On ne fait plus exploser de chaudron en quatrième année quand on a choisi la filière science ! Visiblement si. Idiot de Gryffondor…

Orphéa se dirigeait vers les toilettes des filles, bien décidée à arranger sa coiffure qui ne ressemblait plus à rien. Et elle était persuadée d’avoir un truc visqueux coincé dans sa frange, mais elle avait besoin d’un miroir pour en être sûre. Alors qu’elle jouait des coudes dans le couloir pour se frayer un chemin parmi les élèves qui se dirigeaient pour la plupart vers la grande salle pour le raps, elle aperçut Bad. Et il était seul. Enfin ! Cela faisait plusieurs jours qu’elle voulait lui parler de la situation avec Lilly.

« Hey Bad ! Lançant-elle en l’attrapant par la manche pour le tirer vers un endroit moins passant. Il faut que je te dise un truc ! »

La petite brune s’appuya contre le mur et prit une grande inspiration avant de commencer à parler, en priant intérieurement pour qu’il ne s’énerve pas.

« En fait, je sais pas si tu as remarqué, mais c’est un peu tendu avec Lilly. Au début, je pensais qu’elle m’aimait pas, mais en fait, je crois qu’elle est jalouse. Je pense que ça lui plaît pas trop qu’on partage un truc que tous les deux. Et qu’on traîne souvent ensemble aussi. Puis j’ai vu tes fesses.
Mais pourquoi tu parles de ça ?!
Mais je sais pas si elle le sait alors ça compte peut-être pas, mais je sais qu’elle devrait plus voir tes fesses que moi…
Ho non tais toi donc …
Enfin, je dis pas que tu lui donnes des raisons d’être jalouse, mais peut-être qu’on est trop proche. Enfin moi je trouve pas, enfin ça me plaît qu’on soit proche.
Ho non ta gueule, il va croire que t’es amoureuse !
Enfin qu’on s’entende bien quoi ! »

La jeune fille avait viré au rouge tomate. Elle pensait être suffisamment à l’aise avec le Serdaigle pour aborder le sujet de Lilly, mais finalement non. Elle avait eu peur qu’il le prenne mal, et résultat elle s’était embourbé dans des explications vaseuses, sans queue ni tête. Elle glissa sa main devant ses yeux pour tenter de masquer son embarras. Heureusement, Bad était tellement grand et elle tellement petite qu’il ne voyait probablement même pas son visage.

« Enfin, le prends pas mal, mais elle est jalouse, et ça me gène de bosser avec elle, dit-elle d’une petite voix. Au début, j’avais peur de tenir la chandelle, mais maintenant, j’ai l’impression qu’elle vient juste pour me surveiller »

Voilà. C’était dit. Elle appréhendait la réaction de Bad. Elle espérait simplement qu’il n’allait pas prendre la défense de sa copine, et lui dire qu’elle n’avait qu’à apprendre l’espagnol toute seule si elle n’était pas contente.

Bad n’avait pas cours le mercredi matin pourtant il avait mis à profit ce temps libre pour s’exercer aux BUSE qui approchaient à grands pas. S’il ne craignait pas les examens dans les matières nécessitant sa baguette, le vol sur balai était l’une de ses bêtes noires. Accompagné d'un vieux Brossdur, le Serdaigle s’était donc levé aux aurores pour s'improviser un parcours d’agilité sur le terrain d'entraînement. Il avait tracé des cercles lumineux à l'aide de bons vieux Flambios et, des minutes durant, s'était entraîné à les traverser. Si le résultat n'avait pas été très convaincant, cet exercice avait au moins eu l’intérêt de le faire transpirer.

Remontant les escaliers menant à son dortoir dans l’aile ouest du château dans l'espoir d'une bonne douche, Bad entendit qu’on le halait. Le visage transpirant enfoui dans une serviette volée à l’époque où il était préfet dans la salle de bain leur étant consacrée, l'adolescent ne reconnut pas instantanément l'inconnu.

« Mmmm ?, marmonna-t-il alors qu’on lui saisissait la manche. Ah tiens, salut Orphéa ! Hé, mais où tu m’emmènes ? »

Qu’est-ce qui lui prenait de l'extraire comme cela ? Ils n’avaient aucun cours d’espagnol de prévu aujourd'hui. C’était donc autre chose. Mais quoi ?

