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23 janv. 2018, 23:28
 RPG  L'arrière-garde
1


Dallan ajusta la position des bagues le long de ses doigts. Certaines brillaient comme des ruisseaux de pierres précieuses entrelacées, d’autres tranchaient par leur sobriété ; de simples anneaux en apparence. Mais en apparence seulement, car Dallan avait imaginé et fabriqué chacun de ces anneaux en leur insufflant une étincelle de magie propre.

On était jamais trop prudent lorsqu’on occupait la fonction si enviée de ministre de la Magie.

Dallan tendit l’oreille, percevant le bruit d’une foule en mouvement dans la salle d’audience n°4. Le procès devait être terminé. Dallan espérait que Nott avait pris en considération son opinion quant au devenir du prévenu, même si ce n’était qu’une opinion parmi d’autres. Et si tel n’était pas le cas… et bien il s’arrangerait pour que l’acte de propriété du Chaudron Baveur finisse entre des mains responsables et dignes de confiance.

La porte de la salle d’audience s’ouvrit sur la silhouette du vieil aubergiste, visiblement libre. Dallan accueillit le résultat du verdict avec satisfaction. Le vieil homme était un héros. Un héros sans toute sa tête, mais un héros tout de même. Lui et beaucoup d’autres avaient épargné le pire à des centaines de petites têtes innocentes retranchées dans Poudlard lors de l’incursion des néo-Mangemorts — parmi lesquelles deux innocentes agitaient le coeur de père qui battait dans la poitrine de Dallan.

Plaqué contre un mur lisse et froid du hall, masqué par le peu de lumière que parvenait à diffuser les torches fixées de part et d’autre de l’entrée de la salle d’audience, Dallan laissa sortir le plus gros de l’assistance en guettant la physionomie des personnalités qu’il apercevait depuis sa position.

L’actionnaire majoritaire de la Gazette du Sorcier, un bonhomme aussi gros qu’un baril, semblait mécontent du verdict à la façon dont il menaçait tout le monde avec sa canne. La grande sorcière au nez crochu qui l’accompagnait — Dallan ne l’avait encore jamais vue — acquiesçait à chacune de ses invectives. Plus loin, un groupe compact de commerçants du Chemin de Traverse arborait des sourires satisfaits, comme la majorité des gens qui quittèrent cette salle sous l’œil attentif de Dallan.

Puis, Dallan la vit. Elle marchait seule, tout de noir vêtu, fidèle à elle-même et aux descriptions des livres d’histoire.

Il s’éclaircit la voix, encore retranché dans la pénombre de sa position.

« Professeur Loewy ? »

Kristen Loewy tourna ses yeux clairs dans sa direction, cherchant à deviner qui l’avait appelé. Dallan s’arma du sourire le plus aimable qu’il était capable de produire et sortit de sa cachette, les bras croisés dans son dos.

« L’endroit ne s’y prêtait peut-être pas, mais en entendant parler de cette audience, j’espérais bien vous y trouver et saisir l’opportunité de vous parler, déclara-t-il avant de saluer d’un hochement de tête les membres du Magenmagot qui le remarquèrent.  Auriez-vous quelques minutes à m’accorder avant de retourner à vos affaires ? »

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24 janv. 2018, 00:09
 RPG  L'arrière-garde
Le procès d’Eadric Sturrlock n’avait pas été bien long. Pendant la majeure partie de l’audience, Kristen avait cru le vieillard condamné. Il fallait dire qu’il s’exprimait très mal et sa défense ne faisait que l’inculper plus encore. Il avait des mots de mage noir, comme lorsqu’il avait dit qu’il avait utilisé le sortilège de l’Imperium par instinct, mais il avait ensuite garanti n’en être pas un... Kristen avait assisté à ce procès dans le but de faire son possible pour épargner à Sturrlock la prison. Elle ne le connaissait pas, le trouvait même stupide et prétentieux, mais elle lui était tout de même reconnaissante d’avoir contribué à aider Poudlard. Quand elle l’avait senti condamné, elle avait hésité à se lever pour prendre sa défense. C’est à ce moment-là que le vieil homme avait changé son fusil d’épaule, à la surprise générale, et enfin fourni de vrais arguments de défense aux juges.

