Tu as chaud. Dès que tu fais un mouvement, le soleil brûle de plus belle sur ta nuque. Si tu avais seulement un peu d'eau, tu n'hésiterais pas à te la balancer à la figure. Mais tu reste là alors que les eaux du Lac Noir sont devant toi, à ta disposition. Tu pourrais très bien avancer ton bras d'un mètre et demi pour te tremper ta main, mais le moindre effort semble te coûter des millions.

Tu es épuisée. Tu n'en peux plus. Tu n'as pourtant rien fait de très physique aujourd'hui, mais le soleil a le don de t'exténuer . Tu n'oses pas bouger, alors que tu croule sous une canicule au soleil de fer. Inspire, Expire. Même respirer te semble lourd. Le fait de porter la vie est trop gros.

Mais tu n'es pas sûre que cela soit physique. C'est seulement dans ta tête que tout est fatigant. Fatigue ? Plus grosse que tu ne l'as jamais eue. Tu aimerais ne penser à plus rien, mais les Pensées sont plus fortes que tout et te bourrent le crâne. Pression permanente, tes Pensées sont tellement chargées et incompréhensibles pour toi que tu as l'impression de ne plus pouvoir bouger.

Tu arrives à te glisser au bord du Lac. Tu enlèves tes chaussures et tu trempe tes pieds dans l'eau. Tu les plonges plus en profondeur, et sans penser au fait que tes vêtements seront eux aussi mouillés, tu glisses ton corps entier dans le Lac. Tu plonges ta tête sous l'eau. Ça fait du bien. C'est rafraichissant. Tu te vides de tout et ne penses à plus rien. Tu es bien.

Tu te laisses tomber sur la pelouse, sous l'ombre fraiche d'un arbre.
Il faisait chaud. Terriblement chaud.
Tu consultes ta montre. Il n'était que quatorze heures cinquante-deux.
Tu soupires, lasse.
Les rayons de soleil te tapent sur le visage, te faisant plisser les yeux.
Il n'y avait pas un seul nuage dans le ciel.
Tous les élèves s'étaient réfugiés au château, bien au frais, et le parc était désert.

Tu regardes aux alentours, et vis une Autre enlever ses chaussures, puis tremper ses pieds dans l'eau. Tu la regardes, de là où tu es.

Elle s'immergea totalement dans le lac. La première pensée qui te vient à l'esprit est qu'elle sera trempée, et ce ne serait pas très pratique pour aller en cours. La deuxième est qu'en fait, cette idée te semblait bonne.

Tu sortis de l'ombre, et t'assis sur la pelouse, tout près du lac, en face de l'Autre.
Sans un mot, tu te libères de tes chaussures et retrousses tes manches, prête à plonger dans l'eau fraiche du lac noir.

— Je... peux te rejoindre ? lui souffles-tu, le rouge te montant aux joues.

Tu regrettes aussitôt tes paroles. Tu n'avais qu'à la contourner pour aller te baigner un peu plus loin. Mais bien sûr, cette option ne te venait à l'esprit qu'après lui avoir demandé si tu pouvais la rejoindre.

Agréable. Le seul mot qui puisse être à la hauteur de ce que tu vis. Jamais tu n'as été autant apaisée ces derniers temps. Mais tu aurais du y penser plus tôt ; l'eau. Celle qui te réconforte à chaques tourments. L'Eau. Tu te laisses embourber dans ce liquide transparent et frais. Tu te laisses vider des pensées qui te tournent autour. Vide. Tel est ton esprit. Tu es tellement bien dans ce monde qui n'existe pas. Dans ce monde qui n'appartient qu'à toi. Tu y restes quelques secondes avant de remonter vers ses portes. Non pas que l'oxygène te manque, tu veux juste comparer ce monde avec le vrai.

Là-haut. Tout est moins beau. La réalité t'étouffe et tu voudrais redescendre dans tes profondeurs. Mais une chose te retient. Des mots. Une fille du monde réel t'interpelle. Tu ne penses pas à l'image que tu donnes, trempée. Tu réfléchis plutôt à sa question, et à ta réponse. Tu n'aurais pas voulu que l'on te dérange dans ce qui t'appartient. Dans ce que tu vis. Mais tu te sens obligée de partager cette détente. Ce vide.

❝Viens❞. Ce mot résonne dans ta tête. Est-ce toi qui l'a prononcé ? De toute manière, quelle importance. Elle n'a qu'à venir, et se détacher de cette chaleur étouffante. Tu ne prends pas le temps de regarder son visage. Tu ne prends pas le temps de te rendre compte que tu la connais de nom. Mais tu te laisses faire par les flots, et replonges dans ton monde.



@Ava Meywood

– Viens, te prononce-t-elle d'un air vague et rêveur, perdue elle aussi dans ses pensées.
– Merci., lui souffles-tu.

Merci pour quoi ? Tu n'en avais aucune idée.

Avec un soupir d'aise, tu plonges tes jambes dans les eaux du lac.
Apaisée par sa fraicheur, tu t'autorises à t'enfoncer davantage dans l'eau, immergeant ton corps jusqu'à ton cou.

Tu lâches la bande de terre auquel tu te cramponnais, pour nager vers le centre du lac.

Tu sens l'eau froide apaiser ton corps meurtri par la chaleur.
Tes pieds te propulsent vers la direction souhaitée en créant des vagues, en éclaboussant tout ce qui se trouvait aux alentours, y compris ta camarade.

Tu regardes l'Autre un instant. Une idée germait dans ta tête, mais tu n'étais pas sûre que ton interlocutrice accepterait.
Mais après tout, qu'est-ce que tu risquais ?

– Hey, on fait la course ? La première arrivant au bout du lac, là-bas, aura gagné. fis-tu en direction de ta camarade Vert et Argent.

Tu soulèves une deuxième vague vers elle, l'éclaboussant à nouveau, en riant aux éclats, avant de plonger la tête en première pour fuir une potentielle tentative de vengeance.

D'habitude, tu aimais le calme et la sérénité du parc, mais aujourd'hui, c'était différent. Tu voulais juste te décompresser, t'amuser. Peut-être était-ce sous le coup de la chaleur ?