Adultes abandonnent leurs rêves d'enfant et leur manière de voir la vie. Parfois, leur douleur est si forte qu'elle les aveugle et ils en deviennent incapables de voir la beauté et la simplicité. Mais tu sais, toi tu seras plus courageuse et plus forte que ta souffrance. Tu te relèveras grâce à ce que les Adultes ont abandonné sur leur chemin parce que l'Espoir et les Rêves nous rendent plus fort. » Je ne sais si mes paroles sont plus destinées à moi-même ou à Galina. L'image de l'urne ne fait que repasser en boucle dans mon esprit, et avec elle, ma peur et ma douleur reviennent. Merlin, je dois cligner des yeux pour chasser les larmes qui tentent de déborder avec toutes ces émotions qui arrivent de nouveau. « Et puis, j'suis là. Et j'peux rester encore un peu si tu veux. »


Nous devrions éteindre Chronos avec nos Envies plus souvent, c'est si agréable.

#466962Étudiante à l'Institut de Médicomagie et des Sciences Magiques — spécialité botanique

02 oct. 2021, 23:29
{ Copeaux de Temps }  ++ 
Tout était si bancal ; tout était d'une stabilité dangereuse. Deux mains unies ; tremblantes. Qu'étaient-elles face au Reste du Monde ? Rien. *Non !* Tu avais cette instinct, cette foi romantique, loin de la rationalité, loin de la Raison — en opposition avec la Façade que tu t'imposais, avec tes gestes contrôlés — qui éclairait ton Âme d'un faisceau nommé Sensation. Cette dernière était si puissante qu'elle te faisait frémir. Ainsi, deux secondes avant la Sensation de deux paumes assemblées, tes pensées étaient Racine, Corneille, Molière ; avant de devenir Hugo, Lamartine, Gautier. Quel miracle, quel prodige que cette jonction ! Tanguer constamment, d'un pied sur l'autre — d'un extrême à l'autre —, n'était-ce pas ta raison d'être ? Tout ; ou Rien. Voilà qui te résumait fort bien.

Vous naviguiez sur une barque peu commode sur le fleuve opaque de la Surprise. De fébriles éclats limpides parsemaient la surface ; ils étaient trop discrets, trop timides pour que vos yeux captent ces mornes étincelles. Il était grand temps, par le Styx, d'accoster sur un Rivage paisible. Mais comment le faire ? Cette si grande émotion, ravageuse, prenait les Sens en otage ; sans paroles, vous n'étiez rien. *Je ne suis rien* Oh, tu prias les résidents de l'Olympe de faire que ces secondes de silence affreux prennent fin. Chaque instant était un pilori ; dont les pierres étaient la Gêne, le Miroir et les Semblables. Il l'était jusqu'à ce qu'un geste, une parole, un regard, un sourire, ne vienne cueillir la cerise de ton Cœur. Un regard ! Tu levas la tête ; c'était cela. En baissant la tienne, tu avais manqué ce sourire et ce regard d'un bleu paisible. Certains regards, certains sourires te transperçaient les entrailles de leur froideur, de leur mépris ; ceux qui t'effleuraient l'Âme étaient la Douceur-même. C'était beau. *Mais mérité-je vraiment cela ?*

Ce fut l'apogée lorsque, comme une bénédiction de l'Olympe, comme une Correspondance, les deux pouces d'Alyona, par un mouvement divin, vinrent s'unir avec tes phalanges. Sans que l'on puisse parler d'osmose, l'union était déjà solide comme un chêne. C'était nouveau, cela, cette sensation de proximité avec une personne que tu ne connaissais que de vue. Avant cette rencontre, les Liens que tu entretenais avec d'autres personnes de ton espèce se solidifiaient avec le temps, ne se formaient pas en quelques instants. Alyona, sans en avoir conscience, avait bouleverser ton approche des autres. C'était fascinant et terrible ; tu t'ouvrais. A tes risques et périls.

