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01 mai 2020, 11:12
 28.01.2045  Les Merveilles de Poudlard
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ERZA NYAKANE


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LES MERVEILLES DE POUDLARD



De tous les endroits que j’ai visités, le château de Poudlard est sans conteste le plus intriguant. Si vous n’avez jamais foulé les couloirs d’un château facétieux au point de changer la disposition de ses pièces trois à cinq fois par jour, alors vous ne pouvez pas comprendre. Les vieilles pierres qui le constituent adorent jouer avec les sens des pensionnaires. Durant mes séjours, je ne compte plus le nombre de fois où j’ai croisé la route d’un élève complètement perdu, seul face à un mur de pierres unies qui, selon lui, possédait une porte le matin même. Contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, il n’y a là aucune volonté de nuire ; seulement, j’en suis convaincue, le plaisir d’un vieux château qui se résume aujourd’hui à titiller les jeunes sorciers et les jeunes sorcières qui arpentent ses boyaux, comme une façon bien à lui de leur témoigner son affection.
Mémoires d’Ailleurs, ERZA NYAKANE

*

C’était un samedi... le 28 janvier 2045, si mes souvenirs ne me trahissent pas.

La lumière du matin dessinait des motifs colorés sur le sol dallé de l’infirmerie de Poudlard. J’étais allongée sur un lit comme il en existait une vingtaine d’autres identiques, ici. Mon bras me causait encore une douleur cuisante malgré les efforts acharnés de l’infirmier — un certain monsieur Mason — de le guérir dans les meilleurs délais. Mais une blessure de feu ne guérit pas aussi vite. Même la plus puissante des potions de cicatrisation ne saurait effacer l’empreinte laissé par un mage de feu au plus profond de la chair, comme un petit cadeau pour la route, au cas où sa cible lui échapperait.

J’entamais ma deuxième journée sous les toits de Poudlard. Après un long échange avec Kristen Loewy le jeudi soir, j’avais consacré pratiquement tout la journée du vendredi à dormir, ne me réveillant qu’une heure ici ou là, l’esprit embrumé, mais la vision assez nette pour remarquer la présence d’Aelle quand ses cours ne l’appelaient pas ailleurs dans le château et celle, permanente, de Zikomo, probablement sur ordre de la première. L’enfant était déterminée à ne pas me lâcher d’une seule semelle, ce qui ne m’embêtait pas le moins du monde. Il y avait, entre nous, un lien indéfectible. Un lien de la première heure qu’il m’est, encore aujourd’hui, difficile de décrire avec des mots simples.

Je ressentais des fourmis dans les jambes. Passer un jour de plus allongée m’était impossible, il fallait que je sorte, que j’aille profiter du bon air des vallées écossaises. Mais il me fallait pour cela distraire l’infirmier qui ne me laisserait pas sortir aussi facilement. Les aiguilles de l’horloge avaient beau tendre vers les huit heures du matin, le brave garçon était déjà sur place, affairé autour des deux ou trois lits occupés de son office. Après une brève réflexion, je choisis la diversion la plus inoffensive qui soit : elle avait fait mouche quelques fois, au temps de ma propre scolarité. Je m’enroulai donc sur le côté et plaquai le bout de mes doigts sur le carrelage gelé au pied de ma couche. En fermant les yeux, je ressentis les veines de terre qui couraient encore entre les vieilles pierres, de minuscules veines, mais encore assez vigoureuses pour me permettre de mettre à exécution la suite de mon plan : d’une brève mais puissante impulsion magique, j’obligeais l’une d’entre elles à gonfler.

Les élèves alités se redressèrent sur leurs fesses pour voir d’où provenait le bruit. L’infirmier leur intima de rester coucher avant de se précipiter vers le fond de la pièce, où une dalle venait de se fendre en deux.

C’était le moment ou jamais ! J’enfilai la robe de chambre noir, en satin, qu’on avait mise à ma disposition, attrapai mes sandales à la volée, et me précipitai vers la sortie, pieds nus, en veillant à faire le moins de bruit possible.

Mais une fois la porte de l’infirmerie refermée sans un bruit derrière moi, je faillis sursauter en croisant son regard intrigué. Prise sur le fait ! Et pieds nus en plus !

LES CONTES DE L'ŒIL
(En vadrouille jusqu'au 3 janvier inclus)
01 mai 2020, 12:44
 28.01.2045  Les Merveilles de Poudlard
28 janvier 2045
Poudlard
4ème année



Habituellement à cette heure, je suis à la bibliothèque ou en salle d’étude, plongée dans mon travail et mes révisions quotidiennes. Habituellement le samedi matin, je suis accompagnée de Thalia et de Zikomo. Aujourd’hui cependant est un jour exceptionnel. C’est une semaine exceptionnelle. Et la visite que j’ai prévu de faire est tout aussi exceptionnelle. Je suis impatiente que Nyakane se remette de sa blessure. Cela ne me dérange guère de la regarder se reposer, mais je préfèrerais que nous parlions. J’ai tant de choses à lui dire, tant de questions à lui poser ! Et puis l’infirmerie me met mal à l’aise, je déteste y retourner. Je l’ai fait uniquement pour la voir elle. Et parce que Zikomo était dans le coin.

