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03 avr. 2022, 18:41
 Cardiff  World's Best Mom  SOLO 
PRESENTS DANS CE RP :

POPPY JONES (mère)
Mère d'Elian, épouse du sorcier Evelyn Kernac'h. Moldue britannique de trente-huit ans dans ce RP.


EVELYN KERNAC'H (père)
Sorcier de quarante-et-un ans dans ce RP, il est trésorier dans une entreprise de fabrication de chaudrons.


ELIAN KERNAC'H
A sept ans dans ce RP (avril 2038).




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« Le Père et la Mère les menèrent dans l'endroit de la Forêt
le plus épais et le plus obscur, et dès qu'ils y furent, ils gagnèrent
un faux-fuyant et les laissèrent là. »
– Charles Perrault

3rd April, 2038
Centre-ville de Cardiff


Un garçonnet se laissait entraîner par la main d'une grande dame aux cheveux blonds. « Est-ce qu'on est arrivés ? » répétait-il pour la troisième fois en l'espace de quelques minutes. Poppy Kernac'h avait cessé de lui répondre dès la deuxième occurrence. De son autre main, elle s'abritait sous un parapluie, laissant se noyer derrière elle son fils qui avait des difficultés pour la rattraper. Comment un être doté d'aussi petites jambes pouvait se montrer aussi agaçant ? Heureusement, le bruit de la pluie drue couvrait partiellement sa voix. Une dizaine de minutes s'était écoulée depuis qu'ils avaient quitté l'appartement et le temps orageux semblait avoir davantage assombri le centre-ville de Cardiff. Poppy Kernac'h aurait pu attendre les éclaircies du lendemain pour s'occuper des courses alimentaires, mais elle craignait de croiser ses anciennes amies. Ces dernières avaient pris la très fâcheuse habitude de se rendre au marché le jeudi pour partager les derniers mérites de leurs enfants. Elle estimait n'avoir plus rien à leur dire depuis que sa fille aînée étudiait la magie en Ecosse. Ce n'était pas qu'elle avait honte de son parcours, c'était plutôt qu'elle risquait d'apporter des problèmes à son mari si elle échappait une information du Monde Magique par mégarde à d'autres Moldues. Quant à Elian, il n'y avait selon elle tout simplement rien à complimenter chez lui, il était simplet et agaçant.
« Et là maman on est arrivés ? » Un court instant, Poppy avait hésité à lâcher la main du garçon au milieu d'un passage piéton. Nul doute qu'il serait resté planté là en attendant qu'un véhicule le renverse. Peut-être aurait-il mieux fallu qu'elle le laisse à l'appartement, mais Evelyn s'était montré si violent lorsqu'il s'était rendu compte, la fois où il était rentré plus tôt du travail, que son fils avait passé une après-midi seul dans la cuisine à compter des grains de riz. Désormais, Poppy devait se montrer plus prudente durant les vacances scolaires lorsqu'Elian restait à l'appartement avec elle. Elle avait bien envisagé à plusieurs reprises d'appeler sa mère pour le garder, mais cela aurait été un aveu de faiblesse pour celle qui jugeait déjà bien trop facilement chacun de ses choix de vie, en commençant par son mariage. Les Kernac'h n'en avaient pas encore reparlé, bien que les visites plus fréquentes de Sigmund Charleston ces derniers temps ressemblaient à une idée d'Evelyn pour l'espionner. Poppy n'était pas contre l'idée que Sigmund garde son filleul indéfiniment, mais voilà, les sorciers étaient de nature occupée. « Et là, on est arriv- » Poppy avait resserré si fort sa main sur celle du garçon qu'il avait fini sa question dans une sorte de râle douloureux. Bien qu'elle avait relâché son étreinte immédiatement, c'était davantage par dépit que par un sentiment de regret. De toute façon, les contours du marché Moldu se dessinaient devant eux et Elian ne pouvait techniquement pas se perdre. Techniquement.