Bad n’eut pas le temps de réaliser ce qu’il se passait qu’Orphéa se lançait déjà dans une tirade. Différentes grimaces fleurirent successivement sur le visage du Serdaigle au fil des explications de la quatrième année et, abasourdi, il ne put que répéter certains termes allant de surprise en surprise.

« – Tendu ?
[...]
– Jalouse ?
[...]
– Mes fesses ?
[...]
– Trop proches ? »

Bad n’y comprenait rien. Il avait l’impression de se réveiller dans un futur lointain après des années de sommeil forcé et de se retrouver déconnecté d’une réalité insoupçonnée. Il n’avait rien vu venir et n’était même pas certain que le scénario d’Orphéa soit plausible. Lilly jalouse ? Le Serdaigle secoua la tête de gauche à droite tandis que la Serpentard au visage rougi se cachait les yeux.

« Hein ? Mais t’es sûre ? Je … Non … Elle me l’aurait dit si c'était ça ? Et puis pourquoi elle serait jalouse de toi ? »

À peine sa phrase terminée, Bad la regrettait déjà amèrement. Paumes de mains levées en geste d’excuses, il tenta d’expliciter sa pensée. Encore fallait-il qu’il en soit capable.

« Je veux dire t’es sympa, drôle, gentille et tout mais moi j’aime Lilly. Elle ne ferait pas ça. Venir te surveiller, je veux dire. Non, c’est pas possible. Une montée de chaleur envahit le cinquième année dont le front se perlait de sueur. C’est juste que son correspondant n’est pas dans la même école, je crois. Enfin, je ne sais pas en fait … Bad se tamponna le visage à l'aide de sa serviette pour en essuyer l’humidité. Tu crois vraiment qu’elle pourrait être jalouse ? Mais … mais j’ai rien fait moi. C’est Oxy qui a enlevé mon pantalon et puis après c’était pour rigoler. Ce passage enfantin dans le lac combiné aux nombreux moments que Bad et Orphéa partageaient pouvaient-ils être à l’origine de cette supposée jalousie de Lilly ? J’ai rien vu venir … »

Les propos décousus de Bad étaient à l’image de ce qu’il se passait dans sa tête. Un vrai bazar.

Ho non, elle en était sûre... Bad n’avait rien vu, et maintenant, elle passait pour la fille relou qui se mêlait de ce qui ne la regardait pas. Elle aurait mieux fait de se taire et d’aller confronter directement Lilly pour lui proposer de régler ça directement. Elle avait envie de fuir, mais les paroles du Serdaigle l’interpellèrent.

Pourquoi elle serait jalouse de toi ?

Orphéa haussa légèrement son sourcil droit en voyant le Serdaigle se rattraper d’une manière pitoyable. La Serpentard pouvait lister une bonne dizaine de raisons qui justifierait le fait que Lilly soit jalouse. Ses cheveux déjà. Qui étaient bien mieux coiffés que les siens. Elle était en toute objectivité, beaucoup plus coquette et bien mieux apprêtée que la Poufsouffle. Il était évident qu’elle était également bien moins prise de tête et plus marrante. Non, elle n’avait aucune raison d’être jalouse. Vraiment. Elle décida de passer outre en voyant que son ami commençait à transpirer. Bien fait.

« Bah je me trompe peut-être... dit-elle sans grande conviction. Mais je vois pas ce que ça pourrait être d’autre. Je la connaissais pas avant, et je lui parle pas en dehors de nos sessions de travail. Enfin, si c’est pas de la jalousie, je comprends pas pourquoi elle m’aime pas »

Elle marqua un petit blanc, avant de décider de poursuivre pour expliquer le fond de sa pensée.

« Elle sait qu’on traîne souvent ensemble, sans elle. Et elle sait qu’on va partir ensemble l’année prochaine au Mexique, et qu’elle, elle sera dans un autre pays, rajouta-t-elle spontanément. Je dis pas que t’as fait quelque chose de mal, et moi non plus d’ailleurs, parce que j’ai rien fait ! Mais imagine si tu la voyais toujours avec un autre type, tout en sachant qu’ils partagent un truc dont t’es exclu. Je peux comprendre que ça gêne certains »