Puis, flot de Mots. Quelle assurance, quelle détermination ! *Elle m'connait pas* Il y avait tant de conviction, tant de bienveillance dans ses paroles que tu craignais qu'elle ne soit déçue lorsqu'elle gratterait l'écorce ; lorsqu'elle serait face à Hannah. *Elle me connait pas* Que faire ? L'admettre, c'était mentir — encore. Dire la Vérité, c'était risquer de tout perdre. Le Silence et le Mensonge, définitivement, étaient des foyers que tu fréquentais de plus en plus souvent. Les routes que tu arpentais étaient pernicieuses et dangereuses. A force de te perdre sur ces sentiers, la Réalité finirait par te dévorer comme un animal féroce. Tu en avais conscience ; alors tu fonçais sans réfléchir.

*Elle... Elle reste ? Elle reste ! Zeus, elle reste !*

Comble de joie, balayant tes sombres pensers comme le mistral dans le ciel encombré. Elle restait. Quel bonheur, ah ! Enfin, elle pouvait rester. Ses mots étaient une perche ; il fallait la saisir, vite.

« Je... J'veux bien. »

Tu ne te préoccupas même pas de ta voix tremblante ; tes pensées étaient fixées sur la Perche d'Alyona. La perspective de quelques minutes de plus, main dans la main. La perspective de quelques minutes de plus, face à ces yeux d'azur. La perspective de quelques minutes, un sourire sur le bout des lèvres. Tout exhortait à l'Allégresse ; ton Visage commençait à s'éclairer ; la Lueur se fit Lumière. Dea eût été pâle à côté de ces Rayons que tu émettais enfin. Le lâcher-prise n'était peut-être pas le monstre perfide que tu avais toujours imaginé. Les masques tombaient, ce matin.

Ton sourire était grand et pluriel ; comme l'Univers.

Joie ! Joie d'écrire avec toi, joie de voir Hannah sourire, joie de ces petits riens qui font nos grands moments.

𐌔

01 nov. 2021, 10:58
{ Copeaux de Temps }  ++ 
Savez-vous qu'un sourire peut être plus aveuglant et lumineux que le Soleil ? Oh, bien sûr, sa lumière n'est pas vraiment extérieure et plisser les yeux face à celle-ci ne sert à rien. La flamme du sourire est invisible à l'œil nu, elle se ressent. Un sourire n'éclaire pas à proprement parler. Cependant cela ne l'empêche pas d'avoir des rayons plus éblouissants que ceux de l'Astre du Jour et d'être plus chaleureux encore que les Danseuses de lumière d'un feu. Les sourires ont ce pouvoir inégalable et unique qui leur permet d'éclairer les pensées les plus sombres, de faire étinceler les regards les plus tristes et de faire fleurir dans les cœurs les plus douloureux les Tournesols les plus grands. Les sourires sont des remèdes contre la peur, l'ennui, la mort, le silence, la souffrance ; un sourire peut tout soigner et parfois se montrer plus efficace qu'un antidote. Lorsque des lèvres s'étirent en demi-lune, elles ne sont plus qu'une simple grimace, un sens leur est donné, une lumière leur est offerte et des pouvoirs leur sont accordés. Sourire est quelques fois plus efficace que certaines paroles.
Malgré tout, parmi les sourires, tous ne parviennent pas à produire ces effets. Certains sont faux, créés par des hypocrites ou des menteurs ; d'autres sont ironiques, bien loin de la douceur d'un vrai sourire, quelques-uns ressemblent plus à des grimaces, formés par ceux qui souhaitent passer pour des êtres forts ou construits par ceux qui se forcent afin de paraître heureux. Les vrais sourires, eux, se reconnaissent bien vite. Le visage n'est pas le seul qui s'illumine alors, le cœur rejoint lui aussi ce cercle prêt à former un Soleil, tout comme le corps qui s'ouvre, les yeux qui pétillent et les joues qui s'étirent. Ces sourires-là ne peuvent disparaître comme les autres, ils sont si doux et lumineux que personne ne veut les voir s'en aller. Alors ils resplendissent comme des bijoux, aveuglent comme l'Astre du Jour et font fleurir les Tournesols cachés dans les cœurs grâce au bonheur qu'ils procurent.

Mon sourire est un de ces sourires-là ; immense, il dévore mon visage et illumine mon cœur. Je rayonne dans cette Grande Salle et je trouve cela fantastique.

