« C’est quoi l’hardiesse ?, questionna Bad. »

Depuis qu’ils étaient sortis de Gringotts, les pensées du Serdaigle tournaient en boucle sur cette question. Le dernier vers du poème présent sur la large porte en argent de la célèbre banque des sorciers était à l'origine de l'interrogation de Bad. Ce n’était pas la première fois que le garçon pénétrait dans Gringotts et pourtant, il n’avait jamais pris le temps de comprendre le sens de la mise en garde. Madenn, surprise de cette question qui arrivait sans prévenir, prit un instant de réflexion.

« – L’hardiesse ? C’est faire preuve de courage mais d’une manière intrépide, téméraire. C’est une des caractéristiques de la maison Gryffondor. Tu n’as pas vu cela en histoire de la magie ?

– Mmmmm, d’accord. Si, sûrement. »

Bad n’était pas convaincu par l’explication de sa mère mais n’étaya pas davantage ses réflexions. Madenn sentit que la réponse qu'elle avait apportée n’avait pas atteint sa cible et il lui fallut quelques secondes pour comprendre ce qui pouvait déranger le garçon.

« – Si tu me poses cette question par rapport au message de Gringotts, il faut que tu prennes en compte ce qui est écrit juste avant. Bad leva de grands yeux verts vers sa mère. Elle avait vu juste. Si je me souviens bien, le poème finit par ‘le châtiment de ta folle hardiesse’.

– ‘Juste châtiment', corrigea Bad.

– Oui voila, ‘le juste châtiment de ta folle hardiesse’. Associée à la folie, l'hardiesse n’est plus forcément une qualité. Madenn dirigea un regard appuyé sur son fils. C’est comme la curiosité de Serdaigle qui peut devenir un défaut quand certains de ses élèves se mettent à chercher leurs cadeaux partout dans la maison …

– C’était rien qu’une fois … Je n'ai ouvert qu’un seul paquet et je l’ai refermé aussitôt. Troublé par le fait que son méfait ait été découvert, Bad avait baissé la tête pour fuir le regard de sa mère. Mais … comment tu le sais ? »

Madenn haussa les épaules en levant ses paumes de mains vers le ciel. Un doux sourire se dessina sur le visage de la femme qui n’en voulait pas à son fils pour cette curiosité enfantine.

« Secret de maman. »

Bad copia le sourire maternel, heureux de ne pas s’être fait disputé et fasciné par les dons d'enquêtrice de Madenn.

Mère et fils continuèrent leurs achats chez Tissard et Brodette où Madenn s’offrit une belle robe de soirée noire. Une tenue à l’opposé des vêtements simples qu'elle portait habituellement mais Bad ne lui en demanda pas les raisons. Il redoutait la réponse. Une trentaine de minutes plus tard, ils ressortirent de la boutique avec un nouveau sac sur le bras et se dirigèrent vers la papeterie Scribbulus Everchanging Inks. Le Serdaigle espérait y trouver un cadeau pour sa mère et ne souhaitait pas sa présence pour ces emplettes. Devant la boutique, il s’arrêta donc pour faire face à sa mère.

« – Est-ce qu’on peut faire un peu les courses chacun de notre côté et on se retrouve là dans une heure ?

– Oui, on peut faire cela. Il sera pratiquement l’heure de déjeuner donc on s’attend devant le Chaudron Baveur. Pas de bêtises, hein ! »

Ce n’était pas une question mais une directive claire. Tandis que Madenn s'éloignait, Bad chuchota en imitant la voix de sa mère.

« On ne casse rien, on est poli et surtout on ne va pas dans l’Allée des Embrumes ! Oui, oui ... »

Bad savait explicitement ce que Madenn attendait de lui. Pourtant respecter ses consignes, c’était une autre histoire.

Poussant la porte grinçante de Scribbulus Everchanging Inks, Bad salua le gérant avant de se diriger vers une armoire contenant une collection impressionnante d’encres magiques.

A dix heures passé de quelques minutes, la fratrie O'Belt avait transplané en direction du Chemin de Traverse. Escortée par Diarmuid, Ennis avait grommelé quelque chose sur son absence de baguette en arrivant sur place. Elle détestait cette sensation de sortir sans sa baguette, se sentait particulièrement vulnérable. L'aîné avait regardé le second qui avait ostensiblement détourné le regard. Il ne rentrerait pas sur cette pente glissante en plein milieu de la rue commerçante et surtout pas devant leur sœur. La dite sœur, elle, s'imprégner de l'esprit de fête qui s'était emparé de l'allée, les décorations étaient partout sur les devantures comme les éléments de la rue. Un peu comme à Poudlard où même les armures revêtaient des habits de fête. Les trois jeunes gens commencèrent à remonter la rue et, en passant devant la ménagerie, le plus âgé informa ses cadets qu'il allait chercher de quoi ravitailler leurs trois rapaces. Les deux plus jeunes continuèrent leur route et très vite, l'attention d'Ennis fut attiré par le magasin de papeterie.