Elle faisait allusion à Jacob sans oser prononcer son nom. Bien sûr, elle ne savait pas vraiment ce qui s’était passé entre lui et Lilly, mais elle avait entendu toute sorte de rumeurs. Elle ne voulait pas se baser sur des on-dit, mais elle avait été suffisamment proche de Jacob pour savoir certaines choses. Et la comparaison était parfaite. Lilly et Jacob avaient partagé quelque chose dont Bad avait été exclu. Bad et Orphéa partageaient quelque chose dont Lilly était exclue. Le concept de jalousie dépassait clairement la petite brune qui avait clairement une trop haute opinion d’elle-même. Pourtant, elle savait que cela pourrait faire réagir son ami. Et qu’il pourrait en parler à sa copine. Et avec un peu de chance, elle arrêtait de subir les regards noirs de la Poufsouffle à chaque fois qu’elle osait rigoler à une blague du brun, ou qu’elle se montrait un peu trop amicale.

La maladresse de Bad ne passa pas inaperçue auprès d’Orphéa comme en témoignait son ballet de sourcils. Le Serdaigle ressentit un pincement dans sa poitrine mais préféra passer à autre chose que de s'attarder sur cette bévue. Son amie de Serpentard ne sembla pas lui en tenir réellement rigueur et, mis à part son jeu de regards, elle ne tarda pas à enchaîner sur les raisons de son ressenti. Si elle lui en voulait, Bad trouvait qu’elle cachait bien son jeu.

Les arguments de la brune tenaient la route mais l’ancien préfet avait du mal à les accepter. Il n’avait pas capter tous ces indices et, d’un côté, se sentait coupable d'être passé à côté. Surtout qu'en matière de jalousie, il en connaissait un rayon. Les derniers mots d’Orphéa firent davantage écho en lui qu’il ne l’aurait souhaité. “Mais imagine si tu la voyais toujours avec un autre type, tout en sachant qu’ils partagent un truc dont t’es exclu.” Jacob, le Dominion, la bague. Des événements dont Bad essayait encore et toujours de se défaire. Le manque de communication entre Lilly et lui suite à ces difficultés avait lentement creusé un fossé qui les avait éloigné. Un gouffre que la Poufsouffle et le Serdaigle empêchaient quotidiennement de s’agrandir. Bad hésita à parler de cela à Orphéa mais il finit par conclure que cela n'arrangerait aucunement la situation actuelle. Si sa petite amie apprenait qu’il livrait ses peines de cœur à la Serpentard dont elle était supposément jalouse, cela reviendrait à se Waddiwaser une Noise dans le pied.

Pourtant cette comparaison avancée par Orphéa, sûrement involontairement d'après Bad, venait à faire réfléchir le garçon. Ce dernier avait profondément prié pour que Jacob et Lilly s’éloignent. Il n’en avait rien dit car il savait cette attitude égoïste. Le Serdaigle blessé n'avait pas souhaité afficher une telle image de lui-même. Devait-il alors en conclure qu'il était désormais nécessaire qu'il prenne ses distances avec Orphéa ?

Tout en pliant sa serviette en un rectangle huit fois plus petit que sa taille initiale, Bad leva un regard sérieux, appuyé par deux sourcils légèrement froncés.

« Je passe du temps avec Elo et pourtant, je ne crois pas que Lilly lui en veuille. C’est peut-être à cause de nos correspondants, oui … Cette explication ne faisait pas réellement sens pour Bad. Il y avait autre chose ; il le sentait. Mais c’est peut-être aussi qu’elle croit qu’il pourrait y avoir plus entre nous. C’est idiot, non ? Le Serdaigle avait toujours vu Orphéa comme une amie. Après cette discussion, il se pouvait que les choses changent dans un sens que Bad se refusait. Le garçon cligna longuement des yeux avant d’ajouter. Tu penses qu’elle a des raisons d’être jalouse ? Que toi et moi, on est trop proche ou qu’on rigole trop ensemble ? Mais moi j’aime bien être avec toi et pourtant c’est elle que j’aime ! Puis l’image de Jacob et Lilly lui apparut en tête. Mais si ça lui fait du mal, on devrait peut-être moins se voir … »