« Tu pourrais te dépêcher, au lieu de parler tout seul », lui reprocha-t-elle sans se retourner. Poppy pouvait entendre derrière son dos les bottes de pluie d'Elian bondir dans chacune des flaques sur le chemin mais peu importait, il était déjà trempé d'avoir marché si longtemps sous l'eau. La Moldue ferma son parapluie en marche arrière pour passer les portes coulissantes : optimisation du temps. Le bruit des commerçants et des acheteurs couvrait à peine le son de la pluie battante sur le toit en verrière du marché couvert de Cardiff, qui avait d'ailleurs davantage un air de gare ou d'entrepôt. Immédiatement, des milliers de senteurs provenant des étales de toutes les couleurs se mélangèrent à leurs narines. Elian, finalement arrivé à sa suite non sans qu'elle n'eut le temps de pousser un soupir d'agacement, faillit partir à toute allure dans l'allée des épiceries fines qu'il avait repéré comme une bête assoiffée de sucre. Elle l'avait retenu de justesse par le col de son ciré, manquant de l'étrangler sous le regard inquiet d'une dame qui sortait du marché. Poppy se baissa au niveau de l'oreille du garçon :
« Si tu me fais honte, je repars en te laissant au poissonnier, te voilà prévenu ! » A voir l'expression d'Elian, le message semblait être passé. Il se répugnait des animaux morts mis en étalage autant que du poissonnier en lui-même - et plus particulièrement de son tablier aux tâches suspectes. Après avoir effectué quelques passages entre différentes allées étroites, Poppy reprenait le temps d'un instant le goût de son ancienne vie, celle où elle n'était qu'une jeune femme célibataire et sans enfant divagant au grès de ses envies sans avoir à combler quelqu'un. Ce marché au décor victorien n'avait pas vraiment changé au fil des ans, c'était une institution à Cardiff et les gallois y tenaient beaucoup. Outre les primeurs et les stands de restauration, on y trouvait l'animalerie à l'étage, la mercerie et la petite librairie spécialisée dans les échanges de livres. Evelyn lui avait raconté qu'il arrivait que les sorciers préféraient réaliser certains achats parmi les Moldus, par curiosité ou pour changer leurs habitudes. On pouvait facilement imaginer la tête que devait faire le libraire lorsqu'il échangeait le dernier roman d'amour contre un vieux grimoire particulièrement convaincant relatant toutes les façons d'ensorceler son ex pour le punir de son manque de loyauté. Peut-être qu'il y avait d'autres sorciers qu'Elian parmi tous ces gens. Bien qu'il n'avait pas montré les signes distinctifs des sorciers étant donné son jeune âge, Poppy restait persuadée que cet enfant se montrait trop étrange pour être humain... Ou plutôt pour être comme elle. Curieusement, le fait que son aînée était également une sorcière ne l'éloignait pas tant de son cœur. Mais Poppy ne voulait pas entendre parler de magie aujourd'hui et la vue de citrouilles lui fit réaliser un certain détour. Pour une fois, rien qu'une fois, elle voulait consacrer un peu de temps à son propre bien-être et connaitre le bonheur de faire une sortie normale dans ce marché qu'elle connaissait comme sa poche.

Les deux bras remplis de paquets, Poppy amorça sa sortie. Ses temps de répits lui paraissaient de plus en plus éphémères. Elle adressa un regard en coin dans son angle mort : « Tu pourrais au moins me demander si j'ai besoin d'aide pour porter les courses ». Pas de réponse. Elian ne savait se taire qu'aux mauvais moments. Elle se retourna complètement, prête à lui en faire le reproche, mais aucun petit garçon ne se tenait derrière elle. « Elian ? » Poppy réalisa un tour complet sur elle-même, se souvenant subitement qu'elle ne l'avait pas revu depuis un certain temps. Tout du long, elle avait pensé qu'il la suivait. Elle fit un pas, puis un deuxième, avant de s'arrêter net, une panique grandissante dans le regard. D'un seul coup, il lui était devenu impossible de maîtriser la voix sourde qui semblait lui parvenir directement depuis son cerveau, celle qui s'activait à chaque fois que son lien avec Elian se rompait un peu plus : elle s'extasiait, observant circulairement tous les coins alentours sans vraiment chercher à identifier quelqu'un. Après tout, les enlèvements d'enfants étaient si courants et si rapides, personne ne pourrait lui en vouloir d'avoir perdu ce garçon au milieu de cette foule...