Hier, ma grosse journée de cours m’a empêché de passer trop de temps avec Nyakane — elle dormait de toute façon à chaque fois que j’étais à ses côtés. Mais aujourd’hui, samedi, je ne m'éloignerais pas d'elle. Sauf si elle me demande le contraire. J’essaie de me persuader qu’elle ne le fera pas. J’essaie de me convaincre qu’elle veut autant que moi que nous passions du temps ensemble — la plupart du temps, puisque je n’arrive pas à m’en convaincre, je me contente de ne pas y penser et c’est bien plus facile comme cela. Je me sens euphorique. Je ne saurais dire si cela est du à mes retrouvailles avec l’Africaine, ma rencontre avec la célèbre Yokohyama Ururu ou mon voyage au Japon. Un mélange de tout cela, peut-être, qui me fait oublier mes problèmes ; le reste du monde n’a plus aucun intérêt puisque Nyakane est revenue et qu’elle est près de moi.

Mon coeur sursaute à peine lorsque j’arrive dans le couloir de l’infirmerie. Le château est calme ce matin, c’est un merveilleux jour pour apprendre de nouvelles choses et avoir une conversation avec Nyakane. Je me demande quel pourcentage de chance j’ai qu’elle soit réveillée. Après tout, sa blessure n’est pas très belle à voir. Elle a besoin de repos. Mais le repos est si ennuyant, nom de Merlin ! On finira tous par crever si on se contente de dormir alors que l’on peut apprendre.

Toute à mes pensées, c’est tout juste si je remarque mon arrivée devant la porte de l’infirmerie. Je repousse loin de moi mes mauvais souvenirs ; pourtant, persistant, un léger mal de tête toque contre mon crâne, comme si mes souvenirs étaient indissociables à la douleur qui les a accompagné si longtemps. Troublée malgré moi, je m’arrête devant la porte. Comme hier. Comme à chaque fois que je dois me rendre à l’infirmerie. Quelques secondes d’hésitation. Vais-je rentrer ou m’enfuir ? Mon coeur qui cogne contre ma cage thoracique a déjà la réponse : pour Nyakane, je serais prête à aller jusqu’au Japon, alors me rendre à l’infirmerie est un jeu d’enfant, n’est-ce pas ?

Pas le temps, cependant, de prendre une décision. La porte s’ouvre sur… Erza Nyakane. Mon coeur s’emballe. Enveloppée dans une robe de chambre, sandales à la main et portant sur le visage l’air de celle qui vient d’être prise en train de commettre un délit. Un sourire s’affiche malgré moi sur mes lèvres ; moquerie ou joie de voir la femme, je ne saurais dire.

« Miss Nyakane, énoncé-je en levant un sourcil, vous vous enfuyez ? »

L’idée est totalement saugrenue, mais c’est la première qui me soit venue à l’esprit. La seconde est moins plaisante : peut-être sort-elle au petit matin pour m’éviter, parce que je l’agace à vouloir rester près d’elle, parce qu’elle ne veut pas répondre à mes questions, parce que j’ai inventé cette relation que je suis persuadée que nous avons, parce que je me fourvoie, parce que…

« Je… J-je viens ? » dégueulé-je pour faire taire la folie de mes pensées.

Je viens. Avec une interrogation plus qu’évidente. *J’suis nulle*. Avant, il me semble que j’étais moins gênée face à elle. Mais aujourd’hui, je ne sais pas. Je ne veux pas savoir. Je me redresse et lève le menton, fière, plantant mon regard dans le sien.
01 mai 2020, 19:06
 28.01.2045  Les Merveilles de Poudlard
Comme à son habitude, Rhys se leva tôt ce matin-là. Il avait eu écho que la veille au soir, Ursula Parkinson et quelques-uns de ses fidèles, étaient venus jusqu'à Poudlard. Le château avait des oreilles. Ses collègues, et certains élèves, avaient affirmé que désormais Dallan Blackwave était au sein même de l'école. Si l'enseignant n'était pas du genre à croire tous ces ragots et rumeurs d'adolescents, il ne pouvait pas nier la véracité des propos des autres professeurs. Lorsque Rhys l'avait appris, il ne savait pas comment réagir face à cette nouvelle. Mais surtout, il se posait bon nombre de questions sur la sécurité et le bien-être de sa famille. En particulier, pour son père, enfermé, à Azkaban. Comment allait-il? Dans quelles conditions vivait-il? Est-il toujours au moins vivant? Tant d'interrogations qui l'ont empêché de dormir. Il se leva de bonne heure mais pas de bonne humeur.

Après avoir traversé le parc, emmitouflé dans sa cape d'hiver remontée au maximum, il prit la direction de la Grande Salle pour un copieux petit-déjeuner. Le stress n'atteignait pas son appétit, restes de sportif.
Malgré tout, il fallait que l'homme aille voir l'infirmier pour son stock personnel de potions anti-douleurs. Il ne les lui donnait qu'au compte-goutte comme s'il se doutait quelque chose. Sur le chemin, le professeur salua quelques élèves matinaux, pour un weekend. Au détour d'un énième couloir, il arrivait presque à destination lorsqu'il remarqua que, contrairement à ce qu'il avait espéré, les derniers mètres qui le séparaient de l'infirmerie ne se feraient pas tranquillement. Une élève, que Rhys avait déjà croisé sans réellement lui adresser la parole (elle n'assistait pas aux cours de Vol), discutait avec une femme. La scène aurait paru moins étrange si la femme en question, n'était pas vêtue seulement d'une robe de chambre et ses chaussures à la main.

