Tu étais en marche vers le bureau de Miss Taylor. Ta Directrice de maison. Pour elle, tu devais sûrement être une simple élève indisciplinée comme tant d'autres. Mais toi, tu ne venais pas pour réclamer des choses , ou pour expier tes fautes. Tu voulais simplement lui parler. De toi. De tes agissements à Poudlard. Mais peut-être pas des choses que tu avais faites, comme ta rencontre avec Lily et Alicia, ou celle avec la Gryffone dont tu n'avais même plus le nom. De toute manière, elle le savait peut-être déjà.

Tu étais à présent à l'étage de la tour Nord où se trouvait le bureau de Miss Taylor. Un pas. Puis tu t'arrêtes. Tu ne sais pas si c'est une bonne idée. Tu ne sais pas comment elle va réagir. Peut-être va-t-elle juste te donner une bonne gifle pour ton impertinence, et prévenir tes parents. Ou plutôt va-t-elle t'écouter, avant de t'envoyer chez la directrice ? Qu'importe. Si ce n'est pas maintenant, ce le sera sûrement à un autre moment, pour une autre raison peut-être même. Deux pas. La porte n'est plus qu'à quelques mètres. Tu es collée au mur de pierres. Le couloir est vide, mais elle se trouve dans son bureau. À corriger des devoirs, ou à regarder une liste d'élèves perturbateurs, ou encore vérifier que Carry n'est pas en train de s' attaquer à un né-moldu. Trois pas. Tu es maintenant devant la porte. Ton souffle doux ne fais presque pas de bruit. Tu lèves ta main, puis la rabaisse immédiatement. Juste toquer. Une fois, deux fois, trois fois, et le tour est joué. Mais que vas-tu concrètement lui dire ? Tu ne sais pas. Mais tu sais simplement que tu dois lui parler.

Tu déglutis. *Un coup*. *Deux coups*. *Trois coups*
Elle devrait avoir entendu. Alors tu l'attend. Sagement.

J'espère que ça vous convient

La tête penchée sur les runes qu’elle nettoyait avec un soin particulier, Joanne avait mis sur son nez des lunettes fines qui lui permettaient de voir la moindre aspérité sur ses runes. Une rune qui se griffe un peu et la voilà passée de vie au trépas, remplacée aussitôt par une nouvelle version propre, linéaire, lisse. Satisfaite du travail accompli, Joanne allait s’arrêter quand quelques coups furent donné sur sa porte de salle d’étude. Arquant un sourcil face à la surprise, elle répondit machinalement « Entrez ! » avec une voix forte pour être entendue.

Il était rare que les élèves lui rendent visite le samedi, était-ce l’un de ses collègues qui souhaitaient la voir ? Il était étonnant que ce-dit collègue n’est pas choisi un autre endroit pour la voir. Monter jusqu’à sa salle de cours relevait déjà d’un petit miracle. Dans un fugace instant, Joanne se demanda si elle aurait plus d’élève dans son cours si sa salle avait été placé à proximité immédiate de la Grande Salle ? Néanmoins, elle n’obtient pas de réponse mentale, laissant donc cette interrogation de côté pour reprendre la plus importante du moment : qui se trouvait derrière la porte ? Le regard était vissée sur l’éventuel entrebâillement de la porte, peut-être en apprendrait-elle davantage ainsi ? Difficile à dire mais Joanne était très concentrée, à tel point qu’elle en avait oublié les lunettes sur le bout de son nez.

Tu sentais les battements de ton cœur s' accélérer au fur et à mesure que les secondes défilaient. Bien que seules quelques 5 secondes passèrent avant que Miss Taylor te dise d'entrer, tu eus l'impression que ce fut plusieurs minutes. Stressée, et intimidée, tu tentas de le masquer avant de rentrer dans le bureau. Qu'allait-il s' y passer ? Tu l'ignorais complètement. Dehors, tu entendais déjà les cris des élèves partis s' amuser dans le parc, et près du lac. Enfin, tu poussas la porte.

