Était-ce l'approche des fêtes qui rendait Eileen joyeuse et donc d'autant plus espiègle ou bien simplement le froid qui lui donnait l'envie de tout le temps bouger pour ne pas grelotter sur place ? Toujours est-il que l'adolescente était taquine, perpétuellement à la recherche d'une plaisanterie à faire. Elle aimait tellement cette période, toute cette magie autour d'eux et elle ne parlait pas de celle qu'elle faisait avec sa baguette magique. Non, celle de Noël est bien plus particulière et d'ailleurs pas réservée qu'aux sorciers. Alors oui, ça la mettait en joie. Au point de se sentir capable d'affronter le pire hiver possible, du moment qu'elle était vêtue de son gros pull avec un renne au gros nez rouge dessus. Oui, oui, c'était kitsch à souhait mais elle assumait.

En attendant, elle avait quitté le douillet confort offert par la cheminée de la salle commune pour se rendre dans la Grande Salle à la recherche de sa prochaine victime. Elle ne savait pas encore trop ce qu'elle allait faire mais elle avait confiance en son imagination pour trouver le moment venu. Elle entra dans la pièce et admira un moment les magnifiques sapins qui l'ornaient, chargés de décorations assez hétéroclites. C'était splendide de son point de vue. Et c'est quand le vent s'engouffra, alors que la porte du Hall s'ouvrait, faisant bouger les branchages qu'elle eut l’illumination nécessaire. Oh oui, ça présageait une bonne rigolade !

Elle regarda autour d'elle et remarqua une Gryffondor à sa table. Une blonde de quoi, première, deuxième année peut-être ? La cible parfaite pour sa petite plaisanterie du jour. Elle s'approcha donc d'elle, pris une mine piteuse et se lança :

"Dis, tu sais qui a installé les décorations de ce sapin ?" lui dit-elle en pointant du doigt l'arbre le plus proche. "Parce qu'il y a un problème... L'angelot sur la branche haute, là... c'est un cadeau pour ma p'tite sœur malade et.. ben il devrait pas être là. Tu veux bien m'aider à le récupérer ?"

Youhou, elle se serait donné un E pour sa prestation théâtrale mais est-ce que ça allait marcher ? Après tout, il suffisait que la Gryffondor dise qu'elle ignorait tout de l'erreur et qu'elle se moquait de ses problèmes et tout tomberait à l'eau. Pour le reste, heureusement, elle avait pris quelqu'un qu'elle ne connaissait pas donc aucun moyen pour elle de savoir qu'elle n'avait pas de petite sœur mais uniquement un grand frère. Parfaitement en bonne santé, aux dernières nouvelles.

J'ai froid. Je grelotte sous mon pull en laine malgré la chaleur qui se dégage de le grande cheminée. Recroquevillée autour d'un chocolat chaud comme s'il s'agissait de la dernière lueur d'espoir pour me réchauffer, je me maudit. Je me maudits de ne pas avoir empilé lainage, écharpe et sous-pulls jusqu'à en être en nage. Au moins je ne me gèlerais pas dans la Grande Salle. Mais il se trouve que le froid est le prix à payer pour profiter de la Magie de Noël de l'école. Les grands sapins ornementés, les flocons magiques qui chutent délicatement du plafond... Oui, ça vaut le coup d'avoir la chair de poule pendant quelques mois. A condition que le vent qui siffle ne me file pas un rhume.

Je retiens de justesse un reniflement disgracieux en voyant s'approcher une grande. Mine sombre, pas traînant et se dirigeant vers moi. Rien que ne vaille en somme. Par Merlin, j'ai fais quelque chose qu'il ne fallait pas ? Instinctivement, je me recroqueville. Mais cette vision intimidante est contrebalancée par l'affreux pull de Noël qu'elle porte. Je réprime un haussement de sourcils qui risquerais d'assombrir encore un peu son visage. Je ne sais pas ce qu'elle me veut, ou si c'est à moi qu'elle en veut, mais j'aimerais qu'elle s'exprime, et rapidement avant que je fasse une crise d'angoisse sur place.

- Dis, tu sais qui a installé les décorations de ce sapin ?

Je suis plus que surprise. Excuse-moi, mais je ne connais pas le décorateur-en-chef du château. Et pour ce sapin en particulier... Cette fille en demande beaucoup et je commence à me questionner sur le fait qu'on se tourne vers moi pour ça. Un brin agacée, je m'apprête à lui répondre que, non je ne sais pas et ne vois pas pourquoi je devrais savoir, mais de toute sa hauteur, la suite me prend de court.

- Parce qu'il y a un problème... L'angelot sur la branche haute, là... c'est un cadeau pour ma p'tite sœur malade et.. ben il devrait pas être là. Tu veux bien m'aider à le récupérer ?

