Le froid glacial de l'hiver envahit la tour Ouest lorsque je pénètre dans la Volière. *Pourquoi est-ce qu'il l'ont mise aussi loin* ? Je claque la porte derrière moi et essuie mes pieds glacés — et ensevelis par la neige — sur le paillasson. J'enlève mon manteau, et le dépose sur le bord de la fenêtre fermée. Cela fait quelque jours que j'ai vu Fred à Pré au Lard, et un peu moins que l'on s' est revus dans la salle sur Demande. Depuis, je ne fais qu'y repenser. Il s' est passé tellement de choses ces derniers jours que je suis complètement perdue moi-même. Maintenant, il faut aller de l'avant, en commençant par la lettre pour Maman. Suis-je seule dans cette pièce ? Je jette un regard de tous les côtés, et je repère la présence de quelqu'un. Je reconnaîtrait cette silhouette entre milles, *Lexa Queen*. Je ne la connais pas personnellement, si ce n'est qu'elle s' est ramenée devant Carry au même moment que moi lors du retour de Carry en salle commune. Et puis, on est de la même promo... *Merde*. Moi qui voulais être seule pour écrire *tranquillement* ma lettre, c'est fichu. Je vais devoir partager le banc avec *Queen*. Je ne sais pas si je dois lui adresser la parole ou non.

Mon parchemin dans une main, la plume dans l'autre, je m'approche lentement d'elle. *Lentement*, c'est plutôt qu'il n'y a aucun entrain dans ma marche oui ! Je viens m'assoir ni trop proche ni trop loin d'elle, et je pose mon parchemin à côté de moi. Jouant avec mes doigts et ma plume, je n'en peux plus du Silence. On dit que lorsque les mots parlent plus, le Silence se met à raconter, mais moi je n'aime pas le silence. Il annonce la fin. Je crois que si Ivy ou moi-même avions cessé de parler, tout se serait terminé. L'Espoir se serait envolé. Je tourne ma tête vers ma camarade. Est-ce qu'elle aussi elle est ici pour écrire une lettre, importante ? Ne sait-elle pas non plus comment la commencer ?

— Toi aussi t'es là pour une lettre Lexa ?

Je me demande bien pourquoi je l'ai appelée par son prénom. Tant pis, et puis de toute façon, ce n'est pas si grave après tout... Je retourne la tête vers mon parchemin encore vierge. Par où commencer ? Je ne peux pas lui parler directement de son mariage, ce serait... *trop*. Au fond, je ne sais pas si je lui en veux vraiment. On a le droit d'être heureux non ? Certes c'est par Fred que je l'ai appris, mais je ne lui dit pas tout non plus, alors on est quitte non ? Je fixe le mur devant moi, comme si je cherchais une idée à travers lui.

— Tu fais comment pour écrire une lettre pour quelque chose de... compliqué...

Je ne sais vraiment pas pourquoi je lui demande de l'aide. Après tout, nous ne sommes pas amies. Juste amies d'amies.

On est le dix décembre, et dans douze jours, les vacances de Noël commencent. Alors je demande à ma mère si je suis attendue ou non. Et comme d’habitude, j’écris en sachant parfaitement ce qu’elle me répondra. Elle sait faire varier les excuses, c’est bien sa seule qualité. À Noël dernier, j’ai été gentiment convié à ne pas rentrer à la maison, parce nous avions des invités, et ma chambre n’était pas libre. alors je suis restée ici.

Mais cette année, je sais que mon petit frère rentrera. Parce que ma mère le préfère, et le préfèrera toujours à moi. Alors je me réfugie dans ma solitude familière, dans laquelle je suis accueillie comme une reine. Et je plonge dans une mélancolie familiale, en me disant que la seule famille que j’ai, désormais, n’est qu’une demi-sœur qui joue les lots de consolations, l’une des raisons pour laquelle ma famille s’est brisée.

Dawn m’a brisée.
Et pourtant, elle est la seule à me reconstruire. Comme je suis la seule à la reconstruire.

