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03 mars 2013, 23:38
 04/2039  L'ombre du hasard (partie 1)







Chapitre Deux de l'Acte Final

“ L'Ombre du Hasard ” (Partie 1)





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Ordre d'écriture :

Aaron Coolidge, auror en service à Poudlard
Roxane Pearl, professeur de Divination
Dernière modification par Arseni Stoyanov le 02 sept. 2016, 14:49, modifié 5 fois.
03 mars 2013, 23:59
 04/2039  L'ombre du hasard (partie 1)


Aaron Coolidge ne croyait pas au hasard. Il croyait à la loi des séries, aux préceptes des probabilités, et tout ce qui pouvait, de près comme de loin, donner raison à l'existence du Destin.

Le Destin ou le Grand Scénario comme il aimait à l'appeler cristallisait toutes ses pensées. Du moment où il ouvrait les yeux à celui où il les fermait, Aaron pouvait identifier aisément une vingtaine de manifestations de la Destinée dans sa seule journée. Il lui arrivait parfois de les compter pour les autres, mais il devait bien reconnaître que le plaisir ressentit n'était pas le même.

Aaron savait comment son histoire se terminerait ; car toutes les histoires, qu'elles soient bonnes ou mauvaises, se terminaient toujours de la même manière en ce bas monde : par la mort du protagoniste principal. Tout joueur qu'il pouvait être, tout sorcier qu'il était jusqu'au bout des ongles, il ne couperait pas à ce final en apothéose. D'aucun dirait que son poste d'auror avait même vocation à précipiter cette fin inéluctable.

Lorsqu'il foula le dallage de la tour de divination cette après-midi là, la Destinée l'accompagnait, humble et gracieuse à côté de lui, tel un rayon de soleil à travers une vitre trop épaisse qui aurait contribué à rendre son ombre plus grande sur le mur. Son éternel sourire pendu aux lèvres, Aaron entra dans la salle de classe dévolue à une certaine Roxane Pearl pour ce qu'il en savait. Comme on pouvait s'y attendre dix minutes après le retentissement du dernier son de cloche de la journée, il l'y trouva, assise derrière son bureau, occupée ; si être occupé signifiait quelque chose pour quelqu'un qui avait la capacité spectaculaire de dénouer les fils du Destin.

A pas feutrés, tel un chat aurait-on dit, Aaron s'approcha et à bonne distance se permit de toussoter pour faire valoir sa présence.

Ai-je bien à faire à mademoiselle Roxane Pearl ? Voyez-vous, je souhaiterai qu'elle me prédise l'avenir.

Une lueur pétilla au fond de ses yeux bleu clair.
01 avr. 2013, 20:05
 04/2039  L'ombre du hasard (partie 1)
La jeune professeure de Divination, Roxane Pearl, était en train de travailler tranquillement, assise à son bureau, dans sa salle de cours, lorsqu'elle fut dérangée par un arrivant totalement inconnu qui n'attendit aucune autorisation pour rentrer dans la pièce et se placer devant elle négligemment.

Ces temps derniers, Roxane se méfiait. De tout. De rien. Des gens. Des animaux. Des choses. Elle ne savait pas pourquoi, mais c'était comme cela, indéniablement.

Elle se méfiait aussi du silence, autant que du bruit. Elle soupçonnait tout le monde. De quoi ? Aucune idée. Elle n'avait jamais été aussi attentive, observatrice au comportement des gens. Pourquoi ? Parce qu'elle cherchait. Elle cherchait une réponse. Elle cherchait un signe. Un signe avant-coureur lui indiquant que bientôt, tout serait fini. Toute cette pagaille. Toute cette incertitude qui peuplait son esprit. Tout ça, quoi !

Alors, obligatoirement, elle s'était méfiée, dès qu'elle l'avait vu, cet individu si étrange qui inspirait la peur et le respect. Le dégoût, un peu, aussi. Car comme Roxane se méfiait, elle n'aimait pas non plus les gens nouveaux. Ceux qui débarquent comme ça, à l'improviste, sans prévenir. Elle regarda l'inconnue. Qui était-il ? Que lui voulait-il ? Avant même qu'elle ait pu esquisser un geste pour poser les différentes questions qui trottaient dans sa tête, l'étrange homme la devança et prit la parole :


« Ai-je bien à faire à mademoiselle Roxane Pearl ? Voyez-vous, je souhaiterai qu'elle me prédise l'avenir. »