Bref, Sturrlock avait échappé à Azkaban. Tout de même puni, on lui avait ôté le droit de se servir d'une baguette. Kristen détesterait avoir à subir une telle punition, elle se sentirait complètement démunie... Mais la décision des juges était en accord avec la piètre défense de Sturrlock, qui n'avait pas donné l'impression de faire très attention à la potentielle dangerosité de la magie.

En somme, Kristen sortit satisfaite, comme la plupart des sorciers présents, de la salle d'audience. Elle allait adresser un mot rapide à Sturrlock puis rentrer à Poudlard, tout simplement, quand on l’interpella. C’était Dallan Blackwave, le nouveau ministre de la magie. Le troisième que Kristen rencontrait depuis qu’elle était directrice de Poudlard. Devait-elle s’en trouver lasse ?

Dallan Blackwave avait l’air d’être quelqu’un de plutôt avenant. Quand on pensait à Aldérande Slughorn, qui l’avait précédé, on prenait conscience du fossé qui existait entre ces deux personnages. Kristen n’avait pas beaucoup aimé Slughorn et il y avait de très fortes chances pour qu’elle lui préfère son successeur. C’était déjà ça.

La directrice de Poudlard se tourna vers le nouveau Ministre, observa les sorciers qui quittaient la salle d’audience comme s’ils pouvaient l’aider à déterminer l’heure qu’il était et le temps qu’un entretien avec Blackwave lui prendrait, et posa à nouveau ses yeux bleus sur le politicien. Elle lui offrit un sourire poli.

« Bien sûr, Monsieur le Ministre. Ravie de vous croiser ici, dit-elle en s'approchant. »

Elle ne savait pas si elle avait déjà été ravie de croiser un simple quelqu’un où que ce soit.

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25 janv. 2018, 00:31
 RPG  L'arrière-garde
2


Dallan continua de sourire aux membres du Magenmagot qui quittaient la salle d’audience par groupes plus ou moins importants. Il attendit de voir Reece et Nott lui filer sous le nez — ils accélérèrent le pas en le découvrant en compagnie de la directrice de Poudlard, qu’ils ne manquèrent pas de saluer — pour retenir la porte de la salle d’audience.

« Venez, je vous prie. Certains murs ont des oreilles que je ne souhaite pas titiller, dit-il en tenant la porte au passage du professeur Loewy. »

La porte refermée, Dallan lui jeta un sortilège d’Impassibilité avant de ramener ses mains dans son dos.

« Je ne compte pas vous juger, rassurez-vous, s’amusa-t-il en passant devant le professeur Loewy. »

Dallan hésitait sur la démarche à suivre. Les informations dont il disposait étaient bien trop graves pour qu’il se permette de les taire. Pour autant, il n’avait aucune idée de la façon dont Kristen Loewy réagirait à l’énoncé des faits. Et si quelque chose le travaillait profondément, c’était bien le caractère imprévisible de cette femme.

« Une fois devant vous, je pensais trouver le moyen d’agir convenablement, mais voilà que mes certitudes se sont envolées, confessa Dallan en s’asseyant sur la première marche de l’escalier qui menait aux travées. Mais enfin… il vaut mieux que vous appreniez la vérité de celui qui la détient. »

Les coudes en appuis sur ses genoux, Dallan retira une de ses bagues et la fit sauter d’une phalange à une autre. Quand la bague se cala entre son auriculaire droit et son annulaire, il la fit virevolter dans l’autre sens. Une seconde plus tard, son pouce la renvoyait lui aussi. Ce petit tour de passe-passe était le meilleur moyen que connaissait Dallan pour distraire son esprit lorsqu’il sentait que ses préoccupations prenaient trop de place.

« Je ne sais pas ce qu’il s’est réellement passé à Beauxbâtons entre vous et Stanislav Stoyanov, mais tout indique que vous êtes présentée comme une alliée du régime en Bulgarie. Si en dehors des frontières bulgares peu nombreux sont ceux qui se laisseraient berner par cette farce, le fait est que votre nom est aujourd’hui haï dans un nombre grandissant de foyers bulgares. Votre nom cristallise sur lui toute la colère que les sorciers soumis au régime répressif des Noirfangueurs n’osent plus tourner contre leurs geôliers. »

Dallan releva doucement les yeux et les plongea dans ceux que toute une communauté aimait de ce côté de la Manche mais qu’une autre s’était surpris à haïr de toutes ses forces de l’autre côté du Danube.