Et puis à quoi bon ? Pourquoi écrire cette foutue lettre, qui finira dans la cheminée, avant de finir dans la main de ma mère ? Et même si elle acceptait que je vienne, elle trouverait une bonne raison pour m’envoyer chez les Clifford dès la première semaine.

Je jette un coup d’œil à la deuxième moitié du banc, occupée depuis peu par une fille de ma promo. Erza, que j’ai dû croiser quelques fois. Dont une près de Carry, quand Serpentard a finalement décidé de la reprendre.

Discrètement, j’essaye de me rapprocher de l’extrémité opposé du banc, pour m’éloigner d’elle. N’y voyez rien de personnel, ce n’est qu’une aversion pour la proximité physique. Ni quand on m’appelle par mon prénom Erza me demande si je suis là pour une lettre. Je lui répondrais bien, avec un rire mauvais, que si je suis dans la volière, la plume sur le parchemin, ce n’est pas pour dessiner les oiseaux. Puis, elle me pose des questions sur la manière d’écrire une lettre compliquée. Bonne question. À laquelle je ne puisse surement pas répondre. Je ne suis pas douée pour affronter les problèmes, en général je les évite au maximum. Quand je ne les créer pas, ou n’y participe pas.

- Je n’écris pas souvent de lettres compliquées, désolée, je réponds, sans lui montrer un réel intérêt.

Je soupire. Je n’aime pas vraiment aider les autres. Je suis plutôt du genre à garder pour moi tout ce qui peut faire avancer les gens, les choses, tout ce qui est bien. Mais dans une situation comme ça, avec une personne qui me ressemble, ne serait-ce qu’un minimum, j’ai toujours l’impression d’avoir la tâche de l’aider.

Alors je décide d’aider Erza. Comme je peux l’aider.

- Commence par dire ce que tu penses, peut-être, je suggère. Tu vas pas te laisser faire si t’es pas d’accord. Et même si t’es d’accord.

@Erza McGowan, désolée pour le petit retard, dis-moi si tu veux que je change quelque chose (:

Le papier a lettre dans les mains, je cherche toujours comment écrire ce que j'ai à dire. Ah si seulement Maman était là, devant moi pour que je puisse lui dire tout ce que j'ai sur le cœur... Qu'est-ce que jespérais de Lexa sincèrement... Je n'aurais pas pu m'attendre à Quel que chose de plus qu'un soupir. Son manque d'intérêt pour la vie me désespère. *Et dire que j'étais comme ça l'année dernière*... Je ne sais pas comment Lydia a fait pour me supporter, ni même Nefarius et Ella. L'année 2047 approche à grand pas, et j'ai de grands projets pour l'avenir. Cette lettre va pouvoir poser les bases de certains. Le plus important : avoir une vie familiale à peu près *normale*. Je n'ai jamais souhaité former une famille aussi unie que parfaite, car cela n'existe pas de toute manière. Ce que je veux, c'est pouvoir sourire en poussant la porte de chez moi, je veux voir en ma mère un modèle, une femme d'exception, et finalement, malgré ses défauts, c'est peut-être ce qu'elle est. Alors que j'étais en train de me perdre dans mes pensées, Lexa propose finalement son aide. Enfin, c'est comme ça que je l'interprète. *C'est déjà ça*... Je me tourne vers elle avant de lui répondre.

— Bonne idée ! fis-je avec un peu trop d'enthousiasme pour que cela paraisse naturel. — Le truc, c'est qu'il faut que je trouve les bons mots...

Comment dire à Maman que j'étais tout à fait pour cette union, si c'était ce don elle avait envie, tout en lui exprimant ma déception quand à la façon dont je l'avais appris ? Cette question restait sans réponse. En plus, je voulais bien lui montrer que j'étais envore toute chamboulée, et qu'il me faudrait sans doit un peu de temps pour acquérir complètement ces informations, bien que celles-ci me réjouissent. J'espère tant que Maman comprendra...