Elle haussa les sourcils et cessa de la dévisager. Non mais euuh, il croyait que c'était Noël ou quoi, là ? * Y'a pas écrit « bobonne » sur mon front, non plus ! * Puis elle remarqua que l'homme était debout, et, selon le moral très pessimiste de Roxane en ce moment-là, elle avait le très désagréable sentiment qu'il essayait de la surplomber. Elle détestait cela. Elle n'était pas vaniteuse en général, mais comme dit, son caractère avait changé. Et en plus, elle ne supportait pas d'être comme « soumise », même si elle ne l'était que du regard à ce moment-ci. Les sourcils toujours très hautement levés, elle se leva d'un bond et contourna son bureau pour se placer face à l'inconnu, redressée de toute sa hauteur, et ouvrit enfin la bouche pour lâcher un amer :

« A qui voulez-vous avoir affaire d'autre ? Vous êtes dans ma salle de classe. » Puis, sans lui laisser le temps de répondre, elle enchaîna tout aussi désagréablement : « Qui êtes-vous ? Je n'aime pas trop les inconnus, surtout lorsqu'ils arrivent comme un cheveux sur la soupe. Alors, je me répète : qui êtes-vous ? Et accessoirement, qui vous envoie chez moi ? »

Roxane décroisa les bras et les posa sur ses hanches, signe chez elle d'une attente impatiente, puis se souvint d'une autre chose qu'avait dite l'inconnu ; et, ne lui laissant toujours pas de répit, et reprit avant lui :

« Ah, et c'est quoi votre délire sur une prétendue prédiction ? Vous pensez franchement que ça se fait comme ça, en un claquement de doigts ? Cela demande de la méthode, de la rigueur ! On ne prédit pas sur un coup de tête, enfin, il faut sortir des histoires moldues de madame Irma ! » s'exclama-t-elle dédaigneusement. « Et, » ajouta-t-elle, « en plus, même si je pouvais, je n'ai franchement pas envie de vous en faire une à vous, de prédiction ! »

Roxane renonça difficilement à faire claquer sa langue contre son palais pour exprimer tout ce qu'elle ressentait en ce moment-même : du mécontentement, de l'indignation, de l'impatience, d'un énervement imminent, de l'indifférence, de... Enfin bref. Elle qui n'était déjà pas de très bonne humeur au départ (c'est le moins que l'on puisse dire !), voilà que cet homme plus que mystérieux ne faisait qu'en rajouter une couche. Lui prédire l'avenir ! Non seulement, comme elle l'avait déjà dit, elle ne pouvait pas franchement le faire comme cela, en plus, elle ne le voulait pas. Pas pour lui, et pas du tout en général. Oui, oui, c'est très bizarre, surtout pour une professeure de Divination passionnée par sa matière (encore heureux !), mais elle avait personnellement déjà eu affaire à une prédiction, et elle ne souhaitait de vivre cela à personne, même à cet homme.
Et puis, pour conclure, elle avait franchement d'autres chats à fouetter... !
02 avr. 2013, 19:54
 04/2039  L'ombre du hasard (partie 1)


Aaron Coolidge souriait. Il souriait tout le temps. La vie ne méritait pas de grimaces selon lui. Alors lorsque Roxane Pearl contourna son bureau pour se planter devant lui, Aaron sourit. Il continua même de sourire lorsqu'elle commença à l'invectiver :

A qui voulez-vous avoir affaire d'autre ? Vous êtes dans ma salle de classe. Qui êtes-vous ? Je n'aime pas trop les inconnus, surtout lorsqu'ils arrivent comme un cheveux sur la soupe. Alors, je me répète : qui êtes-vous ? Et accessoirement, qui vous envoie chez moi ?

Et bien... voilà un volcan qui ne demandait qu'à entrer en irruption finalement. Intéressant.

Aaron suivit les mouvements de bras de son interlocutrice puis ramena ses yeux dans les siens après avoir rapidement jugé sa largeur de hanches. De bien jolies hanches.

Ah, et c'est quoi votre délire sur une prétendue prédiction ? continua-t-elle, sans décompresser. Vous pensez franchement que ça se fait comme ça, en un claquement de doigts ? Cela demande de la méthode, de la rigueur ! On ne prédit pas sur un coup de tête, enfin, il faut sortir des histoires moldues de madame Irma ! Et, en plus, même si je pouvais, je n'ai franchement pas envie de vous en faire une à vous, de prédiction !

Allez, en piste, c'est à toi de parler.

