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02 sept. 2022, 19:24
 Delnabo  L'orgueil en bandoulière
Je suis incapable d'endiguer le flux de ses paroles, incapable de me détourner de ses yeux trop brillants, incapable également de ne pas remarquer les tremblements qui secouent sa voix. Et ses mots me frappent un à un, comme des coups de maillet ils enfoncent les certitudes qui commençaient déjà à s'ancrer en moi : je fais du mal, je suis un problème, j'aggrave toujours les choses, je fais souffrir et rends la vie des autres plus dure qu'elle ne l'est sans moi. Elowen m'aime et elle a besoin de moi, à entendre sa mère je suis celle sur qui tout repose. Je n'ai jamais demandé ça, moi, jamais voulu avoir à charge une enfant incapable de se gérer ; je n'ai même jamais voulu de son amour, elle me l'a imposé elle-même, n'est-ce pas ? N'est-ce pas ?

Je sais tout ça, je sais qu'elle a souffert, qu'elle est morte, qu'elle a vécu des choses pires encore que je ne suis pas capable de comprendre ! Je sais qu'elle pense à l'envers et qu'elle n'a pas la même maturité que les autres, je sais qu'il y a un truc qui cloche chez elle mais alors ? En quoi est-ce mon problème ? Pourquoi devrais-je porter sur mes épaules ses problèmes alors que les miens me hantent jusqu'à me priver de sommeil et de mes capacités de réflexion ? Croit-elle que je ne souffre pas, moi aussi, que ma vie est toute belle et toute lisse, que je ne lutte pas chaque jour qui passe ? Elle pense que j'ai les épaules ? Est-ce qu'elle pense sincèrement que j'ai envie de me préoccuper de qui que ce soit sachant que je ne souhaite même pas m'occuper de moi ?

« Non j'ai pas ce pouvoir, » finis-je par dire d'une voix amère en me détournant de la femme, parce que je suis persuadée d'avoir été façonnée pour vivre seule.

Je fais quelques pas dans la cuisine, sans aucune raison ; ou alors juste pour aller contre ses ordres et ne pas trouver place assise.

« Vous croyez que je veux de ce rôle ? De ces responsabilités ? Non, j'en veux pas, laissé-je m'échapper dans un filet de voix parce que tout ça est trop, beaucoup trop. C'est pas à moi d'la gérer. »

J'ai l'impression de crier mais ma voix est presque basse, comme l'est celle de Livingstone. Je n'ai pas la force de parler plus fort, pas plus que j'ai la force de dire qu'à défaut de la gérer, j'aimerais juste qu'Elowen accepte que je l'aime, même si je le fais soi-disant mal. Mais mon amour est cassé. Personne n'en veut jamais. Pas même ma famille.

Et, parce qu'elle m'a fait mal et que j'aimerais qu'elle souffre tout autant :

« Vous voulez comprendre ? Bah c'est bon, je vous la laisse votre fille ! »

Entendre que je la sens déjà qui m'échappe et que je ne peux pas essuyer un nouvel abandon, pas maintenant.

« Vous avez eu ce que vous voulez, » grincé-je, les poings serrés de colère.

Comprendre : il est plus facile d'être en colère contre elle que de l'être contre moi-même.

03 sept. 2022, 16:08
 Delnabo  L'orgueil en bandoulière
Les paroles de l'insolente jeune fille font trembler Gaëlle le temps d'un instant. Elle n'a jamais voulu me garder pour elle, jamais. Au contraire même. Elle a toujours cherché à m'ouvrir, à me faire évoluer, avancer. D'un coup elle doute. Mais heureusement pour elle, elle est intelligente, elle sait que la jeune Poufsouffle est douée pour frapper pile là où ça fait mal. Elle essaie de faire douter ma mère pour lui éviter à elle de se remettre en question.

« Pardon, attends, je te coupe. Je parle à une adulte majeure et responsable ou à une enfant capricieuse qui fait sa petite misère, qui pense que le monde est contre elle ? Mais prends les choses en main, Aelle ! Arrête de considérer que tout te tombe dessus ! Qu'on soit bien claires, Aelle. Il est hors de question que tu me voles ma fille, effectivement, elle n'est pas à adopter. Eh oui, affirmation bête, réponse bête. Il est également hors de question que tu t'occupes d'elle ou je ne sais quelle absurdité. Tu as été sa petite-amie. Pas sa maîtresse, sa gouvernante, sa parente voire même sa propriétaire. La discussion qu'on a, là, elle ne tourne pas autour du fait de vouloir avoir Elo comme si c'était une possession. Et je ne suis pas en train de te faire une crise de jalousie. Elle est ma fille, tu es sa copine, nous avons chacune un rôle différent dans sa vie. »

Elle est décidément bien bornée, à penser que tout joue contre elle, qu'elle n'est responsable de rien, qu'elle n'a jamais rien demandé. A bout de souffle et tentant tant bien que mal de conserver son calme, Gaëlle boit une gorgée de citronnade, le plus lentement possible. D'un geste presque mécanique, elle repose son gobelet. Puis, elle redresse la tête, requinquée, et reprend d'une voix posée.

