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26 janv. 2021, 20:41
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Un sorcier ? S’il incante ainsi, et un sort inconnu... CIRCAE MEDEOR, s’il vous plaît… Non, il n’est pas question qu’elle se laisse faire, être un animal d’expérimentation, sans façon…. Habile refus intime permettant de ne pas affronter le réel, la peur de renforcer le mal au lieu de l’amoindrir. Il ne doit pas. Mais au moins une bonne nouvelle apparaît, ils sont du même monde. Ainsi pourra-t-elle donner un peu de sens à certains des élans. S’il est encore là car, dans les tréfonds de son cerveau, la pensée prochaine prend naissance. Et s’il est raisonnable, au sens Serdaigle du mot, il prendra le premier Poudlard express et retournera au paradis des enfants sorciers. Circéia est une vipère, son affiliation à Serpentard n’explique pas tout. Dangereuse comme une mante religieuse, sa morsure ne peut s’anticiper. Jusqu’à présent seule victime de ses débordements , elle n’a pas créé beaucoup de chaos. Mais la toile est tissée et la proie a posé un peton. Le faisceau remonte, génère un grand sourire, déformé de douleur mais un large sourire, celui de l’expulsion. Où en sont leurs mains ? A vrai dire je m’y perds car moi aussi je cherche... éloignées ? Réunies ? Ces deux-là sont une alliance dont il vaudrait mieux se prémunir des connexions. A les voir, ils étaient faits pour en arriver là. Mais elle n’a rien voulu, poussée par le nihilisme d’un misanthrope, elle a juste dit vrai. Toujours. Mais dans le monde ordinaire, la vérité se tait. Les gens directs sont des condamnés, un supplice quotidien.
Elle ne distingue toujours pas ses yeux, la main gauche occupée sans trop savoir à quoi. La douleur s’estompe et son écho ne fait plus mal. Circéia erre entre les rideaux d’une pièce irréelle, sans fenêtres… par dizaines ils tombent d’un ciel soudainement sans nuages. La neige redouble et occulte sa source. Combien d’épaisseurs, et de quelles couleurs ? Le mal vous transforme en un réceptacle à sensations. Des milliers de cauchemars potentiels et l’esprit fait son choix, un peu de douleur, beaucoup de remords, des êtres inquiétants, ou disparus. Chacun compose sa propre liste mais le résultat dérange par la similitude, des effets. Où en est-elle alors que le vent fournit aux flocons une énergie devenue pénible. Des piqûres, à la surface du visage, seule peau à vif. Et les piqûres répétées, on ne les supporte pas indéfiniment. Elle lui dirait bien qu’elle a froid mais ce n’est pas le moment. L’urgence de traduire la pensée irrépressible.

- Ne tentez pas de magie sur mes plaies, je préfère encore que vous m’embrassiez.

S’entendre la fait éclater de rire. Du moins son corps essaye-t-il d’arriver à bon port. Mais elle s’étouffe, augmentant le malaise que lui peut ressentir. Rien ne prouve qu’elle le veuille, l’attitude n’a jamais été séductrice. Lui… que sait-il d’elle ? Ont-ils été à Poudlard ensemble ? Forcément, d’une certaine manière au moins… mais elle ne se souvient pas. Pas en l’instant. Or en toute logique, elle devrait. Tousser, tousser de nombreuses fois, relancer une machine moldue proche de caler. Le froid, sinon quoi. Mais les secousses font mal, elle ne peut s’empêcher de saisir le manteau de Hjúki, comme ces combattants martiaux plient l’ennemi par la poigne. Arrimée. Cette fois, sans réfléchir, elle s’est blottie contre lui, de loin la scène, millimétrée, prédestinée.
On ne devrait jamais pratiquer l’humour dans les circonstances importantes de l’existence. Mais qui s’autorise le droit d’établir le primordial ? Elle s’imagine sans doute n’avoir aucune chance, la séduction involontaire. Circéia ne cherche pas, au plus à être elle-même. Vous en conviendrez, à son âge, cela relève de l’exploit. Mais elle ne le sait pas. Ne peut pas le savoir. Alors la femme, enfin. Mais qui donc oserait toucher un flacon de poison ? Et par les lèvres mon ami, par les lèvres. Une idée russe, une sottise. Peut-il rationnellement se détacher des mots ? Agrippée à lui, elle souffre, à l’évidence. Mais semble heureuse aussi... surprenant.

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Reducio
NDLR :
Le décalage entre réalité et perception ne saurait être lié à une facilité scénaristique. Circéia est dans un état qui ne lui permet pas de tout analyser avec la rigueur du théâtre antique. Il faut lui pardonner ses égarements. Mais, j'avoue que ces derniers interviennent fort à propos.

Diplômée de l’ISDM => naturellement charismatique.
Vivre sans faire de mal à personne qu'à moi-même...

26 janv. 2021, 23:18
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Une fois l’ardente braise lancée, l’attente curieuse et hésitante. Chioné et les Boréades n’épargnent pas ces deux Silhouettes aux empreintes posées sur le sable, et les flocons s’élancent pour les recouvrir. Tout balayé de blanc, retour à la pureté ? Si Hjúki lui tourne le dos, Circéia est encore offerte au regard d’Ouranos. À quel point son corps absorbe-t-il les traits de glace au-dessus du sien ? Ce visage clair est si troublant. *Porcelaine ?* Préfère-t-il sa force ou sa vulnérabilité ? *Les deux.* Il essaie de la lire, tout en sachant au fond de lui que ce n’est pas si nécessaire, sa réaction est presque prévisible, à moins d’être aussi versée dans l’irrationalité que lui en ce moment. Cela n’empêche l’adolescent de se montrer disposé à être surpris, dans cet étrange espoir de l’impossible. Qu’elle prendra sans doute soin à briser. Guettons. À l’affut de décisives notes.