Le sourire de Galina fait écho au mien. Nous nous regardons l'une l'autre avec nos lèvres étirées comme des miroirs, nos mains serrées et nos yeux, ces grands puits, plein de lumière. C'est beau et foutrement agréable. Merlin, est-ce réel ? Comment un moment comme cela peut-il exister alors que tout autour de nous est si sombre ? L'urne recouvre de son ombre terrifiante la Grande Salle, les murmures se font étouffants, les regards scrutateurs et le parfum qui règne dans l'air est celui de personnes tendues et inquiètes. Pourtant, Galina et moi rayonnons. Nous sommes la lumière du phare qui balaye l'horizon sombre de la mer et l'arc-en-ciel au milieu du ciel gris. Par Hélios, que c'est doux de ressentir un tel rayonnement dans un instant pareil ! Et, même si tout cela ne durera qu'un moment, même si la lumière que nous partageons s'éteindra et que le bruit nous envahira de nouveau, j'aurais eu la chance de vivre cela. Certes, tout ceci était pour le moins inattendu. Pourtant, au fond de moi, je crois que c'était ce qu'il me fallait. J'avais terriblement besoin de ressentir et de vivre ceci, de laisser une telle lumière me rendre ivre. Alors, même si tout redeviendra certainement comme avant quand quelques minutes, je serai sûre de repartir avec dans le creux de mon cœur un petit rayon de soleil.

Je suis la première à détourner mon regard, Merlin seul sait pourquoi. Est-ce que cela me fait peur de ressentir un tel bonheur alors que l'urne noire promet un avenir si gris ? Après tout, ai-je le droit d'être heureuse quand Chu-Jung, Mei et Qiong sont enfermés dans des cages ? Ai-je le droit de sourire ainsi alors que tout va si mal ? Cependant, rester enfermée dans des pensées sombres car ce que je vis est difficile n'est pas non plus une bonne idée. Et puis, je ne connais pas l'avenir alors profiter du bonheur qui m'est offert, n'est-ce donc pas une bonne chose ? Mon sourire tremble légèrement sur mon visage avant de redevenir comme avant. Cet instant me rappelle celui que j'ai vécu avec la Jaune du train par cette soirée d'orages. Pourtant, ce que je vis est assez différent. Une petite douleur vient piquer mon cœur quand je revois le visage de la Jaune près du mien ; cela commence à faire longtemps que nous nous ignorons mais je n'ai pas le courage de venir lui parler, peut-être que je ne sais pas que dire pour chasser les mois de Silence. J'éloigne le visage de la Poufsouffle de mon esprit ; c'est inutile de me torturer l'âme ainsi.

Mon regard revient se plonger dans celui de Galina. Cela me fait un bien fou de vivre un tel moment. D'ailleurs, je souris tellement que j'en ai mal aux joues. Merlin, que je suis bien ici ! Mes jambes se balancent sous la table. Mon sourire est rayon de soleil. « Merci. » *de m'permettre de rester avec toi et de ressentir tout cela.* « C'est si agréable de sourire ! J'ai l'impression que nous sommes plus lumineuses que le Soleil. » Mais n'est-ce qu'une impression ? Par Circé, je n'en sais rien mais je crois que pour une fois, cela m'importe peu. *J'm'en fous*, et cela me fait encore plus sourire. Je suis ivre de Bonheur.


Oh, c'est une joie réciproque !


(D'ailleurs, merveilleux anniversaire à toi et à ton étonnante Protégée, cher poëte !)

#466962Étudiante à l'Institut de Médicomagie et des Sciences Magiques — spécialité botanique

01 déc. 2021, 18:44
{ Copeaux de Temps }  ++ 
Son sourire est d'une beauté qui ne me laisse pas de marbre. Le genre de sourire qui est vraiment — en tout cas j'en ai l'impression — sincère et auquel je réponds généralement par un autre sourire sincère, sauf lorsque mon humeur fait des siennes et m'emporte loin de la bienveillance. C'est ce que je fais aujourd'hui, car la Colère, la Peur et l'Effroi sont des continents lointains dont je n'ai presque plus connaissance ; tout à l'heure je marchais sur leur sol. Les choses changent vite chez moi.