Poppy secoua la tête, serrant les paquets contre elle. Sa propre implacabilité l'effrayait. Elle ne pouvait pas être aussi mauvaise, et puis son mari n'était pas n'importe qui, il retrouverait forcément son fils à l'aide d'un simple sortilège. Ah Evelyn... Il lui en voudrait encore. Alors qu'elle prenait lentement conscience du danger, elle se rendit compte d'une chose plus terrible encore : elle ne se trouvait plus du tout au milieu du marché couvert de Cardiff. Sa respiration s'accéléra à la réalisation qu'elle venait de faire tout le trajet inverse jusqu'à l'appartement d'une façon tout à fait inconsciente. Et toujours aucune trace d'Elian. Quelle horreur ! N'était-ce pas ce fameux instinct maternel qui devait s'enclencher automatiquement dans cette situation ? Poppy se força à garder son calme et se surprit de la facilité avec laquelle elle pouvait ne pas s'inquiéter pour Elian... Ce n'était pas si surprenant pour elle, en vérité. Réfléchis, mère indigne. S'il s'était perdu, il serait logiquement revenu vers l'entrée... Mais Elian n'était doté d'aucune logique. Poppy lâcha toutes ses courses sur la table et se mit à haleter sous la pluie, désorientée. La luminosité avait encore baissé ou bien était-ce le fruit de son imagination ? Rien ne semblait sûr, avait-elle recouvré ses esprits ? Combien de temps s'était écoulé depuis la disparition d'Elian ? Elle courait, à deux doigts de craquer pour de bon sur le pavé. Sans Elian à côté d'elle, le chemin jusqu'au marché allait beaucoup plus vite. Non, c'était terrible de penser ça ! Elle arriva tout droit à l'entrée, la rue était déserte et le lieu paraissait vide. Seul un vigil qui s'apprêtait visiblement à barrer les portes se dirigea vers elle, interrogatif. Son cerveau ressassait la réaction d'Evelyn et le désespoir l'avait complètement gagné lorsqu'elle souffla : « J'ai perdu un petit garçon.
— Ah on ne perd pas ce genre de truc très souvent ma petite dame, railla d'abord le vigil avant de positionner sa radio devant sa bouche. Delta Plane à Delta Face, on a un louveteau en cavale. Je répète : on a un louveteau en cavale. Quoi ? Ah oui pardon, ça c'est le code pour les chiens libérés de leurs laisses... Du coup, c'est quoi le code pour un enfant perdu ? »
Poppy arqua un sourcil : essayait-il de détendre l'atmosphère ou ne voyait-il vraiment pas que la situation pouvait s'envenimer à chaque minute qui passait ? L'homme ôta son pouce sur le dessus de la radio pour s'adresser de nouveau à elle : « Il ressemble à quoi votre petit garçon ? » Un peu prise au dépourvu, elle commença avec la pire des descriptions :
« Euh... Eh bien... Il est petit, c'est un garçon...
- Ben voyons !
- Il a les cheveux clairs et il porte un ciré jaune... Il a six... Non sept ans ! »
continua-t-elle en fronçant les sourcils, incertaine. Le vigil transmettait sa description tandis qu'elle tentait de reprendre son souffle. Poppy leva les yeux sur la grande pendule : il était déjà dix-huit heures passées. Il s'était écoulé une heure entre le moment où elle s'apprêtait à sortir du marché et le moment où elle s'était retrouvée seule à l'appartement. Si Elian avait quitté cet endroit, où diable pouvait-il bien se trouver à présent ? Il ne savait pas retrouver son chemin depuis la rue adjacente à celle de l'appartement, alors depuis un lieu situé à plus de dix minutes de marche... Après la panique et le désespoir, c'était la colère qui faisait battre son cœur. Pourquoi lui faisait-il subir cette humiliation ? L'homme coupa sa radio un instant pour lui poser la question qu'elle redoutait : « Vous l'avez perdu ici au marché ? » Elle acquiesçât, posant une main sur son front pour dissimuler un peu la honte qui s'affichait sur son visage. Le vigil semblait comprendre lentement l'étrangeté de la situation car son attitude n'avait plus rien de détendue. « Quand est-ce que vous vous êtes rendue compte qu'il n'était plus avec vous exactement ?
— Ecoutez, si vous n'avez pas d'informations à me donner, laissez tomber. »
Elle tourna les talons tout en sachant pertinemment que le vigil ne voulait pas en rester là : il fallait qu'elle s'éloigne. Dehors, elle se figea sur place, sous le préau qui précédait la rue passante. La grande silhouette d'un homme à la longue barbe l'observait sous son parapluie. Dans le manche de ce dernier, elle le savait, était dissimulée sa baguette magique. Il avait une posture menaçante, à la fixer ainsi sans bouger de l'autre côté de la rue. Redressant le col de son manteau, Poppy prit son courage à deux mains et s'engagea pour rejoindre son époux. Aussitôt, Evelyn se mit en mouvement pour traverser la chaussée avant elle, l'obligeant à s'arrêter de nouveau et à attendre d'être frappée par la foudre. Elle voulut être la première à lui dire quelque chose, mais il la dépassa pour se rendre directement dans le hall du marché. Nul doute à présent que le sorcier avait déjà récupéré Elian, étant donné la contenance dont il faisait preuve.

Lorsqu'il réapparut, ce fut sa voix grave qui lança les hostilités, tandis qu'il reculait d'un pas pour l'empêcher de s'abriter sous son parapluie : « C'est la dernière fois que je quitte mon travail pour réparer tes bêtises.
— Je pensais qu'il me suivait...
— Tu n'aurais pas quelque chose à me demander avant d'essayer de te justifier ? »
Poppy baissa la tête, confuse et pathétique sous la pluie. « Où est Elian ? » Evelyn laissa échapper une sorte de rictus moqueur avant d'engager la marche du retour. Il gardait toujours son parapluie pour lui. Poppy n'osait dire mot à ses côtés. Elle pensait qu'ils transplaneraient à un coin de rue mais il n'en fit rien, la laissant faire trempette comme leur fils quelques heures plus tôt. « Tu ne réponds pas, il va bien ? » demanda-t-elle sans conviction. La Moldue se sentait incroyablement fatiguée. Evelyn possédait toutes les informations, il était donc le seul maître de la situation. Il stoppa sa marche et la fixa de son horrible regard d'analyste, il savait bien que ça la rendait folle de rage. « J'ai cru qu'il était avec moi, ça arrive, d'accord ?! explosa-t-elle.
— En effet, ça peut arriver... » Il fit mine de continuer son chemin avant de se reprendre très vite : « Oh, tu te souviens quand tu as menti sur son âge pour l'inscrire à un cours de boxe anglaise ? Et cette fois où tu l'as laissé prendre le bus scolaire tout seul et qu'il a atterri à Bristol. Sans oublier l'été dernier quand tu l'as défié de toucher la dernière bouée à la mer alors qu'il ne sait pas nager correctement. Je dois dire que tu t'es surpassée, le perdre dans un lieu surpeuplé, c'est du génie ! » C'était la seconde fois depuis très peu de temps qu'elle voyait son mari perdre son calme religieux et, tout comme lors de la première occurrence, elle ne pouvait pas lui en vouloir. Lui était naturellement préoccupé du sort d'Elian tandis qu'elle ne parvenait même pas à l'associer au mot "fils". Le plus dur était de savoir qu'elle pouvait être une bonne mère, Edith en était la preuve formelle. Mais, depuis la naissance du garçon, Poppy n'avait fait que prendre sur elle-même pour ne pas voir la vérité en face : ce lien affectif qui ne s'était pas produit avec Elian était le symptôme de la déchéance d'un mariage qui n'arriverait jamais à se reconstruire.

