Allongé sur son lit, bras croisés sur son carnet sur sa proitrine et yeux fermés, le petit garçon de neuf ans venait tour juste de finir de rédiger une nouvelle page de son journal, sur laquelle il émettait des doutes quant à ses origines. Cela faisait un bon moment que cette question le turlupinait, mais il y réfléchissait particulièrement depuis qu’il avait découvert être un sorcier quelques mois plus tôt. Trop d’éléments étaient inexpliqués ou contradictoires. Pourquoi ne ressemblait-il pas du tout physiquement à sa maman ? Pourquoi cette photo de son papa avec une autre dame sur le rebord de la cheminée ? Pourquoi il n’avait pas de photos de lui, papa et maman à la sortie de la maternité ? Des rares copains qu’il avait, tous pouvaient en montrer. Pourquoi avait-il des pouvoirs magiques et son papa non ? Pourquoi ce dernier avait éte surpris de découvrir qu’il était sorcier ? Qui était cette femme dont il entendait parfois son père et sa mère discuter brièvement quand ils pensaient qu’il n’écoutait pas ? Allongé sur son lit, il se reposait encore en boucle cette multitude de questions, en y cherchant des réponses… en vain. Il avait bien une hypothèse mais… cela le bouleversait grandement.

Et puis sans trop savoir pourquoi, au bout de quelques minutes il s’était levé brusquement, suivant alors l’implusion soudaine d’aller directement confronter ses parents. Pourquoi maintenant ? Il ne saurait pas le dire, juste qu’il en avait marre se ruminer et son instinct lui soufflait que c’était le bon moment pour en parler. Il les avait rejoins dans le salon, prenant place sur le canapé en se lovant dans les bras de son père avant de poser sa question de but en blanc.

- Papa, maman, répondez sincèrement, j’ai été adopté ? D’abord surpris de par la soudaineté et la teneur de la question, Heavent et Tyler étaient restés interdits, échangeant alors un regard de stupeur. S’ils avaient pu s’attendre à cela… ce fut son père qui lui répondit en premier lieu, lui demandant pourquoi une telle question. Et Owen ne s’était alors pas privé pour répondre dans un long monologue et hochement d’épaule en donnant toutes les petites interrogations qui subsistaient dans son esprit. Ses deux parents se pincèrent alors la lèvre dans un geste miroir, ne sachant trop quoi lui répondre. Ils avaient tardé à lui expliquer son passé, repoussant sans cesse ce moment car se disant à chaque fois que ce n’était pas le plus approprié… mais en réalité y en avait-il un ? Ils avaient également souhaité attendre qu’il soit plus grand pour qu’il soit en mesure de comprendre. Mais peut-être avaient-ils trop tardé… Ce jour là en tout cas, ils n’avaient plus vraiment le choix. Ils étaient dans une impasse. Il allait falloir qu’ils prennent leur courage à deux mains, surtout Tyler, pour répondre aux questions de leur fils qui étaient toutes plus louables les unes que les autres. Mais après un long moment d’hésitation, le père de famille prit la parole, non sans avoir la gorge nouée et des larmes menaçantes qu’il tentait tant bien que mal de cacher.

- Non Owen, tu n’as pas été adopté… enfin… pas totalement… avait-il commencé, très peu sûr de lui sur la suite. Mon fils, il va falloir que tu sois fort, c’est compliqué à expliquer… mais sache que dans tous les cas, je suis et serai toujours ton papa, et elle est et sera toujours ta maman, ajouta-il en parlant de sa compagne, et que tu es notre grand garçon extraordinaire qu’on aime de tout notre coeur. Il marqua alors une pause, resserant son étreinte autour de son fils et permettant ainsi à Heaven de prendre momentannément le relais. Mais avant cela, elle attrapa la main d’Owen pour la serrer dans la sienne. Cela va répondre je pense à beaucoup de tes questions… mais ce n’est pas de moi que tu tiens ton gène magique, Owen. C’est quelque chose que tu as en toi depuis bien plus longtemps que tu ne puisse l’imaginer… mon coeur, tu sais, je n’ai pas connu papa avant que tu naisses. C’est pour ça qu’on ne se ressemble pas… parce que ce n’ai pas moi qui t’ai porté dans mon ventre… tu as une autre maman mon chéri… continua-t-elle avec beaucoup d’émotions dans sa voix avant de se faire interrompre par Tyler qui repris la parole. Owen je… ta maman qui t’as fait naître… est partie juste après ta naissance. Quelques jours seulement… je… elle… il ne trouvait plus ses mots tant cela était difficile pour lui d’y repenser mais avant tout de l’expliquer à son enfant. N’y avait-il après tout pas plus cruelle chose que de devoir annoncer ce genre de nouvelles qui remet en cause toute l’histoire de vie que son fils s’était imaginé ? Il n’osait pas imaginer ce que son petit garçon de neuf ans pouvait ressentir à ce moment là. Et Owen ne donnait pas d’indices, il restait pour l’instant de marbre, digérant certainement tout ceci au fur et à mesure. J’ai rencontré ta maman, celle qui t’as élevé, éduqué et qui t’aimes de tout son coeur quelques mois plus tard. C’est pour cela que tu ne t’en souviens pas et devait j’imagine être persuadé n’avoir connu qu’elle, n’avoir qu’une mère… et alors qu’il ne savait plus vraiment quoi ajouter d’autre et cherchait de l’aide et de la compassion dans le regard de sa bien aimée, quelques gouttes d’eau perlant au bord de ses yeux, Owen, resté silencieux jusqu’à présent avait de nouveau complètement retourné la situation par une réaction pour le moins innattendue.