C'est un peu étrange, ce que je ressens. Un mélange de béatitude et de curiosité qui me dévore les entrailles — mais d'une façon positive, je crois — et qui me rend un peu hors de mon corps. Mon Âme s'élève un peu, et j'ai l'impression (pensé-je) que celle d'Alyona aussi. Nous sommes des Oiseaux blancs, porteurs de paix. Ou des Oiseaux noirs, pour rompre avec les mythes qui font des couleurs sombres un blasphème. Ah, je reconnais bien là ma volonté de briser tous les codes et toutes les règles ; ce que je ne fais pas nécessairement par envie mais surtout par pulsions. J'ai besoin d'aller à l'inverse de ce que font les Semblables, j'ai besoin d'être la confidente du Mal, j'ai besoin de me tapir dans ce que tout le monde ou presque appelle l'Obscurité. Je ne sais pas si c'est une bonne chose ou une mauvaise — discerner le Bien et le Mal est pourtant censé être une des grandes facultés des individus de mon espèce — et j'ai l'impression que je m'en moque allègrement. Ce qui compte pour moi, c'est d'avancer. Peu importe sur quelle route, peu importe sur quel chemin. Du tant que je fonce tout droit, tout va bien.

« Et que la Lune ? » ne puis-je m'empêcher de lancer.

Le Soleil a à mes yeux un caractère inquiétant. Il me brûle la peau, et il guide les Semblables vers le lieu que j'apprécie le plus, à savoir le Parc. Et une fois que tous ces braves gens sont massivement de sortie, le calme disparait, et je suis obligée de me cloîtrer dans mon dortoir ou d'errer dans les Couloirs. Alors le Soleil et sa lumière — je dirais plutôt sa lueur ; Victor Hugo précisait dans un ouvrage que la lueur a quelque chose de profondément vil et pernicieux — sont un peu comme les voyageurs que je croise dans le Poudlard Express ; des inconnus dont je me méfie.

La Lune quant à elle, donne à l'Homme l'impression qu'il est leur de quitter la besogne et de se reposer. C'est à ce moment là que le Silence reprend ses droits. J'ai une nouvelle fois l'image de cette Inconnue, ô merveilleuse, qui de ses mains avait guidé mes pensées sur un air de piano ; aujourd'hui encore je m'en souviens et la remercie intérieurement. La Lune est l'Astre de la Nuit, et la Nuit est l'Astre de ma vie ; ma vie n'est l'Astre de personne, je crois. Alors je n'ai pas pu retenir ces quelques paroles. Je me sens obligée de me justifier.

« Je... J'aime beaucoup la Nuit, tout est plus paisible. Tout m'éclaire et tout me guide »

Je garde mes yeux dans les siens, cela n'est plus difficile. j'ai pleinement conscience que je lui accorde une telle confiance qu'elle pourrait me faire faire n'importe quoi. Certains appellent cela de la naïveté, moi j'appelle cela le Lien, puissant. Je crois en ce que nous allons créer, Alyona et moi. Je crois en cette personne, je crois en cette Âme, oui. Et pour rien au monde je ne laisserait mes pensées semer le doute quelque part dans mon cerveau. Car malgré le remous permanent et le chaos de mon esprit, j'ai besoin d'une certitude à laquelle m'accrocher. Alyona est cette certitude.

Je songe, je tangue intérieurement, tout en explorant les yeux de la Bleue. Je me perds dedans comme une femme qui prend la mer, je me vois dedans comme une femme face au Miroir.

Pour un autre anniversaire.
Ravi de poursuivre l'écriture de ce Moment.
Carpe Diem.

