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07 nov. 2021, 11:16
{ L'ébène et la Terre(eur) }  ++ 
Œuvre sans nom, Christophe Hohler



< Thème musical : Un peu de sang - Lomepal >



« Nil admirari »
________________


Hannah, 13 ans
13 Octobre 2046 [Après-midi]
Toilettes abandonnées, Poudlard


Avertissement : Pensées noires, idées suicidaires


Le frisson dans l'échine ; j'ai de l'humeur. J'en ai après tout : les cours, l'Amour, le château, les escaliers qui n'en font qu'à leur tête... J'en ai assez. Assez de me lever le matin lorsque le soleil apparaît, assez de me coltiner des journées de cours sans que ma concentration ne s'active, assez de ne pas être capable de gérer mes relations sociales sans que l'éloignement ne soit irrémédiable avec les mois, marre de courir après le temps. La vie fatigue mon Âme, j'arrive à saturation. Je ne peux plus rien supporter ; pas même un Murmure. J'ai besoin d'être seule. Besoin de m'évader. Alors je quitte le Flot de Semblables qui me répugne tant, et je file dans un lieu que je ne fréquente presque jamais : les Toilettes écrasées.

Sur le moment, je ne m'en rends pas vraiment compte, mais au fur et à me sure que j'avance, je me rends compte que je cours à moitié. J'ai l'impression que je ne contrôle plus grand chose. Zeus ! Que personne ne me voie dans cet état là, je l'en supplie. Je sens que mon cœur tente de s'extirper de mon corps tant il bat sous ma peau avec la force d'un bataillon. J'ai peur de ce que je vais faire. Quand ça commence à partir en vrille, plus rien n'arrête mes pulsions. Mon esprit tente d'affronter la Terreur qui prend possession de mon être. Cela faisait si longtemps que cela ne m'était pas arrivé... J'avais presque oublié cela. Mes mes démons sont toujours là ; prêts à me prendre par surprise.

Je me précipite dans la pièce plus que je n'y entre ; personne n'est là fort heureusement. L'effroi m'arrache quelques sanglots. Je tousse, je suffoque. Je n'ai même plus la force de penser que je dois être l'objet d'un triste spectacle. Je n'ai même pas la force de surveiller l'arrivée de possibles intrus. Je n'ai même pas la force de bouger ; je m'écroule par terre, Merlin. Comme une faible. Toutes les mauvaises pensées accumulées ces deux dernières années se marient dans un noir mélange — *du Goudron, bordel* — et je m'y noie la tête la première. Je pourrais mourir, si je le voulais. Des idées pour le faire me viennent à l'esprit. J'essaie de les chasser ; mais c'est comme si les Bras tentant d'éloigner le Corbeau étaient coupés à la source. Je suis impuissante. Avec le crâne bourré de pensées noires.

Je suis vraiment submergée, je m'en rends un peu plus compte à chaque seconde. Je me sens opprimée au point d'exploser sous le poids de la douleur qui déchire mon Âme. Je songe à souffrir de l'Extérieur ; *Peut-être que ça soignerait l'Intérieur*. Me vider de ce qui me ronge, pourquoi pas ? Je ne me suis jamais essayée à ce que je vois comme une façon de faire sortir cette bon sang de Douleur. Vais-je le faire. J'hésite. La tentation est forte. Mais dans un ultime tentative de la Raison, je me ravise.

Ce dernier effort a un inconvénient. La Raison, épuisée, n'est plus. Je suis laissée seule face à mes Erreurs, seule face à mes démons, seule face à mes souvenirs. En cet instant je ne sais plus si j'ai réellement envie d'être seule. Je suis si faible face à la Vague d'ébène qui est en train de déferler sur moi... Mais il y a mon orgueil. Et mon orgueil, lui, dit que je n'ai besoin de personne pour m'en sortir. Personne, à part Swann peut-être. Sauf que Swann n'est pas là. *l'est pas là* Je vais donc devoir batailler seule. En serai-je capable ? Je préfère écarter cette question loin de mes pensées.

J'essaie de m'assoir un peu plus convenablement, je ramène mes jambes contre ma poitrine. Des larmes dégoulinent sur ma robe de sorcière. Je suis minable. Est-ce que je vais m'en sortir, un jour, de tout ça ? Est-ce que les médecins au font, n'ont pas raison ? Suis-je incapable d'avoir le contrôle de moi-même ? Suis-je destinée au Gouffre si je n'accepte pas les mains qu'on me tend ? Je soupire. Tout cela me fatigue profondément. Je ferme les yeux.