Excuse-moi pour le retard

Orphéa le regarda plier sa serviette, tout en l’écoutant parler, espérant qu’il réagisse enfin. Elle n’allait pas être déçue. Malheureusement, les choses ne se déroulaient pas vraiment comme prévues. La jeune fille n’éprouvait pas ce genre de sentiment pour Bad, mais le fait qu’il puisse dire avec tant d’assurance qu’il était idiot de penser qu’il pourrait y avoir plus entre eux lui fit plus de mal qu’elle ne l’aurait pensé. En réalité, c’était très vexant. La Serpentard lui adressa alors un sourire qu’elle ne lui avait jusqu’à présent jamais fait, son sourire hypocrite. Celui qu’elle gardait en général pour la petite amie du Serdaigle lors de leurs cours d’espagnol. Forcé, figé, dévoilant toute sa dentition. De toute façon, elle ne pouvait rien faire d’autres. Elle ne pouvait pas s’énerver et agir comme Lilly. La petite brune ne pouvait pas non plus lui dire ce qu’elle ressentait à cet instant précis. Cela donnerait forcément raison à la Poufsouffle. Alors elle continua de l’écouter parler en lui souriant. Puis... On devrait peut-être moins se voir. Son sourire disparu instantanément, au profit d’un air ébahi. Cette conversation prenait une tournure qu’elle n’avait pas du tout envisagée. En fait, la jeune fille espérait que Bad se contente de lui dire qu’elle avait raison, d’aller dire à Lilly d’arrêter d’être jalouse, et que tout redevienne comme avant. Mais visiblement, elle s’était bien trompée.

« Heu, je pensais plutôt que tu pourrais en discuter avec elle et essayer de lui faire comprendre qu’elle n’a pas de raison d’être jalouse, commença-t-elle d’un ton un peu plus rude qu’elle ne l’aurait voulu. Comme tu dis, ce serait idiot de penser qu’on pourrait être plus qu’amis »

Orphéa ne put s’empêcher de lâcher un petit rire nerveux. Évidement, Lilly passait en premier, c’était normal. Mais elle avait quand même envie de dire au Serdaigle que le fait qu'il envisage de prendre ses distances lui faisait du mal. Elle savait qu’elle aurait mieux fait de se taire et de ne pas se mêler de ce qui ne la regardait pas. Maintenant Bad ne voulait plus la voir et elle ne pouvait s’en prendre qu’à elle-même. À moins que... Il lui restait peut-être une dernière solution. Elle arriverait peut-être à le convaincre qu’elle avait tort.

« Tu sais quoi, oublies, dit-elle simplement en retrouvant un sourire plus franc. Je me suis sûrement trompée »

Tout en exposant ses réflexions, Bad put observer le visage d’Orphéa se parer d’une expression qu’il ne lui connaissait pas. Du moins, pas à son égard. Un regard à la fois familier et étranger. Le Serdaigle n’était pas sûr de la manière dont il devait l’interpréter et choisit alors de faire semblant de ne rien avoir remarqué. Jusqu’au moment où le sourire de la Serpentard finisse par disparaitre subitement. Cette proposition d’éloignement qui ne faisait absolument pas plaisir à Bad semblait avoir le même effet sur son amie. Évidemment que le garçon n’en avait aucune envie mais l’image persistante de Jacob et Lilly lui restait bien ancrée devant le visage. Y a-t-il des sacrifices nécessaires ?, s’interrogeait Bad sans certitude sur la réponse. Mais Lilly a des sentiments amoureux pour Jacob et encore aujourd’hui elle le voit. Suis-je égoïste à ne pas céder à sa jalousie ? Et puis, est-ce qu’elle est vraiment jalouse ? Même si cela l’embêtait, l'adolescent allait devoir en parler avec Lilly. Cette décision qui serait la sienne méritait la consultation de l’une des principales intéressées. L’autre se trouvait devant lui et entamait sa réponse. Des paroles qui faisaient parfaitement écho au ressenti du Serdaigle. Orphéa validait même cette idée d’une impossible relation plus qu'amicale. Le garçon qui s’était l’espace d’un instant laissé à aller à des fantasmes interdits ressentit malgré lui un petit pincement au cœur. N’importe quoi Bad … Dans tous les cas, le cinquième année s’était décidé à ne prendre aucune décision, encore moins contre son gré, tant que sa petite amie et lui n’aurait pas eu une conversation à cœurs ouverts au sujet d’Orphéa.