Rhys n'avait pas assisté à l'échange, il ne savait donc pas ce qu'il se passait mais visiblement l'élève, qu'il crut reconnaître sans en avoir le cœur net pour autant, semblait attendre une réponse de la femme qui se tenait devant elle.

Et puis d'abord qui était-elle? Que faisait-elle dans le château? On accueillait tout le monde ici? Une minute, ces tatouages sur le corps... Non! Rhys écarquilla les yeux. Cela ne devait pas être possible. Ne voulant pas passer pour un idiot, il s'approcha des deux sorcières pour confirmer ou non, ses soupçons.

- Mal aux pieds après avoir dansé toute la nuit? Pour le retour dans votre chambre, en toute discrétion, sans alerter les parents, c'est loupé. Il va falloir s’entraîner,
adressa t-il à la femme dans un léger sourire.

Il se tourna vers l'adolescente pour détecter un signe de détresse.

- Tout va bien, Miss?

En glissant je viens, en rusant je vaincs, le sommet j’atteins.

"Si le mal brille dans toute sa splendeur, c'est devant le pire que le bien prend toute sa valeur." Oxmo Puccino
02 mai 2020, 12:43
 28.01.2045  Les Merveilles de Poudlard
Aelle. Qui d’autre ?

Étais-je si matinale à son âge ? Je souris en songeant que non. Je n’arrivais pas à me souvenir le nombre de fois où mon grand-père m’avait reproché de trop préférer la chaleur de mon lit à celle des salles de classe, mais elles étaient nombreuses.

« C’est ça, je m’enfuis. Allez viens, répondis-je en la saisissant par la main. »

Les explications attendraient certainement un peu. Mais ce qui était désormais Notre escapade s’arrêta là, au tout premier pas… un homme à la peau aussi sombre que la mienne nous barrait la route. En quelques longues enjambées, il fut sur nous. Alors qu’il essayait de faire preuve d’humour — j’avais, comme lors de mes derniers séjours, bien des difficultés à comprendre l’humour britannique — je détaillais son visage, éclairé d’un sourire, mais quelque peu assombris par les questions que soulevaient nécessairement les deux longues cicatrices qui barraient son oeil gauche. Sans trop savoir comment, il me vint à l’esprit que ce regard ardent ne m’était pas tout à fait inconnu mais je ne m’attardais pas sur la question. Si nous continuions à bavarder, j’étais certaine que l’infirmier ferait très vite le rapprochement entre ces voix et mon lit vide. Je devais prendre les choses en main et vite !

Faisant fi de la douleur qui animait chaque bout de chair de mon bras gauche (monsieur Mason avait fait des miracles pour en effacer toutes traces de sévisses, comme il avait merveilleusement réussi à me retirer les ecchymoses sur le reste de mon corps), j’enfilai mes sandales à la hâte, saisis l’homme par le bras en prenant conscience de son profil athlétique et entraînais de force mes deux captifs un peu plus loin. Les premiers picotements de froid assaillirent ma peau mais j’étais trop préoccupée par le succès de mon évasion pour m’en soucier tout de suite.

« Zikomo n’est pas avec toi ? demandai-je à Aelle. »

J’adressai un sourire chaleureux à cette enfant unique en son genre et, étrangement d’ailleurs, si chère à mon coeur. Si peu de moments passés ensemble et pourtant une sorte de compréhension mutuelle, sourde à toutes logiques. Un coup de foudre amical.

« Pardon, je ne me suis pas présentée, Erza, dis-je à l’homme en nous arrêtant au premier embranchement de couloirs venu. Si j’en juge par votre apparence et votre accent, vous n’avez pas fait vos classes à Uagadou. Professeur… ? »

Où avais-je bien pu croiser ce regard ?

LES CONTES DE L'ŒIL
(En vadrouille jusqu'au 3 janvier inclus)
03 mai 2020, 12:50
 28.01.2045  Les Merveilles de Poudlard
Un bonheur tout simple éclate dans mon corps lorsque la femme me saisit la main. Tout aurait pu s’arrêter là, à cette légère étreinte. Cette dernière me fait ressentir tout un tas de choses étranges, bien différentes de ce que je ressens avec Thalia. Je ne saurais l’expliquer et je n’en ai d’ailleurs pas l’envie. Je préfère profiter, tout en ayant intimement conscience qu’ainsi Nyakane pourrait m’emmener au bout du monde sans que je lui refuse le voyage. Le sourire qui a grimpé sur mes lèvres s’affaisse néanmoins lorsque mon regard tombe sur lui. Grand, noir, balafré. Pas aussi effrayant que Zuhri, mais bien plus malvenu. Je le reconnais au premier coup d’oeil. Le professeur de vol ; j’ai oublié son nom. J’ai beau faire, impossible de m’en souvenir. Aodren m’a pourtant parler de lui, mais le fait de ne pas suivre ses cours de Vol m’a empêché de retenir ce détail insignifiant.