Le nez surmonté d'une paire de lunette fines, Miss Taylor semblait imposante, si bien que tu hésitas à t'enfuir à toutes jambes. *Ne t'enfuis pas* Des runes étaient posées sur son bureau, et tu te demandait si elle venait de les utiliser pour découvrir une prophétie quelconque. *Ça c'est en Divination ...* Tu tentas d'esquisser un timide sourire, mais il ne vint pas alors tu restas impassible. Comme elle ne t'avait pas indiqué un siège, pour que tu puisses t'assoir, tu restas debout, et lorsqu'une petite minute passa, tu te décidas enfin à briser le silence.


Tu espérais qu'elle ne te renverrait pas, et qu'elle ne te prendrai pas pour quelqu'un de narcissique ... Dans le doute, tu te permis de continuer.


Tu ressemblais sûrement à une fillette désespérée, qui tente de se confier à l'ange... Était-ce un ange, ou un humain comme les autres ?

« Erza McGowan, je vous en prie, asseyez-vous ». Bien sûr qu’elle la connaissait. Elle se devait de connaître au moins de nom, les élèves de sa maison. La mine soucieuse de l’élève intrigua sa directrice. Il n’était pas courant que les élèves viennent faire part de leurs soucis alors, quand c’était le cas, Joanne leur donnait une écoute attentive et active. Après tout, il était de son rôle d’entendre les doléances des élèves de sa maison. Et si elle pouvait leur être utile, alors il fallait le faire.

En l’occurrence, la jeune fille parlait d’un vide qu’elle ressentait. « Vous vous sentez vide ? ». C’était une question ouverte, destinée à faire parler l’adolescente. Après tout, sans plus d’information, elle ne pouvait pas vraiment la conseiller. « Asseyez-vous donc et parlez-moi de tout ça ». Joanne était toute ouïe. De par sa responsabilité de directrice de maison, elle était souvent amenée à devoir discuter de chose et d’autre avec les élèves de sa maison.

Et surtout, Joanne savait que l’adolescence était une période noire, où les idées pouvaient être dévastatrices. Il fallait être fin, vraiment à l’écoute. Pour éviter que certaines idées se concrétisent, pour que l’élève voit la vie différemment, il fallait être là, présent, presque à toutes heures du jour et de la nuit pour être bien. Ou au moins, plus serein.

Tu pris peur soudainement. Allait-elle te rejeter, ou t'enfoncer sans le vouloir ? Tu pris la chaise qu'elle t'avait désignée, et t'assis lentement. La pièce était intrigante. Sans être trop chaleureuse, tu lui trouvais un côté mystique qui te plaisait. Ta Directrice, tu la trouvais plutôt impériale, et intimidante. Tu ne la voyais jamais sourire, et tu te demandais intérieurement pourquoi. Avait-elle aussi des failles difficiles à refermer ? Mais tu ne t'attardas pas mentalement sur la question, tu n'étais pas venue pour elle, mais pour toi. Tu lui répondis :


Tu ne t'expliquais pas clairement, et ce serait normal si elle ne te comprenait pas, mais tu continuas tout de même.


Tu t'arrêtas afin de reprendre ton souffle, et te calmer. Tu espérais ne pas l'exaspérer avec tes propos, mais en même temps tu venais de tout déballer ... Certe pas en détail, mais bon. Tu attendis.

Joanne écoutait les propos de l’adolescente et se posait, petit à petit, des questions. Peut-être qu’elle ne les formulerait pas à voix haute, peut-être que si. Elle hocha la tête, signe de compréhension face au discours. Si elle entendait les failles et l’abîme du doute qui habitait la tête de la petite sorcière, elle ne saurait préjuger qu’elle peut en comprendre les tenants et les aboutissants. Mais il fallait montrer quelque chose.