Choc, bien plus que surprise. S’il ne serrait pas les dents pour s’empêcher de les claquer, sa mâchoire s’en serait certainement décrochée. Non, mais oui ? Oui, mais non ? *Was ?!* La langue de ses racines lui revient en tête alors que sa torpeur essaie de traiter l’information. Ses doigts gourds réinséraient naturellement la branche qui s’était confirmée inutile dans la poche alors que son esprit tourbillonnait autour des derniers mots. Comment en viennent-ils à être choisis ? L’acmé de l’improbable ? Fais-le si tu l’oses. Un défi ? Sans compter que le tressautement corporel qui agite la danseuse à peine rétablie n’est point éloquent. Le froid lui aurait-il engourdi la tête ? Fascinant contraste, alors que celle de Hjúki demeure presque toujours la partie de soi la plus brûlante, quelles que soient les basses températures qui pourraient l’enrober. Tiré en avant, par les pans de son manteau laissés libres et maintenant tenus. Vertige… tel celui que l’on expérimente lorsque l’on mésestime le niveau du sol qui nous attend. Le corps a besoin de temps pour se réaligner, puis se synchroniser à celui qui s’est introduit tout contre soi.

Étreinte mutuelle ? Elle a initié, et bien qu’il n’ait pressenti l’urgence d’un tel contact, il y répond en présentant à son tour ses bras. Entourés. Non plus comme entre les limites d’une prison. Enchevêtrés. Et son esprit dissèque, taillade le mot qui a toujours caché à ses oreilles une immense ambivalence. Em-Bras-ser. Il repense à ces étudiants qui se mêlent à la volée, avec nonchalance. Qui se fusionnent et se rompent en voltefaces, à la chaîne. Qui se mélangent les corps sans retenue. Qui jettent mots et gestes avec légèreté. Qui s’
embrassent. Hjúki observait tout cela, n’en comprenant qu’à peine quelques fragments, conscient de l’étrangeté que lui présente toute une parcelle du monde, entouré de son bouclier invisible que personne n’ose approcher. Comment s’était-il construit cette aura répulsive ? Il n’en savait trop rien, mais avait volontiers admis cette naturelle prédisposition qui le préservait de bien des heurts avec des camarades.

Attendait-elle seulement qu’il lui offre ses bras pour l’accueillir auprès de lui ? Attendait-elle ce singulier partage des lèvres ? Jamais encore il n’avait aimé quelqu'un qui ait besoin de se mélanger aussi étroitement. Opa s’en était retenu, lui expliquant que ce serait à lui seul de choisir, de décider s’il le lui fallait. Prouver en un geste d’abandon sa pleine confiance. Laisser une partie de soi ne plus être exactement à soi, absorber une partie étrangère. Levant la main, il caresse délicatement sa joue. La brûle-t-il ? Le brûle-t-elle ? Il ne parvient à le déceler, ses Sens sont trop brumeux. Hume. Il n’a jamais goûté la peau d’une…femme. Flagrance à la pointe rosée. Humide de neige fondue. Son masque est tout autre, un stasimon ou déjà l’épisode suivant. Murmure pour lâcher un seul mot au creux de ses oreilles, celui de la concession.


« Soit… »

Alors, suivant le mouvement de la force de gravité induite par la tenaille en laquelle Circéia le retient, il approche son visage pour poser pudiquement, non loin du coin de ses lèvres mais seulement sur sa joue, un baiser du bout ses siennes.

S'embraseront-ils ?

27 janv. 2021, 17:47
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Les flocons ne la criblent plus, en se rapprochant d’elle, Hjúki leur interdit l’accès au visage, se réservant une exclusivité sensitive dont il ne se doute assurément pas. D’une certaine manière, la chaleur revient, par arrêt de la glaciation. Ensuite. Ensuite c’est le contact, en lui-même pas réellement générateur de chaleur. Mais la fusion qu’il implique provoque en elle une multitude de raisonnements inconscients, dont la mise au jour ne nécessitera aucun effort archéologique. Là se confirme les étonnements de la rémission. Le moral peut accélérer le processus. Et dans le cas présent, nous devons attester de la disparition des « rhumatismes » situés aux bas étages. Par une étrange arithmétique, l’état de Circéia est bien meilleur mais rien n’indique que cela soit le cas. Un membre peut, dans un calcul, être la somme de deux valeurs positives mais son résultat, positif, peut aussi traduire la somme d’une valeur négative inférieure à l’autre. Les sciences prétendument exactes ont souvent la froideur d’une raison objective, autrement dit peu réjouissante. La seule chose qu’elle entrevoit d’abord est la fin de la crise. Dans le silence de ce constat, une forme de relâchement, ses doigts donneraient à penser qu’elle va le libérer de cette étreinte forcée. Elle s’arrime. Et son cerveau peut enfin réfléchir à tête reposée. Ainsi le garçon n’a pas profité de sa faiblesse. Quand bien des hommes l’ont malmenée avant son voyage en Russie, ternissant des nuits plutôt agréables, lui a su la respecter. Et pourtant elle est malhabile avec Hjúki, l’ayant provoqué, et qui sait moqué… Il a gardé la noblesse d’âme des gens biens, ce qu’elle est. L’oubli de soi est un maléfice de l’âge.
Circiéa a senti son odeur, les femmes ont ce talent, et les bébés aussi. Désormais, le terrain est tout autre, elle tranche. S’assagir. Ses yeux s’éteignent le temps de ce contact, tout se passe en même temps tu sais, vraiment tout et s’en tenir à de la dissection trahit la suspension. Ressentir l’émotion d’un geste n’est pas donné à tout le monde, d’abord il faut le vivre. Et ensuite l’intégrer. Pour ce qu’il est. Jamais auparavant un baiser n’a eu un tel effet. Lame de fond, c’est sérieux. Pleurer serait facile, mais pas dans sa famille. On ne peut s’opposer à la matrice, sous peine de voir notre âme se rompre. Il n’est pas Serpentard, qui aurait pris sans hésiter. Il peut bien être ce qu’il veut, elle s’en fiche. Bizarrement, elle vole, le sol a disparu et les volutes du ciel la portent dans un territoire embrasé de lumière. Le rêve éveillé.

