Traverser la marée humaine pour pouvoir atteindre le train est un enfer pire que l'enfer lui-même. Sans oublier qu'il fait chaud, que ma valise pèse une tonne et que plus j'avance, plus le train semble s'éloigner de moi. À croire qu'il est en train de partir en abandonnant la moitié des élèves de Poudlard. Passer les vacances d'été ici ne serait pas dérangeant, mais je ne tiens pas à moisir entre les murs du Château alors que mes frères et soeurs s'amusent à la maison ou chez Grand-mère ou Grand-père. Il ne manquerait plus que ça, tiens, que tout le monde aille chez lui et pas moi. J'entends d'ici Valerian se moquer car j'ai été coincée sur le quai.

Je soupire, fronce les sourcils et accélère le pas pour chasser son image de ma tête. Rien que de penser à ce qui n'arrivera pas me met en colère. La chaleur me rend tendue, et je sens qu'une minute de plus passée à me débattre pour atteindre ne serait-ce qu'un compartiment vide va me faire exploser. Je donne un coup de coude rageur à un élève qui vient de me rentrer dedans, poussé par je ne sais qui, avant de presque courir jusqu'au train. Enfin me voilà à l'intérieur ! J'expire. Ici, il y a moins de monde. Je pars en quête d'un compartiment vide ou presque, histoire d'être un peu tranquille. Je ne veux pas passer le voyage avec Natanaël, et puis de toute façon il y a tellement de monde que trouver où il est me parait impossible. J'avance d'un pas rapide, jetant des coups d'oeil à travers les vitres des portes pour regarder les gens à l'intérieur. La plupart sont avec leurs amis en train de papoter joyeusement. Je ne vais pas m'incruster avec eux, ce serait terriblement gênant et de toute façon je ne veux pas me retrouver avec des inconnus.

Après avoir marché ce qu'il me semble être des centaines de kilomètres, j'aperçois une porte dont les stores sont tirés. Il n'y a presque personne ici, alors il ne devrait pas y avoir de monde à l'intérieur. J'ouvre brusquement la porte, rentre, me retourne sans regarder à l'intérieur et la ferme d'un coup sec, faisant trembler le mur où elle est accrochée. En soupirant de soulagement, je colle mon front à la vitre. Sa fraicheur me soulage, et je reste ainsi quelques secondes les yeux fermés. Puis, je me redresse et me retourne, prête à aller m'asseoir pour passer le voyage tranquillement et...

« Ah ! »

Je sursaute en voyant qu'une Poufsouffle est déjà là. Elle est en deuxième année je crois, mais je suis incapable de mettre un nom sur sa tête. Je l'ai déjà croisée, mais je n'avais pas fait attention à elle plus que ça. Après tout elle est plus âgée que moi, je n'allais pas m'embêter à lui faire la conversation.

« T'attendais quelqu'un ? »

Si elle me dit que oui, je partirais sans plus attendre, la situation est déjà assez malaisante comme ça. Sinon, j'irai m'asseoir en face d'elle en priant pour qu'elle ne m'adresse pas la parole.

Cadeau, une Ashley de mauvaise humeur !

Une nouvelle année se termine. Dernier voyage avec le Poudlard Express avant septembre. Ma tête posée contre la vitre, je ferme les yeux. Je suis montée parmi les premiers et je suis partie me réfugier dans un compartiment situé le plus loin possible dans le train. Je pensais même pouvoir y rester tranquille. Je me remémore tous les moments passés de cette deuxième année à Poudlard. Mes soirées pyjama avec mes amies. Les cours. Les examens. Pourquoi est-ce que je pense à ça ? Je lâche un léger soupir. Mes entrainements avec les Hel's Angels, ça c'est un beau souvenir. Aucune blessure, aucune déchirure à mon actif pour le moment. Les sourires, les rencontres, les éclats de rire, les disputes, les départs.. Tant de choses se sont passées. Le bal de Yule.. J'ai tant aimé y danser. Mais ai-je fait preuve de stupidité en pensant qu'Il accepterait de danser avec moi ? Je chasse rapidement cette idée de mon esprit.

- Idiote.. arrête d'y penser.

