La journée avait été particulière en ce premier vendredi en tant que professeure pour Sixtine. Elle avait donné un cours au troisième année ce matin puis, elle ne s'était pas rendue au repas du midi pour pouvoir s'entretenir avec une de ses élèves qui avait un membre de la famille Harrison pour Epouvantard.

Elle avait ensuite passé l'après midi à prendre des notes sur son carnet de parchemin, à peser le pour et le contre de la situation. Elle avait noté tout ce qu'elle avait retenu de l'histoire : Enfant Harrison - Agression sur un né moldu de l'école - Cicatrice - Torture de moldu - Peur - Traque - Cave - Prison. Il ne s'agissait que de mots clés mais ces simples mots lui permettaient de ne pas oublier l'histoire. Elle avait cogité tout l'après-midi en cherchant une solution pour rassurer son élève. Est-ce qu'elle devait en parler à la directrice en passant outre les demande de son élève ? Non, elle avait pensé qu'il ne valait mieux pas qu'elle se sente trahi. Elle avait déjà réussi à se confier à une professeure inconnue, elle ne pouvait pas trop lui en demander non plus.

En fin d'après-midi, elle avait terminé ses tâches administratives et avait fait le choix de plonger sa tête dans son tout nouveau coffre qu'elle avait acheté à son arrivée, sur l'allée des embrumes. Depuis son altercation avec Enzo, elle ne l'avait pas revu. Alors, la vague de souvenir qui s'était dégagée du coffre lui avait fait presque verser une larme. Presque car, elle s'était vise ressaisie.

A l'heure du diner, elle avait prit place loin du professeur d'astronomie pour ne pas croiser son regard. Se contenter de faire comme si il n'existait pas, c'était la méthode la plus simple pour elle. Après le diner, elle était remontée directement à son bureau, elle s'était servie un verre de Whisky pur feu et avait commencé la préparation de ses prochains cours. Pour ne pas se sentir trop seule, elle avait sorti d'une étagère une petite boite à musique qu'elle avait un jour acheté lors d'un voyage en France.

Enzo regarda sa montre. L’objet elliptique, minutieusement attaché à son veston via une chainette argentée, lui confirma qu’il avait tout juste trente minutes pour faire le détour. Une demi-heure, à peine, avant de remonter en Tour d’Astronomie pour y commencer le cours des 1ère année.

Le professeur d’Astronomie grimpa rapidement l’escalier menant au premier étage, puis tourna sur sa droite, le pas décidé. Il n’avait rien oublié de cette soirée d’Halloween. La rancœur était encore bien présente, et plus il y pensait, plus elle devenait obsédante. Ce n’est pas tant le verre reçu en pleine figure qui, au passage, l'avait humilié devant la quasi-totalité de Poudlard qui nourrissait son amertume. Non, cette profonde rancune s’expliquait davantage par l’incompréhension d’un tel geste, d’une telle agressivité soudaine.
Il ne pensait pourtant n’avoir rien fait de mal, si ce n’est saluer une vieille connaissance avec qui il avait flirté pendant ses études. Rien de bien méchant au final. Ou du moins, pas de quoi s'emporter de la sorte.

Arrivé devant la salle de Défense Contre les Forces du Mal, il s’arrêta un instant et pris une inspiration. À l’évidence, ce qui l'attendait là dedans allait certainement mal se passer. Mais il n’en attendait pas moins pour autant, et ce n'était certainement pas le tempérament de feu de sa nouvelle collègue qui allait l’en dissuader. Dans tous les cas, il s'était juré de garder son sang froid et de ne surtout pas s’énerver. Juste des explications entre adultes, en somme.

L’écossais ouvrit finalement la porte et s’engouffra dans la salle de cours. Sans grande surprise, celle-ci était vide de toute forme de vie - quoiqu’il ne l’aurait peut-être pas parié, après réflexion.
À cette heure-ci, elle était probablement retournée à son bureau, pour y corriger des copies ou préparer ses cours du lendemain. Et maintenant qu’il était là, ça ne lui coûtait pas grand chose de vérifier. Sans perdre plus de temps, il se décida à traverser le no man’s land pour atteindre la porte de son bureau. Main en l’air, il hésita puis finit par rabattre son doigt deux fois sur la porte.

- “Sixtine ? C’est… Enzo. Tu es là ? J’aimerais te parler.”