Je m'étonne que vous n'ayez pas entendu parler de moi. D'ailleurs que vous ne m'ayez jamais vu non plus. Mais soit, partons du principe que vous êtes une jeune femme plutôt jolie, mais aveugle, je me présente, Aaron Coolidge, Auror au service de Poudlard. Quant à savoir qui m'envoie, remerciez conjointement ma tête et mes jambes.

Il accentua son sourire, presque irrésistiblement, puis, d'un air toujours aussi détaché, se décalla sur le côté pour tirer à son propre compte la chaise réservée aux invités, placée au centre du " U " que formait le bureau du professeur de Divination. Il s'y installa et, croisant les jambes, entreprit de sortir son jeu de tarot de sa poche pour battre les cartes.

Allons, calmez-vous, ce n'est pas comme si j'étais venu vous demander de m'embrasser, ajouta-t-il, d'un ton où ne perçait aucune forme d'ironie malgré ce sourire persistant. ”

Aaron observa du coin de l'oeil la réaction de son hôte puis, très vite, ramena toute son attention sur le paquet de cartes qui se faisait et se défaisait avec grâce entre ses mains habiles.

Vous avez un don unique au monde, vous savez. Le Destin ne peut pas vous cacher ses desseins les plus sombres. Votre école est menacée, et vu le rôle que j'y occupe, qui sait si je ne trouverai pas la mort dans l'heure qui suit ? Vous, vous pourriez peut-être le savoir. Mais ce n'est pas ce que je vous ai demandé. Allons, ne feriez-vous donc pas le plaisir à un mourant de lui dire ce que le Destin lui réserve ? En échange, je pourrai vous dire ce que les cartes murmurent à votre compte...
06 avr. 2013, 21:58
 04/2039  L'ombre du hasard (partie 1)
Roxane n'avait qu'une seule envie, chasser cet inconnu de son bureau. Mais avant qu'elle ait pu reprendre la parole pour lui dire de foutre le camp, elle fut devancée (encore une fois !) par l'homme bizarre :

« Je m'étonne que vous n'ayez pas entendu parler de moi. D'ailleurs, que vous ne m'ayez jamais vu non plus. Mais soit, partons du principe que vous êtes une jeune femme plutôt jolie, mais aveugle, je me présente, Aaron Coolidge, Auror au service de Poudlard. Quant à savoir qui m'envoie, remerciez conjointement ma tête et mes jambes. »

Et il essayait de faire de l'humour, en plus ? Puis, sans plus attendre, il s'assit. Il prit une chaise, et ils s'assit. Non mais oh, il s'est pris pour qui, là ? Puis, tranquillement, il sortit un jeu de cartes qu'il se mit à mélanger. Oh. Mon. Dieu. Un jeu de cartes. Non non non non non. Pas ça. Je vous en supplie. Roxane passait de l'énervement à la terreur. Et comme pour en remettre une couche, le prétendu Auror qu'elle n'avait, soit dit en passant, jamais vu, ajouta d'un air narquois :

« Allons, calmez-vous, ce n'est pas comme si j'étais venu vous demander de m'embrasser »

Beuaaark, mais c'était quoi cette technique de drague ? Il avait définitivement un culot vraiment pas possible à assimiler pour Roxane. La jeune femme haussa des sourcils indignés.
Comme une de ses élèves, dont elle ne citera pas le nom, elle n'arrivait pas à cerner l'objectif de cet homme.
* Aaaaargh, c'est horrible, je déteste quand ça me fait ça ! * hurla intérieurement la jeune professeure. Le dénommé Aaron reprit :

« Vous avez un don unique au monde, vous savez. Le Destin ne peut pas vous cacher ses desseins les plus sombres. » Noooon, tu crois, joli cœur ? « Votre école est menacée, et vu le rôle que j'y occupe, qui sait si je ne trouverai pas la mort dans l'heure qui suit ? Vous, vous pourriez peut-être le savoir. Mais ce n'est pas ce que je vous ai demandé. Allons, ne feriez-vous donc pas le plaisir à un mourant de lui dire ce que le Destin lui réserve ? En échange, je pourrai vous dire ce que les cartes murmurent à votre compte... »

Roxane ouvrit des yeux grands comme des soucoupes. Elle avait plein de choses à dire, et commença tout de suite après que l'homme ait fini :