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31 janv. 2018, 22:07
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Rares étaient les plaisanteries qui pouvaient arracher un sourire à Kristen Loewy, aussi la remarque censée être amusante du nouveau Ministre de la Magie fit-elle un profond flop. Quoi que, ce n’était pas vraiment un flop, c’était plutôt une inexistence. Kristen n’eut aucune réaction, si bien qu’on eût été en droit de se demander si elle avait bien saisi la vanne. Elle se contenta de suivre le Ministre sans mot dire et le laissa aller là où il voulait en venir. Son mouvement de bague l’impatienta, car elle y vit clairement une façon, pour Blackwave, d’occuper ses doigts en attendant d’avoir quelque chose de véritablement lourd à dire. Elle haussa un sourcil.

Elle comprit dès que le nom de Stanislav Stoyanov fut prononcé. Elle saisit une grande quantité d’air dans ses narines en même temps que son menton se relevait. C’était une sorte de position de défense fondée sur un principe de dignité intimidatrice.

Que son nom soit haï, elle n’en avait cure. Elle ne se préoccupait pas plus de l’admiration qu’elle suscitait que de la haine qu’elle pouvait inspirer. Ce qu’on pensait lui passait au travers, comme cela avait toujours été le cas, tant que cela ne lui portait pas de sérieux préjudices. L’humanité avait un avis si insignifiant qu’elle ne voyait pas l’utilité qu’il pouvait y avoir à prendre garde à l’opinion publique. Après tout, elle savait qui elle était, ce qu’elle faisait, et elle seule était en mesure de se juger.

« Je ne fais pas de politique, Monsieur Blackwave. »

Elle, non, Stanislav, si. Il s’était apparemment servi de la situation pour sa politique douteuse. Kristen en était blasée.

« Nous aurions tous dû mourir à Beauxbâtons. Peut-être seriez-vous mort, vous aussi, à terme, et peut-être y aurait-il eu des morts parmi les élèves de Poudlard. Ce n’est pas arrivé parce que Stanislav Stoyanov et ses Noirfangueurs sont arrivés à temps. »

Elle parlait en toute honnêteté. Ce n’était pas quelque chose de correct. La société veut qu’on déteste toujours les personnes considérées naturellement comme odieuses, même lorsqu’elles font des choses dont les conséquences sont plutôt positives. Pas de rédemption pour les ordures ; et personne ne comptait sérieusement pardonner à Stanislav Stoyanov, de toute façon. En l’occurrence, il s’agissait plutôt de se poser devant le fait accompli avec une sincérité malvenue.

« Néanmoins, je le hais peut-être autant que je hais Pierre Legallet, et je pense que le monde serait meilleur s’il s’abstenait d’exister. Peut-être trouverez-vous ces propos choquants, mais nous sommes dans une salle d’audience… La vérité, rien que la vérité. »

Elle ne souriait pas aux farces, mais ce genre de remarques gênantes l’amusait. Allez savoir pourquoi.

« Enfin. Tout cela pour dire que je suis loin d’être une alliée de son régime. Mais j’imagine que vous aussi étiez convaincu que cette supposition n’était qu’une farce… Permettez-moi, donc, de vous demander où vous voulez en venir en me faisant part de cette information ? »

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01 févr. 2018, 20:09
 RPG  L'arrière-garde
3


Je laissai Kristen s’exprimer librement en me contentant de l’observer. Sa fantastique capacité à dire la vérité, rien que la vérité, m’impressionnait. Peu de gens en était capable. On pouvait même parler de miracle au sein des cercles de pouvoir. Kristen Loewy en était un, à sa façon. Nul n’ignorait les risques qu’elle avait pris depuis que son nom s’était associé à la réputation de Poudlard ; bons ou mauvais, les choix de cette femme étaient remarquables de détermination. Le reste, je le laissais volontiers aux juges amateurs. Ceux-là même qu’une vie morose et dénuée de but les poussait à juger le monde entier d’après un point de vue si étriqué que la lumière de la vérité n’atteignait que rarement leur regard aveugle. Le bien ou le mal d’une action me semblait peu de choses au regard du courage dont il fallait parfois faire preuve pour justifier son opinion. Kristen avait choisi de protéger Beauxbâtons coûte que coûte. Qui pouvait la blâmer pour ça ?