- Merci.

De l’avoir respectée, de l’avoir mis au chaud, de l’avoir consolé des douleurs intestines, de l’avoir écouté malgré ses brusqueries, d’avoir vu autre chose qu’une simple créature, d’avoir su arrêter un processus hâtif. Agir comme il se doit n’est pas donné à tout le monde. Elle en a conscience et quand enfin elle voit ses yeux de près, ce n’est pas la même que l’instant d’avant. La solennité. Chacun verra en eux ce qu’il voudra. Toujours aussi noirs, toujours aussi profonds. Insondables, dans leurs errances, dans les désirs secrets tapis au fond du coeur. Vivre l’instant sans penser au pourquoi du sombre. Cet homme est un mystère pour elle, tout le rend attirant. Les doigts. Ils reprennent leur fonction de geôliers. Tu ne m’échapperas pas, c’est décidé, je ferai en sorte, d’une manière ou d’une autre. Mais je dois me méfier de moi-même car si c’est important, il ne faut surtout pas briser l’incantation. Tu l’as appris, sers-t’en. Il faut le vouloir sans cela point de magie. Plus rien d’autre ne compte.
Se relever serait possible, elle sent pouvoir le faire. Mais un certain confort la pousse à ne rien provoquer. Elle est paisible, cherche son regard en sachant parfaitement que le charme peut s’interrompre à chaque instant. Ne plus rien dire, quoi qu’il arrive la journée est belle et Circéia heureuse, détendue. Elle dirait bien que grâce à lui elle n’a plus mal. Mais la bulle de savon menace d’éclater à tout moment. Plus on bouge, plus la photo sera floue. Son coeur devrait battre la chamade, mais non. Ce doit être cela le bonheur.

- Je suis heureuse.

Le segment relie terrestre à céleste. Nótts en résonance, quatre billes de verre s’entremêlent. Ce qui advient ensuite... « c’est égal ». Et cela porte un nom ; l’abandon.

Diplômée de l’ISDM => naturellement charismatique.
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27 janv. 2021, 22:05
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Écarte son visage au terme du contact pour recouvrer une distance convenable à celui son enchanteresse. Par ce geste il a parlé sa langue. L’a-t-elle compris ? Elle ne l’a du moins pas encore lâché. Une pudique hardiesse, mesurée. À quel point peut-elle métamorphoser ? Il se laisse porter, tant qu’elle maintient la prise, Circéia conserve à sa façon une forme de maîtrise de l’ensemble. Silence. Silence de Respirations. Leur proximité leur permet presque de capter leurs pulsations, mais il ne perçoit rien d’affolant. Une brise bienveillante souffle sur les ondes inquiètes de ses eaux. Temps, il t’est accordé de … te prendre. De capter l’espace. Garder un souffle régulier dans une telle posture de tension est une tâche délicate. Pourtant il résiste au moins pour ce qui est de l’ouverture de la bouche, bien qu’elle lui permettrait d’avaler plus voracement l’air. Il ne serait opportun d’instaurer entre eux la fumée que forme le mélange de l’haleine avec l’atmosphère hivernale. Son nez se plisse alors qu’il tente de se renouveler posément. Une immobilité de surface, telles deux statues ancrées sur la plage, ou même l’unique marbre immortalisant deux corps joints, alors que vraisemblablement les agitations grondent à leurs rythmes en chacun des jeunes adultes.

Le premier mot qui franchit les lèvres de Circéia semble avoir été transposé en une autre tonalité par rapport à la première occurrence de cette même note dans leur variation. Justesse. Les bonnes notes provoquent l’agréable vibration musicale, quand la fausse note vrille douloureusement contre la peau qui l’a provoquée. Harmonie et Justesse, leurs vibrations sont accordées. Son vœu, de la plus imprévisible des façons, s’est exaucé, au moins partiellement. Il ne lui est possible de savoir si Circéia est guérie, mais il perçoit dans ce remerciement la germe du rétablissement. Ce n’était pas la magie, la salvatrice. À l’évidence. Justesse de la chorégraphie sans vulgarité, sans effets. Où chaque mouvement est accompagné de sincérité jusqu’en ses extrémités. Jusqu’aux bouts de ces doigts qui l’accrochent, comme pour l’empêcher de disparaître. Trop fasciné par la Couleur qui s’est immiscée autour d’eux, parfaitement nuancée, pour songer un instant à s’évaporer par une pratique aussi barbare que la magie. Par l’Ancre qui l’arrime, il n’explosera de cette force étrangère.

L’ultime confession éclate et carillonne puissamment dans sa tête. Une eau bienheureuse de laquelle il se délecte en cherchant à en profiter le plus possible ; la laissant s’étendre, s’épandre. Cette source inédite a apporté une toute nouvelle eau à son Lac, et Hjúki aimerait la sentir dans sa plus pure finesse, à la Goutte. Ses veines sont habitées du liquide ayant coulé de ses mots, elles diffusent la toute douce chaleur de sérénité joyeuse, en une pulsante excitation. Sorti des insoupçonnés tréfonds de soi, un rire aérien agite son buste. Un rire exultant, débordant. Erreur. Fumée en volutes. L’adolescent avait oublié l’inéluctable de ce phénomène. Il patiente pour qu’elle se dissipe, comme son fulgurant éclat s’est dissipé, bien qu’il en conserve les bienfaisants relents. La clarté leur permettant à nouveau de se voir, il tire doucement la commissure de ses lèvres. Ce sourire est le sien, presque égoïste car retranscrit sa propre élévation. N’oublie pas à qui il la doit. Comment se pourrait-ce ? Écho, à l’encontre de la malédiction d’Héra, car en toute conscience.