Sixtine était dans son bureau lorsqu'elle entendit une personne entrer dans sa salle de classe. Est-ce qu'un élève avait besoin de lui parler, à cette heure-ci, à l'heure du couvre feu ? Ou bien était ce un élève en quête d'une bêtise ? Sixtine avait décidé de rester dans son bureau en attendant le bon pour en sortir. Si, dans 5 minutes, elle ne voyait personne venir jusqu'à elle alors, elle sortirait pour s'assurer que personne ne dérange sa classe. A peine une minute plus tard, une voix résonna jusqu'aux oreilles de la professeure. Elle soupira longuement avant d'ouvrir la porte de son bureau magiquement.

- Miss Valerion pour toi, je te l'ai déjà dit.

La professeure de défense contre les forces du mal observa son nouveau collègue, le professeur d'astronomie. Il avait vieilli mais son visage était à peu près similaire à celui qu'elle avait connu à l'époque de sa scolarité entre ces murs. Elle se demandait comment avait elle fait pour ne pas le reconnaitre au premier coup d'oeil durant son premier jour ? Elle avait la réponse, elle n'avait pas une seule fois levé la tête pour observer son entourage.
Elle savait très bien pourquoi ce professeur là se tenait devant elle. Lors du bal d'Halloween, elle avait eu, une légère montée de sang et avait jeté le contenu de son verre à la figure de ce charmant professeur.

- J'imagine que tu souhaites parler du bal d'Halloween. Il est vrai que je n'aurais pas dû te jeter ce verre mais sache que c'était totalement mérité cela dit, je m'excuse. Voilà, tu as des excuses sincère tu peux maintenant retourner à tes étoiles Lorenti.

Le clic de la porte lui confirma rapidement qu’il ne s’était pas trompé. Elle était bien là.

Enzo eut un rictus lorsque son homologue lui rappela de l’appeler par son nom. Elle n’imaginait tout de même pas qu’il se plierait volontiers à ce caprice. Il se mordilla néanmoins la lèvre inférieure pour se taire et ne pas envenimer la situation, qui était déjà bien assez tendue.
À l’évidence, elle semblait tout faire pour le repousser, ou du moins pour mettre une sérieuse barrière entre eux deux. Par colère, sans aucun doute. Quant à la raison, le professeur d’Astronomie restait dans le flou.

Elle s’adressa de nouveau à lui, pour à la fois s’excuser du dérapage de l’autre jour puis pour gentiment le congédier. Si la manière était, elle, dénuée de toute bienséance, l’air expéditif de sa collègue le fit sourire cette fois-ci. Il reconnaissait bien là la Sixtine qu’il avait fréquenté, lui rappelant par ailleurs de lointains souvenirs.

Mains dans les poches, Enzo profita qu’elle reprenne son souffle pour faire quelques pas sur la moquette de son bureau. Il se retrouva dans une pièce assez sombre, où trônait un large bureau rouge et noir, un canapé dans le même style sur sa droite ainsi que quelques vitrines, à l’opposé. L’Aberdonien marcha vers ces dernières et y contempla la couverture des livres qui s’y trouvaient. Sans même la regarder, il riposta à son attention :

- “Toujours aussi explosive, hein ? Pour tout te dire, ça non tu n’aurais pas dû, mais passons.”

Il s’arrêta et tourna la tête vers elle.

- “J’accepte tes excuses. Mais en revanche, j’aimerais comprendre en quoi partager le fond de ton verre avec moi pouvait bien être mérité ? Je t’ai laissé un si mauvais souvenir ?”

Il la regarde de haut en bas, l’air amusé.

- “Je serais surpris. Notre dernière nuit n’avait pourtant pas eu l’air si mal.”

A l'aise dans le bureau de la professeure de défense, il avait franchi le seuil de la porte et prenait le temps d'observer les livres qui composait sa bibliothèque personnelle. Elle avait arrêté la petite boite à musique en la fermant pour qu'elle ne fasse plus de bruit puis, elle l'observait. C'est en l'observant qu'elle se rendit compte qu'il avait toujours un effet attractif sur elle. Elle avait cependant un peu trop de fierté pour l'avouer et préféra le regarder avec mépris.

Lorsqu'il accepta ses excuses, elle ne se sentait pas soulagée, bien au contraire. La question qui poursuivait l'acceptation était pire. Cette simple question, lui donna la nausée. Elle revivait tout le désespoir qu'elle avait connu autrefois, tout ce tourment, toutes ces tensions. Elle revivait un moment qu'elle avait mis des années à oublier. Alors, quand il aborda le sujet de leur dernière nuit, ce fut la goute de trop. Son sang ne fit qu'un tour, elle se leva d'un bond, plaqua ses paumes de main contre son bureau d'une telle force et rapidité que son bureau en trembla.