J'vais m'en sortir.

J'vais pas craquer.

*Pas craquer*

Mais quelque chose me dit que j'ai déjà commencé à craquer. Et pas qu'un peu.

Plume de @Stella Ruewen

𐌔

07 nov. 2021, 13:05
{ L'ébène et la Terre(eur) }  ++ 
Stella Ruewen, 12 ans
[...] Et dans le bruit, je cours et j'ai peur [...]

Des couleurs. Des sons. Des images. Des idées. C'est trop. Trop. Alors elle hurle. C'est un cri silencieux. Mais qui résonne comme un glas. Tout a perdu son sens. Alors pourquoi continue-t-elle de voir des gens sourire ? Et être heureux ? Ils ne voient donc rien ? Ces Autres vivent leur vie et effacent les gens comme Elle. Elle se sent coupée en deux. Il y a Elle et il y a l'Autre. Mais les deux ne font qu'une. Stella Ruewen. Elle a entendu quelqu'un l'appeler comme ça. Donc, le monde ne l'a pas oublié ? Elle n'est pas un Oubli ? Apparemment.

Le Monde n'est que Brume. Celle-ci recouvre la vue de la jeune fille et la plonge dans l'Obscurité. Cette Obscurité qui mérite sa majuscule. Elle est tranchante. Vertigineuse. C'est comme une pente qui l'attire. Pour la faire sombrer. Loin de tout. Oh, comme ce serait agréable de tout abandonner et de se noyer.... Mais il y a Elle. Elles, pour être exact. Lydia. Iris. L'une comme l'autre sont des bouées. Des bouées de sauvetage.

Lydia. Elle est jeune, belle, forte. Mais elle est aussi seule, triste, sans sa grande sœur. Et sans protection. C'est pourquoi l'Aiglonne doit réussir. Elle doit Vaincre. Se sortir de là. Et partir, partir loin de tout. Mais où se réfugier ? L'eau ? Non, l'eau est douce et calme. Alors que Stella se sent comme une tempête. Les arbres ? Non. Avec leurs branches ils chantent une mélodie et apaisent les âmes tourmentées. Et son Âme à elle ? Pourquoi est-elle si abimée ? Que s'est-il passé pour qu'elle soit dans cet état ?

*STOP !*


Ne plus y penser. Rester loin de ça. Loin de tout. Alors. Où se réfugier ? L'eau et les arbres sont éliminés de la liste. La bibliothèque ? Non. Trop calme. Trop de joie. D'apaisement. Pour une Âme comme la sienne, mieux vaut de l'agitation. Mais alors....quoi ? La Foule ? Ce serait ça son refuge ? Elle qui est claustrophobe....voudrait s'enfermer ? Avec les Autres ? Et leurs visages radieux ? Non. Mais alors où ? Dans les bras d'Iris. Oui. C'est là qu'elle souhaite être. Iris. A sa pensée, son cœur chante. Des Ailes lui poussent et elle s'envole pour retrouver son Ange. Son Ange d'hier. Son Ange d'aujourd'hui. Son Ange de demain. Son Ange et ses cheveux de feu. Ses flammes pourraient surement l'envelopper et la bercer. Des hautes flammes. Comme une barrière. Une Protection. Ce dont Stella a besoin. Mais en ce moment, Iris n'est pas avec elle. Alors l'Aiglonne fuit. Loin. Loin des Autres. De leur joie. Un Oubli. Voilà ce que c'est.

Tap. Tap. Tap. Ses pieds frappent le sol à un rythme régulier. La pierre est Froide. Comme les Autres. Elle est indifférente à la Douleur. A la Colère. A la Tristesse. La pierre est là et elle ne bouge pas. Elle ne ressent rien. Comme Stella l'envie. Elle aussi a besoin de tout oublier. Elle a le visage en feu. De l'eau. Un demi-tour précipité. Une collision avec une armure. Vite, de l'eau. Mais où ? Les Toilettes. Sauf que... Claustrophobie. Puis la voix.

