Koko attend dans les toilettes abandonnées, elle a un peu peur. L'annonce du retour de sa mère lui a fait un choc. Mais ça passe. Doucement. Cinq jours que dure son désespoir, son malheur. Il était tant qu'elle s'en remette. Un peu. Elle suffoque. Un peu. Mais ça passe. Lentement.
Il faut que tu arrêtes,
Koko,
De te mettre dans des états pareils.
Elle le sait bien, Koko. Elle n'y arrive pas. Pas trop. Elle a sommeil. Elle ne dort plus beaucoup, la nuit. Elle fatigue, là. En classe, elle ne suit plus. C'est difficile. La nuit
C'est pourquoi elle a appelé Cheryl. Elle va venir, ici. L'aider. Elle va sûrement lui dire qu'il ne faut pas se mettre dans ces états pour une idiote incapable. Elle aimerait, Koko. Sa mère lui manque, elle la déteste pour ça. Elle n'a pas les mots. C'est... abominable. Affreux. Tous les mots fonctionnent, à peu près.
Koko espère que son amie ne va pas tarder. Elle tremble. Un peu. Mais ça passe. Non.
Koko prend un bonbon. Qu'elle avale de travers. Elle pense à sa mère. Encore, toujours. Elle ferme les yeux, quelques secondes, le temps d'oublier. Elle aimerait être sourde, un temps, pour ne pas entendre le bazar de la salle. Quelques jours. Encore quelques jours avant de céder.
Elle a mal. Elle secoue la tête.
Il faut qu'elle s'en remette.
- Coucou Cheryl.

Cela faisait un peu moins d'une semaine qu'aux yeux de Cheryl, le comportement de Koko avait changé. Alors que cette dernière était toujours partante pour quoi que ce soit, elle ne l'était plus depuis quelques jours. En cours, elle écoutait à peine. Lorsque Cheryl lui parlait, elle semblait totalement ailleurs. Elle n'était certainement pas tombée malade, non. C'était sûrement un évènement qui avait causé ça, qui la rendait comme ça. Après cinq jours, son amie s'était enfin décidée à lui en parler. Du moins, c'était ce que la rouquine pensait puisqu'elle lui avait demandé de venir aux toilettes abandonnées. C'était pas le lieu le plus glamour, qu'on soit d'accord. Quoi qu'il en soit, la fillette était venue. Koko était une personne qu'elle appréciait, et la voir dans cet état n'était clairement pas source de bonheur.

La première année poussa la porte des toilettes. Elle n'y était jamais venue, du moins, que très peu. Elle y trouva Koko, la mine toujours dépitée. En la voyant, son amie la salua "Coucou Cheryl." C'était une salutation aussi froide que son comportement depuis des jours. Cheryl s'avança d'un pas précipité vers elle et la prit dans ses bras en tapotant son dos. Elle lui répétait ça va aller, ça va aller. Après quelques secondes, elle la relâcha de son étreinte.

- Raconte-moi ce qui ne va pas.

Cheryl s'avance vers elle avec précipitation. Elle essaie de la calmer. Sans grand succès.
Koko se tourne lentement vers son amie. Celle-ci la regarde avec attention. Alors elle lui dit :
- Ma mère est de retour.
Voilà, elle l'a lâché. Ce qui parait basique pour certain est extrêmement difficile pour elle. Sa mère est de retour. La cruelle. En abandonnant son fils Cracmol, en plus. En plus. Toujours.
- Et mon demi-frère est Cracmol. C'est vraiment n'importe quoi. J'ai peur.
Peur de revoir sa mère. Que va dire son père, que va-t-il faire ?
- Elle est horrible, tu sais. Horriblement diabolique. Terriblement belle, aussi.
Si son père retombe dans ses bras, dans sa cage ? Que deviendra Koko, et les cousins, et tante Kim ? Elle ne restera pas bien sage. Non, elle ne restera pas les bras croisés. Son courage est si infime... Koko risque de les abandonner à la première difficulté.
- Je pense qu'elle est revenue parce qu'elle ne peut pas accepter que son fils soit Cracmol. Elle n'a pas dû supporter. Au dernière nouvelle, elle n'est pas à la maison mais elle essaie de convaincre mon père de la garder quelques temps sous notre toit. Il hésite. Il va le faire, c'est sûr. Et ça me met hors de moi.
Elle va gagner. Et Koko ne pourra rien faire. Elle enrage.
Reste sage.
Calme-toi.
Ne t'en fait pas,
Tout finira par s'arranger.
Elle ne le croit plus depuis longtemps, son père.

Cheryl écoutait attentivement les propos de son amie. La première phrase survint "Ma mère est de retour". Cela lui rappelait le retour de son père chez elle. Un enfer. Elle préféra ne rien dire et continuer à écouter ce que la rouquine lui disait. Alors comme ça, Koko avait un demi-frère cracmol, une mère horrible et manipulatrice ? Cheryl cacha sa surprise ; jamais elle n'aurait imaginé ça. Koko, c'était synonyme de sourire, de bêtise, de bonne humeur. Même si le monde entier était triste, elle aurait été celle qui aurait donné de la bonne humeur à tous.