« Quant à moi, j’en suis heureux. »

Un rare état dont il lui était reconnaissant. N’est-ce pas la quête cachée de tous ? Avait-il vraiment pu transmettre, lui, cette once de bonheur ? À présent, il sent qu’il a le droit de lui offrir ses mains en confiance. Hjúki délie ses bras et les replie pour approcher les mains de Circéia qui l’enserrent des deux côtés, pour se glisser vers les doigts de la tenaille. Et il n’a pas encore besoin d’y toucher directement. L’invite est transparente, en rien forcée. Ses doigts se présentent pour proposer un croisement relâché auquel il est prêt à consentir. Tout en mêlant ses Perles-de-Nótt à celles Noires d’Encre, sans toutefois manquer d’expressivité. Oh, comme il est certain qu’il écrira cette sublime Noirceur.

29 janv. 2021, 06:00
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Les premières fois ne peuvent être des jours heureux. Imperfections, ignorance. Circéia traverse ces instants météoriques avec sa petite expérience. Voilà pourquoi elle accède à l’Eden. Avoir perdu son innocence dans des circonstances pénibles, avoir souffert dans son coeur par bêtise, toutes ces fadaises prennent sens ; le passage obligé, l’eau froide du grand bain. La découverte douloureuse. Bien sûr elle souhaiterait un baiser de roman, une étreinte formidable. Mais ce qu’elle vit l’habille parfaitement. La délicatesse. Si des deux l’étudiante est la plus sage, il lui incombe d’orienter, juste le nécessaire. Parce qu’il faut être deux pour corriger les maladresses et lui a fait sa part. Les mots ne sont plus nécessaires, les corps s’écoutent et se comprennent. La différence... non plus deux entités cherchant un plaisir égoïste : on échange mais je prends. Il s’agit au contraire d’une danse attentive, réciproque de l’instinct.

Bien des sensations émergent. Les amarres communes ne montrent rien et pourtant le tumulte grandit. Cette fois, le coeur bat vite. Car les doigts sont des terminaisons bien plus étendues qu’il n’y paraît. Le toucher, un sens appréciable. Une seule main. L’autre, restée gantée, semble aveugle. Et si le sortilège remplit toujours son office, il interdit la sensation. Mais sa main droite, libérée de son étui, est déjà enlacée. L’assemblage n’a pas tardé car les corps sont programmés pour certaines attitudes. La chaleur, doigts emmitouflés. Les siens, si petits. Une fois embroussaillés, immobiles, ils diffusent leur perception. Je me mêle à toi. Par l’autre main je tiens aussi mais le cuir, peau entre peaux, affadit le contact. Une main suffit. En cet instant, ma baguette te jalouse car il est entre nous un lien bien supérieur. Et les yeux fermés, Circéia s’interroge. Est-ce bien elle qui a droit à tout ça ? Je devrais avoir honte de ne penser qu’à moi. Je me rapproche, elles me verrouillent à ton corps, grâce à elles je peux m’amalgamer. Ma tête contre ton coeur, arrivée par hasard, on ne saura comment, se nourrit de ton chaud. Le pouce navigue imperceptiblement. Câlin d’enfant. Je prends conscience de ma maîtrise sur le monde en me voyant agir. Ma main tourne, je la regarde et mes doigts qui s’agitent confirment mon pouvoir. Ce souvenir d’enfance ressort, sur la plage cotonneuse blanchie de neige cumulée. Je bouge un peu, embryon dans la mère. C’est violent et c’est doux, et surtout c’est exquis. Dans ma poitrine, le tambour cogne fort mais pas si vite. Des frissons, des frissons permanents. Je rougis, je le sens. Le sourire est parti, je suis toute en dedans. Mes mains sont à lui ; et ses mains sont miennes.

Il faudra se résoudre à bouger, relancer la machine, réactiver le temps. Mais plus tard, laissons-les pour un temps demeurer des enfants. Très vite ils apprendront. Aujourd’hui, ils découvrent. La sensation de bien-être éclabousse, un printemps spontané. Et comme elle n’y a finalement jamais vraiment pensé, parce que ses émotions ont été endiguées trop longtemps, le choc s’avère énorme. Les adjectifs ne sont pas excessifs, le piège de l’emphase ne doit pas vous tromper. Une personne à qui l’on n’a pas appris l’existence de son corps, sa conscience, ne peut s’inventer un demain. Voilà les vagues scélérates possibles. Sa force la sauve, une dignité, la résilience nouvelle aussi. Car elle est amoindrie, ses jambes ne la portent plus tout à fait. Mais sans cela, elle serait restée droite, sans cela elle n’aurait pas pris l’air à Abercorn park. Sans cela, elle ne tiendrait pas un homme entre ses mains ! Se respirer de lui, oublier qui l’on est, ne plus savoir parler. Mais être.
Les tremblements jaillissent, il est trop dur pour elle de retenir l’assaut. Jamais elle n’a atteint ce degré d’inquiétude. Déboussolée, ébouriffée, consciente de devoir ne rien dire. Respirer fort, c’est déjà menacer le fragile équilibre. Les mots ne seront pas. Ou ils seront la mort. Paralysée. Malade. Mais d’une façon extrême. Il vaut mieux oublier de dire, on emploierait des mots à la solennité dangereuse. Son visage, blotti contre le torse, s’insinue. Elle sait se maquiller, face à un échiquier. Vivre est plus compliqué.