Devant ce silence qui sonnait comme un aveu, la silhouette du grand sorcier s'éloignait. Elle l'observa gagner plusieurs mètres devant elle. Evelyn connaissait tous les efforts qu'elle fournissait pour essayer de tisser un quelconque lien avec Elian, pourtant il lui semblait qu'elle n'avait été que très peu encouragée dans sa démarche. Il lui semblait aussi qu'elle venait d'être détrônée d'un simple balayement de la main, titres et noms retirés, mais c'était une douleur bien moindre face à la réalisation de son échec avec Elian. A défaut de ne pas ressentir d'affection pour lui, elle ressentait au moins de la pitié : il ne méritait pas ça. Comme un spectre lié au seul homme qui gouvernait sa vie, Poppy s'abandonna à l'automatisme de ses pas, se laissant à présent persuadée que son exil était la seule solution à explorer pour prévenir le drame qui se dessinait progressivement devant eux. Un drame dont elle serait la seule fautive. Après tout, Evelyn n'avait aucun mal à être un bon père pour ce garçon, lui, à défaut d'être un bon mari.
Dernière modification par Elian Kernac'h le 19 avr. 2022, 12:06, modifié 3 fois.

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08 avr. 2022, 19:36
 Cardiff  World's Best Mom  SOLO 
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« Que font-ils maintenant dans cette Forêt ? Hélas ! mon Dieu,
les Loups les ont peut-être mangés ! Tu es bien inhumain
d'avoir perdu ainsi tes enfants. »
– Charles Perrault

7th April, 2038
Appartement des Kernac'h, Cardiff

Occupée à son bureau, Poppy Kernac'h n'avait pas entendu la porte de l'appartement s'ouvrir. Seule la rumeur grandissante des voix de son mari et d'Elian lui parvenait depuis le couloir. Elle jeta un coup d'œil à la porte de la petite pièce pour vérifier si elle était bien fermée et poussa un soupir de soulagement. Déjà. Le garçonnet avait passé le reste des vacances chez la mère d'Evelyn et ce dernier s'était arrangé pour le récupérer au moment de sa débauche. Le lendemain, il retournerait à l'école et Poppy ne le verrait plus que sporadiquement. Cette fois-ci, elle n'espérait pas que les choses s'arrangent d'elles-mêmes, son rôle de mère se résumerait à signer ses contrôles et à préparer le repas du soir. Elle avait baissé les bras, laissant Evelyn s'occuper intégralement du garçon, se tenant à l'écart de leur relation fusionnelle. Ce n'était pas si simple du côté d'Elian, puisque, comme la plupart des enfants, il n'avait aucune limite lorsqu'il s'agissait d'interagir avec quelqu'un, même si cette personne était le pire être que l'univers ait porté. Comme pour prouver ce trait de caractère, le garçon voulut débouler dans le bureau avec un certain enthousiasme : il avait visiblement déjà oublié les événements qui s'étaient déroulés quelques jours plus tôt au marché. Toc. toc. toc. « Maman ? » Toc. toc toc.
« Maman ? » Toc. toc. toc. « Maman ? » Elle leva les yeux au ciel : il tenait cette détermination de son père. Quand ce dernier éloigna le garçon jusque dans le salon, des rires extatiques ne tardèrent pas à retentir. Evelyn était un bon père, ou du moins il n'avait pas eu le choix de l'être pour rétablir la balance, semblant s'être finalement prit au jeu complètement. Il prenait soin d'Edith aussi, à sa façon, mais c'était bien différent de l'éducation qu'il donnait à Elian. Les hommes et leurs fils...

Poppy s'étala sur la table du bureau, les bras croisés. Ils en étaient donc arrivés là, à s'éviter et à faire comme si l'un ou l'autre ne pouvait rien ressentir face à cette situation. Elle aurait voulu au moins s'excuser auprès d'Elian pour soulager sa conscience, mais Evelyn l'avait convaincu que c'était inutile de ressasser cette histoire et, ces derniers temps, sa ténacité contre lui manquait de vigueur. En plus de cela, Evelyn gardait secrète la façon dont il avait secouru son fils, c'était peut-être la chose la plus curieuse de toute cette affaire.
Ses yeux fixaient distraitement son herbier, placé juste à côté de sa tête. Cet herbier, elle l'avait commencé à la suite de son deuxième accouchement sous les conseils d'une psychologue de la clinique, pour lui redonner l'envie de sortir. Du journal dépassait une feuille en papier. Elle en connaissait le contenu mais ne se rappelait plus des mots exacts qu'elle avait utilisé à l'époque pour exprimer ce qu'elle avait ressenti juste après son second accouchement. Toujours affalée sur la table, ses doigts attrapèrent mollement le coin de cette page libre.