« Je suis un très mauvais juge, répondis-je en replaçant la bague à mon doigt. Il m’est difficile d’émettre une opinion sur quelque chose qui ne me concerne pas directement, quelque chose que je ne peux me venter d’avoir vécu de l’intérieur. Et même si j’en avais une, je pense qu’elle n’aurait aucune valeur. Il est toujours plus facile de juger le monde en étant tranquillement assis dans son canapé, les doigts de pieds écartés devant un bon feu de cheminée, que d’éprouver la rudesse de ce même monde sous la pluie, le froid, et la peur. »

Je tournai mon regard vers un renfoncement de la salle d’audience où une petite porte dérobée permettait aux agents du département de la justice magique de faire entrer les détenus.

« Faites-les entrer ! criai-je. »

La petite porte dérobée s’ouvrit, libérant le bruit de chaines trainées sur le sol. Tandis que trois Aurors faisaient avancer deux hommes vêtus de haillons dans la faible lumière de la salle d’audience, je reportai mon regard sur Kristen, curieux de voir quelle serait sa réaction face à ces hommes emplis de haine à son égard.

« Il y a très exactement vingt-huit heures et trente-six minutes, le bureau des Aurors a capturé ces deux individus dans une chambre de la Tête de Sanglier. Ils ont fait venir un traducteur. Tous les deux sont bulgares. Et devinez quoi, ils projetaient de vous assassiner… »

Je me levai et marchai jusqu’à Kristen tandis que les Aurors faisaient s’agenouiller les détenus.

« Ce ne sont pas des mages noirs, lui dis-je en regardant ailleurs. L’enchantement du Priori Incantatum n’a révélé aucun usage de la magie noire chez ces individus. Ils ont refusé de nous donner leur nom et leur prénom, mais l’office des Portoloins nous a permis de retrouver leur identité au sein d’une liste de touristes bulgares arrivés sur notre sol il y a une semaine. Vasil et Yavor Ivankov. Ils travaillent pour un éleveur de chimères. Deux hommes sans histoire, si ce n’est l’embrigadement forcé de leur soeur par les Noirfangueurs il y a six mois. »

Je me détournai et me dirigeai vers la sortie contre laquelle je m’adossai. C’était là ma façon de ne pas faire peser ma présence dans la balance. Kristen devait se sentir seule face à son choix.

« Je vous suis intimement redevable pour tout ce que vous avez fait depuis que vous êtes à la tête de Poudlard, dis-je en croisant mes bras sur ma poitrine. Deux de mes filles étudient la magie sous votre bienveillante protection. Votre alliance éphémère avec ce Stanislav Stoyanov ne me concerne pas. Je suis mauvais juge, ne l’oubliez pas. Mais le sort de ces deux hommes vous concerne. Faites ce que vous croyez être juste. »

D'un geste, je renvoyai les Aurors qui disparurent derrière la porte dérobée.

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04 févr. 2018, 19:33
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La façon de penser de Blackwave plut assez à Kristen. On ne pouvait juger tout ce qui s’était passé à Beauxbâtons sans y avoir été : c’était trop gros. Indicible. Inimaginable. Un coup à confondre les nuits noires et les nuits blanches, et les cauchemars et la réalité – c’est souvent ce qui arrive quand la réalité est déjà un cauchemar.

Un cauchemar, c’est aussi ce que vivaient les Moldus et opposants au pouvoir, devenu exclusivement sorcier, en Bulgarie. Dans cette situation, on fait tout pour s’en sortir. Tout, c’est-à-dire qu’on serait même prêt à tuer, pourvu que cela cesse. Kristen n'aurait pu en vouloir à ceux qui se battaient pour la liberté d’Être – même lorsqu’il s’agissait de Moldus. Elle avait beau les considérer comme inférieurs aux sorciers, car ils avaient, selon elle, un manque et non une chose en plus : le manque de sorcellerie (sans magie dans les gènes, il n’y aurait que des Moldus), elle n’en était pas à leur vouloir le moindre mal. Leur existence l’indifférait, tout simplement, qu’ils vivent tranquillement de leur côté, sans l’importuner, et tout irait pour le mieux.