J’allais répondre simplement à sa question étrange. Une réponse en l’air, destiné à détourner son attention de moi (et de Nyakane) pour qu’il s’en aille plus rapidement. Un « oui, oui » balancé à la va-vite. J’étais même prête à tirer sur le bras de l’Africaine pour la mener dans mon sillage — après tout, c’est moi qui connais le château, c’est à moi de le lui faire visiter. Mais la femme semble avoir une toute autre idée en tête. Comme si elle le connaissait depuis toujours, elle attrape le bras de l’Autre et elle nous traîne tous les deux jusqu’au bout du couloir ; par dessus sa silhouette, je jette un coup d’oeil à l’homme — *pourquoi elle l’emmène ?*.

Toutes mes pensées, toutes mes inquiétudes sont néanmoins expédiées par le sourire que m'offre Nyakane. Un sourire tout simple avec dans les yeux un petit quelque chose de brillant qui me donne envie de sourire à mon tour. Merlin, j’aimerais qu’elle reste pour toujours avec moi. Sans la présence de cet homme. Il me dérange. Je n’aime pas être en compagnie d’inconnus. Ils me dérangent, ils me gênent. J’ai l’impression que je ne pourrais pas profiter pleinement de Nyakane tant qu’il sera dans les parages. Je lui jette un coup d’oeil réservé avant d’offrir mon attention à l’Africaine, luttant contre mon malaise pour répondre à sa question.

« Je pensais qu’il était avec vous, dis-je simplement, sur la réserve. Il doit être en train de chasser. »

A vrai dire, je n’ai aucune idée de l’endroit où Zikomo peut bien être, mais cela ne m’importe que peu. Je sais qu’il nous rejoindra quand il le voudra. Je lui ai demandé de rester près de l’Africaine, mais sans doute a-t-il eu quelque chose à faire. Zikomo va et vient. Cela ne m’étonnerait pas de le voir se pointer au moment où nous nous y attendons le moins.

Je reste étrangement silencieuse en attendant la réponse de l’homme. Mon regard hésite quant à l’objet sur lequel se fixer : Nyakane qui attire inexorablement mon regard ou cet Autre que je ne peux m’empêcher de reluquer, peut-être dans l’espoir qu’il s’en aille plus rapidement. Incapable de choisir, mes yeux cheminent entre les deux.
03 mai 2020, 17:46
 28.01.2045  Les Merveilles de Poudlard
Rhys avait la réponse à sa question. Le geste amical et le sourire que l'une avait eu envers l'autre, ne trompaient personne. Les deux sorcières se connaissaient et visiblement s'appréciaient. L'adolescente ne prit même pas peine de répondre à son professeur. Étrange. Il ne s'en formalisa pas pour autant. Pas plus pour sa blague ratée puisque la femme non plus, ne lui répondit pas. De toute façon, il n'avait pas le cœur à rire, vu les derniers événements.
Il avait l'impression d'interrompre un moment important, comme suspendu par le temps. Rhys se sentit mal à l'aise quelques secondes. Malaise qui s'accentua lorsque la femme à la peau ébène le dévisagea. Bien que cela soit relativement furtif, Rhys eut le sentiment que cela avait duré une éternité. Il n'arriverait jamais à se faire à l'idée que les gens puissent voir autre chose que ses cicatrices. C'est pour cela qu'il n'aimait que peu la foule et le regard des autres. Même si en temps normal il s'en moquait, celui de la sorcière le transperçait.

Avant même qu'il puisse dire quoique ce soit, la femme qui s'était chaussée à la hâte, prit Rhys par le bras et emmena ses deux interlocuteurs plus loin, là où l'homme se trouvait quelques instants auparavant. Elle n'eut pas trop de mal, Rhys s'étant laissé faire. Il ne connaissait pas ses intentions mais il se doutait qu'elles n'étaient pas mauvaises. Elle se tourna vers l'élève pour lui poser une drôle de question. Zikomo...Zikomo... Mais oui c'était la fille Bristyle! Il l'avait bien reconnu finalement. Il avait entendu parler d'elle et son frère était plutôt bon dans ses cours. Même si dernièrement, son comportement avait un peu changé, mais là n'était pas la question. La Poufsouffle resta silencieuse après sa réponse, comme si elle se méfiait de quelque chose- ou de quelqu'un- , ou regrettait déjà ses propos.

Enfin la femme aux tatouages adressa la parole à Rhys et lui confirma son identité. C'est elle! Il avait raison! Cette fois-ci son sourire se fit plus franc et illumina (presque) le visage de l'enseignant. Il omit pendant un court instant, les tracas de ces derniers mois et redevint l'enfant de onze ans qui rencontrait pour la première fois une fillette aux pouvoirs extraordinaires et fascinants.

- Erza! Quelle merveilleuse surprise! Excuse-moi, j'en oublie mes bonnes manières. Je suis Rhys! Rhys Saunders. Je ne sais pas si tu te souviens de moi... J'étais en première année quand tu es venue à Poudlard. Alors ça...