"Petit Elian, j'ai du mal à réaliser que tu n'es plus dans mon ventre mais à côté de moi, là, dans cette chambre. Hier, quand l'infirmière t'a posé dans mes bras, il m'était difficile de te regarder, comme si tu étais toujours un peu irréel, comme si tu allais disparaitre comme un pissenlit si on te soufflait dessus. Tout le monde autour de nous dit que tu es un très beau bébé mais"

La phrase se coupait abruptement. A cette époque, elle se culpabilisait davantage lorsqu'elle ressentait des émotions négatives envers Elian et se censurait à tout prix. Aujourd'hui elle avait réussi à accepter toutes ces émotions pour mieux les contrôler, bien qu'elles réussissaient toujours à resurgir de temps en temps... Souvent. Poppy savait comment elle avait voulu finir cette phrase : "Tout le monde autour de nous dit que tu es un très beau bébé mais tu n'as absolument rien en commun avec moi".
A la ligne, plusieurs phrases courtes se succédaient, comme des pensées un peu brouillons. On pouvait y lire "Je suis redevenue cette insignifiante Moldue" ou "Rien n'a changé entre Evelyn et moi, si ce n'est qu'il a trouvé son bonheur dans tes yeux et moi pas". Cette remarque avait terriblement bien vieilli. Poppy se mit à grimacer de douleur, plongeant de nouveau sa tête entre ses bras. La fatigue ne l'épargnait pas et les remèdes qu'Evelyn lui concoctait semblaient manquer d'efficacité contre la puissance de ses migraines. Quelle injustice, d'être la seule à devoir porter le poids de cette fatigue. Evelyn n'attendait qu'une chose tout en étant encore trop incertain de toutes les retombées hypothétiques pour la mettre en exécution. Il évaluait les risques comme le trésorier qu'il était. Après tout, elle se trouvait dans son droit de demander la garde d'Elian après cet inévitable divorce. Toc. toc. toc. Cette fois-ci, la voix d'Elian ne lui parvint pas, bien qu'il se trouvait derrière la porte. Poppy se redressa, endormie sur sa chaise : « Qu'est-ce qu'il y a ?
— Je crois que la porte est fermée... »
La Moldue reposa sa tête sur sa main. Evidemment que la porte était fermée, elle voulait rester seule. Après quelques secondes de silence ininterrompues, le garçon frappa de nouveau à la porte, comme un chat insistant pour rentrer dans une pièce spécifique sans égards pour ses maîtres qui ne demandaient qu'un peu de répit. Que faisait Evelyn ? En se concentrant sur les sons de l'appartement, elle perçut le son de l'eau qui coulait depuis la salle de bain. Ah, le maître des lieux se rafraîchissait. Poppy se déplaça mollement pour entrouvrir la porte. Elian parut stupéfait, mais c'était son expression habituelle. Il tenait une feuille d'arbre dans la main, qu'elle désigna du menton :
« Qu'est-ce que c'est que ça ?
— C'est une feuille d'arbre en forme de cœur que j'ai trouvé hier dans la rue quand on se promenait avec mamie et comme j'ai un copain qui a offert un galet en forme de cœur à sa maman je pense que ça te fera plaisir que je t'offre une feuille d'arbre en forme de cœur comme tu tiens toujours ton herbier à jour tu pourras peut-être y placer cette feuille d'arbre en forme de cœur et puis j'aimerais bien que tu me montres quelques pages de ton herbier parce que c'est joli les plantes en tout cas celles que tu ramasses sont jolies et de toutes les couleurs et elles sentent bon. »
Poppy avait fermé la porte au milieu de la discussion. Elle entendait encore Elian continuer son charabia de l'autre côté, imperturbable. Quelque part, elle savait que c'était une chance à saisir pour obtenir les réponses aux questions qui la taraudaient depuis quelques jours... Elle ouvrit la porte plus franchement comme pour se donner du courage et constata, comme prévu, qu'Elian n'avait pas bougé d'un pouce, la feuille toujours entre ses doigts. La Moldue s'en empara avec une certaine mauvaise volonté et reporta directement son attention sur le garçon dont le visage s'était illuminé. Lance-toi Poppy. Elle chuchota pour ne pas être entendue du sorcier : « Viens, entre. Mais ne touche à rien ! » Elian respecta cet ordre à la lettre, croisant ses mains derrière son dos. Poppy se réinstalla sur sa chaise de bureau et indiqua au garçon qu'il pouvait monter sur ses genoux, ce qu'il fit immédiatement. Ses cheveux lui arrivait au niveau de son menton et elle ne put s'empêcher d'y passer sa main, comparant la sensation à la douceur d'un petit nuage et, bien qu'il était impossible de toucher un nuage, Elian en était bel et bien un pour elle : il était perché là-haut, lunaire, immatériel. Le garçon s'était un peu retourné devant ce contact un peu étrange alors, concentrée sur son objectif, elle se pressa pour ouvrir son herbier à la première page et pour lui demander enfin :
« Qu'est-ce qu'il s'est passé quand tu t'es perdu au marché ? » Elian semblait absorbé par les différentes entrées du journal, il suivait des yeux chaque description de chaque plant séché où se trouvait une petite définition qui correspondait à un mot du langage courant. « Elian ? » Rien ne semblait troubler sa contemplation et, quelque part, pour la première fois depuis longtemps, elle se sentait un peu flattée. C'était ce que devait ressentir Evelyn à chaque fois qu'il utilisait sa magie devant son fils pour l'impressionner. Poppy eut une idée qu'elle qualifia d'ingénieuse pour le faire réatterrir, préparant sa main au-dessus du bureau en bois. Toc. toc. toc. Le nuage se dissipa pour laisser place à un Elian pesant sur ses genoux, prêt à lui confier sa version des événements. Curieusement, Poppy ne se souvenait même plus d'être fatiguée, attentive à ce que le garçon pouvait lui révéler. Son entreprise n'avait pas vraiment pour but de faire taire une possible culpabilité, c'était davantage un moyen de faire un pied de nez à son cher mari : il serait furieux de savoir qu'Elian lui avait raconté ce qu'il s'était passé ce jour-là, et peut-être même pardonné complètement.
Dernière modification par Elian Kernac'h le 18 avr. 2022, 11:33, modifié 1 fois.