𐌔

26 déc. 2021, 12:25
{ Copeaux de Temps }  ++ 
Certains évènements sont capables d'éveiller des émotions assez fortes pour retentir dans le corps en plus des pensées. On a, sans pouvoir le contrôler, un énorme sourire sur les lèvres. Notre cœur semble proche de l'envol, comme si l'effacement soudain des problèmes si pesant dans nos pensées l'avait rendu plus léger. Les mains tremblent, parcourues par le bonheur jusqu'au bout des doigts. Les yeux pétillent et brillent comme des petits soleils. Une force nouvelle semble s'emparer de nos muscles et on se croirait soudain capables de faire n'importe quoi. Dans nos veines se baladent une énergie et un plaisir inespérés. On voudrait cligner plusieurs fois des yeux tant cela semble impossible. Ressens-je vraiment cela ? N'est-ce pas qu'une illusion, une sensation inventée de toute pièce ? Mais c'est juste la joie qui fleurit en nous, après avoir soulevé en grandissant des montagnes de soucis étouffants. Elle croît et nous la regardons avec fascination, sans penser qu'elle est si fragile qu'une simple bourrasque est capable de l'arracher. Elle est belle, n'est-ce pas ? On souhaiterait pouvoir la contempler et la ressentir pour l'éternité. Elle arrive sans prévenir, s'empare de nos pensées puis de notre corps, et nous voici remplis par elle. Voyez comme je rayonne ! Mes douleurs sont de lointains souvenirs abandonnés, c'est le bonheur qui les repousse loin de moi.
Et dire qu'elle vacille si facilement, petite fleur fragile.

*La Lune* Tout tangue soudainement. Je dégringole de mon sommet avec l'impression d'avoir reçu un grand coup dans le ventre. Mon visage se décompose. C'est au tour de mon sourire et des étincelles coincées dans mes yeux de s'envoler.
L'Œil blanc qui nous regarde de tout en haut, comme s'il nous surveillait. Nuit et jour, aucune pause, toujours rivé sur nos moindres actions. Il ne disparaît jamais, sauf derrière les nuages. La Lune qui danse avec les étoiles. Tout revient toujours à cela : la Lune, les *maudites* étoiles et le voile terrifiant de Nyx. C'est une boucle infernale, un maléfice lancé sur ma vie, une vieille douleur que l'on croit avoir oublié mais qui ressurgit tout de temps ; en fait elle ne s'est jamais cicatrisée. On croit que le bonheur peut se cultiver pour ne plus jamais cesser de grandir, mais moi je crois que le bonheur est un peu comme un son ; parfois fort et douloureusement présent, parfois éteint et presque absent. Le bonheur aime jouer avec nos cœurs. Au moment où on le pensait intouchable et éternel, il s'écrase sur le sol, et nous voici perdus, ébahis et choqués. Ah, les étoiles m'auront décidément tout pris !

Galina, les yeux plongés dans les miens, continue à faire l'éloge de la Nuit. *Heureusement qu'elle ne me parle pas des étoiles.* Pourtant, c'est comme si elle le faisait. Nyx qui éclaire et guide. *Merlin !* J'entends de nouveau la voix de maman dans mon crâne. Sa voix pleine de passion, de plénitude et de bonheur quand elle me parlait en regardant le ciel étoilé de ses secrets, comme s'ils étaient de vieux amis. Je m'étouffe avec mes pensées.

Le Noir qui broie nos certitudes et nos espoirs, la Lune qui nous épie comme si nous étions les pauvres moutons qu'elle surveillait *avant d'les dévorer*, les étoiles qui rayonnent comme de petits soleils, nous faisant croire qu'elles sont merveilleuses et là juste pour nous tendre les doigts et nous faire rêver. Ah, illusions ! Galina est tombée dans leur piège ! Mais elle ne va pas vouloir en sortir, elle aussi. Comme la Bleue plongée dans sa bulle et ses mots-venins, comme la Rouge et ses sortilèges de feu, comme tous ceux que j'ai croisé et qui semblaient d'accord sur un seul point : les étoiles et le ciel nocturne sont merveilleux.

