Inscription
Connexion

17 août 2020, 23:20
Mirage, Rivage
RUBY, 11 ans
7 mai 2045 Début d'après-midi
Rives du Lac, Poudlard


Image

•••

L'eau offre décidément un spectacle fascinant. Souvent, j'ai cette pointe de culpabilité en moi qui me ferait préférer cet élément au feu. *‘oublie, impossible*. Voyez ? J'évite continuellement la question, mais je ne peux me retenir d'apprécier la compagnie du Lac. Et tant pis si je ne pense plus au feu crépitant dans notre Salle rouge, je passe l'éponge sur mes Pensées dans ces Instants-là.

Les pliures de brins d'herbe s'enfoncent dans mes paumes, y laissant leurs marques désarticulées. C'est comme une souffrance superflue que je m'inflige, pour m'accorder en contrepartie la simple permission de contempler cette étendue de beauté. De la toucher du bout des doigts, même ! À l'instant, j'avance ma main droite et viens la faire planer au-dessus de la Surface. Bref contact, à peine plus vaporeux qu'une étincelle. Et puis des rides, des rides à l'infini qui découlent de mon geste pour s'étaler partout où je peux poser mon regard. *Est-c’que l'eau avait d’jà des rides lorsqu'elle est née ?* je médite, songeuse. Oh, je me pose des questions, beaucoup, et je n'ai pas fini de m'en poser. C'est une évidence en moi, les phrases interrogatives s'imposent d'elles-même dans ma tête et je me dois ensuite d'y répondre. *Est-c’que le Reflet me r’présente toujours, si les rides viennent l'altérer ?*. Mes mots s'ensuivent d'un silence pesant. Parfois, je ne trouve pas de réponse. Peut-être parce que je ne comprends plus la question que me pose mon inconscient. Et je m'en veux, horriblement.

Mes lèvres se séparent soudain en un long bâillement qui pourrait englober le Lac. Absolument pas digne d'une lady, mais qui en a cure ? Je suis seule.
*Seule*. Ce Mot a un goût trop vieux dans ma bouche. Acide, amer, presque rance de vétusté. Pourtant, je l'accueille en moi comme un ami oublié. Je trouve amusant de revoir ces amis — mes amis de Solitude — sous un angle différent, les jours ayant passé. Fini, la petite Ruby remplie d'incertitudes qu'elle se cachait à elle-même ; fini, la petite blonde qui voulait faire ses preuves en solitaire ; fini, la petite Gryffondor qui explosait de jalousie face aux Serdaigle. Place à la Deuxième Année qui est légitime ici, et qui a rayé « Seule » de sa liste des Mots d'Esprit.

C'est un élan d'orgueil qui m'a poussée à m'agenouiller devant mon reflet, voilà peut-être une quinzaine de minutes. Mon corps s'est plié, déplié puis replié pour accéder à une position enfantine, et je me retrouve à quatre pattes sur le sol chaud. Le dos dégringolant à la manière d'une descente aux Enfers, mes bras sont fermement droits et ancrés en Gaïa, ma tête les surplombant. Mes genoux qui s'enfoncent dans l'herbe un peu humide se tacheront peut-être de vert, mais qu'importe : j'ai de l'eau à portée d'Être pour les rincer.
Et je brûle d'envie de plonger dans l'eau, mais je me contenterai de plonger dans mon Reflet. C'est agréable de se détailler, même si je m'observe pour la millième fois. *P’t-être vaniteux, mais j'm'en fous*. Au moins, je ne ressemble pas à ces Autres qui fuient leurs Reflets et vomissent face à leur Paraître. *Qu'est-c’qu'ils m'ennuient, eux* je constate, dépitée.
Non, moi, j'aime me perdre dans les courbures de mon visage fin, explorer quelques-uns de mes sillons oculaires — trace d'insomnies persistantes — ou l'arcure de ma bouche, le cadeau de Cupidon planté au milieu de cette dernière. Parce qu'au fond, ce Reflet me plaît.