La qualité principale qu’on m’avait toujours trouvé, c’était l’honnêteté. Même si parfois c’était surtout un défaut. A force de parler dès que j’avais quelque chose à dire, je n’ai plus aucune censure. Un secret ? Aucun. Si il y a des choses que les gens ne savent pas sur moi, je l’écris quelque part, et le cache, pour que personne ne le sache. Si j’ai un problème, je l’affronte. C’est ce que voulait papa. Une fille forte. Bien que par « fille forte », il pensait souvent à un fils.

Quand j’avais peur de m’exprimer, il disait toujours la même chose. Une phrase de manipulateur, de mâle. Mais pourtant, ça fonctionnait toujours.

- C’est juste des lettres, les mots. Tu leur fait dire ce que tu veux.

Les mots et les humains, papa n’avait jamais compris leur différence. Il manipule les deux avec une facilité qui me déconcerte toujours.

- C’est comme de la peinture. Même en peignant un trait sur une toile, tu réussiras à l’exposer dans un grand musée en inventant une symbolique bidon. Ou les gens. T’arrive a faire croire a des gens que t’aime pas que tu les apprécie ? Tu mens, c’est facile.

Comparer les mots à la peinture et aux humains, j’étais la digne fille de mon père. Une fine manipulatrice, sans gêne ni gentillesse. Et comme mon père, je n’avais pas de problème à donner des conseils foireux aux autres, mais ne les appliquait jamais. Qu’aurais-je dit à maman si j’étais lui ? « Salut, je voulais juste savoir si j’avais une bonne raison de venir à Noël ou si t’allais encore m'expédier ailleurs. Bisous, Lexa. »

Non.

Laissez les autres galérer avec un problème qu’ils essayent de régler, et ne jamais faire quoi que ce soit pour les miens, c’est la vie que j’ai décidé de mener.

retard who ?

Depuis la sortie à Pré-au-Lard puis la discussion dans la salle sur demande, mon cerveau refuse de passer à autre chose et je ressasse indéniablement chaque parole prononcée. Je n'arrive toujours pas à accepter ce qui m'arrive. Je me sens pareille que si l'on venait de m'annoncer que j'avais été nommée préfète en cheffe ou directrice de Poudlard même. Je suis partagée entre l'incompréhension, la surprise, l'appréhension, la joie et la peur. Je ne comprends pas tout à fait ce qui m'arrive — ou ce qui va m'arriver. Je m'attendais à tout sauf ça et désormais j'ai peur de la suite. Peur de ne pas être acceptée dans tous ces changements, comme si l'on faisait une mise à jour dans laquelle je ne suis pas comptée. Je ne demande qu'à être heureuse puisque je vois bien que ma mère rayonne depuis quelques temps. J'aurais du me douter de ce qui se tramait, mais j'étais sûrement trop centrée sur moi pour y faire attention. Ou alors je voulais qu'elle garde son amour pour moi uniquement, parce que cela faisait si longtemps que j'en avais besoin.

Lexa me répondit, ce qui me fit revenir brutalement à la réalité. J'étais là pour écrire à Maman. Pour passer à autre chose, pour enfin accepter tout ce qui bouillonnait en moi. Je déteste écrire pour dire les choses, mais là tout de suite, je serais incapable d'attendre les vacances pour lui en parler. J'écoutais avec attention les conseils de Lexa, du moins si on pouvait les désigner comme tels. Je n'étais pas tout à faire sûre à l'idée de suivre ses indications, mais lui répondit poliment.

— J'vois ce que tu veux dire. Le truc, c'est que là j'ai vraiment besoin d'être vraie. D'être moi. J'ai appris pas mal de trucs récemment, des nouvelles sensées être bonnes mais ça chamboule tellement tout ce que j'avais imaginé que j'arrive toujours pas à les accepter.

J'avais résumé la situation sans entrer dans les détails, ce qui était exactement ce que je voulais faire. Lexa n'était pas assez digne de confiance pour que je lui déballe ma vie privée sans garantie en retour.