Ce que Stanislav Stoyanov faisait subir à ces gens et à tous ceux qui les soutenaient en s’opposant à son gouvernement se situait aux confins de l'horreur. On ne pouvait pas briser tant de vies sans être puni.

Kristen mit ses mains dans les poches de son manteau et soupira. Aude l’aurait détestée de faire si peu attention à sa vie.

« Je ne suis pas morte, je crois. Arrête-t-on des innocents, dans mon pays ? »

Elle fronça les sourcils en jetant un bref regard en direction des bulgares. Ses yeux bleus revinrent assez vite vers Dallan Blackwave et elle ajouta :

« Si le sort de ces hommes me concerne vraiment, je dirais qu’il faut qu’ils soient aidés, comme tous les sorciers et sorcières dans leur situation et comme les Moldus persécutés en Bulgarie. Vous êtes peut-être mauvais juge, Monsieur Blackwave, mais à en croire votre nouvelle fonction, vous devez être bon politicien, et les bons politiciens sont assez rarement - bien que ça arrive - de parfaits idiots renfermés sur eux-mêmes et leur seule communauté de sorciers. »

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06 févr. 2018, 10:14
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4


La réponse de Kristen en aurait surpris plus d’un au ministère. Dallan en était certain. Mais pas lui. Si les rapports sur les évènements survenus au cours de ces deux dernières années à Poudlard lui avaient appris quelque chose, c’était bien que Kristen Loewy était tout sauf une folle. Elle était capable de coups de sang d’une imprévisibilité rare, mais Dallan la soupçonnait de toujours bien mesurer leur portée. Une personne capable de retourner autant de coups de sang en coups d’éclat devait posséder des capacités de réflexion et d’adaptation au-delà de la normale. Kristen ne faisait que confirmer cette théorie en épargnant les bulgares.

Dallan sourit en se décalant. Il ne souhaitait pas l’avoir dans son champ de visée au moment de sortir sa baguette magique. Je ne suis pas un duelliste. Ça, elle le sait déjà. Son sortilège de Destruction libéra les prisonniers de leurs chaînes dans un bruit de métal enfoncé au marteau. Les bulgares échangèrent un regard égaré. Manifestement, ils ne comprenaient pas pourquoi Kristen les avait épargnés.

« Vous pouvez sortir. Vous avez désormais la preuve que cette femme n’est pas votre ennemie. Des agents vont s’occuper de vous et s’assurer que vous puissiez recommencer votre vie en Grande-Bretagne, sous notre protection (1), leur expliqua Dallan en pointant la porte par laquelle ils étaient entrés sous le statut de prisonniers et par laquelle ils repartiraient sous le statut de réfugiés politiques. »

Les bulgares se mirent debout en échangeant quelques mots inaudibles. Leurs regards apeurés sautaient de Kristen à Dallan avec une frénésie craintive. Peut-être croyaient-ils que tout ceci n’était qu’un jeu. Une façon de leur faire miroiter un brin de liberté pour mieux les briser ensuite. Une méthode de Noirfangueur… songea tristement Dallan.

« Vous êtes libres (2), insista Dallan en préparant une note administrative d’un tour de baguette magique. »

L’enveloppe pourpre déploya ses ailes en papier et s’envola vers la porte dérobée par laquelle elle disparut.

« Pour s’emparer d’une forteresse dans le désert, il ne suffit pas de posséder une grande armée, dit Dallan en regardant Kristen dans les yeux. La victoire dépend aussi du degré de préparation des hommes et du libre accès aux points d’eau. »

Dallan détourna son regard pour voir les bulgares remercier Kristen d’un hochement de tête. L’image était assez forte pour l’assurer qu’ils lui livreraient des informations susceptibles de servir leur cause une fois qu’ils seraient confortablement installés et libérés de la peur des Noirfangueurs. Les deux hommes hochèrent également la tête dans sa direction. Dallan le leur rendit en rangeant sa baguette dans sa manche.