J'ouvre les yeux et regarde les élèves se dépêcher sur le quai. Je suis encore toute seule et j'apprécie ce silence et ce calme devant un tel spectacle à l'extérieur. On dirait plein de Niffleurs qui se disputent de l'or. Je tourne lentement la tête vers la porte de mon comportement, lorsque j'entends du bruit. Qu'est-ce qu'il se passe tout à coup ? Je vois alors une fille entrer et au vu de son comportement, je pense comprendre qu'elle ne m'a pas remarqué. Je reste donc silencieuse, telle une spatule perdue dans un tiroir de moldus. Est-ce que ça existe au moins comme expression ? Je crois que j'ai trop fréquenté Narcisse avec ses expressions étranges. Qu'importe, je la vois sursauter en me remarquant enfin et je finis par secouer la tête négativement.

- Non, non. Tu peux t'installer, je t'en prie.

Je la laisse faire puis regarde de nouveau à l'extérieur. J'ai l'impression que le quai est moins rempli. Je regarde discrètement ce que fait.. l'élève de Poufsouffle, non ? Oui, elle est à Poufsouffle. En première année, il me semble. Du moins elle l'était. À son comportement quand elle est entrée dans le compartiment, je crois bien qu'elle n'a pas trop envie de discuter. Il n'y a pas besoin de parler le Gobelbabil pour le comprendre. Malgré tout...

- Contente de rentrer ?

Les mots soulignés et en couleur sont pour la cabane de cristal.
@Narcisse Brando, un nouveau cadeau pour toi. Tu m'inspires ce soir !

À la réponse de mon aînée, je m'assoie en face d'elle sans plus attendre. J'étends mes jambes devant moi en réprimant un long soupir de soulagement. Maintenant que je suis posée dans le compartiment, je sens tout le stress et la fatigue d'il y a quelques minutes m'assaillir comme une vague déferle sur les rochers d'une côte en pleine tempête. Rapide, violente et douloureuse. Mes épaules s'affaissent, osant enfin se détendre. Je baisse la tête pour regarder mes pieds qui se balancent en rythme. J'aimerais bien enlever mes chaussures pour être plus à l'aise mais ce serait peut-être mal vu par ma camarade. Enfin, ce n'est pas que son avis m'importe plus que ça, mais je n'ai pas envie de me prendre une remarque désagréable du style "Tes pieds puent, remet tes chaussures !". Non merci.

Mon regard se glisse vers la fenêtre pour regarder dehors. Il y a de moins en moins de monde sur le quai, le train va bientôt partir. Enfin ! Je n'aime pas les longs voyages et celui-là promet de l'être terriblement. J'ai laissé tous mes livres dans ma valise et je n'ai pas envie de m'embêter à l'ouvrir pour tout fouiller, mettre le bazar et devoir tout ranger méticuleusement après. Surtout que je parie qu'ils sont tout au fond, là où ils sont le mieux protégés des risques de pliures. Je les ai déjà lus de toute façon, alors ce ne serait pas aussi passionnant que la première fois. Lorsque la Poufsouffle me faisant office de compagne de voyage m'adresse la parole, je tourne la tête vers elle pour plonger mes yeux dans les siens. Si je suis contente de rentrer chez moi ? Oui et non. Je ne sais pas, à vrai dire. Ça m'est égal. Tant que j'ai de quoi m'occuper et que je peux étudier, tout me va.

« J'suis contente de revoir mes parents. Un peu moins de quitter Poudlard, l'école va m'manquer en vrai. Et puis mine de rien on est vraiment bien ici, et j'ai pas envie de voir mes frères et ma sœur tous les jours cet été. J'les supporte déjà assez à l'école. »

La mention de ma famille n'était pas prévue, et je grimace en me rendant compte qu'elle n'était pas vraiment utile. Elle s'en fiche sûrement, de savoir qui sont les veracrasses qui me font office de frangins. Des veracrasses... C'est pas mal trouvé ça, comme surnom. Il faudra que je le ressorte quand je me disputerai avec Gwennaëlle, je suis sûre qu'elle adorera. Et je suis également sûre qu'elle aimera tellement qu'elle me traitera de tous les noms, me crachera au visage ses pires insultes et qu'elle s'enfermera dans sa chambre en claquant la porte après avoir vu que je lui sourirai d'un air narquois. Oui, ce surnom promet d'être très intéressant. À utiliser avec modération par contre, parce que sinon je risque de me réveiller chauve ou avec des pustules sur le visage suite à une potion qu'elle aurait glissée dans mon plat la veille au soir. Je me mords les lèvres pour m'empêcher de sourire à cette vision de Gwen énervée qui essayerait de se venger. Elle n'a jamais été très créative, elle demande tout le temps de l'aide à Valerian. Et après elle se permet de se vanter qu'elle est la plus âgée de nous quatre... Comme quoi, l'arrogance n'a pas de limites.