- Attends... Temps mort. Si j'ai bien compris, ta mère a un fils avec un autre homme, et ce garçon est cracmol. Elle veut pas l'accepter donc elle revient chez vous comme si de rien n'était ? Mais c'est ta vraie mère ? demanda Cheryl sans laisser le temps à Koko de répondre.

En y repensant, Cheryl n'avait jamais vraiment discuté de sa famille avec Koko. Les deux fillettes se parlaient fréquemment mais, étrangement, jamais le sujet de problèmes familiaux n'avait été évoqué. Elle savait juste qu'elle vivait avec son père. Et puis, vu la bonne humeur quotidienne de Koko, difficile à deviner qu'elle a des problèmes aussi. Peut-être bien que la Serpentard lui avait aussi dit qu'elle vivait avec sa mère et son frère jumeau, mais rien de plus.

C'est à peu près ça. Cheryl résume bien. Très bien. C'est la vie de Koko, voilà.
- Oui, c'est ma vrai mère. Elle a eu mon demi-frère quand mes parents étaient... encore ensemble. Après, ils ont divorcé car il n'y avait pas que ça, et elle a épousé le père de mon demi-frère. En gros.
Koko sent que ce qu'elle raconte n'est pas très clair. Mais c'est la meilleure façon de décrire sa mère. Elle pense. C'est un peu compliqué, à la maison. Non. C'est catastrophique.
- J'ai peur de revoir mon grand-père... Mais il n'y a pas de raison... Non...
Elle s'exprime sans filtre, pour une fois. Pour ça, Cheryl est fantastique. C'est facile de se confier. Elle pense.
J'ai peur,
J'ai peur,
J'ai peur,
J'ai peur.
Elle se calme, un peu.
- Enfin, bref, j'imagine qu'elle va encore tout foutre en l'air. Mais ce n'est pas de sa faute... Elle a juste fait les mauvais choix...
Sa plus grande peur, faire les mauvais choix. Perdre le contrôle. Difficile, compliqué, complexe, qui sait quels impacts plus tard ça aura. Elle va vraiment devenir folle...
Et il va se passer quoi, maintenant ?
Plus rien. Vide. Noir.
Bonne chance, vraiment.
Koko ne va pas bien. Elle n'aime pas le voir. Elle se sent vide.
- J'imagine que tout commencera une fois que je serais au manoir...

Cheryl écoutait sa camarade parler. Au ton de sa voix et des phrases qu'elle prononçait, la fillette sentait bien que quelque chose ne tournait pas rond. Même pire, que ça allait mal. Vraiment mal. Ce que Koko racontait sur sa mère la stupéfiait ; et le pire dans tout ça, c'est qu'elle ne semblait pas remontée contre sa mère. Enfin, tout semblait mélangé dans sa tête. Au départ, elle disait qu'elle était horrible, et maintenant, elle disait simplement qu'elle avait fait les mauvais choix. Cela reflétait clairement une pagaille sans nom dans sa tête.

- Euhm, Koko, désolée de t'interrompre mais... tu dis que c'est pas la faute de ta mère ? Tu plaisantes ? Si t'es dans cet état, aujourd’hui, c'est à cause d'elle. Peut-être qu'elle a fait les mauvais choix mais en attendant, c'est toi qui souffres de ça.

La fillette avait réagi de manière brute, mais c'était sa seule façon d’exprimer à quel point elle était révoltée. Elle ne voulait évidemment pas crier sur Koko, loin de là, c'était d'ailleurs pas le moment pour ça. Mais comment pouvait-elle nier le fait que tout ça soit la faute de sa mère ? Évidemment que ça l'était. C'était la faute à qui d'autre, sinon ? Le pape ?

- Ton père il en dit quoi, lui ? demanda-t-elle en baissant le ton.

La faute de sa mère. Une évidence. Pourtant, elle a souffert. Sa mère. Pas de chance.
- C'est comme ça. C'est ma mère. Elle est mieux que son père à elle. C'est déjà ça.
Son père ne laissera personne d'autre que sa mère venir à la maison. Parce que, d'une certaine façon, c'est aussi chez elle. Non. Un peu, comme même. C'est chez elle.
- Mon père la déteste. Mais il l'aime aussi. Il sait qu'elle est horrible. Je ne sais pas trop ce qu'il pense. Mon père est un mystère...
Toujours derrière un masque, il ne sème. Rien. C'est étrange, chez Koko. Rien de concrets, que des secrets. Rien de très bien. Juste des mots.
- Ça fait du bien d'en parler.
avoue-t-elle avec un sourire timide. Elle ne ment pas, c'est vrai. Peut-être est-ce moins vide. C'est vrai.
Peut-être que ce trou noir,
N'est plus si noir.
Peut-être que...
Peut-être qu'un espoir
Est encore là,
Par là.
Peut-être que... C'est mieux ainsi. Oui. Dans l'ordre des choses. Ça devait arriver. C'est arriver. L'ordre des choses. Mais c'est triste, un peu. Pauvre gamin laisser seul, sans magie. Pour le protéger. Pour le sauver. C'est peu. C'est la vie.
Injustice.
Eh, Miss,
Tu te souviens,
De moi ?
Oui, très bien. Grand papa.
T'es fou toi.
Absolument. Grand papa. Fou, exactement. Ce sont les bons mots. Se dit Koko.