« Bon, déjà, arrêtez avec vos commentaires louches, ça me gêne. Ensuite, vous n'êtes pas un dieu, alors non, je ne vous connais pas. Je ne fais pas attention aux Aurors présents dans le château, parce que, selon moi, ils sont sensés être discrets.
Donc, si j'ai bien compris, vous êtes venu de votre plein gré parce que vous souhaitez que je vous prédise l'avenir. Parce que j'ai un don. Oui, j'ai un don, sinon je ne serai pas là. Mais qu'est-ce qui vous permet de penser que je vais vous prédire l'avenir à vous ? Votre histoire de mort imminente, vous n'allez pas essayer de me faire croire que vous ne vous y attendiez pas ? Vous avez choisi d'être Auror, vous choisissez de mourir car c'est votre boulot, au final. Mourir pour la communauté magique. Pour nous protéger tous.
Et croyez-moi, ce n'est pas bon de savoir ce qui va vous arriver. Certainement pas si c'est votre mort. Vous ne voulez pas savoir. Vous croyez que ce sera mieux, mais ce sera horrible. De savoir quand votre heure aura sonné. Vous vivrez jusqu'à la fin dans une crainte permanente de tout perdre. Il ne faut pas. Je ne le ferai pas pour vous. Pour plusieurs raisons : un ; je ne vous aime pas. Pourquoi ? Aucune idée. Peut-être parce que vous débarquez comme ça et vous demandez un truc « aussi anodin » qu'une prédiction ! Et de deux ; parce que je suis quelqu'un de gentil qui, en dépit du fait que je ne vous aime pas, je vous donne la magnifique opportunité de vivre ce qu'il reste de votre vie dangereuse sans la vivre dans la crainte et l'horreur.
Et pour finir, rangez ces stupides cartes. Je n'ai jamais cru à la Cartomancie, en premier lieu, et en second lieu, je hais savoir l'avenir. Ahah, c'est bizarre, pour une professeure de Divination, n'est-ce pas ? »
rigola Roxane en se doutant bien que l'Auror serait étonné par cette phrase, car dès qu'elle la sortait, c'était la stupéfaction générale. « C'est dur à expliquer. J'ai... Je... On m'a déjà prédit l'avenir. Et ce n'était pas joyeux. Pas du tout. J'en ai été traumatisée, et je ne suis toujours pas guérie aujourd'hui. Il ne faut pas. Il... Il ne faut pas... »

Roxane ne pouvait pas continuer plus loin, car une larme commença à perler au coin de son oeil gauche, puis une autre au coin de son œil droit, puis les deux coulèrent, puis ce fut le déluge instoppable. Elle ne pouvait que faire quatre choses à la fois, et rien d'autre : se moucher, s'essuyer les yeux, dire qu'elle était désolée, et répéter inlassablement : « Il ne faut pas... Il ne faut pas... ".
18 avr. 2013, 14:11
 04/2039  L'ombre du hasard (partie 1)


... Il ne faut pas... Il ne faut pas... répéta le professeur Pearl dans un flot ininterrompu de larmes. ”

Durant une fraction de seconde, Aaron Coolidge se demanda si l’extravagance était le critère de recrutement principalement recherché chez tous les professeurs de Divination. Il se souvenait encore parfaitement bien de son propre professeur, Sibylle Trelawney, du temps où il arpentait les couloirs du château comme un étudiant lambda - quoi que lambda était un terme inadéquat pour qualifier le jeune sorcier qu’il avait été - et non comme un Auror en mission officielle. Cette vie insouciante lui manquait terriblement. Gryffondor lui manquait terriblement. “ Tandis que les plus brav's des tromp'-la-mort, Allaient tous chez le hardi Gryffondor ” avait chanté le Choixpeau le jour de sa répartition. Brave, il l’était toujours, songea Aaron, mais tromp’-la-mort, il ne le demeurerait certainement plus pour très longtemps. Le Destin en avait décidé ainsi, sans même requérir son avis consultatif. Aaron avait eu du mal à l’admettre au début, mais avec le recul, il avait fini par l’accepter et comprenait même mieux que quiconque ce que la mort signifiait pour tous ceux qui, un jour, avaient eu le malheur de croiser sa route. Une fin inéluctable. L’achèvement d’un tout et en même temps le commencement d’un nouveau chapitre. Pas pour ceux qui disparaissaient à tout jamais, mais pour ceux qui demeuraient vivants et garderaient vivant le souvenir des disparus. La mort n’était qu’une épreuve à supporter pour les autres, jamais pour soi-même ; c’est cette perception-là qui faisait toute la différence. Pour lui en tout cas. Loin d’être un mauvais bougre malgré ses airs de fripouille, Aaron éprouva une forme de compassion pour la jeune femme et dès lors abandonna toute idée de la harceler plus longtemps. Il se contenta de tasser les cartes en un paquet uniforme, qu’il retourna ensuite de sorte à garder le dos de la première carte sous ses yeux. Quand il se sut prêt, il retourna les trois premières cartes du paquet et s’affala lourdement contre le dossier de son siège. Voilà qui était fâcheux.