« Vous vivez une période difficile. L’adolescence n’est guère qu’un passage entre l’enfance et le monde adulte. C’est … difficile, tout ceci, à gérer. La magie, les amis, le quidditch … Vous essayez d’être partout mais ne réussissez pas à vous trouver réellement ».

Elle hocha les épaules. « Malheureusement, je n’ai pas de solution miracle. J’aimerai en avoir. Pour vous et pour vos camarades. Mais si vous vous priviez de cette expérience que vous êtes en train de vivre, alors vous devrez l’affronter plus tard, en tant qu’adulte ». Joanne essayait d’avoir des mots simples et compréhensibles pour que la jeune fille puisse le comprendre. « Il faut laisser venir et vivre avec. Voyez ça comme une vague dans la mer. Peu importe la force avec laquelle vous luttez, le temps que vous passerez à lutter. La vague finira toujours pas vous submergez. Vous devez davantage apprendre à nager pour réussir à revenir à la surface une fois la vague passée. Ainsi, vous vous en trouverez plus sereine ».

Il était difficile de lutter contre soi-même, Joanne en savait quelque chose. Parfois, il fallait juste apprendre à lâcher prise.

Tu commençais petit à petit à te détendre un peu. Tu n'arrivais pas tellement à déceler si c'était de la bienveillance à ton égard, ou juste un devoir, mais cela te faisait plaisir qu'elle t'écoute ainsi. Tu attendais patiemment sa réponse. Mais le doute t'assaillit soudainement. Et s'il n'n'y avait pas de solution ? Si tu étais contrainte à continuer de lutter contre quelque chose d'invisible, d'impossible à toucher ?

Miss Taylor répondit par des phrases simples, mais dont tu ne parvins pas à trouver la solution à tes problèmes. Venait-elle de te répéter que tout était impossible à gérer, et qu'il fallait simplement attendre ? Par contre, tu avais aimé sa phrase qui parlait de la mer. De l'*Eau*. C'était poétique. Tu aimas tout de suite cette vision des choses. C'était beau. Tu t'imaginais alors, devant la mer, te faisant recouvrir par les vagues, avant que l'écume ne reparte se perdre dans l'abîme. Peut-être ne prenais-tu simplement pas la bonne route ? Fallait-il retourner au croisement, pour partir vers une nouvelle odyssée ? *Peut-être*. Dans ce cas, de quel instant faudrait-il reprendre ? L'*âme dans l'eau*. Âme.


Telle était la question. Te transformais-tu en dramaturge, comme l'illustre Shakespeare ? Sûrement pas, puisque tu ne savais déjà pas exprimer tes propres émotions, alors celles de autres, ce n'était même pas la peine d'essayer.

Mes excuses pour le retard !

La petite sorcière semblait plus mature que son âge pouvait le laisser présager. Mais, si, justement, elle était aussi mature, pourquoi ne voyait-elle pas ce que Joanne essayait de lui dire ? L’enseignante soupira. La discussion ne semblait pas mener là où l’enfant le voulait et, de fait, elle n’était pas d’accord – ou plutôt ne semblait pas voir – ce que Joanne voulait lui faire comprendre.

Joanne avait des phrases acerbes sur le bout de la langue. Mais elle les retenait fort. La patience avait laissé place à l’ennui. Non pas d’avoir une élève à réconforter, mais plutôt pour le fait d’avoir une élève qui pensait tout savoir mieux que tout le monde et qui venait tout de même réclamait une aide – qu’elle n’estimait sans doute pas nécessaire. Le serpent qui se mord la queue.

« Vous m’avez dit il y a quelques minutes que vous étiez vide. Comment pourriez-vous vous sentir submergée par le vide ? N’avons-nous pas la même définition de ce mot à 4 lettres ? ».
Elle leva les yeux au ciel devant son propre manque de retenue. Elle aimait aider les élèves dans la mesure où elle le pouvait. Ici, Joanne avait l’impression d’être face à quelqu’un d’obtus qui voulait entendre uniquement ce qui lui plaisait … et ça ne lui plaisait pas le moins du monde. Quand l’on demande de l’aide, il faut savoir entendre même les choses qu’on ne veut pas affronter.

