La vision de Zikomo est réconfortante, comme toujours. Il m’aide à me sentir mieux, il m’aide à me sentir moi. A m’échapper de la peur qui rode dans mon coeur et des questions qui pèsent sur mon esprit. Avec lui, tout semble toujours plus simple. Comme s’il suffisait de se laisser aller pour que tout aille bien. Malheureusement, je sais que ce n’est pas le cas ; peu importe, tant que Zikomo est là.

Inconsciemment, j’ai déjà commencé à réfléchir à ce que je pourrais apprendre au garçon. Un ou deux sortilèges suffiront amplement à remplir ma dette. Ou un seul, en fonction de la puissance et de la difficulté du sortilège. Et avant cela, il me faudra évidemment me rendre compte de son niveau ; je vais devoir l’observer de loin, essayer de le comprendre. Il est dans la même année que Thalia, je pourrais lui demander si… Mon coeur sursaute lorsque l’image de la jeune fille se dépose dans mon esprit. Je la repousse habilement ; je me débrouillerais sans Thalia s’il le faut. Peers est de l’année de Hunter, je pourrais le lui demander à elle. Elle me répondra, je le sais.

Mon regard est attiré vers le garçon quand celui-ci reprend la parole. Je ne retiens pas la grimace qui me mange le visage, mais j’arrive de justesse à ne pas rétorquer : « J’suis encore en quatrième année ». Son idée de sortilège n’est pas mauvaise. Protego, c’est le plus évident. Apprendre à se protéger quelque soit les circonstances. Si j’avais été un minimum débrouillarde, j’aurais pu me protéger du sortilège qui m’a foncé dessus au bal et tout aurait été différent. Je sais très bien lancer le charme du bouclier, alors pourquoi n’ai-je pas été capable de le faire au bal ? *J’suis nulle* ; cette réponse, bien que réaliste, paraît trop simple pour être totalement vraie.

Je hoche vaguement la tête et lance un regard en coin à Hunter. Le charme du bouclier, pourquoi pas. Je ne lui dirais pas, mais cela ne me fera pas de mal de réviser ce sortilège. Et puis ce sera l’occasion de m’entraîner à lancer des sortilèges d’attaque sur Hunter pour l’entraîner. Ce ne sera pas une perte de temps, non.

« En tout cas je compte pas attendre tranquillement que les problèmes viennent me trouver sans rien faire. »

Mon coeur se serre. Moi non plus, je ne vais pas attendre. J’ai une pensée pour l’aventure que j’ai vécu au Japon. En général, ce sont les problèmes qui me trouvent, et pas le contraire. Qu’aurais-je fait si je m’étais fait attaquer là-bas ? Aurais-je été capable de me défendre ? Ne pas avoir la réponse à cette question me rend folle. Et c’est une preuve évidente que j’ai besoin, moi aussi, de m'entraîner.

Je me lève en même temps que Hunter, cachant de ce fait ma surprise de le voir partir aussi vite. Je suis rassurée, cependant. Je pensais que nous allions parler de long en large du sortilège à apprendre, que ça allait durer trois plombes. Mais il ne semble pas de cet avis. Peu importe, cela me laisse la possibilité de terminer mon devoir. Et de toute façon, je dois aller retrouver Nyakane.

« Je viendrais te trouver, » répondis-je au garçon en lui jetant un regard perplexe.

Y réfléchir maintenant aurait évité de devoir nous retrouver plus tard pour nous donner rendez-vous. Je garde mes pensées pour moi — les Autres sont bien trop incompréhensibles pour me fatiguer à leur expliquer les choses.

Je baisse le regard sur Zikomo qui se lève et répond à la salutation de Hunter. Nous regardons le garçon partir puis, d’un bond, le Mngwi retrouve sa place sur mon épaule et nous retournons à notre table.

« Tu as eu ce que tu voulais ? »
— Je sais pas, » marmonné-je en lançant un vague regard à Zikomo. Je laisse passer quelques secondes avant de continuer : « J’aurais préféré lui faire un devoir ou deux.
— Tu es parfaitement capable de l’entraîner, ne t'en fais pas. »

Si, je m’en fais justement. Mon coeur bat comme un tambour et l’angoisse me tord les entrailles. Je détourne le regard pour ne pas croiser celui de Zikomo ; cela ne m’empêche pas de le sentir me brûler la peau.

« Les Autres me… » Ma gorge se noue. « Et si j’arrive pas à d-dire les sortilèges ? Il me prendra pour une débile, soufflé-je, amère.
— Ce garçon me paraît être beaucoup de choses, mais pas un moqueur.
— Ouais bah il peut très bien cacher son jeu. »

Zikomo ne me lance aucun regard, mais je capte ses pensées comme s’il me les avait offerte à voix haute : arrête de voir le mal partout. Je grogne. Je ne vois pas le mal partout, je le devine, au contraire. Et je ne fais pas confiance à Hunter, même s’il m’a aidé à sauver Ricke, même s’il l’a fait sans ne rien me demander en contrepartie. Il reste un Autre et les Autres ne sont pas dignes de confiance.

Avec un soupir, je me force à reprendre la rédaction de mon devoir. De toute façon, il le faut. Je vais régler ma dette et ce sera une chose en moins à laquelle songer. Cela ne me fera pas de mal de me décharger de mes problèmes. En attendant, j’ai autre chose à songer, une chose beaucoup plus intéressante, palpitante et excitante : Erza Nyakane. Tant qu’elle est à Poudlard, il n’y a qu’elle qui compte. Prenant la décision sur un coup de tête, je remballe mes affaires ; mes devoirs attendront. Je veux voir Nyakane.



Merci ! Comme toujours, écrire avec toi est un vrai bonheur. Je te retrouve avec plaisir pour que nos Protégés s'entraînent ensemble. Nous verrons bien s'ils se supportent mutuellement — de toute manière Jeffrey est un ingrat, il n'a accepté que pour revoir Zikomo. Je vois clair dans son jeu.