« Ce dont il est question, c'est de lui apporter ce qu'il y a de mieux pour elle. Et en l'occurrence, dans l'état actuel des choses, tu n'es pas ce qu'il y a de mieux pour elle. Alors ne te défile pas, Aelle. Tu es entrée dans sa vie, c'était ton choix, tu as accepté cette relation, donc tu as des obligations. Si tu n'es pas capable de les tenir, soit. Sois une lâche, fuis, mais aie la présence d'esprit de lui dire clairement les choses. Que tu la quittes. Arrête de la torturer. Par contre, si tu es prête à cesser de jouer à ton petit jeu débile, si tu es assez mature pour cesser d'être une enfant, alors prends tes responsabilités en main, fais des efforts, aime ta relation, assume-la, assume Elowen, construisez un truc ensemble. Mais cesse de tout détruire juste parce que tu as peur. C'est d'Elo dont il est question, là. Pas d'un vulgaire bout de bois. »

Un regard bref pour lui faire comprendre qu'elle n'en a pas encore terminé, comme pour signaler à Aelle qu'il n'est pas encore l'heure pour elle de répondre.

« Oui, ce n'est pas évident de grandir. C'est réaliser que tes actions, tes décisions, impactent les autres. Et ce n'est pas horrible et ce n'est pas contre toi non plus, parce que non, Aelle, le monde n'est pas contre toi. Le monde te tend la main, essaie seulement de repérer les signes et tu le verras. Grandir, ça arrive à tout le monde. Les habitants de la Terre entière, à un moment donné, se retrouve face à leurs responsabilités, ils ont des choix à faire, des gens qui dépendent d'une façon ou d'une autre d'eux. Et là, honnêtement, tu agis comme une gamine. Pas comme une grande fille. »

Reducio
Gaëlle Living (ce n'est pas l'image que j'avais en tête mais je trouve que ces images correspondent encore assez bien) :
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7e année RP - #8C6A8E
JE NE SUIS PAS UN HIBOU UNE PLUME

03 sept. 2022, 16:58
 Delnabo  L'orgueil en bandoulière
Je suis venue ici par besoin et aussi parce que j'en avais le pouvoir et la possibilité. J'étais libre de venir si je le décidais. Mais maintenant que je suis chez Elowen, je me sens totalement entravée. Il y a cette femme inquiétante dont l'amour pour sa fille me dévore et les paroles acides qu'elle me jette au visage alors que je n'ai rien demandé. Je n'ai pas voulu, moi, qu'elle me mette face à tout ça, qu'elle me force à penser à des choses auxquelles je ne souhaite pas réfléchir. Je me décompose tout à fait lorsqu'elle argue que le monde me tend la main, une vague passe sur mon visage et m'arrache mon semblant de calme. Quelle plaisanterie ! Le monde n'a cesse de me bousculer et de me blesser ! Le monde ne me comprend pas, le monde m'abandonne, le monde me torture et le monde marche complètement à l'envers depuis quelque temps. Et j'ai beau vouloir le suivre dans sa cadence, le monde, rien y fait : il va à contre courant et je n'ai jamais, jamais autant galéré dans ma vie. Alors non, non je n'ai pas envie de faire des efforts, non je n'ai pas envie de bousculer mon fragile équilibre !

Mais ses mots résonnent trop fort et veulent m'emporter avec eux, ils poussent sur quelque chose qui se trouve dans ma tête et ça me fait flipper. Je n'ai pas envie qu'ils résonnent avec moi, cette femme n'a aucune vérité à m'offrir, absolument aucune.

Ses insultes m'abîment. Ça bloque tout à l'intérieur de moi, mes émotions comme mes mots. Je tremble sous mon souffle agité. Il y a mille choses que je veux dire et ce sont milles choses que je vais garder pour moi parce que ça toque trop fort contre la porte de ma conscience et que je ne peux pas faire face à tout ça.

Je me détourne dans un mouvement de cape, le corps tremblant et le visage défait. Je marche jusqu'à la porte, pressée par l'envie de fuir et de disparaître maintenant. Le panneau de bois ne s'ouvre pas, je m'acharne contre la poignée, frappe des deux mains contre le battant, un cri rageur aux lèvres. Ouvre-toi, bordel ! Je secoue, je m'énerve, mais rien ne bouge. Elle est verrouillée magiquement ; les larmes envahissent mon regard, je me sens tiraillée, j'ai envie d'exploser, j'ai envie de pleurer et de—

Je brandis ma baguette.