*Quoi ? T'as peur d'un lieu ? T'es ridicule !*
rire jaune
*Trop Faible. Trop Pathétique. Même pas capable d'aller dans des Toilettes !*

De la Provocation. Pourquoi pas. Mais c'est vrai. Elle se plaint de sa claustrophobie alors même qu'elle avait songé à rejoindre la Foule pour se cacher. Ridicule, en effet. Tap. Tap. Tap. La course effrénée reprend. S'arrêtera-t-elle jamais ? Non, probablement pas. Mais c'est ainsi. Vite, de l'eau. Sauveuse. Tap. Tap. Tap. Les muscles tendus. L'oreille attentive. Le souffle court. Pourquoi ? Elle se sent traquée. Comme une bête. Mais qui est le Traqueur ? C'est Elle. L'Autre Elle. Celle qui est faible. Celle qui attend, prostrée. Elle attend le Moment. Celui où elle rejaillira. Comme un serpent qui sort de son trou. Brusquement. Sans prévenir. Tap. Tap. Tap. De l'eau. Devant, elle, les Toilettes. Entrer. Pour ça, ouvrir la porte. Sauf que... Une Autre. Déjà là. Que faire ? Stella la dévisage.

Une Autre. Comment réagir ?

Plume de @Hannah Hardhoke, ravie de cette Danse. Tes Mots sont très beaux.

« Si elle joue tant avec le feu, c'est qu'elle s'est déjà brûlée. Et que, malgré la douleur, elle a aimé la danse de la flamme dans son cœur. » _ Myra Eljundir

14 déc. 2021, 17:50
{ L'ébène et la Terre(eur) }  ++ 
Je la vois apparaître, lentement. Mes sens sont tellement endormis que je ne m'inquiète pas tout de suite de cette présence. A vrai dire, je ne contrôle plus rien ; les mots qui pourraient sortir de ma bouche ne seraient pas les miens, ce seraient ceux de l'Autre Moi. L'Autre Moi, c'est cette bestiole immense qui me dévore l'intérieur — le cœur surtout — et qui, parfois, prend le contrôle de mon Être. Cette bête sombre m'effraie ; peut-on être effrayée par soi-même ? Je n'ai pas la réponse à cette question. Je laisse toute ces moisissures putrides en provenance de *j'sais pas où* s'échapper loin du noyau central de ma Pensée. C'est dérangeant d'être striée par la pourriture. J'ai l'impression de moisir en même temps que mes pensées.

Des larmes continuent de dévaler la surface lisse de mon visage. Mon regard est vide. J'attends. Je ne sais pas quoi. Je ne sais pas qui. J'attends. Et soudain, mon cerveau percute qu'une Semblable *bordel !* est face à moi. Je me répète intérieurement la chose. Un brouillard humide obstrue les cavités de mon crâne. C'est comme si on m'avait ôté toute ma capacité à raisonner. Zeus, c'est horrible.

« Q-Qu'est-ce que t-t'es venue foutre ic-ci ? »

Ma voix tremblote comme une peau saisie par le froid. Je n'ai ni le courage ni la force de m'en agacer. Je me recroqueville un peu plus sur moi même. Je ne sais pas trop à quoi m'attendre. Je ne me suis même pas attardée sur les traits de cette personne (je ne sais même pas si c'est une fille ou un garçon), je tente simplement de résister à l'envie de me laisser aller complètement. Je dois garder la face, même si j'ai les yeux trempés, même si Swann n'est pas là pour me dire que le Néant est un affreux personnage, même si Aristid n'est pas là pour me donner le sourire en racontant des bêtises. Je dois tenir, coûte que coûte.

Comment ai-je eu l'idée d'atterrir ici ? Après tout, j'aurais très bien pu aller me réfugier sous mes Draps-de-Mer dans le Dortoir, personne ne m'aurait dérangée. Là, je suis vulnérable, visible par tout individu pénétrant dans les Toilettes abandonnées. J'avais besoin de calme, je suis allée me fourrer dans l'endroit le plus répugnant possible et en plus, j'ai maintenant face à moi une fille qui me veux je-ne-sais-quoi. Ou peut-être ne me veut-elle rien. Ou peut-être veut-elle *bordel j'vais arrêter mes hypothèses*

Supposer, je ne fais que ça. J'ai la tête remplie de questions, comme le pluviomètre un jour d'orage. J'ai appris, au sommet de la Tour d'Astronomie, que ces questions n'étaient que des preuves que j'existais. Pourtant, dans ces moments où je descends dans les profondeurs de mon humeur, j'ai la furieuse impression que tout ce que j'ai appris n'existe plus. C'est comme si les paroles du Messager s'étaient par exemple évaporées d'un coup. Et ça me fait mal, parce que je ne comprends pas. Pour être plus précise, je ne comprends rien.