Le Jugement, la Tempérance, et l’Arcane sans nom, le tirage était peu commun, même pour les yeux d’un habitué. Pour un non-initié, il aurait pu présager du pire, mais Aaron n’était ni un novice ni un imposteur. La Cartomancie était une imposture qu’il ne pratiquait pas. Le Destin avait placé toutes les cartes entre ses mains. Il lui revenait maintenant de prendre la décision fatidique. Le Destin n’était jamais cruel, au final Aaron songea qu’il était même bon et juste envers les vivants comme envers les morts. Aaron savait désormais que quelqu’un comprendrait, que quoi qu’il advienne quelqu’un pourrait faire toute la lumière sur le passé. Il se leva et eut le courage de prendre les mains du professeur Pearl entre les siennes pour y enfouir la carte de l’Arcane sans nom avant de les refermer et de déposer un baisemain des plus courtois.

Pardonnez-moi.

Pour tout, aurait-il du ajouter. Mais il n’en fit rien et s’en alla comme il était entré. Comme un mourant.
07 mai 2013, 19:12
 04/2039  L'ombre du hasard (partie 1)
Roxane avait pris un mouchoir, et avait essuyé ses beaux yeux verts baignés de larmes. Elle se mouchait inlassablement. Puis elle se sentit ridicule. Elle se rendit compte que l'homme en face d'elle, quel qu'il soit, gentil ou méchant, bienveillant ou malveillant, plein d'espoir ou sur le point de baisser les bras face à tout, elle se rendit compte que cet homme, là, devait tout simplement la prendre pour une folle. Alors elle se ressaisit, elle jeta son énième mouchoir dans la corbeille à sa droite et releva la tête, ses yeux rouges gonflés et le menton tremblotant. Un mot en plus de la part de l'homme et elle aurait refondu en larmes.

Puis, l'homme - Aaron, c'est bien cela ? - rassembla ses cartes en un gros paquet, et les mis à l'envers. Il en tira trois, celles qui venait. Roxane, effrayée, le regardait faire attentivement, essuyant ses yeux (qui ne voulaient malheureusement pas s'arrêter de pleurer - bon, c'était silencieux, au moins). Alors l'homme retourna les trois cartes et s'affaissa dans le fond de son siège, comme s'il voulait se recroqueviller tout au fond de lui-même, dans un mutisme instoppable, surprenant, un mutisme qui faisait peur, un mutsime qui voulait dire non mais qui ne pouvait pas, un mutisme d'homme qui avait officiellement abandonné la partie.

Alors Roxane s'en voulu. Elle s'en voulu de n'avoir pas fait la prédiction que voulait tant cet homme. Après tout, elle avait beau se répéter "qu'il ne fallait pas", s'il était bel et ben "mourant", comme il disait, pourquoi pas ? Si c'était ainsi une partie de ses dernières volontés. Mais d'un autre côté elle se rendit compte qu'elle n'aurait pas pu. Tout simplement. Même si elle avait voulu, sa peur l'aurait emporté sur sa volonté. Elle ne
pouvait pas faire de prédictions. Ni aux autres, ni à elle-même (surtout à elle-même... !).

Le dénommé Coolidge se leva alors et mis entre les mains de Roxane une des trois cartes. Elle n'eut pas le temps d'esquisser un geste pour la regarder qu'il referma ses mains et y posa très légèrement ses lèvres, avant de dire :


" Pardonnez-moi. "

Puis il sortit, tout simplement. Alors Roxane regarda par la fenêtre. Pendant une minute, un quart d'heure, une heure. Elle ne savait pas. Elle ne savait même pas ce qu'elle ressentait. Le grand moment de panique et de peur qu'elle avait semé depuis quelques temps à peine et qui était revenu toquer à sa porte (toquer, hum hum !) s'était réenvolé, désormais. Peut-être persistait-il encore de al peur en elle - il en persistait toujours, de toutes les façons - mais la plus grande partie s'en était allée. Elle ne savait donc pas trop ce qu'elle ressentait et pourquoi elle se sentait si étrange, mais elle était sereine.

En tout cas, jusqu'à ce qu'elle regarde la carte... !
18 janv. 2014, 12:58
 04/2039  L'ombre du hasard (partie 1)
© MAGICLAND