« Et toi ? »

Ma question est plus une formule de politesse qu'une vraie curiosité de ma part. Je me fiche pas mal de savoir si elle est contente de rentrer ou pas. Néanmoins, si échanger des banalités me permet de faire passer le voyage plus vite, je suis bien contrainte de m'y plier.

Je la regarde avec le plus de douceur dont je suis capable. Alors que je m'attendais à ce qu'elle ne daigne même pas répondre, je suis agréablement surprise de voir que finalement, elle se prête au jeu. Je souris doucement et l'écoute me confier ce qu'elle ressent. Nous avons beau être dans la même maison, rien ne l'obligeait à se confier de la sorte. Aucune information très privée, certes, mais elle n'en restait pas moins libre de refuser la conversation. J'étais contente qu'elle ne l'ait pas refusée.

- Ainsi, tu as ta fratrie à Poudlard... Est-ce qu'ils sont à Poufsouffle, eux aussi ? Je suppose que ce n'est pas toujours évident de devoir les voir tout au long de l'année. Surtout s'il y a des différences d'âge.

J'avais bien d'autres questions à lui poser sur eux. Mais j'avais peur de dépasser les limites. Si elle a envie de me parler d'eux, elle le fera d'elle même avec l'ouverture que je viens de créer. Je ne dois en aucun cas la forcer en lui posant des questions type d'une enquête de brigadier. Je suis bien plus discrète que cela. Je jette un nouveau coup d'œil sur le quai. Nous allons partir. Voilà que j'entends de nouveau le son de sa voix, et ce, pour me retourner ma toute première question. Je réfléchis quelques secondes avant de la regarder de nouveau.

- Je suis bien contente de rentrer. J'avais besoin de souffler donc ça tombe très bien. Et puis en septembre, je reviendrais avec mon petit frère... J'ai hâte.

Je lui souris doucement tandis que je le train nous secoue légèrement. Nous rentrons chez nous. Enfin.

Je n'aime pas le regard avec lequel elle me regarde. Ce regard empli de douceur, de pitié même, qui me fait me sentir si petite et insignifiante. Je savais que je n'aurais pas dû répondre à sa question, que j'aurais dû faire semblant de ne pas l'avoir entendue. J'aurais même dû sortir un livre, quitte à faire semblant de le lire, mais au moins ça m'aurait évité cette situation qui me parait si étrange et gênante. Mais la voilà qui continue de parler, parler et encore parler, me posant d'autres questions auxquelles je n'ai aucunement envie de répondre et où pourtant je suis obligée de le faire car la conversation est déjà engagée. Trop, en tout cas, pour que je puisse y mettre fin d'une manière ou d'une autre.

« Non. J'ai un frère à Serdaigle et l'autre est à Serpentard avec ma sœur. Ils sont plus âgés que moi mais c'est pas gênant. On s'entend plus ou moins bien, ça dépend des moments j'suppose. »

Je me mords la lèvre. Voilà que j'en ai encore trop dit. Je ne sais pas si c'est ma faute ou la sienne, mais il est indéniable qu'elle est douée pour faire parler les gens. Son attitude, sûrement, appelle à s'ouvrir et je déteste ça. Je ne la connais même pas, pourquoi devrais-je tout lui dire sur ma famille ? Méfiante, je me recule le plus possible au fond de mon siège, jetant un coup d'œil à travers la fenêtre. Le train s'est mis en marche. Dans quelques heures, je serai enfin de retour chez moi. Loin de Poudlard, loin du train et surtout, loin de la Poufsouffle-aux-mots-compatissants.

Je suis quand même soulagée de voir qu'elle répond à ma question. Enfin, à la sienne que je lui avais aussi posée par politesse. Elle a également un frère, cependant plus jeune qu'elle. Est-elle l'ainée de sa famille ? Ou est-ce qu'elle a une sœur ou un autre frère plus âgé.e ? Je brûle de lui poser la question, mais je me retiens comme je peux pour ne pas paraître impolie. Quoique, ce ne serait pas un problème, vu la curiosité dont elle a fait part il y a quelques instants.