Le Soleil est à son Zénith, ou presque. Je ne le sais pas précisément. Je n'ose pas le dévisager en face alors je préfère contempler son Reflet, à lui aussi, se réverbérant dans l'eau comme la lumière d'un lampadaire fait briller des trottoirs mélancoliques. D'ailleurs, c'est amusant de voir l'Astre sous cet angle, il éclaircit mes cheveux à un tel point qu'on les prendrait pour translucides, ou blancs. *‘core heureux que j’sois pas ridée, moi !* je pense, entre amusement et soulagement.
Et mes yeux, eux, sont teintés d'une couleur que je ne leur connais pas. Ils m'apparaissent presque violacés. Probablement le Noir du Lac qui déteint sur le cobalt de mes iris. Et après tout, le cobalt ne dérive-t-il pas du violet ? *Qu'est-c’que t'en dis, hein ?*.

Le souffle de la brise qui remue mes cheveux ne peut rien faire pour me bousculer. Toute à mon immobilité, on me croirait sans doute hypnotisée. Je compte bien tout faire pour gagner ce duel de regards entre mon Reflet et moi-même.
Mais, évitant la fin de la partie, il fuit soudain, le lâche.

Oui, mon Reflet s'écarte ; laissant à sa place un Faux-Reflet. Presque identique ; mais je vois bien que les deux détails précédemment relevés, yeux et cheveux, diffèrent sensiblement d'un Reflet à l'autre.
L'incrédulité me saisit la première et fait cligner mes yeux sur un lent tempo. Le Faux-Reflet m'imite. Qu'a-t-il donc, celui-là ?! *Ou cette chose ?*. Qu'est-ce, ce Reflet-usurpateur, en réalité ? Un Mirage ? *J'aime pas les Mirages ! ‘y s’font passer pour des Reflets !*. Et je trouve ça grossier, très irrespectueux, pour tout dire.
Je secoue la tête, consciente de l'étourdissement passager qui est en train de me prendre. Car c'est cela, *n'est-ce pas ?*. Les Mirages viennent lorsque la conscience ne peut plus supporter son propre poids. Le Soleil devait se refléter trop fort, et il m'a incendié la conscience. Mais le Faux-Reflet secoue la tête, en parfaite synchronisation avec mon corps de gamine. *Que...*.

Je ne comprends plus rien au ballet qui se joue devant mes yeux. Voilà que le Reflet originel (*le vrai*) vient masquer sa doublure, se positionne devant lui comme la Lune éclipse son ami solaire. Pourtant, quelque chose ne colle pas dans ce puzzle étrange, qui m'a tout l'air d'un casse-tête. Quelque chose ne colle pas, parce que le Reflet-censé-être-Vrai ne me ressemble pas. Il a ces petites différences de couleurs. Et lorsqu'il remue dans le plus grand des silences, je suis certaine d'être toujours paralysée. Parce que je comprends, très lentement. Le Faux-Reflet était Vrai, c'est en réalité le mien, aux tons blond cendré et cobalt. Mais si le Mensonge devient Vérité, qu'advient-il de la Vérité Mensongère ? *L'autre Reflet, bon sang ?*.

Mon regard reste vissé sur la Surface. Impossible de se détacher du creux des pupilles-qui-ne-sont-pas-miennes, alors je balbutie un « Q-Qui es-tu ? » , la bouche tordue de surprise.

these violent delights have violent ends

25 août 2020, 12:19
Mirage, Rivage
@Ruby Everheart
7 mai 2045, début d'après-midi
DEUXIÈME ANNÉE


Image

PEU AVANT, PARC
L'ennui tue et inspire


Les cours n'ont pas encore repris. Cela permet à Lumah la folie d'ôter ses chaussures et marcher pieds nus sur l'herbe fraîche et tassée du parc, comme elle le fait si souvent depuis qu'elle est à Poudlard, durant les beaux temps. Et pourtant, même si elle aurait dû le faire depuis longtemps, elle ne s'en lasse pas ; elle aime bien trop cette sensation de liberté qui lui chatouille la plante, une sensation casanière, quelque part, puisqu'elle le faisait toujours chez elle, dans son jardin. Si bien que le soir, son père lui rappelait sans faute d'aller se doucher les pieds pour ôter la crasse et ne pas se coucher avec les pieds aussi noirs. Parfois, elle l'oubliait, et Jake la regardait de travers le matin, mais que pouvait-il lui reprocher ? C'était trop tard, et sa fille savait pertinamment qu'il cèderait à la vue de ses grands yeux.