J'observe cette vague de tristesse qui s'échoue sur le sable de mon Âme. Comme les autres, elle est douloureuse et puissante. Comme les autres, elle ne fait qu'annoncer la suivante. Comme les autres, elle jette son écume de Colère sur les parois de mon esprit. Une Colère qui ne s'exprimera sûrement pas aujourd'hui ni demain. Comme ces Vagues, la Colère arrivera au moment où on ne s'y attend pas, au moment où la foudre tombe sur l'Âme dans un grand bruit, laissant cette Âme se fendre en deux comme un arbre décimé. Voilà ce qui m'attend, voilà ce qui attend les autres. De l'écume, débordant de ma bouche. Elle jaillira comme la flamme du cracheur de feu, elle sautera au visage comme un aigle saisit sa proie, elle sera mortelle comme la Vie que je mène. Je la sens déjà palpiter dans mon cœur, cette colère. J'attends ; encore. Et je tremble à l'idée de la personne sur laquelle s'abattra ce Fragment de Vague.

𐌔

31 déc. 2021, 14:56
{ L'ébène et la Terre(eur) }  ++ 
Quelque chose lui brûle la gorge. Quelque chose lui entame la peau. Quelque chose lui fait perdre la tête. Il lui faut de l'Eau. Cette Eau libératrice, puissante. Elle veut se noyer dedans. Oublier....quoi ? Tout ? Non, elle ne pourra jamais Oublier. Les Maux la retiennent luttant désespérément contre les Mots. Puis la Tempête reprend et les incertitudes la noie. Les Chaînes mordent sa peaux, provoquant une sensation de brûlure. Une brûlure ? Alors qu'elle se noie dans l'Eau ? Le Monde perd son sens. Mais la Brûlure est bien là, nichée au fond de son Cœur. Elle la tire depuis le jour ou Il est partit, l'abandonnant ainsi seule dans la Nuit. Oui, Il a quitté le Monde incertain pour passer dans l'Au-delà. La Barrière s'est refermée et Stella ne Le verra plus jamais.

C'est fini.

Il est partit et les Ténèbres l'ont avalé. Il est partie et l'a laissée toute seule dans la Nuit. Les Maux se sont abattus sur sa frêle silhouette blessée et le Feu l'a embrasé. Il est partit. Loin d'elle. A présent, l'Au-delà détient un bien précieux de la jeune fille. L'Au-delà l'a pris Lui.

C'est fini.

Une Autre. Les Larmes coulent sur son visage et son Regard vide hantera désormais les Cauchemars de Stella. Un Instant passe. Puis deux. Et ainsi de suite. Elles n'ont ni la force ni l'envie de parler. Pourtant, les Mots se battent et la Barrière cède. L'Autre ouvre la bouche et les Mots s'échappent, tels de vulgaires criminels. Mais les Mots sont plus que ça. Ils sont une Liberté. Un Espoir. Une Lumière. Les Mots brisent les Chaînes et sont le Vent qui porte ses Ailes entravées.

« Q-Qu'est-ce que t-t'es venue foutre ic-ci ? »

Sa voix tremble, vacille comme la Flamme exposée à la morsure du Vent. L'Autre se recroqueville et le Regard de Stella Voit. Elle Voit son reflet. Une fille Brisée. Les Eclats sont éparpillés dans sa tête mais c'est son Cœur qui encaisse les Echos. Les Mots des Autres sont blessants. Alors l'Autre a construit une protection. Solide comme du cristal et fragile comme de la glace. L'Autre a construit sa propre Prison. Elle s'est elle-même condamnée. Un rire sans joie s'échappe de sa bouche avant de se taire aussitôt. Ce que l'Autre a fait.... Stella l'a fait elle aussi. Alors pourquoi rit-elle ? Parce qu'elles sont idiotes. Elle se cachent mais les Maux sont mesquins, ils sont partout. Il sont Tout. Et elles sont Rien. Cette pensée frappe la jeune fille sur place. Elle vacille. Sa Flamme est aux prises avec le Vent. Mais elle tient bon.

- Je..., Sa voix se brise. Qu'est-elle venue faire ici ? Malgré tout, les Mots poursuivent leur chemin sans qu'elle puisse lutter. Je suis venue combattre ma Nuit. Pour détruire les Echos et pour libérer mes Ailes. Mais je n'ai pas réussi.