Depuis plusieurs dizaines de secondes, Bad avait gardé un visage fermé qui ne signifiait aucunement qu’il en voulait à Orphéa mais plutôt que cette situation lui donnait matière à réfléchir. Beaucoup plus qu’il n’en fallait pour cette petite tête d’adolescent. Le Serdaigle ne réalisa son attitude non propice à la discussion que lorsque son amie souhaita mettre fin à la discussion. De sa dernière phrase, il ne crut aucun mot. Lui-même était parfois adepte de la langue de bois et les termes utilisés par la jeune fille ne laissaient aucune place au doute sur ses intentions.

L’ancien préfet ne souhaitait pas que cette conversation n'entache leur relation et les éloigne. Orphéa avait eu l’honnêteté de venir lui livrer son ressenti et c’était ce genre de personnes que Bad souhaitait avoir près de lui. À son tour, d’être un bon ami.

Sa serviette sale bien pliée en main, le Serdaigle la jeta au visage de la petit brune en rigolant.

« Allez, on se détend ! Je vais en parler avec Lilly et tout va s’arranger ! Jetant un regard à son balai, il ajouta. Si je suis capable de manœuvrer ce truc, je devrais m’en sortir avec ma petite amie. Reprenant un visage plus sérieux mais toujours paré d’un sourire qui se voulait tendre, Bad plongea ses yeux dans ceux gris clairs d’Orphéa. Honnêteté. Je ne veux pas m’éloigner de toi, tu sais. C’est juste qu’il y a eu une histoire compliquée avec Jacob et Lilly et j’ai encore du mal à la digérer. J’aurais dû t’en parler mais c’est difficile. Changeant d’épaule son balai posé verticalement pour l’en soulager du poids du manche, Bad donna un petit coup de poing amical contre le bras de son amie. Et puis si tu n'étais pas là, qui me corrigerait quand je n’arrive pas à prononcer les ‘n’ tildés ? »

Orphéa sursauta de surprise en recevant la serviette de Bad dans la figure. Sa serviette pleine de sueur. Une odeur de transpiration lui parvint aux narines, et elle ne sut pas réellement si elle trouvait ça dégoûtant ou non. Ce n’était certes pas très propre, mais cela signifiait au moins qu’il prenait soin de lui, et faisait attention à son physique. Ce qui était fort appréciable. La jeune fille grimaça légèrement, pour la forme, et garda la serviette entre ses mains, en jouant nerveusement avec tout en le regardant droit dans les yeux. Les paroles du Serdaigle se voulaient rassurantes, son regard chaleureux, son sourire tendre. La petite brune ne put s’empêcher de sourire et lança un regard gêné vers la serviette. Alors qu’il se confiait, elle se sentit légèrement coupable d’avoir utilisé cette information pour le manipuler. De toute façon, le karma le lui rendait bien. Son plan de base se retournait contre elle, risquant d’éloigner le brun plus qu’autre chose, et elle tirerait certainement une leçon de ce qui venait de se passer. Ou pas. Alors qu’il se mettait à blaguer avec elle, la Serpentard lui renvoya sa serviette en boule.

« C’est vrai que sans moi, tu progresserais pas beaucoup ! Dit-elle pour le taquiner, avant de marquer une courte pause et de redevenir un peu plus sérieuse. Je sais que Lilly est importante pour toi, mais j’espère vraiment que ça ne nous empêchera pas de continuer à traîner ensemble. Je t’aime bien, t’es … un bon pote ! »

Orphéa avait légèrement hésité à employer ce terme, mais elle ne savait pas comment qualifier sa relation avec Bad. Collègues, camarades, amis… ? L’amitié était parfois compliqué, et elle ne savait pas si le garçon la considérait comme son ami. Avec Alice, qui avait été pendant longtemps sa référence en matière d’amitié, elles se confiaient, mais elles se disputaient aussi souvent. Ce qui n’arrivait pas avec le Serdaigle. Enfin, en fait, il commençait à se confier, et cette discussion aurait très bien pu tourner à la dispute. Mais pote lui semblait de toute façon plus adapté. Pas de prise de tête, proche, mais pas trop. Et on ne pouvait pas être jalouse des potes de son copain non ?

Retour à l’envoyeur. La serviette lancée par Bad quelques dizaines de secondes revint dans les mains de son expéditeur qui manqua pourtant de la faire tomber au sol. La rattrapant de justesse du bout des doigts, il remarqua que l’odeur qu’elle dégageait n’était pas des plus ragoûtantes. S’il ne connaissait pas aussi bien Orphéa que maintenant, il est probable qu’une petite gêne se serait installée entre les deux protagonistes. Seulement, les nombreuses heures partagées dans leur formation commune à l’espagnol, ou même en dehors, avaient eu raison de toutes formes d’embarras.