Si la petite se déchaussait instinctivement à la vue d'un jardin, elle ne le faisait pas dans la forêt ni au parc, cependant, bien qu'elle y aille souvent : il y avait trop d'obstacles en forêt, des ronces et des orties, et c'était très peu supportable que de devoir rester quelques heures avec la sensation qu'infligeaient les orties, alors elle préférait ses bottes à des chaussures ouvertes et profitait seulement, même si elle en avait rêvé, de la sensation de la mousse dans ses mains, des baies et de l'air épuré par les arbres. Quant au parc, c'était le défouloir des chiens, alors sa mère, Isabel, y avait interdit à Lumah toute liberté. Elle y allait juste dans l'optique de profiter des balançoires (ou plutôt d'une, l'une d'elles étant trop dommagée pour servir encore) et du toboggan, donc.

Dans ce parc-ci, à Poudlard, il n'y avait pas ce problème de propreté - du moins, elle n'y avait pas vu cela - puisqu'il n'y avait pas de chiens (ou un, peut-être), alors elle pouvait retirer ses chaussures sans la moindre hésitation. Cette fois-ci pourtant, Lumah ne voulait pas seulement marcher. Elle avait très envie de nager, aussi, parce que le soleil lui chatouillait la peau, et que pour contraster avec la chaleur de ce soleil éblouissant, elle avait bien besoin de faire trempette. Ou alors était-ce une simple excuse pour justifier la curiosité qui la poussait à s'immerger dans l'eau du lac noir ? Dans les deux cas, Lumah avait ôté son sac à bandouillère et s'était hissée, mains sur le bord, de manière à glisser dans l'eau doucement. Et elle était si bonne, à son plus grand étonnement, qu'un clin d'oeil ensuite, Lumah avait pris sa respiration et disparu sous l'eau.

MAINTENANT, LAC
Reflets Ruby


Au fond, l'athmosphère était tout à fait différente : il n'y a plus aucun de ce chahut incessant dont ses oreilles sont incessamment les victimes, il n'y a plus aucun bruit, de fait. A la place, une douce mélodie résonnait, agréable, comme celle des oiseaux dans la campagne. Lumah agita légèrement ses bras, mais elle est déjà bien assez en profondeur et ne risquait pas de remonter à la surface trop vite, fort heureusement. Des bulles sortirent soudain de ses narines, et la petite trouva cela drôle, parce qu'elle les voyait même si sa vision était absolument floue ; comme elle voyait distinctement son visage l'observer depuis la surface - quoiqu'il était différent, ce visage, il n'avait pas les mêmes couleurs : ses cheveux étaient bien plus foncés, ondulaient joliment (elle ne s'était jamais vue ainsi, cela lui faisait un choc), et ses yeux, d'habitude d'une couleur améthyste, penchaient vers l'azuré. Elle était certaine d'avoir abandonné sa frange également, mais ça ne l'intriguait pas plus que cela. Dans l'eau, tout était différent, même ses cernes, effacées.

Puis la petite vint à se demander si son reflet la suivrait, alors elle poussa l'eau de ses pieds et partit vers la droite - ou la gauche, mais elle était bien incapable de se repérer ici -, laissant derrière elle un remue-ménage de vagues, comme des plis dans l'eau, et un reflet ébahi. Mais ça, elle en était inconsciente.

Néanmoins, sur le ciel bleu de l'eau, elle ne vit plus rien. Plus d'elle, juste une toile éclairée de temps en temps par des filets de lumière.