Les Mots qui se sont envolés n'avaient aucun sens. Pourquoi sont-ils sortis ? La jeune fille n'en a aucune idée. Mais ils sont sortis, et c'est Tout. Le Silence retombe. Pesant, il est sur ses épaules de la même manière que Sa disparition l'a accablée. Il est partit sans un bruit dans la Nuit noire. Le Feu de sa gorge ne s'est pas atténué. Au contraire, il grandit. S'approchant à pas feutrés avec une discrétion féline, Elle s'approche d'un lavabos et l'ouvre. Le Bruit brise le Silence qui tombe en Poussière. L'Eau coule à flot. Se baissant pour happer les gouttes tant désirées, Stella retient ses cheveux d'une main, s'appuyant sur le rebord du lavabos à l'aide de l'autre. Et l'Autre observe. Mal à l'aise, l'Aiglonne s'essuie la bouche et se laisse glisser au sol. Les Questions tourbillonnent. Que faire ? Que dire ? Dans cette situation, les Mots ne lui sont d'aucun secours. Le Temps s'écoule comme du sable. L'Âme de la jeune fille patiente, comme un animal. L'Autre finira par parler. Nul n'est plus patient qu'Elle. C'est Lui qui lui a appris à attendre. C'est Lui qui lui a tout appris de toute façon.

Une Question obstrue tout. L'Autre.... Pourquoi est-elle là ?

« Si elle joue tant avec le feu, c'est qu'elle s'est déjà brûlée. Et que, malgré la douleur, elle a aimé la danse de la flamme dans son cœur. » _ Myra Eljundir

17 janv. 2022, 18:32
{ L'ébène et la Terre(eur) }  ++ 
« 'tain... »

De la poésie pour peindre sa noirceur. Il ne manquait plus que ça... L'agacement étaient parfaitement perceptible dans ta voix. Tu n'en pouvais plus de ces gens qui édulcoraient la douleur lorsqu'ils la vivaient. C'était impossible d'avoir mal et de décrire ce mal avec autant de grands mots. La poésie des Semblables te donnait de l'humeur. Elle était si banale... On aurait dit des histoires pour des enfants de trois ans. *Dis ce que tu ressens vraiment, bordel !* Le principal problème de la souffrance, c'est qu'on ne sait jamais trop comment l'exprimer. Alors au lieu de dire les choses avec clarté, on utilise métaphores et allégories. Ce qui ne règle en rien cette souffrance ; la preuve, cette fille n'allait pas mieux en disant cela. Elle contournait faiblement sa douleur. *Comme m... non*

« Raconte pas des conneries de ce genre, j'suis pas d'humeur. »

C'était le cas de le dire. Si tu avais relevé la tête et que la boule de colère commençait à se vider, — il en restait encore cependant — le ton que tu employais était d'une couleur très sombre, sûrement allant vers l'ébène. Tu effleurais la méchanceté, mais ça te faisait du bien ; tu avais besoin de te défouler contre quelque chose. Finalement, ce ne serait pas toi mais cette fille. Bien décidée à te casser les pieds, visiblement.

Le frisson, qui revient ; les pensées aussi. *Merde...* Tu ne pouvais pas te permettre de craquer face à cette inconnue à qui tu venais de cracher des injures qui plus tard deviendraient remords. Tu ne pouvais pas car on ne s'agenouille pas devant celui qu'on bat. Pas plus que le Roi ne se soumet aux ordres de l'Esclave. Alors tes yeux quittèrent l'autre Bleue — sans que tu ne puisses savoir si c'était un aveu de faiblesse ou une preuve de ton désintérêt ; la deuxième option te rassurait bien plus — pour se poser dans un recoin abîmé de la salle : une plinthe que le temps et les humains avaient vandalisée. Tu te sentais proche de celle-ci car son histoire te ressemblait quelque peu. Tes yeux glissaient le long de la faille qui l'ouvrait en deux. Béante, la faille. Comme l'entaille qui découpait ton cœur en deux hémisphères. Du Nord au Sud, en passant par le Noyau, ton Cœur était le frère de Dédale. Impossible d'y retrouver quelque chose, toutes les étagères étaient renversées, et les souvenirs — livres dont les pages s'effritaient — s'écaillaient plus encore à chaque battement de ce qui fut autrefois un Lambeau. Ne l'était-il pas redevenu aujourd'hui ?