« Reducto. »

C'est fulgurant, bruyant, effrayant et ça me fait un bien fou. La porte explose en poussière, ça en fout dans tous les coins, dans mes cheveux et mes vêtements.

Maintenant, la voie est libre.
Dernière modification par Aelle Bristyle le 03 sept. 2022, 17:48, modifié 1 fois.

03 sept. 2022, 17:17
 Delnabo  L'orgueil en bandoulière
Ma mère voit toutes les émotions passer sur le visage d'Aelle et elle reste à distance. Elle a été dure et elle le sait, pourtant elle ne s'en veut pas. Elle est convaincue qu'Aelle la Miss-Je-Sais-Tout-Mieux-Que-Tout-Le-Monde avait besoin d'entendre ces choses pour commencer à les assimiler. Devant elle, un triste spectacle : une adolescente qu'elle ne connait que grâce à ce que j'ai bien voulu lui raconter d'elle, dans sa maison, en train de se recevoir une énorme claque et de ressentir des sentiments contradictoires. Gaëlle ne bouge plus d'un pouce, le temps est suspendu et l'atmosphère est lourde.

Soudain, Aelle commence à se diriger vers la porte, et ma mère, qui a très bien compris ce qui allait se passer, et qui a bien vu que la jeune fille a une seconde baguette dans les mains, ferme les yeux. Un instant plus tard, c'est un éclat de bois qui vient s'enfoncer dans la chair de son bras, duquel coule désormais une trainée de sang. Gaëlle sourit tout en essayant de masquer la grimace qui se dessine sur ses traits.

« Aelle, mercredi prochain nous prendrons le thé en famille. Tu es conviée, si tu le souhaites. Tant que tu as réfléchi à ce que je viens de te dire et que tu ne risques pas de blesser Elo, volontairement ou pas, tu es la bienvenue chez nous. Et tu le seras toujours. Réfléchis-y, c'est une vraie invitation, pas des paroles dans le vent. »

Elle se lève pour raccompagner mon ex-petite-amie à ce qui fut jadis une porte. Et moi, là-haut, je joue à présent à Geometry Dash, entrainée par Rosa-Lynn, et je n'ai pas la moindre idée de ce qui peut avoir lieu deux étages plus bas.

7e année RP - #8C6A8E
JE NE SUIS PAS UN HIBOU UNE PLUME

03 sept. 2022, 17:47
 Delnabo  L'orgueil en bandoulière
Les dernières éclaboussures de puissance m'atteignent encore que la voix résonne dans mon dos. Essoufflée, je quitte mon ouvrage des yeux pour observer Gaëlle Livingstone m'inviter pour le thé mercredi prochain. Je tique, je l'avoue. Je tique au beau milieu du carnage alors que j'ai de la poussière dans les cheveux et une grimace sur les lèvres. Est-ce qu'elle vient réellement de m'inviter à prendre le thé ? Mon yeux fouillent ses traits ; je ne comprends pas pourquoi elle ne semble pas se foutre de moi. Est-elle aussi délurée que sa fille ? Je détruit sa porte et elle veut me revoir ? Ses étranges paroles auraient pu me faire douter d'elle et de son intelligence mais finalement c'est de moi que je doute : ai-je loupé quelque chose ou mal fait comprendre mes intentions ?

Non.
Le problème c'est cette femme. Elle est faite du même bois que papa. Elle est adepte des deuxième, troisième et quatrième chance. C'est ce qu'elle fait, elle me laisse une chance de retrouver Elowen, d'approfondir ce lien qui ne fera que me bousiller. N'aurait-elle pas pu m'ordonner de disparaître, tout simplement ? Cela aurait rendu les choses plus simples.

« Non merci. »

C'est ce que j'aurais aimé dire mais je n'y arrive pas. J'ouvre la bouche et aucun son n'en sort. Si je dis ça, je n'aurais plus la possibilité de venir. Non pas que je le souhaite mais si jamais je change d'avis ?

Je soutiens le regard de l'Écossaise et pour la première fois depuis que je la connais, elle n'est plus la mère d'Elowen mais juste une femme. Une femme contre laquelle je viens de perdre une bataille à laquelle je n'ai rien compris.

Étourdie par toutes les émotions qui me hantent et m'agressent, j'essuie du revers de la paume la poussière sur ma joue et me détourne de la maison des Livingstone, piétinant mon oeuvre sans chercher à la réparer. Je disparais dans un craquement et atterrit sur une certaine île à plusieurs kilomètres de là, une île balayée par la pluie et le vent qui m'accueille toute entière avec ma frustration et mes douleurs, toute cette crasse que je me trimbale et dont je me débarrasse à grand renfort de sortilèges violents.