Il s'interrompit un bref instant avant de reprendre en se tournant légèrement vers la jeune fille qui les regardait.

- Vous saviez, Miss, que j'ai bien connu un certain Narym Bristyle, cette année-là?

Rhys, surpris et heureux, de retrouver la sorcière africaine, oublia d'un coup les manières d'un bon gentleman. Sans s'en rendre compte, il avait tutoyé Erza et avait parlé beaucoup plus que d'ordinaire.

En glissant je viens, en rusant je vaincs, le sommet j’atteins.

"Si le mal brille dans toute sa splendeur, c'est devant le pire que le bien prend toute sa valeur." Oxmo Puccino
06 mai 2020, 10:08
 28.01.2045  Les Merveilles de Poudlard
Zikomo chassait ? J’avais bien du mal à me faire à l’idée que le Messager des rêves, ce compagnon fidèle de mon enfance, était désormais fait de chair et de sang. Je m’interrogeais, tout naturellement, sur la manière dont il était passé d’un état à un autre mais je ne souhaitais pas mettre à mal Aelle devant l’un de ses professeurs. La question était, par bien des aspects, beaucoup trop privée pour cela. Je me contentais donc d’hocher la tête en souriant à l’adolescente, sans lui lâcher la main, puis de basculer mon regard vers son professeur quand le visage de celui-ci s’anima.

La suite me laissa sans voix. Passé l’étape du tutoiement, j’analysais les propos de cet homme du mieux que je le pouvais du bas de mon esprit engourdi. Rhys Saunders ? Rhys Saunders… Rhys, Rhys, Rhys… je n’arrivais pas à associer ce nom à un souvenir en particulier et en ressentais une forme de honte à l’idée d’être vraisemblablement reconnue sans être capable de reconnaître à mon tour. Réellement embarrassée face à cette situation, je restais les lèvres pincées et forçais mon esprit à balayer encore une fois mes souvenirs de mon tout premier séjour à Poudlard.

Vingt ans. C’était il y a vingt ans.

Je me souvenais encore parfaitement du premier soir où la catastrophe s’était produite : innocente, j’avais demandé à deux élèves de Poudlard, Owen et Octavia, si je pouvais voir leur baguette magique, loin d’imaginer que mes tatouages entreraient en résonance directe avec elles. L’effusion magique et le dôme qui en avaient résulté habitaient encore ma mémoire, tout comme l’effroi qui m’avait saisi à ce moment-là, mais je ne trouvais, nulle part, la trace de Rhys Saunders. Déçue, je refermai ce chapitre de ma vie et m’apprêtai à me répandre en excuses auprès du sorcier quand un souvenir se matérialisa devant mes rétines.

Nous étions le deuxième jour de notre séjour à Poudlard. A l’invitation bienveillante de mon grand-père, et toujours suivie de près par Kuba, son guépard apprivoisé, j’étais retournée m’asseoir à la table des Serpentard, espérant reparler à Octavia mais la jeune fille n’étais pas encore là. Mais un garçon bienveillant aux yeux d’or et à la peau aussi sombre que la mienne était là, habillé d’une robe noire brodée de l’écusson des Serpentard.

« Rhys ! »

Je souris en me remémorant la gentillesse du garçon de première année qui avait tenu à s’excuser au nom de sa maison pour l’accueil que m’avait réservé Serpentard le premier soir.

« Je me souviens du garçon adorable qui s’était excusé à la place de ses aînés, répondis-je en inclinant la tête. J’espère que ce garçon n’est pas mort, et qu’il a encore toute sa place quelque part à l’intérieur de ce physique d’athlète. »

L’instinct me disait qu’il n’en était certainement plus rien mais je terminais tout de même ma phrase en piquant la poitrine de Rhys avec mon index, à l’endroit où se trouvait son coeur.

« Ecoutez tous les deux, je dois sortir prendre l’air. Je n’ai pas oublié les caprices de ce château, alors je vais avoir besoin de votre aide pour trouver le chemin de la sortie… »

Je frissonnai, incapable de résister plus longtemps au froid comme le pouvait un mage de feu. Il faisait si froid dans les couloirs ! J’en oubliais sur le moment que nous étions fin janvier.

« … et je vais avoir besoin d’un manteau. Le plus épais possible ou je vais me transformer en statue de glace. Si mes souvenirs sont exacts, vous pouvez en faire apparaître grâce à vos baguettes ? »

Je ne sus cacher mon enthousiasme à l’idée de revoir ce tour de magie d’une incroyable complexité.