- "On peut?" Demanda la cadette qui commençait à manquer cruellement de parchemin pour ses lettres. "On trouvera peut être des parchemins à en-tête pour Diarmuid." Le plus grand de ses frères sourit, sa benjamine avait toujours des idées qui sortaient de l'ordinaire, des idées pertinentes. Ça compléterait bien leur cadeau initial qui consistait à faire de la garde robe de leur frère quelque chose de pratique pour son cruel manque de goût.

- "Tu vas les chercher où tes idées?" Demanda Dom avec un sourire en poussant la porte. L'air chauffé de la boutique les saisit et l'irlandaise dessert l'écharpe de Poufsouffle qu'elle portait autour du cou. Les deux O'Belt se dirigèrent vers l'espace dédié aux lettres, enveloppes et autres parchemins spécialisés. La cadette trouva sans mal ce dont elle avait besoin pour elle alors que son frère sélectionnait quelques exemplaires qui pourraient convenir pour Diarmuid. L'adolescente donna rapidement son avis et il ne fallut guère plus de quelques minutes pour faire leur choix avant de se diriger vers les encres. Ennis en souhaitait de plusieurs couleurs pour prendre des notes. Et, en arrivant devant les étagères, elle reconnut sans grandes difficultés le garçon qui se trouvait devant. Bad. Dom se tenant en retrait, elle s'avança et se plaça à ses côtés:

- "Salut Bad, tu vas bien?" Lui demanda-t-elle en lui faisant un léger sourire. Et, tout juste après cette question, elle sentit un main sur son épaule. C'était Domhall qui lui disait dans leur langue maternelle, penché sur son épaule:

- "Je te laisse ça," il lui donna une bourse qu'elle sentait généreusement garnie, "je vais payer ce qu'on a. On se retrouve devant Mme Guipuire vers midi?" Ennis lui servit un grand sourire en acquiesçant et son grand-père frère se dirigea vers le comptoir.

- "Tu sembles hésiter." Dit-elle au Serdaigle en mettant la bourse dans la pochette interne de sa cape.


Les dialogues entre Ennis et ses frères sont en irlandais. Avec Bad en anglais.
Bad et Elowen, en particulier puisque vous êtes de la même maison, Domhall était à Poudlard à Serdaigle pendant vos trois premières années, vous pouvez être en mesure de le reconnaître si vous êtes physionomistes.

Caleb avait décidé d’emmener sa fille sur le chemin de traverse pour quelques achats de dernière minute. Ils avaient fait plusieurs boutiques, et Orphéa avait finalement trouvé tout ce qu’elle voulait. Elle avait même remarqué une petite affiche qui annonçait un atelier de création de baume pour les mains chez Apotic'Herbes le lendemain et elle comptait bien y traîner sa mère pour y participer. Et alors qu’ils sortaient de chez Madame Guipure, son père fut accosté par un ancien camarade de l’ISDM. La brune se présenta et partagea quelques courtoisies avec l’ancien ami de son père, avant que celui-ci ne commence à lui demander des nouvelles. En plus d’être très longue, la discussion commençait à devenir ennuyeuse. Les politesses sur la famille s’étaient transformé en jargon professionnel incompréhensible. Orphéa commença à regarder autour d’elle. Les gens, les décorations de Noël, les vitrines, Bad... Bad ? L’opportunité était trop belle. Le Serdaigle passait la porte de Scribbulus Everchanging Inks. La jeune fille se tourna vers son père, attendit qu’il ait terminé sa phrase et tira la manche de son manteaux pour signaler qu’elle voulait lui parler.

« J’ai vu un ami la bas, précisa-t-elle en indiquant la papeterie d’un mouvement de tête. Je peux aller lui dire bonjour ? »

« Oui bien sûr, dit-il en jetant un coup d’œil à sa montre. N’oublie que l’on rentre dans une heure. Je te retrouve devant le chaudron baveur »

La Serpentard remercia son père et salua son ami acvant de se diriger d’un pas rapide vers Scribbulus. Elle serait mieux à rigoler avec Bad qu’à écouter les conversations ennuyeuses des adultes. Elle poussa la porte de la boutique et après avoir fait le tour de quelques rayons, elle l’aperçut devant une grande armoire. Elle s’approcha et quand elle fut a bonne distance elle le salua.

« Holà Bad ! Cómo estás ? Lança-t-elle avant d’apercevoir la préfète de Gryffondor. Salut Ennis ! Vous faites vos derniers préparatifs pour Noël ?  »

Et alors qu’elle écoutait la réponse de ses camarades, elle remarqua Megan à qui elle adressa un signe de la main accompagné d’un ravissant sourire. Elle était accompagnée d’une autre fille dont elle ne voyait pas le visage.