Lumah fronça les sourcils, déconcertée, et se dirigea à nouveau vers le lieu où elle était certaine de s'être vue ; alors, elle soupira, soulagée : elle était toujours bien là, différente, et familière. Maintenant, c'est l'air qui vient à lui manquer : combien de temps s'était-il écoulé ? Légèrement affolée, la petite remonte à la surface d'un battement ou deux, rapidement, tandis qu'à ses oreilles résonne un Qui es-tu ?, dont il est établi qu'il ne provient pas d'elle. Mais elle aussi se pose bien cette question, la coïncidence est bien trop grande pour provenir du hasard.

Cette même sensation de passer d'un monde à un autre, l'un aussi douillet qu'un lit, aussi chaleureux qu'une maison chauffée au feu de cheminée, à l'autre à la violente lumière, la saisit d'un coup. Cette sensation est la même, quelque part, à plus grande échelle ; Lumah change incessament de monde, de celui sorcier à moldu, sans pour autant savoir lequel elle préfère, ni lequel souhaite réellement d'elle. Mais son esprit ne s'encombrera pas d'un débat de plus ; ses yeux, qui fuyaient à l'emplacement de ses chassures et de son sac, sont déjà captivés par un autre paysage. Un visage, de fait. En face d'elle, radicalement, se dresse une jeune fille dont elle ne pourrait dire l'âge (parce qu'elle ne sait pas en donner, à quiconque), qui porte une expression ahurie, autant que celle du reflet. Le reflet - elle vient de comprendre, désormais ! -, c'est elle. Elle, elle ne la connaît absolument pas, mais elle lui ressemble à tel point que c'en paraît irréel. Elle est belle, aussi, bien plus que Lumah, avec ses cheveux si bien coiffés, ses cheveux en cascade d'eau rebelle ! Et son visage d'ange est aussi clair que le sien, elle en est sûre, mais sans ces cernes qu'elle, Lumah, doit supporter dans le miroir chaque jour, et dans chaque reflet que lui offre le paysage.

« Tu es...? »

Inspiration, quand tu nous tient...

“ Il lui arrive d'avoir des agissements curieux. Mais bon, c'est Lumah ! ” ED
17 ans (à l'aide) 6eA #674ea7

04 avr. 2021, 20:07
Mirage, Rivage
Est-ce une Sirène ? *Est-ce une Sirène ?* répètent en écho mes Pensées, aussi inlassablement qu'elles le peuvent ; venant s'échouer encore et encore telles des vagues contre les parois intérieures de mon crâne. *J'ai rencontré une Sirène-du-Lac !* s'émerveillent en chœur ces mêmes Pensées. Avant qu'un vert de Jalousie ne vienne s'interposer entre l'Être de l'eau et moi-même. Pourquoi est-ce moi qui me retrouve sur la terre ferme, alors que j'aime tant me mouvoir dans les flots ? N'aurait-ce pas été plaisant d'être découverte comme je viens de le faire avec cette blonde qui me ressemble, d'être considérée comme Sirène ? *Moi, plutôt qu'elle ?*.

De toute façon, mon discours coupe court à mes idées pleines de mièvrerie. « Ruby » je complète, machinalement, face à ses points de suspension. Et puis, les mots affluent tour à tour dans mon esprit, se proposant à lui pour tenter d'être choisis et placés dans la phrase que j'aimerais exprimer. Quelques heureux élus sont retenus, parmi tous ces volontaires de lettres ; je les remercie secrètement de venir à mon secours. Eh ! sans eux, je ne saurais que dire d'autre que mon prénom rougissant ; il se pourrait d'ailleurs que mes joues aient rosi, elles aussi, depuis l'accrochage des deux regards qui sont nôtres, à cette jolie Sirène et puis à moi-même.