Absolument impossible de savoir quelle serait la réaction de cette inconnue face aux paroles que tu venais de lui balancer. Si elle agissait comme Bristyle, elle t'attraperait par le col et te règlerait ton compte. Si elle agissait comme la plupart des Semblables, elle lâcherait quelques larmes d'amertumes, ayant peut-être cru que tu lui viendrait en aide *n'importe quoi* Rien de plus imprévisible qu'un humain qui pleure. Tu guettais donc sa future réaction, prête à t'échapper de la pièce si l'envie prenait à l'intruse de t'écraser contre ce mur. De toute façon, tu en avais assez de cette odeur de moisissure qui s'insufflait dans tes narines, puis dans tes poumons. Mais pour le moment il restait un éternel obstacle devant la porte : la fille. Impossible de le franchir pour le moment ; l'attirer vers toi pour mieux prendre congé n'était pas une mauvaise stratégie, en soi.

La colère au bord des lèvres, il ne manquait pas grand chose pour que ta langue ne siffle encore une fois et ne projette des mots durs sur le visage d'une fille qui, après tout, n'avait rien demandé *c'est faux !* Dans ces moments où il faut se raccrocher à quelque chose de solide pour ne pas Tomber et rester en vie, tu avais le choix entre souffrance et méchanceté. A l'accoutumée, c'était la douleur vers laquelle tu te dirigeais, faute de trouver une personne à qui dire des horreurs. Mais aujourd'hui, tu avais trouvé une victime. Aussi innocente était-elle, elle allait payer pour tous les autres.

Se réfugier dans les bras de la Haine
Pour se débarrasser de sombres peines
Douleur ou douleur, l'issue est la même
Mais une Âme meurtrie ne craint point le blasphème.

C'est une enfant haineuse qui laisse éclater sa rage. Réfugiez-vous derrière les Buissons troués.

𐌔

30 janv. 2022, 20:05
{ L'ébène et la Terre(eur) }  ++ 
Elle avait raison. C'était elle la plus patiente et l'Autre a craqué. A moins que ce ne soit juste un Hasard, comme de ceux qui arrivent et qui peuvent tout chambouler. Un Hasard, comme de ceux qui arrivent et qui peuvent tout briser. *Le Hasard peut même briser une vie...* Le Hasard de cet instant fatal l'a brisée, elle. Et Lui. Une larme solitaire coule le long de sa joue. D'un battement de cil, la jeune fille ramène l'intrépide sur son cil et la condamne. Ce n'est pas le moment de s'attarder sur l'Ombre. Seuls comptent les Mots et la Valse infernale dans laquelle ils l'ont attirée. Puis la voix de l'Autre résonne dans la pièce. Encore une fois. Mais cette fois, elle est différente. Plus forte. Plus ferme. Le venin se fait sentir et touche droit le coeur de la Serdaigle qui tressaille.

« 'tain... »

Ce Mot la claque comme une gifle. Ce Mot la percute comme une vague. La Colère froide et bouillante brûle dans cet unique Mot. Une Colère aussi froide que la glace et aussi bouillante que la lave. Voilà sur quoi l'autre s'est rabattue. Elle se laisse dominer par la Colère, se laisse ronger par celle-ci. La Serdaigle sait que c'est son moyen de défense. Son moyen de repli. Sa protection. Mais l'Autre est aveuglée par ses sentiments. Elle ne voit pas plus loin que la Colère puissante, dévastatrice, destructrice même qui l'habite. Mais la voix réduit le filet d'Espoir qui se profilait à l'horizon à néants.

*Tu t'crois mieux ? Regardes-toi, tu n'es qu'une coquille vide. Brisée. Impuissante. Faible. Tu ne vaux rien.*

Les Mots s'attaquent à son coeur. A son esprit. A son âme. Stella aussi voudrait céder à la Colère. Mais la Colère mène à la Haine, la Haine mène à la Souffrance, la Souffrance mène à la Peine et la Peine conduit de nouveau à la Colère. C'est un cercle sans fin. Vicieux. Terrible. Comme un vortex, il aspire toutes les petites choses et les rejette en beaucoup plus grandes. La brune recule d'un pas et pose son regard vide de couleurs sur l'Autre. Le noir rempli son regard et ses pensées le sont surement tout autant. Le venin se profile à l'horizon et l'impuissance semble être de la partie. *Pourquoi tu fais ça.* Ce n'est pas vraiment une question. La jeune fille est consternée.