- ASSEZ ! SORS, SORS DE SUITE DE MON BUREAU ! Dit-elle en criant non, en hurlant. Elle respira longuement, très fort avant de reprendre. Tu m'as blessé plus que quiconque sur cette terre, tu m'as abandonné au pire moment, tu m'as laissé dans l'attente, sans nouvelle. Tu m'as enlevé la meilleure partie de moi-même et tu crois que j'ai envie de parler du passé avec toi ? Le simple fait de voir ton visage me blesse.

Toujours debout, paume sur son bureau, elle sentait son corps à bout de nerf. A la limite de l'épuisement physique alors qu'elle n'avait rien fait. Son visage pourtant, n'avait pas bougé, aucune larme, aucune veine apparaitre, c'était un contraste presque impossible et pourtant bien réel.

La soudaine colère de sa collègue le glaça instantanément. À cet instant, il eut l’impression qu’un éclair venait de le traverser de part en part et l’avait totalement paralysé. Son sourire s’effaça aussitôt, laissant place à une expression allant de l’étonnement à l’incompréhension.

Ce n’est qu’après quelques secondes qu’il réalisa réellement à quel point la fureur de Sixtine était si importante.
Tu m'as abandonné. Ces mots résonnaient dans son esprit. Quel abandon ? Pour lui, tout avait été consenti, des deux côtés. Il n’y avait jamais eu d’abandon. Il ne l’avait jamais laissé dans l’attente. Enfin, de ce qu’il se rappelait.

- “Écoute Sixtine… Comme si notre aventure avait une quelconque importance aujourd’hui. Ça fait plus de 30 ans !”

Le visage du professeur d’astronomie devint plus grave.

- “Je ne t’ai pas abandonné. Ne dis pas ça, j’avais juste besoin…”

Il soupira. C’est à ce moment qu’il comprit vraiment ce qu’elle lui reprochait. Ce n'était pas seulement de la colère, il y avait également une déception, une blessure profonde qu’elle avait essayé de panser par tous les moyens durant toutes ces années.
C’est vrai, peut-être que son départ avait été un peu brutal. Elle l’aimait toujours, quand il l’a quitté. Elle s’était attachée à lui, et leur rupture n’avait été finalement qu’à sens unique. Et le temps n’avait manifestement rien effacé.

Pour la première fois, il se sentit concerné par sa douleur. N’osant la regarder dans les yeux, plus par crainte d’une énième explosion que par un sentiment de honte, il reprit :

- “Je regrette. Je suis profondément désolé. Je n’avais pas imaginé que tu tenais encore à moi à cette époque. Saches qu’aujourd’hui, ton visage lui, me rappelle de jolis moments. Et permets-moi de te dire qu’après toutes ces années, ta beauté est restée intacte.”

Elle attendait une réponse, des excuses peut être ? Ou bien attendait elle simplement qu'il quitte son bureau comme elle lui avait demandé précédemment. En tout cas, elle ne bougea pas d'un pouce, c'était à peine si elle clignait des yeux. Le professeur d'Astronomie avait prit un air sérieux, il semblait maintenant comprendre qu'elle ne rigolait pas, elle ne voulait pas rire avec lui.

L'ancienne Auror allait lui répondre, elle allait lui expliquer les choses mais il la devança en reprenant la parole avant elle. Il ne fit pas l'effort de la regarder dans les yeux. Le spectacle l'avait il effrayé ? Avait il la crainte d'une nouvelle crise ? Sans doute. Mais cet air de niffleur battu avait tendance à agacer plus qu'autre chose la professeure de défense contre les forces du mal. Et les paroles qui accompagnaient son manque de charisme l'énervaient plus encore.

Ne voulant plus se laisser dépasser par la colère, Sixtine inspira et expira longuement avant de reprendre place sur sa chaise. Elle n'invita pas Enzo à faire de même.

- J'espère que tu as bien profité de tes années Don Juan car aujourd'hui tes cheveux gris et tes rides masquent ton ancienne beauté. A l'époque déjà tu étais trop dans les étoiles pour faire attention à quelqu'un d'autre qu'à ta propre personne... Je vois que tu es toujours le même. Je t'ai écrit des lettres, tu n'as jamais répondu.

Elle sortit sa baguette de sa robe. Elle le regarda dans les yeux. La professeure était tout à fait capable d'utiliser sa baguette pour le faire souffrir mais, elle avait de nouveau retrouvé le calme dans son esprit et, elle utilisa sa baguette pour ouvrir la porte de son bureau. Signe qu'il était temps pour le professeur d'astronomie de quitter la pièce.

- Tu n'as pas besoin de moi pour trouver la sortie et pour trouver la tour d'astronomie. Dans l'un de tes beaux souvenirs avec moi tu dois en avoir un ou nous nous étions retrouvé la bas alors utilise-le.