Sur le flacon que tenait Bad en main, les écritures de l’étiquette passaient du violet au rouge en prenant successivement toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Sympa ! Le garçon avait très envie d’acheter cette encre pour sa mère mais les deux Gallions demandés le refroidissaient. Paume ouverte, il comptait les tristes pièces qu'elle contenait. Treize Mornilles et vingt-deux Noises, quatorze Mornilles et vingt-deux Noises. Quin …
Une voix derrière lui fit sursauter le Serdaigle qui lâcha quelques pièces de monnaie par terre. Ennis O’Belt se tenait à ses côtés avec un sourire poli sur le visage. Le garçon, surpris mais surtout ravi de croiser la Gryffondor en dehors du château, se baissa pour ramasser l’argent tombé au sol.

« Oh, salut Ennis ! Tu m’as surpris !, répondit-il en se redressant et en glissant sa monnaie dans la poche de sa robe dans un tintement métallique. »

L’adolescent ne put s'enquérir des raisons de la présence de la cinquième année. En effet, un garçon plus âgé se pencha vers elle pour lui donner quelques informations en irlandais. C’était une langue que Bad maîtrisait parfaitement même s’il perçut ici un accent dans les paroles de celui qui s’éloignait désormais. Son visage ne lui était pas inconnu mais il fallut à Bad un peu de temps pour identifier l’ancien Serdaigle. Domell, Domon, quelque chose comme cela. Était-ce le frère d’Ennis ?

Alors qu’ils n’étaient plus que tous les deux et que Bad tenait toujours fermement le flacon d’Arc-encre-ciel entre ses doigts, le garçon fit une légère moue.

« Oui, j’hésite à acheter ça pour ma mère. Il tendit le bras en tournant l’étiquette vers la Gryffondor et ajouta. Tu penses que ça vaut le coup ? J’ai un peu peur que ce soit de l’arnaque ce truc. »

Quelques secondes après et comme si les élèves de Poudlard s’étaient donnés rendez-vous, Orphéa débarqua derrière Ennis. Bad, tout sourire, lui adressa un signe de la main.

« ¿ Muy bien y tu ? »

La Serpentard partageait avec Lilly Zarbi et lui des cours d’espagnol en vue de pouvoir communiquer avec leurs correspondants AMICO. Ils avaient fait d’énormes progrès même s’ils n’en étaient qu’à des phrases simples et avec peu de vocabulaire.

« Oui, il me reste encore quelques cadeaux à faire mais je crois que je vais manquer d’argent pour tout acheter. Il ajouta sur le ton de la plaisanterie. Peut-être que je vais devoir voler quelques trucs discrètement ! »

Après cette boutade, il vit qu’Orphéa hélait quelqu’un. En penchant la tête sur le côté, Bad reconnut Megan et Oxy, deux élèves de quatrième année, qu’il salua à son tour. Le Serdaigle remarqua que toutes ces personnes étaient présentes un mois plus tôt dans la bataille d’eau initiée par Elowen. Drôle de coïncidence.

- "Désolée," s'excusa l'adolescente en remarquant a quel point le Serdaigle avait été surpris qu'elle vienne l'accoster et en avait fait tomber sa monnaie. Le temps que son frère lui parle, le garçon avait tout récupéré et même eut le temps d'observer le jeune homme un court instant. Ennis hésita à préciser qu'il s'agissait de son aîné avant de se raviser. Ce n'était pas d'une importance capitale et puis, son camarade lui demandait son avis sur tout autre chose:

- "Si ta mère aime utiliser de l'encre pour des créations, je te conseillerais plutôt les assortiments de couleurs." Elle montra de la main la partie droite de l'étagère où de petites boîtes renfermaient de quatre à douze fioles petit format d'encre de couleur différentes. "Je ne suis pas sûre du comportement dans le temps de ce type d'encre changeante. Et elle pourra créer des couleurs avec ça." Répondit Ennis sans mentionner qu'une boîte de six petites fioles - à lui de voir quelles couleurs l'inspiraient - lui reviendrait un peu moins cher que l'arc-encre-ciel. En effet, une Serpentard un an plus jeune arrivait par derrière elle en les saluant.

- "Bonjour Orphéa. Pour Noël et l'anniversaire de mon frère aussi." Confirma-t-elle en pensant au plus vieux de sa fratrie qui aurait un an de plus le trente. Puis, profitant de la plaisanterie du Serdaigle elle attrapa cinq fioles d'encres pour elle même - deux noires pour écrire, une bleu, une rouge et une verte pour ses annotations et autres méthodes de révisions: "Et du stock pour les cours." Dit-elle en se retournant pour voir d'une part qui la plus jeune appelait mais aussi Domhall quitter la boutique en s'excusant auprès des nouvelles arrivantes puisqu'il devait passer entre elles pour accéder à la sortie.