« On m'aurait caché une jumelle ? je demande, aidée par mes fameux mots. Je suis à moitié rieuse — l'autre moitié est happée par cette possibilité, fantasque mais intrigante, que l'Être-du-Lac me soit semblable jusque dans son sang. L'espace d'un instant, je m'évade bien loin d'ici, me rends au cœur de mes imaginations capricieuses pour m'inventer cette vraie jumelle. Tenue éloignée de moi par mes parents, la voilà qui surgit du passé pour rattraper le temps perdu, et même volé. Une scène se joue devant moi : je ne cherche même pas à savoir si elle appartient au passé ou si je m'imagine le futur. Je la vois, c'est tout.
Le Temps se distord insolemment. Et moi, je ne sais pas que je semble ailleurs. Je n'en ai pas conscience, mais l'air rieur s'est vite dissipé, laissant place à une hébétude totale. *

Je cligne des yeux et bats prestement des cils, pince mes lèvres, puis fronce mes sourcils. Comme si rien n'était arrivé, la curiosité me pique : mon ton de voix se transforme, plus inquisiteur que jamais.

« D'où viens-tu, créature ? »

*Des bas-fonds de l'eau, idiote*, s'apprête-t-elle sûrement à me répondre ; ou quelque autre variante qui aurait trait, de près ou de loin, aux profondeurs sous-marines, aux grottes algales, aux courants chauds puis froids ; et je regrette mes mots aussitôt après les avoir libérés, bien que la formulation m'ait plue dans sa douceur.

Me vient l'envie de lui montrer que je l'ai démasquée, en le lui glissant furtivement ma supposition. *Non*, en fait, la fausseté de mon hypothèse est inenvisageable, c'est là l'évidence. Ainsi, puisque ce que je dis est vrai, elle pourra admirer ma perspicacité dans toute sa splendeur.

« Tu sais que tu ressembles à une Sirène, dis ? Oh, une jolie Sirène bien sûr, pas celles qu’on nous montre dans les contes pour nous faire peur. »

Contente de moi, je suis intarissable. J'ai envie de parler encore et encore à cette Sirène, de la retenir près de moi de peur qu'elle ne s'échappe d'un battement de queue, dans un froissement d'écailles. Nous pourrions nous apprivoiser, si je revenais jour après jour au bord du Lac, me rapprochant jour après jour de la surface de l'eau. Qui, parmi la multitude d'élèves qui peuplent le Château, peut se vanter d'avoir dans son cercle d'amis un Être de l'Eau ? Je n'en sais rien, mais la proportion doit être bien proche de zéro. Enfin, loin de moi l'idée de vouloir me vanter de côtoyer une Sirène. Je trouve simplement ces relations singulières : avec le temps, elles doivent bien devenir de plus en plus spéciales. *Merlin sait que j'aime ce qui est spécial, non ?*
Enfin, des milliers de questions fusent dans mon esprit, provoquées par la simple présence de mon double, des deux mots qu'elle a prononcés, ou de son doux regard posé sur moi.

« D’ailleurs, ta voix est bien plus jolie. On m’a raconté qu’leurs cris étaient plus stridents que ceux d’une mandragore : rien qu’des mensonges, tout ça. Au fait, je t’ai d’mandé ton nom ? »

__________
* Épisode de zoning out, soit une légère dissociation, en lien avec le Trouble du Déficit de l'Attention avec Hyperactivité (TDAH).

these violent delights have violent ends

06 janv. 2022, 19:39
Mirage, Rivage
Ruby, répond l'autre Elle. Ruby - Lumah pensa immédiatement à un trésor. Elle devait chérir son nom, c'était sûr : c'était celui d'un véritable joyau, après tout, comme ceux qui se trouvent dans les coffres que cherchent sans relâche les pirates. Si Lumah avait été un pirate, comme ses rêves le lui permettaient des fois, elle aurait bien aimé trouver cette Ruby à la fin d'une expédition, elle aussi. C'aurait sans doute été le plus beau cadeau qu'on ait pu lui faire. Non, en fait, elle aurait aimé être Ruby, ou du moins tout comme elle. Celle-ci semblait déborder de confiance, et elle était belle, si belle - bien plus qu'elle. Elle l'enviait, celle jolie Ruby.

« C'est joli, comme nom, Ruby », dit Lumah sans même essayer de cacher son émerveillement.