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12 avr. 2022, 21:37
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« Poppy au pays d'Elian »


3rd April, 2038
Quelque part ou nulle part
dans les rues de Cardiff

Flic. Flac. Floc. Elian courait après sa maman pour la rattraper,
sans oublier de sauter à pieds joints dans chacune des flaques qu'il croisait.
Il était habitué à être complètement trempé,
la pluie était le temps qu'il préférait !

Tout de même pressé par le présent, le garçon leva la tête,
surpris que sa maman ne soit plus qu'une silhouette.
« Maman ! Maman ! Je suis loin derrière toi ! fit-il de sa petite voix.
Peut-être est-ce de ma faute », se disait-il à chaque fois.

Au marché des Moldus et des sorciers, il avait beaucoup rigolé,
surtout quand la dame avait fait parler Winifred le Perroquet.
Plus tard il aurait pleins d'oiseaux et un zoo,
mais, pour le moment, maman l'avait abandonné dans un caniveau.

Ses jambes commençaient à le faire souffrir de courir,
à vrai dire il ne savait même plus dans quel endroit il fallait atterrir.
« Je suis perdu ! » constata-t-il au monde,
comme s'il voulait que ce dernier lui réponde.

On peut trouver le bonheur même dans les moments les plus sombres...
Il suffit de se souvenir d'allumer la lumière, pauvre concombre.
Dans la poche intérieure de son ciré,
Elian se saisit du gallion que Papa avait enchanté.

Assis au bord du trottoir, la pluie le faisait drôlement grelotter,
mais le gallion serré dans son poing se mit à chauffer.
Dans sa flaque d'eau mille deux cents cinq gouttes d'eau tombèrent,
mais Elian était sûrement le plus mauvais calculateur de l'univers.

Ce n'était pas le cas de son papa adoré,
trésorier dans la fabrique de chaudrons d'à-côté.
Le gallion du sorcier, sur son bureau chauffait au point de produire de la fumée.
Avec ce procédé, le petit Elian pouvait se sentir en sécurité.

Le cœur battant, Evelyn Kernac'h avait d'abord transplané chez lui.
Si Poppy n'avait pas su s'empêcher de faire du mal au petit...
Heureusement qu'il avait fait ensorceler ces gallions,
Il avait su prévoir cette affreuse situation.

Dans la panique le sorcier avait rameuté,
pas moins de la totalité des autorités.
Moldus et êtres magiques avaient leurs propres moyens,
de connaitre les coordonnées exactes de leurs citoyens.

En moins d'une demie heure on retrouva au creux d'une rue abandonnée,
le petit garçon qui ressemblait davantage à un rat musqué.
Le policier, l'air de dire, se gratta la tête :
« Pourquoi avoir remué Ciel et Terre pour retrouver cette drôle de bête ? »

Le grand barbu faillit rendre inutiles les retrouvailles,
tant il serra sur son cœur sa marmaille.
La morale de cette histoire pour lui fut évidente :
il était à deux doigts de transformer sa femme en chaise pliante.

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18 avr. 2022, 12:45
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« Quelquefois cependant c'est ce petit marmot
Qui fera le bonheur de toute la famille. »
— Charles Perrault