LES CONTES DE L'ŒIL
(En vadrouille jusqu'au 3 janvier inclus)
08 mai 2020, 13:21
 28.01.2045  Les Merveilles de Poudlard
A la demande de Nyakane, deux pensées particulièrement claires viennent s’échouer dans esprit. M'apparaît tout d’abord la solution la plus indiquée dans cette situation, soit le sortilège d’Apparition qui permettra de faire apparaître une belle cape chaude. Mais immédiatement après cette pensée arrive un constat qui me glace le coeur : je suis incapable de lancer ce sortilège mais lui, le professeur Saunders, y arrivera d’un tour de baguette. Nul besoin de douter : ce simple geste ravira Nyakane. J’ai bien compris qu’elle est aussi intéressée que moi par la magie qui lui est étrangère. La future admiration que la femme aura pour Saunders me tétanise, mais cependant moins que de savoir qu’elle a déjà pour lui une affection bien particulière. Il me faudrait être folle pour ne pas avoir vu le sourire qui s’est affiché sur ses lèvres lorsqu’elle a reconnu l’homme. Ces deux-là se sont connus enfant. Qui sait le nombre de souvenirs qu’ils ont en commun ? l’amitié qu’ils se portent ? Et si, à cause de l’admiration que le sortilège d’Apparition de Saunders créera dans le coeur de Nyakane mêlé à l’affection qu’elle a pour lui, l’Africaine décide de ne passer du temps qu’avec lui ? C’est certain qu’après tout ça, elle cessera de s’intéresser à moi. Je ne suis même pas capable de répondre à sa demande, je ne suis qu’une sorcière de premier cycle, une enfant de quatrième année, pas même douée pour la magie des golems. Une incapable, en soit. Elle ne voudra plus jamais—

*Non !*. La pensée fait taire mes craintes. J’ai encore une chance de lui montrer que je ne suis pas une incapable. C’est à moi de répondre à sa demande et pas à cet énergumène qui n’a rien à faire avec nous. D’un geste de l’épaule, j’ôte ma cape après avoir attrapé ma baguette dans l’une des poches. Concentrée, déterminée et surtout persuadée que je peux être aussi brillante que ce sorcier capable de lancer un sortilège d’Apparition, je pointe ma baguette sur ma cape et prononce calmement :

« Amplificatum. »

Aussitôt, le vêtement s’agrandit jusqu’à pouvoir, à vu d’oeil, recouvrir les épaules de l’Africaine. Je rengaine ma baguette et tend fièrement ma création à la femme, un sourire sur les lèvres.

« Voilà pour vous ! énoncé-je en lançant un petit regard qui dit elle est pas à vous à Saunders. Vous aurez pas froid avec ça. »

Je hausse les épaules, comme si le sortilège ne m’avait rien coûté et que j’étais capable de faire bien mieux. C’est à cet instant précis que je me suis rendu compte que le vêtement que je viens d’offrir à Nyakane ne correspond pas à ce qu’elle recherche, soit une cape la plus épaisse possible. Ce n’est pas une cape d’hiver que j’ai enfilé ce matin, pas une cape d’extérieur, mais une cape toute simple.

Mon air tout fier dégringole le long de ma face au moment où je me fais une seconde réflexion qui me rend honteuse, une réflexion qui me fait bien trop rougir : maintenant, c’est moi qui n’ai plus de cape et c’est moi qui aura froid. *C’était complèt’ment con*. Oui, ce que je viens de faire est idiot et Nyakane me prendra pour une idiote, sans parler de Saunders qui doit déjà avoir une sale vision de moi. Troublée et gênée, je baisse les yeux. Et dire que je voulais questionner l’homme sur sa relation avec Narym, toute surprise que j’étais de découvrir qu’il avait passé ses années d’école avec lui. Désormais, mortifiée, je suis incapable d’être autre chose que profondément *débile*.

Il me faut agir ou je finirais par crever sous leur regard plein de pitié. Je fais quelques pas dans le couloir, forçant un sourire à apparaître sur mes lèvres.

« C-c-c’est là-bas qu… »

Foutu bégaiement ! Désormais, cela n’arrive que lorsque je suis angoissée ou en proie à de trop vives émotions. Je prends une inspiration tremblante.

« L-la sortie, annoncé-je en désignant le bout du couloir. Par là. »

C’est certain, me murmure mon coeur battant, c’est certain qu’elle voudra passer tout son temps avec Saunders, désormais, et pas avec moi.
09 mai 2020, 19:14
 28.01.2045  Les Merveilles de Poudlard
Reducio


Septembre 2025.


Rhys, 11 ans, avait été réparti quelques minutes auparavant dans la très noble maison Serpentard de l'école de magie, Poudlard. Toujours fébrile, il s'assit auprès de ses camarades Vert et Argent, sans grande joie. Il chercha du regard sa grande sœur Megan, assise à la table des Serdaigle. Pourquoi n'était-il pas avec elle? Il aurait voulu qu'elle le rassure, qu'elle lui dise que tout se passerait bien, que ce n'était pas grave. Mais elle ne pouvait pas. Enfin, il trouva les yeux tant recherchés. La Troisième année lui fit un sourire empli de tendresse et lui fit un petit signe de victoire. Elle lui indiqua d'écouter ce que les adultes disaient. Une école africaine de Magie? A peine eut-il le temps de se demander qu'un homme de la même couleur de peau que lui, accompagné d'une petite fille et d'un guépard faisaient leur entrée. Un guépard? Waoouuuuh trop bien!Fasciné par l'animal, Rhys ne fit pas réellement attention à la petite fille ni au discours du directeur de Uagadou. Rhys bavarda un peu avec ses voisins. Il n'entendit pas non plus les échanges entre les grands de Serpentard et de Serdaigle. A un moment, il vit juste un grand gaillard de sa maison qui avait l'air de vouloir se battre. Mais pourquoi réagissait-il ainsi? Il intimidait le jeune élève. Son inquiétude fut vite écourtée par l'arrivée du félin, non loin du néo-Serpentard. Qu'est ce qu'il est beau! C'est la première fois qu'il en voyait un d'aussi près. Il voulut montrer son excitation à sa sœur mais elle était en pleine discussion avec ses copines. Tant pis. Rhys sursauta lorsque des applaudissements retentirent. Il se joignit à la foule sans réellement savoir ce qu'il se passait. Il regarda autour de lui et fit un haussement d'épaules à un autre première année de Serpentard. Il ouvrit des yeux ronds lorsque la multitude de plats apparut. C'est génial ici! Plus que tout ce que Megan avait bien pu dire.