Koko semblait aller mieux, et ça se voyait. Heureuse de voir la mine de sa camarade s'éclaircir, Cheryl lui sourit de manière compatissante et murmura :

- C'est normal. T'es pas toute seule, ok ? Dans ma famille aussi, il y a des imbéciles. Un en particulier.

La première année fit allusion à son père en tripotant la manche de sa longue robe. Elle n'avait jamais osé parler de sa famille à quiconque, en particulier de ce qu'ils appellent "son père". Elle ne le considérait plus comme son père ; une personne comme lui n'avait aucune importance aux yeux de la rouquine.

Alors qu'elle se rendit compte qu'elle s'était mise à parler de sa famille sans s'en rendre compte, elle s'interrompit avant de secouer vivement la tête et demanda en changeant rapidement de sujet :

- Le père de ta mère, il est comment ?

Vu la façon dont son amie décrivait son grand-père, il ne devait pas être l'un de ceux qu'on appellerait comme "aimable". Pire que son père ? Peut-être bien. De toute façon, la simple expression de visage de Koko lorsqu'elle parlait de lui en disait long. Faisait-il peur ? Etait-il terrifiant ? A en voir Koko, on n'aurait jamais pensé que des complications comme telles étaient présentes dans sa vie. Et pourtant, on dirait bien que sa famille n'était pas toute rose, loin de là.

@Koko Kayla Désolée pour le délai

Le un en particulier surprend Koko. Elle se doute bien que la vie de Cheryl n'est pas rose - qui a une merveilleuse vie ? Mais la rousse n'avait jamais mentionné sa famille. En fait, elle n'avait jamais vraiment parler de ça, la vie. Sujet tabou, sans mot. Apparemment, cette fameuse personne n'avait pas empêcher Cheryl d'être une merveilleuse fille.
- Le père de ta mère, il est comment ?
La question qui fait mal. Très mal. Il est comment, grand-papa ?
Inhumain. Un monstre, cruel, assoiffé. Il a ces regards de meurtriers. Qui font peur. Il n'est pas saint. Il fait peur.
- Pire que ma mère. Au moins, elle, elle a comme même des sentiments.
Koko n'ajoute rien d'autre. Elle ne veut pas en parler. Ça fait six ans qu'il est parti. Et ça lui convient. Très bien. C'est fini. Rien d'autre.
- C'est fou comme les imbéciles aiment emmerder le monde ensemble...
Elle n'en pense pas moins. Ils pourraient embêter chacun de leur côté. Ça ferait moins de dégâts. Ils ne doivent pas être si idiots que ça. Elle aimerait les frapper. Un à un. Mais elle n'en a pas la force, le courage.
N'oublie pas,
Tu dois
Rester sage.
Koko sourit. Enfin. Il était temps. Elle a envie d'entendre son amie scander la débilité des gens. C'est drôle, c'est bien. Mais elle ne rit pas. N'exagérons pas. Il lui reste du temps, encore. Encore. Un peu, c'est ça.

Ne t'inquiète pas, prends ton temps

Une fois sa question posée, l'atmosphère s'alourdit soudainement, l'aura de Koko s'assombrit. Elle lui annonça qu'il était pire que sa mère. De la façon dont elle décrit sa mère, Cheryl avait déjà une idée de ce qu'était sa mère : une personne détestable. Mais alors si son grand-père était pire, la première année n'aurait su que dire.

La fillette ne dit rien et attendit que son amie poursuive ce qu'elle disait. Après quelques secondes, cette dernière ajouta une phrase qui interpella Cheryl.
C'est fou comme les imbéciles aiment emmerder le monde ensemble.

- T'as bien raison Koko.

La première année avait sorti cette phrase de façon spontanée, sans réfléchir. Les imbéciles ça courent les rues. Depuis qu'elle était en primaire, la jeune sorcière avait toujours considéré ceux qui s'opposaient à elle, ceux qui pensaient différemment, comme des imbéciles. Son père, c'était un imbécile hors pair. Même pire qu'un imbécile. Alors que la Serpentard pensait justement à lui, son regard se posa sur son amie.

Finalement, sa camarade finit par sourire. Un sourire que Cheryl n'avait pas vu depuis un bon bout de temps. La fillette se mit à sourire également, heureuse de voir la bonne humeur revenir peu à peu chez Koko.

- Ça va mieux ? demanda-t-elle en se levant. D'ailleurs, ne fais pas la tête pour ça. Les imbéciles ne nous atteindront jamais.