« Raconte pas des conneries de ce genre, j'suis pas d'humeur. »

Ça y est. L'Autre se déchaîne, envoie sa Colère contre Stella. Immobile, celle-ci absorbe tout. Telle une éponge, elle ne cille pas. les Mots de l'Autre rebondissent sur sa Prison de larmes. De douleur. De haine. Cette dernière est vive. Elle brûle ardemment, tel un feu qui jamais ne s'éteint. Et elle est aussi dangereuse qu'une vraie flamme. Peut-être même qu'elle l'est plus. Mais qu'importe. La Vie ne vaut rien. C'est ce que lui a appris la Faucheuse de Vie. Si la Mort n'a pas de pris, alors la Vie n'a pas de valeur. Des Mots oubliés dansent dans l'esprit de la fillette. Et de nouveau, la Voix recommence. Encore.

*Tu ne peux sauver la vie des gens, tout comme tu es incapable de sauver les gens de la Vie. Alors laisse-les. Ils t'ont abandonnée parce que tu ne valais rien. *

Douloureusement, ces Mots plein de Haine et de Désespoir se creusent un passage dans la Serdaigle. Mais quelque chose d'autre se forme. Et sa voix part sans qu'elle puisse la retenir.

- Tu t'trompes. Placer des Mots sur ce qu'on ressent c'est pas une connerie. C'est un moyen de se reconstruire tout en sombrant.

Les Mots s'échappent de son être. Chargés de colère, de tristesse, de douleur, de peine, de souffrance, de haine, d'incompréhension. Et ils frappent avant de battre en retraite. Ils sont de plus en plus violents, chargés de reproches que la fillette aurait aimé adressés à ses parents.

- Tu te rabats sur toi-même et tu restes prostrée comme une bête blessée ! A présent, la petite crie. Si tu veux avancer dans ta vie, faut que tu regardes au dessus de ce que tu vois bordel !

Les larmes se sont mises à couler. De plus en plus nombreuses. Puissantes. Dévastatrices. Stella n'en revient pas d'avoir parlé ainsi à l'Autre. D'avoir partagé sa peine aussi librement. De lui avoir permis de Danser sur la pistes de lames en sa compagnie. Mais c'est trop tard. Une fois que les Mots sont sortis, rien ne les ravale. Désormais, seul le Temps peut arranger ce qui a claqué dans l'air. Epuisée, Stella se laisse glisser au sol. Elle attend la Tempête. Celle qu'elle a elle-même provoquée. Celle qui va achever de la détruire. Une fois abandonnée au sol, de nouveaux Mots passent la barrière de ses lèvres et viennent s'échouer dans la pièce. Des Mots beaucoup plus doux. Des Mots qui soulagent la peine, la douleur, la haine, la colère, la tristesse, l'angoisse.... Tout ce que la Première Année a ressenti un instant plus tôt. Ces Mots bercent son coeur, se lovent autour et lui chantent une mélodie.

- Quelqu'un m'a dit que la chute n'était pas un échec, que l'échec c'était de rester là où on est tombé... Mais en fait, l'échec c'est de se laisser dominer par le monstre qui dort en nous...

Doucement, la fillette se balance d'avant en arrière en fredonnant une mélodie. Une mélodie entendue dans un film Moldu. Stella ne se souvient ni du titre ni des paroles exactes. Mais elles sont là, lovées autour de son cœur. Une douceur inattendue arrive et remplace la douleur qui se trouvait là. La paix forme une protection autour de la fillette et les émotions qui s'échappent de l'Autre rebondissent dessus. Une solitude apaisante tombe sur la gamine. Elle pose ses mains sur le sol glacé et savoure ce contact privilégié. Elle ravivera la flamme plus tard. Pour le moment, son combat est terminé et la Serdaigle se sent happer par les Ténèbres. Le Sommeil l'attire mais Stella ne veut pas rater la réaction de l'Autre.

Alors elle attend. Comme toujours.

Plume, désolée pour ce pavé. Les Mots se sont écris à mon insu,
j'ose espérer qu'ils toucheront ta gamine.

« Si elle joue tant avec le feu, c'est qu'elle s'est déjà brûlée. Et que, malgré la douleur, elle a aimé la danse de la flamme dans son cœur. » _ Myra Eljundir

13 mars 2022, 17:17
{ L'ébène et la Terre(eur) }  ++ 
*Ah ouais, j'me trompe ?* Tu te faisais corriger par cette gamine et tu comptais bien te venger. Quoi, on t'humiliait gratuitement, alors que la douleur se propageait dans ton corps comme un poison puissant, un poison nommé angoisse ? Tu n'allais pas laisser passer un pareil soufflet sans jeter une réponse digne de ce nom à l'intruse. Quoique jeter ne fût pas le terme adéquat ; on eût du lui préférer le verbe cracher. Lui cracher à la figure toute ta rancœur comme si la haine devenait postillon, avec un regard noir-corbeau, qui ne vacille aucunement et qui plante son bec dans l’œil vaincu de l'interlocuteur (l'interlocutrice, ici).