« Tu penses qu'il ira dans quelle Maison ? demandé-je pour rester dans le thème de l'école. Puis, sans pouvoir m'en empêcher, je continue. Il s'appelle comment ? »

Peut-être qu'ainsi, elle me donnera son nom de famille, peut-être même son prénom, et j'aurais un espoir de pouvoir l'appeler par autre chose que "la Poufsouffle" ou "la deuxième année". Parce que si je lui pose la question plus tard, ce serait bizarre étant donné qu'on se parle depuis longtemps. Et je suis sûre que ce serait extrêmement malaisant. Quelle horreur.

Elle m'offre quelques informations supplémentaires sur sa fratrie et je l'écoute avec attention. J'ignore si je pourrais me rappeler de tout mais au moins je me souviendrais qu'ils sont tous plus âgés qu'elle et surtout qu'ils ne sont pas à Poufsouffle. J'aurais bien envie de creuser davantage mais j'ai peur de paraitre trop curieuse, surtout que jusqu'à aujourd'hui on ne s'était jamais parlé elle et moi. Je ne rajoute donc rien de plus et me contente de répondre à ses questions en souriant doucement.

- Très bonne question... J'aimerais beaucoup qu'il me rejoigne à Poufsouffle. Maiiiis... d'un autre côté, je ne serais pas étonnée s'il venait à rejoindre Gryffondor. Nous verrons bien.

Je ris légèrement alors que je vois déjà mes grands-parents espérer qu'il rejoigne telle ou telle maison. Poufsouffle comme mon père, mon grand-père et moi-même ou alors Gryffondor comme ma grand-mère ? Je ne le vois absolument pas rentrer dans une autre maison que ces deux-là. Elle me demande soudainement comment il s'appelle et cela me rappelle quelque chose soudainement. Comment ai-je pu oublier de me présenter ? Il est évident qu'elle ne connaît pas mon nom, nous n'étions pas dans la même classe.

- William. Il s'appelle William... Et je pense tout juste que tu ne dois même pas connaître mon nom. Je suis désolée, j'aurais du commencer par là. Je m'appelle Mary Bain. Enchantée de faire ta connaissance. Tu t'appelles comment, toi ?

Sorry pour ce retard... Je devrais avoir plus de temps maintenant !

Un nouveau Poufsouffle, donc ? Je suppose que ça ne la dérange pas d'avoir son frère dans la même Maison qu'elle pour cinq longues années. Je ne sais pas si ça m'aurait plu d'être à Serpentard avec Valerian et Gwennaëlle. Enfin, j'aimerais toujours y être, évidemment, mais j'aurais sûrement cherché à les éviter le plus possible. Entre les blagues de l'un et les critique de l'autre, j'aurais eu du mal à les supporter toute l'année. Et même pire, pour plusieurs années. Je suis d'ailleurs bien contente de ne plus passer mes journées avec eux. Il faut dire qu'avoir du temps pour moi et pouvoir faire ce qu'il me plait est merveilleux. Je me sens plus libre, moins contrainte à devoir faire ce qu'ils veulent. Et puis surtout, je peux choisir les moments où je passe du temps avec eux. Evidemment, il y en a beaucoup, mais ce sont mes choix et non des obligations. Quel bonheur !

Je souris lorsqu'elle me dit le nom de son petit frère, mais surtout le sien. Enfin ! Désormais, elle ne m'est plus inconnue, ce qui me sera fort pratique pour le reste du voyage.

« Moi c'est Ashley Houston. »

Je me tais un court instant, hésite et jette un coup d'oeil par la fenêtre, ravie de voir le paysage défiler de plus en plus vite.

« Appelle moi Ash, si tu veux. »

Quitte à rester ensemble, autant qu'elle m'appelle par mon surnom. Plus pratique, plus beau et surtout, il me plait plus.

« Ravie de te connaitre également. »

Il faut dire que malgré sa capacité à me faire dire des choses que je n'aurais normalement jamais partagées avec des inconnus, elle est très gentille. J'ai même envie de mieux la connaitre. Peut-être que nous deviendrons amies ?

« Tu fais quoi pendant les vacances ? »

Flûte... Vraiment désolée pour ce retard !