7th April, 2038
Appartement des Kernac'h, Cardiff


Des gallions ensorcelés. C'était donc ce dispositif qui avait permis à Evelyn d'être alerté et d'intervenir aussi rapidement. Poppy n'y connaissait rien en matière de magie, mais elle trouvait le principe de ce sort assez dérangeant. Même si elle savait depuis quelque temps que son mari ne lui accordait plus aucune confiance, elle ne pouvait s'empêcher d'être blessée par le fait qu'il agissement maintenant derrière son dos. Elle déposa Elian au sol, qui sembla réfléchir intensément pour savoir ce qu'il avait dit de mal.
« Tu sais, je ne pense pas pouvoir continuer cette mascarade encore longtemps, dit-elle en évitant le regard du garçon. Je fais de mon mieux, je te promets que je fais de mon mieux. » Elle sentit la main compatissante du garçon tapoter son genou... Ou bien voulait-il simplement remonter à hauteur du bureau. C'était hors de question, Poppy sentait qu'elle venait d'épuiser son quota de sociabilisation avec lui. Le pauvre ne devait rien comprendre à ces problèmes d'adultes, sans même savoir qu'il était à l'origine d'une discorde sans fin entre son père et elle. Son père, et elle. Ne pouvait-elle pas être une maman normale, comme toutes les autres, et refaire partie du duo parental exceptionnel qu'elle avait formé avec son sorcier... Un autre petit garçon que lui n'aurait probablement tiré de cette situation que de la tristesse ou de la colère. Bizarrement, elle avait hérité d'un être un peu à part qui ne semblait pas lui en vouloir ou bien ne comprenait rien à rien.
« J'aurais dû ramasser les escargots... », soupira-t-il soudain avec un sourire. Poppy lâcha un rire nerveux, que lui passait-il par la tête encore ? Il ne tarda pas à lui en apporter la réponse : « Avant qu'on se mette en route pour le marché, tu discutais avec la voisine dans la cour de l'immeuble et il y avait pleins d'escargots partout. Partout partout ! Si je les avais ramassés, j'aurais pu les déposer tout le long du chemin jusqu'au marché, comme le Petit Poussin.
— Je crois que tu veux dire "le Petit Poucet". »

Elian sembla réfléchir. « C'est quoi un Poucet ? » Poppy avait la sensation, curieusement pas mauvaise, de digresser. Ils parlaient bien toujours de ce jour où elle l'avait abandonné au milieu d'une foule, et pourtant cet horrible cauchemar prenait des airs de contes de fée dans sa bouche.
« Un Poucet, c'est un enfant comme toi, très naïf... et petit comme un pouce.
— Ha ha comme une pousse ! »
fit-il en désignant l'herbier, toujours ouvert sur le bureau. Poppy sourit : qu'il était bête. « Tu sais Elian, les escargots sont peut-être un peu lents, mais ils auraient fini par bouger et tu n'aurais pas pu retrouver ton chemin de cette façon.
— Ah bon... Alors j'aurais dû ramasser les pétales de rose. Elles étaient toutes tombées à cause de la pluie.
— Je ne vois pas pourquoi tu t'entêtes à vouloir ramasser des choses au sol, tu as passé l'âge de toucher à tout ce qui se trouve par terre. »
Elle pendit la feuille d'arbre par sa petite tige comme pour démontrer ce qu'elle disait, étant donné sa propre aptitude à faire exactement ce qu'elle lui reprochait, c'était assez audacieux de sa part. « Ben alors je n'allais pas trouver des escargots dans les airs... Ils ne volent pas, si ? dit-il, semblant réellement pris d'un doute. Et puis toi aussi tu ramasses que des fleurs déjà mortes au sol, j'ai bien vu que tu ne les cueillais jamais. » Sans vraiment l'écouter, Poppy reprit, tournant un peu la feuille sur elle-même : « Et je ne vois même pas en quoi cette feuille est en forme de cœur.
— Mais si c'est un cœur, regarde ! »
Nullement blessé par la remarque, Elian avait tendu une main dans laquelle Poppy déposa son présent, interloquée. Elle l'observa s'agenouiller et poser à plat la feuille sur le tapis avant qu'il ne lui demande : « Feutre. », comme un chirurgien demandant ses outils de travail. Poppy savait à quel crime il allait s'adonner mais, pour une fois, elle décida de ne rien faire pour l'en empêcher. Il était fascinant, cet enfant. Son enfant. Il ne ressemblait plus du tout à son père, comme ça, ou bien peut-être n'avait-elle jamais pris la peine de dépasser la comparaison physique. Pourquoi ressentait-elle cette curiosité soudaine à son égard ? Le méfait rapidement accompli, Poppy dut s'avouer vaincue : la forme dessinée sur le tapis était bien celle d'un cœur, un peu malade, certes. « Très bien, bravo ! Maintenant tu peux nettoyer », sanctionna-t-elle avec un sérieux à faire pâlir le plus récalcitrant des enfants. Le sourire d'Elian s'étira, le sien aussi. Ils n'étaient plus que deux mêmes idiots dans cette petite pièce.