J'étouffe. Mes mains sont crispées contre celles de Galina et je respire plus rapidement. La Nuit comme guide. Peut-on être guidé par le noir ? Peut-on être éclairé par les ombres ? Sommes-nous capables d'aimer l'obscurité comme une vieille amie qui vient bercer nos pensées ? Pouvons-nous être heureux entourés de ténèbres ? Cette fois-ci, c'est le Lac Noir qui s'impose dans mes pensées. Le Lac Noir et ses sombres abysses prêtes à me dévorer. Je me rappelle de la peur, tellement immense et infinie qu'elle semblait me dévorer les entrailles. Je me rappelle de l'eau autour de moi qui me donnait l'impression qu'elle cherchait à me faire disparaître. Je me rappelle que même les yeux grands ouverts, je ne parvenais plus à apercevoir la lumière ; elle était si loin qu'elle paraissait inaccessible.
Le Noir m'étouffe. Je dégringole dans mes failles.

Il faut que je me ressaisisse. Je ne peux pas laisser tomber Galina comme cela. Le bonheur qui fleurissait en moi ne peut pas être parti si vite. Il doit en rester un peu tout au fond, non ? Je dois continuer à sourire, comme si de rien n'était. Attraper les restes de lumière et les coller sur mon visage. L'obscurité ne va pas gagner encore une fois, n'est-ce pas ? Je vais réussir à retenir un peu de joie pour réparer mon cœur. Je ne vais pas tout abandonner, Merlin ! Galina a besoin de moi. Je dois continuer à la soutenir et renforcer ce quelque chose grandissant qui nous rendait si lumineuses. *Rendait*, merde. Ce n'est pas fini ! Ce n'était qu'une erreur, un lapsus ! Je peux encore sourire, voyez-vous ? Non, ce n'est pas une grimace ! Voyez, c'est réel ! Ce n'est pas sincère mais c'est réel ; et c'est tout ce qui compte, non ?

Oh Merlin. Comment reconstruire ce qui vient de tomber sans faire cela d'une mauvaise manière ?

« Je... » *OUVRE LES YEUX GALINA, LA NUIT NE GUIDE PERSONNE AUX BONS ENDROITS !*
J'inspire profondément. Je ne dois pas trembler. Mais, je ne sais que faire ! La panique et la terreur se glissent sur mon visage. Je tombe, je chute ! Tout s'emmêle et mes peurs reviennent à la charge. Et ma colère, par Circé ! Orage de pensées.

L'urne *noire* danse de nouveau dans mes pensées, accompagnée par les étoiles régnant sur une toile *noire*, le Lac *noir* et ses abysses ainsi que la Lune, œil blanc au milieu de ce visage *noir* de Nyx.
Et je suis prise au piège par mes terreurs.

« Je... Je dois y aller, désolée. »

Mon regard quitte brutalement celui de Galina tandis que je lâche ses mains. Mon cœur bat vraiment très vite. Je recule et quitte le banc de la table des Serdaigle. Ma main droite vient recouvrir ma bouche. J'essaye de cacher ma frayeur mais j'ai l'impression qu'elle sort par tous les pores de mon corps. Mes yeux brillent et mon regard est flou à cause des perles salées qui me brouillent la vision. *Ne pas se laisser dévorer* Mais j'ai tellement peur !

Je tourne le dos à Galina et mes genoux tremblent.

Elle va m'en vouloir. Je suis incapable de la soutenir. Je suis incapable de vaincre mes démons. Elle va me prendre pour une lâche et une faible. Elle va se poser des questions. Elle va se mettre en colère ou retomber elle aussi dans ses ténèbres. Elle va me détester d'être partie comme cela *comme Alison*.

Oh la la. Je-ne-peux-pas-recommencer.

Je me retourne brutalement vers Galina, prise d'une panique soudaine.

« Oh pardon. J'suis tellement désolée. C'est l'noir il... » *J'vais passer pour une idiote.* « Il m'fait peur. » Ma voix se brise sur ces derniers mots. Des sanglots grimpent dans ma gorge.


Argh. Et dire que je voulais terminer ce post par un joli : "joyeux Noël !". Cela semble soudain très étrange.
C'est incroyable, Aly cache une boule énorme d'émotions douloureuses derrière les étoiles et le ciel nocturne. Je me demande comment elle fait pour parvenir à garder cela enfoui en elle.

Désolée de faire subir cela à Galina, j'en veux un peu à ma gamine.
Tout de même Joyeux Noël ?

#466962Étudiante à l'Institut de Médicomagie et des Sciences Magiques — spécialité botanique