Je me fige. Stoppe brutalement toute remarque sur cette fille. Sa sœur est malade ? Et son cadeau s'est retrouvé dans un des sapins de l'école ? Je comprends mieux cette mine triste. Mais encore une fois, pourquoi moi ? Vraiment, je ne comprends pas. Elle est plus grande et sait certainement mieux se servir de la magie que moi. Une petite partie de moi me souffle que c'est Noël, que je devrais avoir honte de réfléchir autant au lieu d'aider celle qui me le demande. Sois altruiste. Sois gentille Aster. Je me lève. Sans maugréer, sans pester ou râler. Je me mets juste debout pour considérer le problème. Impossible d'atteindre la branche en question, même en me mettant sur la pointe des pieds. En utilisant la magie, je risque d'abîmer l'objet qui semble trop délicat et fragile pour survivre à une chute. Pas le choix, il faut que je monte sur quelque chose. Autour de moi, rien qui ne se déplace facilement outre cette fille, mais il est hors de question que je grimpe sur les épaules d'une inconnue. Non. Reste le banc. A condition d'en déloger tous ceux assis pour le tirer à grande peine jusqu'au sapin. C'est ce que je fais. Mais faire bouger l'assise requiert plus de force que je n'en possède et je ne parviens qu'à le faire pivoter sensiblement. Puis, debout sur le vieux bois, je me hisse. Même de là, je ne peux ne serait-ce qu'effleurer le petit ange. Je soupire. On a pas finis de fouiller le chaudron...

Le froid était décidément bien installé à Poudlard. Malgré un nombre impressionnant de couches de vêtements - et oui, Maddie commençait à avoir de l'expérience en matière de rude hiver - cela ne suffisait même pas. La préfète se dit qu'elle allait devoir sortir l'artillerie lourde dés sa prochaine ronde si elle ne voulait pas attraper un rhume carabiné. Prendre de la Pimentine n'avait rien d'agréable alors si elle pouvait éviter, elle préférait tout autant. Elle poussa la porte du château après son tour dans le parc où aucun incident n'était à déplorer et décida d'aller se réchauffer avec un chocolat chaud. Elle s'orienta alors vers la Grande Salle tout en retirant son manteau pour révéler sa cape d'hiver. Il faisait nettement meilleur à l'intérieur, mais c'était loin d'être les Caraïbes pour autant !

La démarche rapide comme à son habitude, elle avait la table de Poufsouffle pour objectif. Elle se laissa cependant happer par la belle décoration du lieu. Ce n'était pas la première fois qu'elle la voyait, mais à chaque fois elle était admirative. Cette période de l'année était magique à ses yeux et à Poudlard encore plus particulièrement. Lors de son tour d'horizon, son regard atterrit sur une scène qu'elle jugea comme dangereuse. En effet, une élève était debout sur un banc et tentait de saisir un objet bien trop éloigné d'elle. Maddie accourut alors et intervint :

"Attends, attends, c'est trop dangereux là. Descends, on va approcher le banc ou trouver une autre solution." se rendant compte de la présence d'Eileen Eastwood, elle s'adressa aux deux filles : "Vous pouvez m'expliquer la situation ?" demanda la préfète.

Je suis navrée de ce retard

Garder son sérieux, garder son sérieux... oh que c'était difficile pour Eileen qui voyait toutes les émotions parcourir le visage de sa victime du jour. Elle avait bien vu qu'elle était à deux doigts de l'envoyer paître ailleurs avant de se laisser amadouer par l'idée de la petite sœur malade et la Serpentard devait faire appel à toute sa maîtrise pour garder un air triste alors qu'elle voyait la Gryffondor se percher sur le banc... sans succès vu qu'elle était haute comme trois - non deux - pommes.

Seulement, comme toujours à Poudlard, rien ne se passait jamais comme prévu. Ça amenait du piquant à la vie mais, parfois, comme ce jour-là, la rousse s'en serait bien passé. Surtout quand le "piquant" arrivait en la personne d'une préfète et pas n'importe laquelle. Maddie Joy. Pff, si ça c'était pas la poisse.

"On fait rien de mal m'dam la préfète." répondit alors Eileen sans même jeter un œil vers la Poufsouffle.

Nan mais c'est vrai quoi, elles ne faisaient aucune bêtise alors de quoi elle se mêlait franchement ? Elle faisait du zèle ou c'était simplement dans sa nature de fourrer son gros nez partout, tout le temps ? Bon d'accord, l'adolescente n'était pas particulièrement avenante avec la blonde mais il faut dire que le passif entre elles, elle ne pouvait pas l'oublier comme ça. Rien à voir avec Jeffrey qui n'avait été que l'étincelle mais la soit-disant douce blonde avait été une des choses qui l'avait conduite, ce jour-là, au bord du lac. Et ça, jamais elle ne le lui pardonnerait.

Elle se tourna alors vers la Gryffondor et, bien plus aimable, lui dit alors :

"Merci pour ton aide. Je me débrouillerai autrement mais vraiment, merci à toi."