Ton épaule


Réapparue

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29 janv. 2021, 11:53
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
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Desserrement. Resserrement. En juste [mi]lieu, le contact. Entre-Croisement. L’instinct a repris le dessus, telles les minuscules mains sans expérience du nourrisson qui agrippent par pur réflexe le doigt tendu et présenté. L’instinct. D’un geste originel, primitif, naturel. Dans ce face-à-face, ce sont leurs respectives mains de puissance qui ont le privilège de s’abreuver de ce fougueux et inédit Courant. La droite de Circéia, la gauche de Hjúki. Asymétrie du côté opposé où sa peau nue est comparativement aveugle, contre le rempart. Toutefois, de partout : la pression, les pressions. Inégales, ruisselantes, avançantes, reculantes, de toutes nuances ressenties. Cette fois, ce sont les siennes qui sont légèrement plus grandes, responsabilité de permettre une respiration libérée, d’empêcher l’étouffement. Car l’avalement est redoutable. Caresses ondoyantes. Ondulations, et intimes frémissements. Sa peau perçoit les courbes tracés tactiles à sa surface, et sans calcul spirale et appuie par intermittence en retour. Les touchers se jalonnent sur deux niveaux, de l’intense peau-contre-peau jusqu’au singulier du peaux contre commune barrière. Dans ce dernier cas, il n’est pour autant pas à croire que rien ne peut s’y passer. Ne reconnaissez-vous pas la véhémence du presque-contact de deux mains qui se collent contre la même vitre ; à une surface, à une texture d’écart ? Ce gant ne peut être synonyme d’inertie. Tel le remous de l’eau, les mouvements s’immiscent et se retirent en un cycle d’éternité. Fonte réciproque dans une chorégraphie manuelle. Cette sensation suspendue est sans commencement ni fin. Immortelle.

Par sa tête posée, elle s’est offert l’accès le plus direct, le plus charnel à son Cœur sous une poitrine qui le protège à peine. La musique du Cœur, le Cœur en musique. Insignifiance, vraiment ? Mais, par le diable, entends-les, Stravinsky ! Entends-les. Comprends-les. Ressens-les. Battements, grondements de la profondeur, une basse sereine et posée des pulsations qui se découvrent en afflux permanent des Sens. Et Circéia, perçoit-elle à quel point elle le tient ? Le visible s’estompe. Qu’importe-t-il de voir les rougissements, les rosissements qui envahissent le teint, quand jusqu’en leurs extrémités délicatement liées, leurs humaines chaleurs se répandent, se partagent ? Mutualité. *Nos sources.* Une évidence. Flux d’elle en lui. Flux de lui en elle. Indéniablement, leurs eaux s’alimentent. Bellement.

Inédit. Lorsque l’on dessine sur la peau connue, le message transmis se comprend comme une confirmation du lien connu, expérimenté, vécu, passé. Quand enfant il buvait ses contacts avec Opa, il en obtenait le doux réconfort du familier. Une Silhouette dénuée de secret, les Contours parfaitement cartographiés de tous ses Sens. Son Protecteur, le jeune besoin égoïste de lui prendre, sans songer à donner. À sens unique. Il le croyait sans fond. Inépuisable. Si Opa l’avait nourri de bienveillants torrents, il ne lui avait sans doute pas appris à offrir de soi. Du moins, son aïeul n’avait jamais demandé, expressément exigé de son Enkel. Liberté de choisir. Choisir de s’offrir. Jamais un don ne peut être forcé car sa nature se veut pure, sincère. Aujourd’hui… aujourd’hui, son Cœur débordait. Il était prêt à donner. Il avait compris. Enfin. Parce qu’elle aussi, elle lui donnait. Parce qu’ils étaient devenus nos sources.

Éveillé. Éveillé, d’une vigilance à traduire chaque impulsion, chaque geste de Sens. Avide tension. Ce Versant de Hjúki est en cet instant parfaitement intelligible. Certes non cupide, il est du moins Avide de Sens. Ces tremblements, qui s’infiltrent en lui, tiraillent ses Perceptions. De toutes ses forces, il aimerait… il aimerait tant et tant. Mais le plus essentiel de tout : donner de toutes ses forces. Il a peur aussi. Deux êtres tanguants au bord du gouffre aux inimaginables profondeurs. Terreur intestine. Excitation pénétrante. Les chutes d’eau. Même les plus habiles Conteurs ignorent parfois comment, mais les héros semblent toujours y survivre. Y sont-ils, à cette orée ? Certitude du moins que dans leur abandon, il est un don. Qu’a-t-il à offrir ? Courants des spirales tactiles. Fermeté de ses doigts dansants, et par ailleurs Hjúki invoque un désir jamais exprimé. Celui d’irradier sa puissance, de la partager. Serait-elle son Réceptacle, sa Destinée ?


« Ma force est vôtre. »

Sautons ;
Ensemble

30 janv. 2021, 11:30
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Le son de sa voix a changé. D’abord elle ne l’a pas vraiment perçu, captant seulement les vibrations du corps. Au point d’immersion qui est le sien, Circéia ne peut comprendre. Elle qui craignait la rupture n’a pas perdu au change. Le timbre noble, passé de mode comme le sont gentiment tous les gens de l’engeance dont tous deux sont issus. Car cela ne fait pas de doute à ses yeux, il est comme elle. Mais plus encore, la possibilité de rencontrer un être à ce point en phase avec ses pensées, ses envies, la moindre de ses rétentions. Il s’est passé quelque chose et elle ne sait pas quoi. La confiance. Il a gagné sa confiance. Elle ne peut plus se terrer davantage en sa poitrine, ce serait impoli. Mais refréner un peu, pour mieux y retourner… Cette fois, le soupir accompagne le geste, répondre sans parler. Il n’a pas dû se passer trois minutes, quatre… tout est allé si vite. De l’autre côté du fleuve. Elle ne se fourvoie pas de penser la bonté, les Cassandre diraient calcul. Mais non. Certaines parties d’échecs sont à tel point minutieuses, elles naissent de la grâce. Les coups s’enchaînent avec tant d’élégance, de logique. Leur java le rappelle, plus c’est endiablé, plus il faut être uni. Circéia sent ces choses, elle en a l’intuition. Lui l’écoute, il a compris.