Au fur et à mesure que ses parents avaient apporté des réponses, l’anxiété du châtain clair était montée d’un cran. Pourquoi donc prenaient-ils tant de précautions et semblaient-ils si perturbés ? Il savait bien qu’ils l’aimaient ! s’était-il fait comme réflexion au premier abord avant que les explications n’affluent d’avantage… dans un torrent d’émotions que lui-même ne saurait trop décrire. A mi chemin entre la confusion, la peur, et le soulagement d’avoir enfin des réponses, il ne savait pas quoi en penser. C’était beaucoup trop pour son petit coeur et son petit cerveau. Il ne savait pas non plus s’il parvenait à y croire, tant cela lui paraissait inimaginable, et pourtant il voyait bien par l’émotion transmise que ses parents ne mentaient pas. Et plus ils parlaient, plus il comprenait ou du moins pensait comprendre une chose et s’en persuadait : sa maman d’origine les avait abandonné, parce qu’il était né.

- Je suis désolé papa, avait-il alors dit les larmes aux yeux en enfouissant son visage dans les bras du plus vieux et le serrant du plus fort qu’il pouvait de ses bras. Aussi bien Tyler qu’Heaven avaient été surpris par cette excuse. Il n’avait rien fait, de quoi s’excusait-il ? Il n’avait fait que subir, était l’une des victimes. Hey mais Owen, làaa tu n’as pas à t’excuser, tu n’y es pour rien d’accord ? Il ne faut pas que tu penses que c’est de ta faute, car ça ne l’est pas… avait répondu sans plus attendre l’homme de la maison tout en câlinant son enfant. Tu sais, au fond, c’est bien mieux comme ça. Tu as perdu une maman mais pour en gagner une nouvelle en or, la meilleure maman qu’un enfant puisse rêver avoir. Et tu as aussi gardé le meilleur papa du monde, ajouta-t-il dans un sourire peu modeste pour tenter de détendre un peu l’atmosphère. Alors, qu’est-ce que t’en dit, elle est pas belle la vie ? conclua-t-il dans un sourire sincère et compatissant en décelant l’incompréhension et la peur qui se lisait sur le visage de son fils. Heaven en avait alors profité pour venir également déposer un baiser dans ses cheveux, lui faisant alors reprendre pied dans la réalité et relever doucement la tête. C’est nous qui te devons des excuses, affirma-t-elle à la limite de l’embarras. On aurait du t’en parler plus tôt peut-être… mais on avait peur de ta réaction et que tu ne comprennes pas… tu comprends n’est-ce pas ? l’interrogea-t-elle tout de même dans moment de doute. Un hochement de tête affirmatif la rassura et un discret sourire naquit en retour à la commissure de ses lèvres. Elle posa alors sa tête sur l’épaule de son compagnon, non loin du visage de son fils en le détaillant d’un regard empli de son amour de mère.

Le trio resta ainsi lové dans les uns dans les bras des autres, silencieux, un bon moment, chacun méditant très certainement sur la situation, la décortiquant et se remettant des ses émotions, avant qu’Owen ne se remette à parler. Un simple merci des plus sincères, dans un demi-sanglot. Ce n’est que de longues minutes peut-être même une heure plus tard, aucun des trois n’en savait trop rien, que les cloches de la chapelle du quartier sonnant six heures et le début de la soirée vinrent interrompre ce moment. Owen qui commençait à ne plus se sentir très à l’aise en avait alors profité pour rebondir sur un autre sujet, restant tout de même dans le thème, en demandant à sa mère s’ils pourraient aller à la messe le demain, quand bien même lui n’était pas croyant, car il ressentait une soudaine envie de pouvoir livrer ce qu’il avait sur le coeur à travers un autre moyen de communication. Il savait également que c’était quelque chose d’important pour sa maman et en ce moment même, plus ou moins inconsciemment il ne souhaitait qu’une chose : passer du temps avec elle en partageant ses centres d’intérêts. Lui montrer à quel point lui aussi il l’aimait, et la remerciait.