Un bon pote.

Bad ne put réfréner l’apparition d’un sourire au coin de ses lèvres. Si Lilly avait elle aussi pu entendre ces mots, le Serdaigle espérait qu’elle aurait compris qu’il n’y avait aucune ambiguïté entre Orphéa et lui. Du moins jusqu’à ce que cette jalousie présumée ne vienne fallacieusement semer une graine dans l’esprit du garçon.

« Oui, on est amis. Des amis normaux. Bad se convainquait lui-même de la teneur réciproque de leurs sentiments. Sans bases claires, les quiproquos pouvaient rapidement être légions. J’espère bien qu’on continuera à traîner ensemble, ajouta le garçon en tendant son poing en avant dans l’espoir qu’Orphéa y frappe le sien. Tout va bien entre nous, il n’y a pas de malentendu, okay ? Bon, par contre, je crois qu’une bonne douche me fera du bien. Bad ne put s’empêcher de renifler sa serviette. Je crois même qu’elle est indispensable. »

Orphéa était satisfaite des paroles prononcées par son ami. Visiblement, il partageait son point de vue. Elle serra son petit poing et alla le coller contre celui de Bad en lui adressant un beau sourire. Un vrai cette fois. Ouais, ça, c’était un truc de pote.

« Je suis contente qu’on en ait parlé, je te retiens pas plus, vas-y, parce que honnêtement… commença la Serpentard en se penchant légèrement vers lui pour reniflant bruyamment. Tu pues ! »

Elle essaya de garder son sérieux, mais elle ne put s’empêcher de sourire à sa propre plaisanterie. Enfin, ce n’était pas vraiment une plaisanterie, mais elle trouvait ça drôle. En fait, elle était simplement soulagée d'apprendre qu’à priori ses révélations ne changeraient rien à leur relation. Soulagée de voir qu’elle pouvait parler librement au Serdaigle de son ressentit sans qu’il ne prenne automatiquement le parti de Lilly. Soulagée de constater qu’elle comptait quand même un peu pour lui. La jeune fille réajusta son sac sur son épaule, et passa sa main dans ses cheveux, sentant un objet non identifié un peu gluant sur sa frange, lui rappelant son intention initiale. Elle décolla la chose en question et l’observa rapidement.

« Et puis, j’ai… ça à nettoyer, explique-t-elle en indiquant ce qu’elle devinait être un bout d’achillée sternutatoire, au bout de ses doigts. On se voit plus tard ? »

Lorsque le poing d’Orphéa heurta le sien, le garçon ne put s’empêcher de ressentir une vague de plaisir lui parcourir le ventre. Savoir que cette histoire avait été - en partie - éclaircie, le soulageait d’un réel poids. Mais celui de devoir en parler à Lilly était toujours bien présent. Si Orphéa se trompait sur cette jalousie présumée, il était possible que la Poufsouffle lui en veuille de cette accusation sans fondement véritable. Le seul moyen d’obtenir une réponse était d’aller à sa rencontre pour en discuter. Ce qu’il s’empresserait de faire dans les plus brefs délais.

Le garçon tira sur le col de son tee-shirt pour renifler bruyamment son torse.

« Oui, je sens le troll des rivières là … J’ai l’impression d’être resté trop longtemps dans les cachots humides de Serpentard, ajouta Bad en tirant la langue à son amie. »

Alors que le Serdaigle glissait sa serviette sale et désormais mal pliée sur son épaule, Orphéa lui présenta ses doigts sur lesquels reposaient une substance aux teintes blanchâtres. Bad fit une grimace de dégoût avant de répondre à l’interrogation qu’elle lui soumettait.

« Oui, on mange ensemble ? J’ai entendu dire qu’il aurait du welsh rarebit fait avec de la Bièraubeurre ce midi ! Miam, ça va être trop bon et j’ai super faim ! »

Après avoir rapidement salué Orphéa, Bad remonta dans son dortoir pour prendre une bonne douche chaude. Une seule question tournait en boucle dans sa tête : Lilly était-elle réellement jalouse ?

Merci Orphéa pour ce RP ! À voir les conséquences ...