Tu laissas défiler des pellicules de mots en attendant fumante la fin de ce supplice. Les injonctions n'en finissaient pas ; voilà ce qu'était cette fille : une donneuse de leçons. S'il y avait bien une espèce de Semblables que tu exécrais au sein du château, c'était celle-ci. Il y en avait à souhait entre les Murs de Poudlard ; une vrai tribu de fourmis prête à mordre le moindre passant, le moindre désespéré. Ils prenaient leurs grands airs de spécialistes, chantaient avec leurs clarinettes-à-mots des mélodies puantes et impétueuses, pire que des psychologues, pire que les autres Semblables. Car ils ont au moins une qualité, ces autres Semblables ; depuis leurs piédestal ils ne voient pas les souffrants et, par conséquent, les laissent tranquilles.

A quoi bon lutter, finalement ? Il est des luttes perdues d'avance, reconnaissons-le. Inutile de se bercer d'illusions qui, une fois le chemin emprunté, mènent tout droit au Gouffre. Même si le Gouffre, te semblait-il, tu y étais déjà. Mais tu remontais peu à peu la pente. Tu avais trouvé la force de parler, de t'armer de colère, de ruminer ta vengeance. C'est avec cette même force que tu te levas brusquement, prenant le soin d'attraper au passage ton sac et de le mettre en bandoulière. Tu comptais désormais trouver un véritable refuge, où personne ne pourrait te déranger : ton lit, au sein du Dortoir couleur bleue, bleu comme le soleil, bleu comme ton corps, bleu comme ton cœur. Restait à écarter courtoisement de ton chemin l'autre Bleue ; il ne s'agissait pas en effet de coller une gifle à cette fille. N'était-ce pas lui accorder une trop grande importance que d'user de tes mains moites pour la toucher, — violemment, certes — pour sortir l'arme de ton fourreau, au risque de se faire sanctionner — car rien ne prouvait qu'en plus d'être une donneuse de leçons, cette fille n'était pas également une balance (tu détestais ce mot vulgaire et fade tant employé par les Semblables, mais ce fut le premier qui te vint à l'esprit) ? Par ailleurs, tu savais fort bien qu'une gifle est une trace qui ne s'efface pas avec le temps. Si cette petite impertinente de Jones t'avait appris quelque chose, c'était bien cela : la violence d'une claque ne dépend point de sa force mais de son intention. Elle grave au fer rouge, sur la joue et sur l'âme, une écriture pourpre, indélébile, qui crie à qui veut l'entendre que vous êtes faible. Qu'on vous a jeté dans l'opprobre. Alors tu laissais aux misérables la possibilité d'user de cette arme destructrice. Car tu avais un cœur, sous cette peau qui recouvrait péniblement tes os.

« J'ai pas besoin de tes conseils. Maintenant, si cela ne te dérange pas, j'aimerais pouvoir sortir. »

Ta voix était un cocktail qui assemblait noir et rose ; dur et courtois à la fois. Il fallait ces deux couleurs pour passer cet obstacle. C'était comme si tu montais à cheval ; douceur et fermeté. Tu refermais tes doigts autour de la bretelle de ton sac, — l'autre pendait, libérée de toute contrainte — animée par une sensation mêlant peur et détermination. *J'vais sortir, j'vais sortir* te répétais-tu sans grande conviction. Cette fille semblait avoir un bon potentiel pour prendre le rôle d'une personne qui sait (personne qu'elle n'était pas). Tu ne souhaitais pas demeurer une seconde de plus en sa compagnie. Il était grand temps de rejoindre le cadre rassurant de la Maison Serdaigle.

Plume, ne réduisons pas les Mots à une quantité ; qu'il y en ait trente ou mille, ce qui compte, c'est ce qu'ils nous font Ressentir.
Hannah n'est hélas pas très réceptive à ce genre de discours ; Stella aura eu le mérite d'essayer. Oh, mais je m'avance peut-être un peu... Hannah n'a pas encore quitté la pièce ; peut-être qu'elle pourra jouer sa dernière carte (ou pas)

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