- Aidez-moi.

Le risque semble préférable à celui de laisser le moment perdurer. Tout gâcher en diluant, sans avoir osé faire le pas. Demeurer assise dans le froid ne serait pas judicieux. Car la crise a été forte, le repos sollicite audience. Elle doit se ménager ! Tomber dans un coma magique aurait des conséquences désastreuses, il n’en est pas question. Et une femme russe ne doit pas trop montrer ses lézardes. Comment parvenir à conserver la proximité. Elle aime être dans ses bras, l’idée de les quitter lui pèse. Trouver l’issue sans sortir. Le regarder, avec des yeux ouverts, lumineux. Lui sourire, oui, lui sourire et initier le geste qu’il accompagnera. Il comprendra, c’est sûr. Mais d’abord lui sourire.

- Je dois rentrer.

Annoncer une mauvaise nouvelle, sans apparat. Peu importe l’après, elle a encore un long temps de partage. Car retourner chez elle demandera précautions. Et manœuvres. Et ne pas flancher de nouveau. La sensation d’un sablier stoppé, impression de vivre chaque infime seconde comme des années, le corps en suspension, les sens au faîte de ce qu’ils peuvent. Tout est vécu au ralenti. Pourtant tout est accéléré. Et va trop vite. Ses cheveux commencent à s’habiller de la neige persistante. Il blanchit.

- Vous avez des flocons plein les cheveux, laissez-moi enlever ça.

La main gantée s’exécute, et l’étudiante s’amuse. Elle inonde leurs visages d’un brouillard accentué. La voit-il déborder ? Ses lèvres ouvertes, et ses pommettes. Visage radieux. Après deux ou trois gestes, la neige a disparu. C’est mieux ainsi car la tempête redouble. Elle ne lui dira pas, lui pourrait y voir les protections d’une mère. Et elle ne le veut pas. Ils sont égaux, Circéia ne doit pas.
Puis le regard contemple le buisson, pour une tignasse, c’en est une. Elle retient un éclat mais son rire la trahit. Elle le dévisage...

- C’est beaucoup mieux ainsi !

L’animal s’échappe. Une pirouette, le trait commun sensé cacher le sentiment. De profondes inspirations cherchent à encourager Hjúki à donner l’impulsion. Parce que s’il n'agit pas, des choses peuvent se passer. Elle ne répond de rien mais la raison lui dicte de différer. Ses jambes la menacent à tout moment.
Les mystères de la vie font que son corps meurtri lui permet de s’ouvrir, non d’une manière ostentatoire, impudique. Ils sont dans un cocon, plus proche de la pleine mer que d’une côte hostile, protégés des regards par une neige intense. Personne ne les voit. Libre de vivre sans penser au qu’en dira-t-on. Circéia, finalement, se retient de basculer, par nature. Téméraire, elle brave le fatum, sachant qu’on aura rien si l’on ne le prend pas.

Diplômée de l’ISDM => naturellement charismatique.
Vivre sans faire de mal à personne qu'à moi-même...

30 janv. 2021, 22:18
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Voix de corps. Quoiqu’elle ait entendu, les ondes lui sont assurément parvenues. Entendues. Comprises. Mots en Sens. Le déliement paraît imminent, alors que leur nœud est pourtant d’une si coulante Harmonie. Non, il faut que le lien soit maintenu, il ne peut pas rompre ; leurs peaux en seraient laissées à vif, arrachées l’une à l’autre. Dans l’urgence il faut songer à tisser d’autant de mailles que la distance qui les séparera. Lien indéfectible. Littéral, et jusqu’où ? Elle ondule, s’agite, se déplace, sans oser toutefois encore le dénouement. Restons, oui. Que jamais cela ne cesse. Et son sourire. L’on dit que le vrai sourire entraîne les yeux. Ses Noires d’Encre participent à l’expression, au message, à sa langue, à leur langue. Temps figé. Même le Temps a compris. Au lieu de tomber en gouttes liquides, il s’écoule en flocons, plus indolents, aux trajectoires plus incertaines. Clepsydre ralentie, engourdie par le froid. L’Hiver apaise et endort les battements de la Nature. Il semble aussi suspendre ce moment adolescent. Hors des lois communes de Temps. Des secondes plus lourdes qui volètent longuement avant de définitivement choir et de recouvrer leur unité de mesure propre à l’état liquide. Si graciles et aériennes ; telles la feuille d’automne ou la plume endiguées dans leur chute par la force venteuse.

Une accumulation temporelle tout autant physique qui n’échappe pas à l’enchanteresse. La neige qui s’entasse, pas encore fondante, conserve son état de suspension. Circéia fait voleter le Temps, le fait se reproduire, le fait retomber. Il neige alors, en superposition, comme si les nuages étaient directement issus de sa tête : Neige-en-Neige. Clepsydre-en-Clepsydre. Renouvellement. Boucle temporelle. Double de flocons, double de secondes s’épanouissent entre leurs visages, en une minuscule tempête. Hjúki est allégé de la neige, mais ses cheveux demeurent alourdis d’humidité. Si la finesse de sa chevelure la rend coutumièrement si libre et virevoltante à l’air libre, l’eau l’engorge et pèse, une différence qui ne peut malheureusement être ignorée. Il agrippe alors l’une de ses propres mèches d’un doigt et l’enroule d’un ou deux tours pour en apprécier le changement avant de la lâcher sans se soucier de l’empreinte laissée sur le cheveu mouillé, à la fois malléable et fragile. L’eau, bien que vivifiante, fausse les textures. Il n’ose toucher à la chevelure de la jeune femme, ce n’est pas de la neige qu’elle a essentiellement besoin d’être protégée, elle n’a pas besoin d’un geste de Hjúki en cela, suppose-t-il.