Heureusement, la pluie se charge de laver les larmes et les gouttes de sang qui perlent sur ma peau.

— Fin —


Merci ?
Tu sais tout ce que j'en pense mais ouah ! Une bonne vague d'émotions, j'ai adoré.

03 sept. 2022, 18:20
 Delnabo  L'orgueil en bandoulière
Elle se retourne, prête à prendre à nouveau la parole, et puis finalement elle se ravise. Après avoir pris le temps de jeter un unique regard à ma mère, Aelle choisit la fuite, comme d'habitude. Sans piper mot, elle tourne les talons et disparaît dans un tourbillon de vent qui projette des feuilles et des insectes à l'intérieur de la maison. Gaëlle, épuisée par cet échange, attrape un balai et entreprend de nettoyer la pièce pour effacer toute trace de ce qui vient de se produire. Et puis, elle sent. Et ça sent le cramé à plein nez. Ma mère fonce dans la cuisine et découvre sa brioche vraiment trop cuite, noire. Elle est désespérée à la vue de ce simple aliment, avoir raté une chose aussi simple vient vraiment à bout de ses forces. La sorcière respire un grand coup histoire de reprendre ses esprits, chasse Aelle de ses pensées, et transplane à son tour.

Elle n'a pas eu le courage de s'y rendre à pied, aussi a-t-elle préféré atterrir dans une petite ruelle absolument pas fréquenté du centre du village. Elle achète une brioche toute dorée à la boulangerie puis revient avant qu'on ne remarque son absence. Elle monte ensuite voir la plus jeune de ses filles, endormie sur les toilettes, et, d'un coup de baguette, transvase ses souvenirs dans ses rêves. Cléia se souviendra d'avoir vu Aelle, mais elle sera convaincue qu'elle en a rêvé. Enfin, elle laisse une note dans la cuisine souhaitant un bon goûter aux enfants, explique qu'elle est fatiguée, et monte se coucher, un linge humide posé sur le visage.

Le soir même, elle raconte tout à mon père, qui la soutient et lui dit qu'il s'occupe désormais de tout. Il joue avec nous, cuisine, nous envoie nous doucher, nous lit une histoire, puis aide ma mère à se mettre en pyjama, la porte jusque dans le salon pour qu'elle mange avec nous le soir, et fait toute la conversation à table. Ca ne lui ressemble pas trop mais je n'y prête guère attention. Moi, je vois mes parents chuchoter au loin toute la soirée, et je surprends quelques bribes, je comprends qu'ils parlent d'argent, et comme je sais que cette discussion ne m'intéresse pas, je n'essaie pas de m'incruster.

______________
Quelques jours plus tard, un hibou vole en direction de la demeure d'Aelle.
Monsieur et Madame Bristyle,

Bonjour. Pardonnez-moi, je me permets de vous écrire, la situation est un peu embarrassante. Votre fille, Aelle, est venue chez nous il y a quelques jours. Il y a eu un accident, rien de grave, un geste trop brusque pendant que nos filles jouaient ensemble à chat, cependant Aelle a fait exploser notre porte d'entrée par inadvertance. Croyez bien que nous sommes navrés de vous importuner de la sorte, simplement... nous avons du mal à financer le remboursement de la porte, ce n'est vraiment pas comme si nous roulions sur l'or, et puis nous avons beaucoup d'enfants en études supérieures, pour qui il faut payer le loyer et autres dépenses quotidiennes, alors nous nous demandions s'il était possible d'obtenir une contribution de votre part ?

Nous sommes disponibles si vous souhaitez prévoir un rendez-vous pour constater l'étendue des dégâts. De plus, si jamais vous doutez de nos propos, sachez que mon mari et moi avons construit la maison de nos mains. Aussi, si vous interrogez magiquement les murs de notre habitation, étant donné qu'ils sont connectées aux habitants et à ce qui se passe à l'intérieur, ils pourront sans doute confirmer nos propos, quant à la personne qui a fait sauter la porte.

Sincèrement, vous écrire pour cette raison nous gêne au plus haut point.
Nous vous souhaitons malgré tout une agréable journée, et nous vous promettons que la porte d'entrée n'était pas excessivement chère.

Bien cordialement,

Gaëlle Living,
Mère d'Elowen Livingstone.
FIN !
Bordel de cacahuète... Ca me fend le cœur que ce RP soit terminé, et leur relation aussi, sans doute... J'adore écrire avec toi, p'tite tête.
Et à voir si les parents d'Aelle gobent le bobard de Gaëlle qui tente de protéger un poquito leur fille haha !

7e année RP - #8C6A8E
JE NE SUIS PAS UN HIBOU UNE PLUME