Une mèche était venue lui obstruer la vue, mais la petite n'en avait que faire ; c'était à peine si elle n'avait pas même oublié qu'elle nageait, qu'elle était dans le lac. Tout son intérêt était ciblé sur la fille.

« Je me demande la même chose, crois-moi », répondit Lumah. Elle est happée par le regard de son sosie - impossible de s'échapper, tant elle se sentait presque prisonnière de cette oeillade insistante, dévisagée. Ce n'est pas désagréable, cependant : Lumah ne se privait pas de faire de même. Elle aurait pu passer des heures à contempler ce presqu'Elle, elle en avait l'intime conviction - non, c'était un sentiment. C'était comme se redécouvrir, ou essayer de distinguer les différences qui faisaient qu'elles n'étaient pas elles, avec l'impression pesante d'être observée, de s'observer.

La blondinette commença peu à peu à douter. Toute cette mise en scène tenait étrangement du rêve, d'une certaine manière. S'était-elle endormie ? Était-elle vraiment venue se baigner au lac ? Était-elle morte, ou évanouie, noyée ? Le rêve essayait-elle de la retenir ? Elle n'en savait rien, et ne savait comment le prouver.

« Sommes-nous dans un rêve, dis-moi, Ruby ? », lui demanda-t-elle poliment - mais la Pierre n'avait sans doute pas entendu, car elle venait de lui poser une toute autre question, que Lumah ne put s'empêcher de trouver étrange. D'où venait-elle ? Elle venait... Du monde des humains. De celui des sorciers. De Poudlard. Du parc. Du lac.

Que pouvait-elle y répondre, sincèrement ? Elle laissa planer un silence.

« Je viens d'ici. Je viens du lac. », dit la petite, à peine sûre de sa réponse. « Je m'y baignais », précisa-t-elle dans un doute.

C'était la réponse qui lui avait paru la plus évidente ; nul ne cherchait à savoir les origines d'une personne qu'elle avait à peine rencontrée - si ? Mais c'était également une réponse à risques, c'est pourquoi Lumah ne put s'empêcher de scruter le visage du Trésor pour y trouver confirmation. Avait-elle bien répondu ? Peut-être allait-elle s'énerver, peut-être serait-elle frustrée parce que Lumah avait répondu complètement à côté de la plaque et partir. La petite aurait été peinée, son coeur s'en serrait d'avance. Mais elle ne devait pas stresser, ça non. C'était mauvais pour elle, pour n'importe qui, et elle perdait alors trop vite ses moyens. Elle ne voulait pas se montrer faible devant une si jolie personne, elle ne voulait pas la décevoir.

Tu sais que tu ressembles à une Sirène, dis ? Oh, une jolie Sirène bien sûr, pas celles qu’on nous montre dans les contes pour nous faire peur.

Lumah étouffa un hoquet d'étonnement. Ces paroles n'avaient aucun sens, mais elles l'avaient touché en plein coeur. Il lui semblait que cela faisait très longtemps qu'elle n'avait pas été complimentée. Non, maintenant qu'elle y repensait, il y avait longtemps qu'elle n'avait pas été complimentée de la sorte. Les derniers mois, elle les avait passés dans la honte, sous les insultes, sous les coups. Une larme solitaire perla sur sa joue.

« Merci, Ruby. Merci beaucoup. Ça me touche en plein coeur, tu ne peux même pas t'imaginer ! Je crois même que c'est le plus beau compliment qu'on m'ait jamais fait, tu sais. Je n'ai pas encore croisé de vos sirènes, je suis curieuse. A quoi ressemblent-elles ? »

Lumah fit une pause.

« Si je suis ta sirène, Ruby, alors tu es la pirate qui m'a trouvée - ça te va ? J'ai toujours aimé les pirates. Ils sont charismatiques, fous d'aventure, et courageux. »

“ Il lui arrive d'avoir des agissements curieux. Mais bon, c'est Lumah ! ” ED
17 ans (à l'aide) 6eA #674ea7