Empêcher la rupture. Imprimer dans leurs chairs et dans leurs mémoires cet instant. Finesse. Délicatesse. Noblesse ? La dramaturgie aime les nobles héros, en sont-ils ? Un dernier geste, une dernière brûlante initiative. Partage. Encore, car ils pourraient s’en abreuver à l’infini. Quelle est leur limite ? Il approche de la main de Circéia et avance son buste, en offre un ultime accès. En parallèle il avance sa propre main vers la poitrine de la sorcière. L’adolescent a soin de ne l’écraser en rien, alors il ne pose que le bout de ses doigts, appuie à peine. Seulement sentir les frémissements à travers le derme par un frôlement nécessaire. Quelques secondes sans doute. Secondes de flocons, raidies d’Hiver. Mains en battements. L’intensité suffit à dépasser le Temps. Une fois certain que l’empreinte est vive, Hjúki libère les postures.


« Nous les avons perçues. Percevons. N’oubliez pas nos vibrations. »

Peut-être, seulement peut-être serait-il désormais prêt à admettre la nécessité de son départ, du retour à… quelque soit sa vie. Il ne sait même pas. Qui est-elle ? *Source. Enchanteresse. Sublime Noirceur.* N’est-ce pas plus important encore que de connaître les affres de son existence ? Sans doute. Oui, elle doit partir. Mais seules leurs enveloppes physiques devront se quitter. Déjà, chacun a planté une part de soi en l’autre. Germes naissantes. Comment pallier les sensations ? Le souvenir. Inscrit, imprimé dans leurs peaux. Dans leurs pulsations. Dans leurs jeunes Cœurs. Toutefois, il n’est pas encore tout à fait temps de disparaître. C’est pourquoi l’adolescent lui présente sa stature comme soutien pour lui permettre se relever, se tenir. Séparation encore doucement repoussée.

31 janv. 2021, 08:36
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 



- Accio canne.

Elle aurait tout aussi bien pu informuler le sortilège. Mais Circéia sent qu’il faut agir ainsi. La raison ne l’emporte pas, non. L’étudiante veut au contraire conserver le miracle. Car la vie ne s’arrête jamais même si nos perceptions en donnent l’impression. Nous voudrions aller plus vite certains jours quand d’autres fois l’espérance est de figer nos âmes. Ne voyant pas l’objet venir à elle, l’épaisseur de la couche de neige n’est pas sa préoccupation. Elle devrait pourtant. Une fois debout, il faudra avancer et avec sa démarche, ce pourrait être délicat. Si par malheur Hjúki partait, ce serait même dangereux.

Au moment d’atterrir dans sa main, la canne se déleste du peu de neige ayant résisté au mouvement. Noir d’ébène, pommeau métallique sobre, rond, des animaux chimériques sont gravés dans le bronze, une enquête conduira à conclure qu’il s’agit de griffons. Elle a les idées larges. A moins que le vendeur n’ait eu que cela en magasin. Laissant glisser l’objet afin de le tenir par son sommet, l’étape suivante est disponible. Elle sait ce qu’elle veut. Mais la manière de l’obtenir lui importe encore plus. Jamais elle ne lui sautera dessus, ni ne le forcera. Elle a déjà payé pour avoir voulu trop vite. Payé, le mot est faible. Mais sans regret, ce qui est fait et fait. La vie lui donne la possibilité de faire les choses convenablement, non pas au sens des conventions, sa perception du monde parle à sa place. « Je le désire mais c’est à lui d’oser, à sa manière et quand il le voudra ». Immédiatement, elle se dit que le plus tôt serait quand même le mieux. Oui, ce serait bien mieux. Ses objectifs sont confus, du moins sur le plan stratégique. Elle raisonne comme lors d’une partie d’échecs, est-ce vraiment bienvenu ? C’est elle. On ne peut tout le temps être imprévisible. Voilà pourquoi elle tremble toujours un peu. Non pas des frissons. Non. Elle a peur, peur d’elle-même, peur du passé… Une honte grandit aussi en elle. Moitié de femme désormais, est-il attendri par son allure ? Intimidé ? Compatissant ? Eprouve-t-il au pire de la pitié ? S’il la voyait nue, son coeur chavirerait. Non, elle ne peut pas lui imposer cela. Les pensées vont trop vite mais il est clair qu’elle se retient à cause de cela. Un joli manteau et un petit chapeau, qui la recouvre si imparfaitement, laissant aussi sur sa tête une touffe de neige, le papier ne suffit pas à masquer le contenu du paquet... Et si lui ne sait pas, elle a vu, déjà, ce corps dévasté. Avoir honte de soi. Le vrai handicap tient en un mot. On le porte tout autant que les personnes qui nous regardent. Ils peuvent bien s’interdire d’en tenir compte, on finit toujours par en arriver là. Ainsi jouera-t-elle sa carte auprès de lui, son coeur vient de le décider. Mais sans jamais utiliser ses meurtrissures pour infléchir les situations. Vois-tu les larmes sur mes joues ? Elle sont le produit de la joie, mon seul enfant. Circéia Sergeïeva Alekhina n’attend pas un train mortifère, ni un espoir qui la ferait souffrir. Elle aspire juste au bonheur. Et dans le vent neigeux, elle le sent autour d’elle, proche, insaisissable. Il suffirait de connaître le sort le mettant en bouteille, l’idée est belle mais on le sait tous, ce serait l’enfermer. C’est cela, elle ne doit pas emprisonner Hjúki, et si elle s’autorise la possibilité d’une résurrection, ce sera au prix d’une vie normale. Ou pas de vie du tout.

- Hjúki, s’il vous plaît, vous voulez bien m’aider à me relever ?