Alors qu'il allait porter à sa bouche une part de tarte citron meringuée (Maman n'en saura rien), un garçon toujours de Serpentard, parla fort en direction de l'invitée africaine. "Petit oiseau exotique?" Rhys fut si horrifié qu'il en lâcha son dessert. Il n'était pas sûr d'avoir compris la signification de la phrase mais ça ne devait pas être gentil. Mais...mais...ils étaient tous comme ça à Serpentard? Rhys ne voulait pas être avec eux, il n'avait pas envie qu'on l'associe à eux. D'après un Serdaigle, il était préfet en plus. Non, non, il y avait erreur, le jeune sorcier en était certain, il aurait dû être réparti dans la même maison que sa sœur. La suite de l'échange lui confirma son envie. Il en parlerait à Megan après le repas. Alors que cela semblait se calmer et que Rhys portait de nouveau à sa bouche la pâtisserie, il fut propulsé plusieurs centimètres plus loin.

- Qu'est ce que qui se passe?

Rhys était terrifié. Et puis il comprit que c'était la petite fille qui avait fait ça. Contrairement à qu'on aurait pu penser, il fut admiratif. Elle avait l'air tellement puissante pour son âge. Le dîner se termina dans une ambiance plus sereine.

Le lendemain, remis de ses émotions, il avait pu échanger avec la petite fille et s'était excusé auprès d'elle pour le comportement des deux Grands, comme il les appelait. Il avait l'habitude de le faire à la place de son petit frère. Il lui avait dit que c'était trop cool ce qu'elle avait fait et l'interrogea sur son guépard qui l'avait tant intrigué. Il vit pour la première fois ses tatouages de près et trouvait ça super. Lui aussi voulait être aussi fort qu'elle! Un jour il serait aussi puissant, il se le promettait.


Plongé dans ses souvenirs, Rhys ne sortit de sa torpeur que lorsqu'Erza s'adressa à lui et le toucha. Il baissa la tête pour accompagner du regard le geste de la sorcière. Le contact avec elle l'électrisa de nouveau, il ne comprenait pas trop ce qu'il se passait. Cependant, il ne répondit rien car il n'y avait tout simplement rien à dire, selon lui. Mais il releva qu'elle avait dit qu'il avait un corps d'athlète. Encore troublé par ce qu'il venait de se passer, il en avait presque oublié la présence de la Poufsouffle. Celle-ci accéda à la requête de la femme en peignoir. C'est vrai qu'accoutrée de la sorte, elle ne devait pas avoir très chaud. Toujours confus, Rhys ne retenta pas une plaisanterie sur la situation.

Aelle transforma et donna sa propre cape à Erza. Elle avait l'air de beaucoup tenir à elle. Mais Rhys, en bon observateur, même par ce début de matinée étrange, remarqua que l'adolescente se retrouvait elle-aussi, sans protection. Le professeur sortit sa baguette, visualisa la même cape que la jeune fille portait quelques instants plus tôt et lança un "Aparecio cape". Il en avait en trop dans la réserve de matériel pour les cours. Certains élèves étaient tête en l'air et les oubliaient dans les vestiaires sans jamais les réclamer (ça et des écharpes, des gants etc...). Les Elfes les avaient pourtant bien nettoyées. Il les visualisait donc assez bien.

Une fois le vêtement en main, il le tendit à l'élève.
- Tenez.

Mais la cape fabriquée par l'adolescente serait trop fine pour le climat écossais. Même pour les autochtones. Alors pour une femme venue de contrées lointaines, elle allait avoir un choc thermique. Mais après tout il ne connaissait rien d'elle, il ne savait même pas si elle vivait toujours sur le continent africain. Qui plus est, elle avait vécu quelques mois ici, la météo ne devait plus lui faire peur. Encore fallait-il qu'elle soit bien équipée.

Rhys s'approcha de la sorcière et ne prononça pour seule parole, que le sortilège adéquat pour rendre le tissu de la cape plus épais et douillet. En tout cas, l'enseignant salua la performance et l’ingéniosité de la Quatrième année par une moue satisfaite mais celle-ci regardait ses pieds.

