Cet aveu fit du bien à Lyria. Elle savait très bien que Gayla et Jane se connaissaient depuis longtemps. C'était juste, qu'étant nouvelle, c'était parfois difficile de se trouver une place. C'était tout à fait logique que Jane soit très proche de Gayla. Elle sourit en retour à Jane. Elle avait l'air un peu perturbée.

Son amie se replongea dans son devoir et Lyria fit de même. Le silence lui était dérangeant. Evidemment, elles étaient silencieuses car elles devaient travailler mais le silence n'était pas... normal. Il était pesant, très pesant. Lyria jeta un rapide coup d'oeil vers sa camarade. Elle pleurait, sans un bruit. Juste des larmes muettes qui dévalaient ses joues. Jane restait focalisée sur son devoir, comme si elle fuyait le regard de Lyria.

Honteuse, la jeune japonaise regrettait amèrement sa jalousie. C'était ridicule. Elle allait ouvrir la bouche pour s'expliquer mais, après avoir mesuré son parchemin, Jane commença à remballer ses affaires. Elle n'avait probablement pas envie de rester plus longtemps avec elle. Lyria baissa la tête. Ses émotions se culbutaient mais tellement vite et de manière confuse qu'elle était incapable d'en déterminer une, incapable de pleurer, de parler, de réfléchir même. Elle écrivait machinalement sur son parchemin. Elle prit sa règle. 51 cm. Elle avait bientôt fini. Elle finirait toute seule.

Elle réussit enfin à mettre des mots sur ses émotions : regret, tristesse et colère. Colère contre elle-même. Elle releva la tête, pensant voir Jane à l'autre bout de la salle, en train de sortir. Jane était toujours en face, elle avait ressorti ses affaires et coloriait avec patience un emblème de Poufsouffle. Elle était fière de sa maison, ça se voyait. Lyria, elle, était encore surprise d'être chez les jaunes et noirs. Elle revoyait l'étonnement, voir peut-être la déception, de son père quand elle a envoyé sa lettre, disant qu'elle n'était pas la petite Serdaigle brillantissime qu'il voulait qu'elle soit. Elle n'avait pas formulé ça ainsi mais... c'était comme ça qu'elle l'avait ressenti.

Enfin, peu importe, Poufsouffle, c'était bien aussi. Peut-être même mieux. A Poufsouffle, il y avait Jane. Jane Anderson, sa meilleure amie. Ca lui suffisait pour aimer cette maison qu'elle n'avait jamais imaginée comme la sienne. Lyria se leva lentement, fit le tour de la table furtivement et s'assit à côté de Jane. Timidement, elle lui tapota l'épaule. Elle releva la tête de son coloriage.

- Hey... Je suis désolée, vraiment. C'était stupide de ma part... Je... Je t'aime vraiment beaucoup, Jane. On oublie ?

Lyria se rapprocha de Jane et ouvrit ses bras. Accepterait-elle la réconciliation ?

Jane regarda Lyria longuement. La jeune fille attendait, les bras ouverts mais les secondes s'égrenaient et devenaient longues. Jane lui en voulait, Lyria en était certaine. Déçue et mortifiée d'avoir ruiné cette amitié si chère à ses yeux, elle relâcha ses bras.

Il ne se passa alors quelque chose de complétement inattendu pour Lyria. Jane, qui était restée stoïque, assise sur son banc, venait de se lever en quatrième vitesse et la serrait dans ses bras, en pleurant. Lyria fut un instant si surprise, elle resta là, les bras ballants. Puis, trop heureuse de retrouver son amie, elle referma son étreinte et une petite larme solitaire glissa du coin de son oeil jusqu'à la commissure de sa lèvre, où elle disparut. Lyria n'aimait pas pleurer et elle n'aimait voir les autres pleurer, surtout de sa faute. Elle serra Jane fort. Elle ne voulait plus jamais que ça se produise. Ne plus jamais se disputer.

A regret, elle finit par se détacher de sa meilleure amie et essuya rapidement ses yeux humides. Jane avait l'air inquiète. Elle le vit tout de suite, malgré les efforts de la Poufsouffle pour paraître entièrement souriante. La raison de son inquiétude n'était pas dite, mais Lyria la devina sans mal. Gayla. Jane se retrouvait coincée entre Gayla, son amie de toujours, sa sœur de cœur et elle, Lyria Jones, la petite nouvelle qui tenait tellement à elle. Lyria décida de finir son devoir, il ne lui restait que quelques lignes puis, après avoir relu et vérifié la complétude de son travail, elle releva la tête vers Jane. Elle avait presque fini son coloriage. Elle attendit patiemment ensuite, quand Jane se redressa à son tour, elle lui adressa un sourire rassurant.

- J'ai fini. On pourrait peut-être aller parler à Gayla, non ? Mettre les choses au clair et reprendre une belle amitié sur des bonnes bases, sans inquiétude, sans jalousie. On serait toutes les deux plus sereines et on n'aurait plus de raison de se fâcher... Qu'en dis-tu ?

ane finissait son coloriage. Elle savait que Lyria l'avait attendu. Elle murmura un vague :
- Merci.
Jane regarda Lyria dans les yeux et lui fit un petit sourire triste. C'est alors que Lyria dit :
- J'ai fini. On pourrait peut-être aller parler à Gayla, non ? Mettre les choses au clair et reprendre une belle amitié sur des bonnes bases, sans inquiétude, sans jalousie. On serait toutes les deux plus sereines et on n'aurait plus de raison de se fâcher... Qu'en dis-tu ?
Jane fut très surprise que Lyria lui propose de l'accompagner voir Gayla. Elle était heureuse de la réaction de son amie mais malgré tout, elle avait peur. Elle dit donc à Lyria :
- Tu sais, Gayla ne vas probablement pas t'aimer. Je ne sais pas si il faut que tu vienne...
Son amie ne bougea pas, elle ne dit rien. Jane ne savait pas ce que ça signifiait. Mais, une partie au fond d'elle lui dit : " Elle t'a proposé de venir avec toi. Il faut que tu accepte. Ca veut dire qu'elle tient vraiment à toi. " Jane rajouta donc :
- Si tu veux, on peux y aller mais je ne veux pas que ça te retombe dessus.
Lyria fit alors quelque chose de très inattendu. Elle sourit à Jane. Cette dernière lui rendit son sourire et en se tenant la main, elles sortirent ensemble de la salle d'étude.