Les bulgares partis, un lourd silence s’abattit sur la salle d’audience. N’appréciant guère le côté presque tragique que cela donnait à l’instant, Dallan fit résonner ses pas. Il marcha lentement vers le centre de la salle, les bras croisés dans son dos. Un coup d’oeil vers le tas de chaînes renversées sur le sol noir revigora ses traits. Les voyantes y verraient, à coup sûr, un présage. Mais aucune chaîne ne peut être brisée sans la volonté de quelques hommes de bien.

C’est sur cette pensée qu’il tourna les talons et se figea face à Kristen.

« Quand tous les éléments auront pris place sur l’échiquier, pourrons-nous compter sur notre pièce maîtresse ? »

Dallan avait bien sa petite idée sur la question.
___________________________________________________
(1)(2) Paroles prononcées en bulgare

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27 févr. 2018, 17:57
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Être libre ne rendrait pas leur sœur aux deux Bulgares. Kristen le savait. Personne n’avait rendu le gentil Stanislav à Arseni. Elle regarda les étrangers s’en aller et imagina un instant l’intolérable désolation de leur vie. Kristen ne parlait pas leur langue, mais elle imagina à peu près ce que le ministre avait dû leur dire. Elle n’attendait pas le moindre remerciement de leur part, pas la moindre reconnaissance. Il lui semblait avoir été juste, tout simplement. Ces sorciers devaient être déshabitués à la justice pour la remercier quand ils la croisaient.

Kristen soutenait naturellement le regard de Dallan Blackwave, n’aimant généralement pas baisser les yeux, quelle que soit la circonstance, et resta muette lorsqu’il eut fini de parler. Elle attendait une suite. Comment, par Merlin, Kristen pouvait-elle savoir s’ils pourraient compter sur leur pièce maîtresse, puisqu’elle ne savait pas ce que c’était ? Quand elle vit que Dallan n’était pas décidé à poursuivre et attendait plutôt une réponse, elle répéta bêtement :

« Votre pièce maîtresse ? »

La réponse du Ministre la laissa perplexe un instant : « vous. » Encore trop (paradoxalement) humble pour se considérer comme la pièce maîtresse de n’importe quel plan, elle qui avait surtout l’habitude de foncer seule selon les règles qu’elle édictait elle-même, ne se sentait pas en position d’être utilisée dans le plan d’autrui. Sa récente renommée lui était encore étrangère, puisqu’elle faisait la plupart de ce qu’elle faisait pour elle-même, et non dans le but d’obtenir une quelconque gloire. Elle ne confondait d'ailleurs pas noblesse, grandeur et gloire : si elle visait les deux premiers, elle se souciait assez peu du dernier, trop dirigé vers la subjectivité des autres pour l’intéresser tout à fait.

Toutefois, des explications s’imposaient.

« Qu’attendez-vous de moi exactement ? »

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28 févr. 2018, 17:34
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Dallan Blackwave n’était pas le genre de personne qui prenait les chemins les plus longs. Il les trouvait trop souvent sinueux et n’aimait pas franchement l’idée de se perdre en route. La voie la plus courte est souvent la meilleure, aimait à dire sa mère. Un conseil qu’il s’était efforcé de suivre tout au long de sa vie, et encore en cet instant, devant l’héroïne de tout un pays.

« Ce que vous faites le mieux : vous battre, répondit-il d’une voix où tonnait toute sa sincérité… et quelques arrière-notes de gravité. »

Dallan n’était pas fait pour se battre. La nature ne lui avait pas accordé une mire infaillible, ni un sens aigu de l’esquive. Un éléphant aurait eu plus de succès dans un magasin de porcelaine que lui dans un duel de sorciers. Chaque chose avait sa place dans cet univers. La sienne ne figurait tout simplement pas sur un champ de bataille, mais derrière des cartes, des liasses de parchemins raturés et, si possible, à portée de main d’un de ces objets biscornus tout droit jaillis de son imagination.