Dans ces cycles-là, éphémères, il faut être attentif. La jeune femme ne l’implore pas, son ton est dégagé, empli d’une forme de distance, comme on demande du sucre, attablés dans un petit salon de thé à Pré-au-Lard. La douceur illustre tout au plus son envie de rester en altitude. Et s’il ne se trompe pas, il entendra. Comme il faut.

Elle lève alors le nez et le découvre. Il a compris, proposant un marche pied. Les temporalités ne sont pas souvent les mêmes, il est même très rare qu’elles le soient. Circéia, la canne dans sa main droite, tend alors le bras gauche pour s’accrocher au cou du garçon. Il la hisse sans peine et sans la moindre éraflure. Cette fois, ils sont tous les deux en grand danger car leurs lèvres sont proches. A l’intérieur, autant dire que le bruit est assourdissant, et si elle ne tremble plus, elle sait la puissance de ses émotions. Sa tête tourne mais elle fait tout pour ne pas le montrer. Circéia croît cela dû à un corps rabougri. En fait, la faiblesse vient du coeur.



Diplômée de l’ISDM => naturellement charismatique.
Vivre sans faire de mal à personne qu'à moi-même...

31 janv. 2021, 18:52
 Edimbourg  Enthalpie  PV Hjúki Anastase 
Aurait-il dû ramasser la canne pour la lui proposer ? L’ébauche d’une interrogation de ce goût traverse l’esprit de Hjúki alors qu’il voit ce soutien boisé voler en direction de celle qui l’invoque. Leur négligence l’avait enfoncée de sable et de neige, en granulosités. Un bel et sombre objet, d’ébène comme le sont les fermes et longues touches des instruments à cordes frottés, le bois qui souhaite rimer avec solidité pour supporter les rapides martellements doigtés. Il le faut bien aussi pour compenser une fragilité de corps. Un premier appui, l’adolescent s’est déjà offert le second, devançant de peu la demande que formule alors Circéia. Prêts, pour s’élever ensemble. Appui à pression. Fermeté vacillante. Apparente stabilité. Leurs visages sont anormalement proches, alors que la jeune femme s’est hissée vers sa hauteur. Sur la même marche. Ils se tiennent, en une mystérieuse architecture, de celles dont chaque élément de construction est essentiel. Clef de voûte. Si retirée, tout s’écroule.

Immobilité. Dans le doute, l’on ne prend pas le risque de retirer une pierre de fondation. Palpitent. Avancer ? Reculer ? Concilier les élans contradictoires. Quoiqu’il en soit, une manœuvre particulièrement délicate et technique les met à l’épreuve. Exécuter la fin d’un pas de façon propre, sans élévation de poussière, sans le mat bruit sur la scène qui rompt l’instant de grâce. À l’inclinaison de la pirouette où il faut maintenir la force de toutes ses fibres pour ne pas s’effondrer. Garder le regard en face pour bien tourbillonner. Il ne semble être question que de quelques centimètres des deux côtés pour faillir en une toute nouvelle posture. Terpsichore, encore. Séductrice éternelle de son esprit, depuis qu’elle lui avait été présentée. Dans quelle esthétique dansent-ils ? Ces danses de cour qui donnent le beau rôle aux nobles ? Ces pas de deux de la glorieuse époque de la danseuse sur pointes, où le danseur n’avait vocation qu’à mettre en valeur sa légèreté, sa gracilité, à la soutenir avec fermeté dans ses ports sophistiqués ? Ou alors, le renversement des pas de deux à la Noureev, quand chacun des partenaires de danse s’épanouit dans ses moments de virtuosité, en perpétuel éloignement et rapprochement ? Danseur à la Noureev… se représenterait-il tel ? L’oserait-il seulement ? Un russe renouvela Garnier ; en retour logique, d’un séculaire écho du chorégraphe français Marius Petipa qui sauva le compositeur russe Piotr Tchaïkovsky. Piotr. Pierre. Gemmes. Émeraude-en-Diamant. Diamant-en-Émeraude. Leurs Joyaux sont autres mais pourraient s’immiscer, se mêler, se raviver leurs réciproques éclats.

Identité de gestes, symétrie, reflet. Pas en avant. À vous. Pas en avant. Est-ce ce à quoi il leur faut à présent incliner ? Il contemple la Noirceur d’Encre, brillante, non loin de coulante. Proches, trop proches. Pourquoi ne recule-t-il donc pas ? Puissance insoupçonnée, effrénée d’un magnétisme qui œuvre entre eux. Qui les fait plonger l’un en l’autre. Éclat irrésistible. Leurs eaux s’appellent. Deux surfaces très sombres et nuitées de mers. Élevés, mais en un lieu aussi ouateux, instable, insondable que les nuages. L’adolescent se sent nuageux, cotonneux. À cette distance minimale, Hjúki pourrait presque boire un souffle qui n’est pas sien. Il lui semble pourtant n’être jamais parvenu jusque-là. Une barrière invisible semble avoir été percé. Autour de chaque peau, une bulle protectrice, d’épaisseur variable en fonction de chacun, cherche à empêcher les intrusions malvenues. Si certaines vies animales sont des plus imprévisibles dans leurs mouvements, celles humaines savent se respecter. Pourtant, comment empêcher le choc de pôles aimantés ? Perpétuelle résistance. Épuisement, pour un peu. Intempérance à contrôler. À quoi point cette rencontre est-elle inéluctable ? Des picotements s’agitent. Sur sa peau, ou par une charge pesant en l’atmosphère ? Le jeune adulte ne parvient à percevoir s’il s’illusionne de sensations, ou si quelque magie incontrôlée serait en train de s’échapper. L’air est du moins électrique. Qu’elle recule. Qu’elle se détourne. Ou qu’elle s’accroche. Les eaux trop bouillonnantes se dissimulent sous la vapeur qu’elles provoquent. Recouvrant une bonne température, moins insondables, il sera possible de les goûter pleinement. Ils sauront.