Je déteste quand les adultes ne me comprennent pas — ce qui, ma foi, arrive très fréquemment. Elle fait donc parti de ma longue liste de *ceux-qui-ne-me-comprennent pas*. Quel dommage ! La conversation avait plutôt bien débuté pourtant... Elle croit que c'est moi qui suis tordue, et c'est sûrement vrai, mais elle pourrait se montrer plus compréhensive à l'égard d'une adolescente en crise. Peu d'adolescents ne font pas leur *crise d'adolescence* et je n'échappe pas à la règle. Bien évidement, je n'en prend pas conscience.

Maintenant, je ne sais pas vraiment quoi lui répondre. Oui je me sens submergée le vide. Vous ne comprenez pas ? Alors personne ne pourra me comprendre — la Gamine se renferme de plus en plus à ce que je constate... C'est bien dommage, puisque j'étais venue chercher des réponses ici. J'ai encore laissé une chance à une adulte, et encore une fois c'est un échec. De plus, je me rend compte que j'insupporte Miss Taylor. Ne serait-ce pas mieux d'en rester là ? Je n'ai pas d'idée de ce que je vais bien pouvoir répondre. Ce ne serait vraiment pas une bonne idée de commencer à critiquer les paroles de ma directrice de maison à voix haute devant elle qui plus est... J'avoue ne plus savoir quoi faire. Alors j'essaye de m'expliquer à moi-même ce que je ressens. *Être submergée par le vide. C'est lorsque tu as l'impression de ne plus vraiment ressentir les émotions comme avant. D'être en somme une sorte de fantôme. Mais qu'en même temps tu a l'impression d'être remplie de milliard de pensées*. Être claire et concise n'était décidément pas mon fort.

— Vous avez pourtant bien entendu... J'ai peur de ne pas arriver à vous expliquer de façon claire ce que je veux dire par être submergée par le vide.

J'essaye de garder un ton neutre, mais mon léger agacement se fait tout de même ressentir. Pour le coup, je suis bonne pour écoper d'une retenue... Quand ne me redis que tout avait bien commencé !

Oh mais Joanne savait très bien ce que signifier être submergée par le vide. Elle ne le dirait pas à la petite sorcière face à elle, mais il n’empêche qu’elle connaissait cette sensation de vague qui vient et qui emporte tout, vous laissant affreusement vide. Vide et triste. L’amertume sur le bout des lèvres de Joanne n’avait pas disparu. La jeune fille ne cherchait pas à comprendre, elle s’obstinait à ne pas vouloir voir plus loin que ce qu’elle pouvait voir ou ressentir ce jour-là.

« Je conçois que cela puisse être difficile, mais croyez-en l’expérience. Il ne s’agit pas de supériorité ici. Mais bien d’expérience de vie. Je vois que vous n’êtes pas prête pour cela, il n’est donc pas question de chercher à vous faire comprendre ce pourquoi vous n’êtes pas faite. Pour l’instant. Un jour, peut-être aurons-nous une conversation similaire, avec une finalité différente. »

Joanne s’était levée à mesure qu’elle égrenait les mots à destination de la jeune McGowan. Elle avait conscience d’être dure, mais on ne devenait pas professeure à Poudlard sans s’endurcir un minimum. Même si son cœur était extensible, elle ne pouvait pas se permettre de répondre à tout le monde. Davantage encore quand les personnes n’étaient pas prêtes pour entendre ce qu’elle pouvait dire.

Après de rapides salutations – suivi d’avertissement concernant sa salle de cours – Joanne s’éloigna doucement. Elle avait besoin de prendre l’air. Rien qu’un peu.

Fin du RP pour moi, merci !