« J’entends que le destin des Noirfangueurs soit aussi funeste que possible, expliqua-t-il, les mains à présent enfoncées dans les poches de sa robe de sorcier. Laisser grandir une force d’une telle noirceur au coeur de l’Europe n’est pas une idée avec laquelle je compte coexister. »

A travers cette dernière phrase, Dallan désignait, sans avoir à prononcer le moindre nom, tout un attroupement de dirigeants européens à qui il manquait deux sous de jugeote. Vous en connaissez peut-être, ce sont ces hommes et ces femmes de pouvoir qui pensent que le meilleur moyen de le conserver est de s’y accrocher très fort en fermant les yeux. Dallan, lui, préférait écouler son mandat en conservant les deux yeux ouverts, quitte à laisser filer le pouvoir là où il se sentait le plus à son aise. Entre les mains de Kristen Loewy, par exemple.

« Je ne suis pas idiot. Je sais que je n’ai aucun don pour le combat. Me présenter à la tête d’une armée de volontaires aurait exactement le même effet que le souffle un peu trop poussif d’un enfant qui essayerait de monter un château de cartes. Mais si c’était vous qui les meniez… et bien je crois que cela changerait absolument tout. Notre intervention serait plus forte tant sur le plan humain que sur le plan politique. »

PNJ du Maître du Jeu (contacter directement le Maître du Jeu)
07 mars 2018, 22:02
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Peut-être que Kristen Loewy savait bien se battre. Sans doute. Disons qu’elle avait l’esprit taillé pour ça et une bonne condition physique, d’autant plus depuis qu’elle était redevenue pleinement elle-même après avoir retrouvé la mémoire. C’était peut-être effectivement ce qu’elle faisait de mieux, mais il fallait dire qu’elle se considérait comme assez incapable de faire quoi que ce soit de correct : elle était une mauvaise mère (et ça prévalait sur tout le reste). Ses épaules s’affaissèrent ; elle ne dit rien.

Elle sentit son cœur s’accélérer et cogner finalement contre sa cage thoracique. Est-ce que Dallan Blackwave lui demandait de se positionner en cheffe de guerre ? Ses sourcils se froncèrent et elle dévisagea son interlocuteur. De ses yeux partaient des éclairs de reproches inexplicables.

« C’est pourtant vous, le chef des sorciers de notre pays. Notre communauté vous a élu, elle vous suivrait, que vous participiez activement ou non. »

Elle soupira, parce qu’elle sentait que toute argumentation serait vaine.

« Aussi surprenant que cela puisse paraître, je n’aime pas beaucoup faire la guerre, Monsieur Blackwave. Même quand j’ai la conviction qu’elle est juste. »

Elle ajusta le col de son manteau d’un geste ridiculement digne.

« Je prendrai soin de réfléchir longuement à votre proposition. Il y a beaucoup de facteurs à prendre en compte. »

Avait-elle le droit de se sentir fatiguée avant de s’engager dans un nouveau combat ? Pouvait-elle profiter du calme présent, d’être avec Aude, prendre le temps de recoller les morceaux avec son fils ? Elle aurait voulu mettre les intrigues sur pause pour savourer ce qu’on lui offrait enfin et pour attraper au vol ce qu’on lui donnait l’opportunité de saisir. S’engager contre Stanislav signifiait manigancer pour savoir que faire de Legallet, mener des sorciers à la mort (il y en a toujours, même dans les belles histoires, ne serait-ce que pour la cohérence générale), mettre le bonheur en gage.

Mais il y avait cette foutue justice, ces foutues victimes qu'il fallait sauver, et qu'on ne pouvait s'empêcher de secourir, d'ailleurs - rien que pour des questions de bonne conscience dans le pire des cas. Et c'était comme ça, si l'on souhaitait que la justice soit couronnée (et Kristen le souhaitait fermement), il ne fallait pas se contenter de demander aux puissants. Il fallait aussi agir. Dans la douleur d'abandonner un confort durement acquis.

« Y a-t-il autre chose ? demanda-t-elle enfin. »

Blackwave répondit :

« Je crois qu'il faut savoir se taire dans certaines circonstances. Celle-ci me semble idéale. Bonne journée, professeur. »

Il s'inclina et un salut rendu plus tard, tous deux purent rentrer de leur côté pour méditer sur les grandes choses qui avaient été dites.

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