« Tergeo. » La voix d'Evelyn avait fait éruption et, sans vraiment savoir pourquoi, Poppy s'était rassise convenablement sur son siège en reprenant sa posture sérieuse et concentrée. Pourquoi lui semblait-il avoir été prise sur le fait accompli de quelque chose d'interdit ? La trace dessinée par Elian avait disparue sous le coup de la baguette magique, en même temps que ce moment d'égarement qui, bien qu'elle ne l'avouerait pas immédiatement, venait de panser un peu la culpabilité sourde dont elle était victime depuis plusieurs jours. « Au lit ! Ah... teu teu teu. » Evelyn faisait taire Elian qui cherchait à contester l'ordre. Le garçon se résigna rapidement. « Bonne nuit ! » eut-elle le temps de lui souhaiter avant qu'il ne disparaisse, un peu abattu, dans le couloir. Quelque chose semblait interrompu, inachevé, ou plutôt retournait cycliquement à la case départ. Evelyn avait rangé sa baguette magique et ramassait délicatement la feuille de tilleul. Il reporta ses yeux extralucides sur Poppy qui se sentit obligée de briser le silence : « Eh bien vas-y, dis ce que tu as à dire. » Ces derniers temps, c'était souvent elle qui entamait les conversations, si on pouvait réellement définir leurs joutes verbales comme telles. « Je n'ai rien à dire. » Là, c'était douloureux. Le grand sorcier déposa la feuille sur l'herbier, rendant leur proximité dérangeante. Bien plus dérangeante qu'Elian assis sur ses genoux quelques minutes plus tôt. Il sentait bon, l'aimait-elle encore, rien qu'un peu, au fond d'elle ? « Tu n'as rien à me dire simplement parce que tu ne peux pas me reprocher d'essayer encore », lui assena-t-elle. Le sorcier tourna la tête comme pour décrypter ce qu'elle venait de dire et leurs visages s'effleurèrent presque. A l'évidence, il ne voulait même plus qu'elle essaye. Evelyn s'éloignait et Poppy se sentait elle-même abandonnée au milieu d'une foule d'inconnus qui émettait toutes sortes d'opinions blessantes sur elle. Elle essayait de se convaincre qu'elle pouvait y arriver, mais elle se souvenait aussi de la réticence avec laquelle elle accueillait Elian à chaque fois auprès d'elle. Encore à l'instant. Peut-être bien que c'était peine perdue et qu'elle ne serait jamais la meilleure mère au monde pour Elian, ni même une bonne mère. Ni même une mère tout court.
« Evelyn ? » Il s'arrêta, la main posée sur la poignet de la porte, patientant d'un air méfiant. Poppy s'était levée pour s'approcher un peu, l'allure pathétique.
« Ne marche pas devant moi, je pourrais ne pas suivre... Ne marche pas derrière moi, je pourrais ne pas savoir mener...
— ...Marche à mes côtés et sois seulement mon amie. »
Evelyn et Poppy se scrutèrent comme s'ils photographiaient cet instant, cette dernière ode à leur complicité détériorée. Un jour peut-être, les choses iraient mieux entre elle et lui, c'était impossible à prévoir et pourtant chacun d'eux, au fond, voulait que cela se produise. Même si les dernières tentatives de sauvetage de leur couple échouaient - ou plutôt quand elles échoueront -, les Kernac'h avaient émis ces vœux d'union en toute honnêteté et les respecteraient, c'était ineffable. Il s'agissait à présent de ne plus lutter contre le vent et de laisser la tempête emporter tout ce qui devait disparaitre. S'autoriser ce nouveau départ, c'était le dernier acte d'amour encore possible à réaliser et Evelyn l'avait bien compris : « Ces mots ont perdu de leur éclat, tu ne trouves pas ? » Poppy finit par s'y résoudre, d'un hochement de tête presque imperceptible. Les prochains jours, mois, années deviendraient probablement les plus compliqués de leur vie conjugale mais, au final, ils respecteraient toujours leurs vœux en se pardonnant mutuellement, même séparés. La seule énigme restait incontestablement leurs enfants, et surtout le petit Elian parce qu'Edith était en âge de comprendre ce qu'un divorce pouvait représenter. Elian leur en voudrait sans doute un jour, dans l'hypothèse souhaitable qu'elle ne soit pas seule désignée coupable... Ou bien était-il déjà capable de percevoir le fait qu'elle pouvait difficilement avoir un rôle dans cette situation ? Si Evelyn ne les avait pas interrompu, peut-être que Poppy aurait pu s'en assurer dès à présent, durant leur furtif instant de complicité. Elle n'en retrouverait plus le courage, c'était certain, et devait maintenant lui faire confiance sans le connaitre réellement : car maintenant que tout espoir de survie de son mariage était décimé, elle pouvait percevoir qu'elle ne voulait pas abandonner ce garçon. Evelyn interprêtait son comportement de la façon qui l'arrangeait, mais elle en était persuadée au fond d'elle : elle pouvait encore faire des efforts et parvenir à aimer ce garçon comme il le méritait. De nouveau installée à son bureau, seule dans la petite pièce à demie éclairée, Poppy Jones colla la feuille de tilleul dans son herbier. Se pouvait-il qu'Elian connaissait la symbolique que l'on prêtait au tilleul ? Elle légenda de son écriture minuscule : "amour conjugal". Elle devait lui céder au moins ça : même s'il ne le faisait pas exprès, ce garçon était étonnant. Son sourire s'étira en repensant au récit qu'il lui avait dicté quelques minutes plus tôt. Poppy ne disposait peut-être pas de gallions enchantés pour se lier à lui, mais il y avait bien quelque chose qui pouvait intrinsèquement les astreindre : ils étaient probablement tous les deux les êtres les plus énigmatiques de cette planète, incapables de s'exprimer clairement, enclins à faire face aux problèmes de la pire des façons qui soit et étrangement obstinés dans leur bêtise. Oui, il n'était définitivement pas que le fils d'Evelyn, et elle pouvait en tirer une certaine fierté.

Septième année en RP - Avatar : chouravé à Herminie Peers-chou
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On a tendance à s'assimiler des choses et à les restituer en croyant que c'est de soi alors que c'est d'un autre. – Hergé