Après un petit temps, Aelle finit par indiquer la sortie à Erza. Mais quelque chose perturbait Rhys. Pourquoi avait-elle l'air de vouloir absolument fuir quelque chose ou quelqu'un?

Rhys, un brin suspicieux, lui demanda d'une voix qui ne se voulait pas accusatrice, pour autant:
- Tu veux seulement t'aérer ou bien sortir du château?

Même si cela n'était pas méchant, il tenta une nouvelle approche qui se voulait plus amicale.
- Tu en as déjà marre de notre compagnie? D'ailleurs, que fais-tu ici? Tu viens nous rendre visite de manière officielle?

Il était vraiment content de sa visite et de cette rencontre inopinée. Il ne voulait pas, néanmoins, paraître impoli auprès d'elle et insister si elle ne souhaitait pas lui répondre.

En glissant je viens, en rusant je vaincs, le sommet j’atteins.

"Si le mal brille dans toute sa splendeur, c'est devant le pire que le bien prend toute sa valeur." Oxmo Puccino
16 mai 2020, 10:40
 28.01.2045  Les Merveilles de Poudlard
Désolé pour l'attente, la semaine de reprise du travail a été un peu compliquée pour moi ^^

La magie des occidentaux, celle des baguettes, est toujours aussi merveilleuse à observer, d’autant plus merveilleuse quand elle est exécutée par une enfant de quatorze ans. Je dévore littéralement Aelle des yeux tandis qu’elle exécute son tour. Merveilleux, prodigieux ! Lors de mes précédents séjours, je suis parvenue à comprendre le lien qui unis les sorciers occidentaux à leurs baguettes magiques et à saisir au vol la complexité de ces dernières. Pour nous, africains, les tatouages sont de véritables catalyseurs, au sens propre du terme. Ils canalisent la puissance brute de notre magie pour la restituer au monde. Pour les occidentaux, les baguettes magiques sont des compagnons de route, dotées d’une sensibilité qui est propre à chacune d’elle. Les baguettes interprètent les volontés ; elles leur donnent une consistance réelle. On dit même qu’elles peuvent trahir. Ceci explique sans doute pourquoi les occidentaux maîtrisent un panel si large de possibilités.

Je saisis l’offrande d’Aelle et la remercie chaudement en m’en habillant. La cape n’est pas très épaisse, mais c’est mieux que rien. Rhys prend toutefois le relai. Je le regarde avec un sourire. Il fait apparaître une seconde cape pour en habiller Aelle, puis il épaissit la mienne sans un effort, en seulement quelques secondes. Le froid n’est plus un problème. Il n’y a pas de comparaison possible : notre magie élémentaire est sans doute plus puissante, plus destructrice aussi, mais elle n’a pas la souplesse, la beauté, et l’utilité de la magie occidentale. Nous mourrions tous de froid si nous nous retrouvions piégés au milieu d’un blizzard… sauf si un mage de feu est de l’équipe bien évidemment. Les occidentaux n’ont pas ce problème-là.

Je remercie Rhys d’un hochement de tête, reprends la main d’Aelle dans la mienne, et la laisse guider notre petit groupe dans ce dédale de couloirs sans fin — elle y parvient sans la moindre carte !

« Je veux sortir. Je déteste être enfermée, encore moins clouée à un lit toute la journée. Et… »

J’hésite à révéler une envie aussi simple que celle qui m’habite à cet instant, de peur qu’elle ne soit pas facilement comprise, mais j’abaisse mes yeux sur Aelle, lui souris, et je sais que cette envie, elle en comprendra au moins la nécessité.

« … et je veux sentir la terre de Poudlard sous la plante de mes pieds. Ça fait longtemps. »

Nous descendons un grand escalier qui s’engouffre dans le majestueux hall d’entrée — mon regard se perd dans l’immensité de sa structure, c’est à peine si je parviens à apercevoir le plafond. Quand je le ramène sur Rhys, l’émerveillement est passé et l’ombre de souvenirs difficiles réapparaît. Mais qu’importe, je suis en sécurité désormais.

« C’est une longue histoire. J’ai mené une mission secrète pour le compte de mon école. Une mission dangereuse qui m’a parfois conduite à des situations fâcheuses mais heureusement j’ai pu compter sur des amis fidèles — mon regard revient irrésistiblement à Aelle — et l’aide d’une école renommée pour soigner quelques blessures. »

Je suis plutôt fière de mon résumé. Il en dit assez sans trop en dire non plus.

Arrivée devant les grandes portes, j’actionne mon seul bras encore en pleine possession de ses moyens pour tirer le battant de droite. Le vent gelé de l’hiver s’engouffre en emportant avec lui une motte de neige à l’intérieur. Je respire à plein poumons ce bon air et me faufile à l’extérieur pour y découvrir deux changements qui me laissent sans voix : l’arbre gigantesque ou plutôt les deux arbres gigantesques entortillés l’un autour de l’autre et la disparition du mur d’enceinte, du portail, remplacés par les eaux du lac…

« J’ai l’impression qu’il s’est écoulé un millier d’années depuis mon dernier passage… le monde a changé partout et pour tout le monde il semblerait… »

LES CONTES DE L'ŒIL
(En vadrouille jusqu'au 3 janvier inclus)