- "Salut!" Accueillit Ennis les deux autres tout en denouant l'écharpe de Poufsouffle qu'elle portait, c'est qu'il faisait chaud dans la boutique.

Oxy était contente d'avoir retrouvé Megan sur pour ce marché de Noël. Elle avait bien espéré que ça arriverait quand elles en avait parlé la veille. Et d'autant plus alors que sa mère l'avait épuisée avec ses "Mais si cette robe t'irait tellement bien, regarde la couleur fait ressortir tes yeux". Ses yeux étaient très bien où ils étaient, merci bien. Et puis elle n'avait pas besoin de robe. Pour faire quoi ?

Bref après une éternité dans des magasins surchauffés et pleins de pépiements excités, la Gryffondor avait enfin gagné une heure de liberté avant de la retrouver pour manger au Chaudron Baveur. Fuyant plus ou moins discrètement Ali Baba où sa mère pouvait traîner indéfiniment, elle était tombée sur son amie et avait suivi celle-ci jusqu'à la papeterie Scribbulus Everchanging Inks.

Elle laissa passer un jeune homme avant de se faufiler à la suite de la Poufsoufle. Elle dû se décaler pour y voir quelque chose et son sourire s'élargit en reconnaissant ses camarades ! Elle leva la main pour leur faire signe tout en saluant poliment le gérant puis s'immobilisa. Il y avait un truc qui n'allait pas avec Ennis mais quoi ?

Elle s'approcha, la dévisageant pour tenter de comprendre ce que son cerveau avait vu mais pas elle. Puis quand le préfète commença à dénouer son écharpe Oxy tilta :
"Ennis ? Mais ? Pourquoi tu as une écharpe Poufsouffle ?"

Face à cette encre magique que Bad craignait être un attrape-nigauds, Ennis le conforta dans cette idée. Elle l’orienta davantage vers un assortiments de couleurs. Du classique. Cela perdait en originalité, certes, mais en jetant un coup d'œil au prix affiché sur une étiquette jaunie par le temps, le garçon reposa rapidement l''arc-encre-ciel' sur son étagère pour se saisir d’un joli lot de six flacons.

« Oui, je vais prendre ça du coup., répondit Bad en scrutant les encriers sous toutes les coutures. Maman sera contente je pense. Merci du conseil ! »

Lorsqu’Ennis rebondit sur sa blague, Bad lui adressa un petit sourire complice mais fut rapidement happé par l’écharpe de la Gryffondor signalée par une Oxy visiblement surprise. Le Serdaigle écarquilla les yeux mais ne dit mot. La dernière fois qu’il avait osé parler de trahison de maison lors d'un match de Quidditch, Bad avait fini par le regretter. Cela avait néanmoins eu le mérite de lui faire ouvrir les yeux sur certaines choses.

Cette fois-ci, il se tint bien de garder sa langue au chaud au fond de sa bouche. Bad se déplaça délicatement aux côtés de Megan, légèrement en retrait, et se contenta d’assister à la scène. Son lot d'encriers en main, il scrutait avec une attention particulière la réaction d’Ennis. Était-ce un cadeau de Jeffrey ?

- "Y'a pas de quoi!" Répondit Ennis au Serdaigle qui choisissait finalement six fioles d'encre à calligraphie et dessin. Puis après échange de regard sur la blague du garçon et avoir saisit ce dont elle avait besoin, elle salua Oxy et Megan avant de laisser un sourire barrer ses lèvres. Soit elles ne savaient pas pour Jeffrey et elle - mais elle n'y croyait pas, elle en avait déjà parlé à Oxy, et puis ils ne se cachaient pas -, soit elles n'avaient jamais entendu parler de s'échanger des écharpes dans un couple d'adolescents de Poudlard. Ils n'étaient pourtant pas les seuls à suivre cette habitude. Elle en avaient déjà vu plusieurs procéder ainsi avec des écharpes ou des pulls, notamment sur les jours sans cours.

- "C'est le nouveau système d'échange inter-maison. Il doit se mettre en place à la rentrée. On m'a demandé d'aller à Poufsouffle quelques semaines. J'essaie de m'habituer." La préfète était clairement d'humeur taquine et elle se demandait qui des quatre autres étudiants allait la croire. En les regardant, elle se dit que son ancien collègue ne suivrait pas l'énorme strangulot qu'elle venait de lâcher dans la boutique. Il semblait plus curieux qu'autre chose de ce qu'elle faisait. Concernant les trois filles... Oxy serait peut être crédule. Orphéa, bizarrement elle y croyait moins. Quand à Megan, elle n'en avait aucune espèce d'idée.