Je suis en proie à un gros dilemme. Me rendre dans ma salle commune dans le but d'y saisir crayons et papier pour m'améliorer à la pratique artistique, ou alors tenter la farce que j'ai en tête depuis que j'ai adopté mon araignée. Enfin, presque. Ce stratagème m'est apparu comme une idée brillante le jour suivant celui de mon acquisition, donc c'est quasiment pareil ! De base, il faut d'ailleurs savoir que j'aurais préféré la mettre en œuvre lors du déjeuner précédent, mais Théo n'avait pas l'air trop emballé. Il semblait beaucoup tenir à son déjeuner tranquille, alors j'ai accepté de faire une concession.

Mais à présent... J'ai vraiment envie de tenter. De voir la personne se rendre compte qu'elle a une araignée dans les cheveux, ou bien sur ses épaules. D'être aux premières loges de sa réaction paniquée... Cela me paraît simplement phénoménal. Des étincelles me parcourent les yeux alors que j'y songe.

Puis justement, alors que je caresse distraitement Aiwylittu qui se trouve dans le creux de ma main gauche, mon regard se pose sur une silhouette au loin. L'idée de la blague se fait plus pressante. Serait-ce ma future victime ? Ce n'est pas encore certain, mais de toute manière, elle arrive à point nommé. Je l'observe qui se rapproche, ralenti le pas... Lorsque je me rend compte que cette silhouette n'est autre qu'un adulte. Je grimace. D'un côté, la blague ne me paraît que plus amusante, mais de l'autre... Je n'ai rien contre cet inconnu, peut-être qu'il est très agréable. Je reste donc immobile quelques instants, indécis, lorsque finalement la raison prend le pas. C'est un adulte, ce qui implique qu'il doit forcément se croire supérieur, ou je ne sais quoi d'autre. Je parie qu'il prend même plaisir à donner des retenues à la pelle, c'est évident !

D'un geste qui se veut doux, je dépose alors ma petite araignée, que je juge toute mignonne, sur l'épaule cette personne. Celle-ci vient à peine de me dépasser, et je me trouve par conséquent parfaitement dans les temps. Allez, file Aiwylittu, viens rétablir la justice dans cette école.

Cette fois-ci, Diarmuid ne s'était pas présenté au repas du midi, il avait profiter de la pause de mi-journée pour traiter des affaires personnelles. Familiales même, et, après être passé à la volière pour donner à Hermès une bonne excuse pour quitter se congénères et retrouver un peu de calme en restant à Dublin. Il le connaissait l'animal, c'était un hibou endurant qui pouvait voler longtemps. Mais il était tellement solitaire que la volière de Poudlard était un supplice pour lui. Rester à l'appartement, c'était une bonne excuse pour - généralement - ne pas se faire prier et délivrer sans rechigner les lettres qui lui étaient confiées. Après ce détour chez les volatiles où le nouvel infirmier avait évité les attaque de fientes avec brio, voilà qu'il avait pour but de rejoindre les cuisines pour demander aux elfes un en-cas à manger d'ici une heure, ou deux s'il avait finalement du monde à l'infirmerie, quelques fruits, un peu de pain et de fromage, il n'avait pas besoin de plus.

Songeant également à un moyen de parler à sa sœur qui le fuyait ouvertement depuis son arrivée un mis plus tôt, Diarmuid traversait un couloir pour rejoindre un escalier qui avait eu la bonne idée de fuir alors qu'il allait poser le pied sur la première marche. De toute évidence, être un adulte du château ne donnait pas de passe-droit pour l'entité magique, si un escalier avait la bougeotte, il avait la bougeotte. C'était tout, il n'était pas à quelques mètres près. Mais il stoppa d'un coup sa progression. Quelque chose l'avait gratté dans la nuque, il venait donc - assez naturellement - de porter sa main à la racine de ses cheveux. Mais ce qu'il trouva sous la pulpe de ses doigts lui fit arrêter sa marche et blanchir son visage d'un coup. Un corps duveteux, des pattes toute aussi poilues et nombreuses... Araignée, une grosses araignée se trouvait présentement sur lui, en train de grimper sur son crâne. Lui qui n'était pas à l'aise avec les animaux et créatures en tout genre, il ne se sentait d'un coup pas très bien. Il fallait éjecter la bête rapidement et pour ça, il voyait une option acceptable. L'irlandais avait beau ne pas être gaucher, il se saisit néanmoins de sa baguette de cette main et pointa l'arrière de sa tête: "Arania Exumai." L'effet fut immédiat, l'arachnide vola. Diarmuid chercha à la suivre du regard mais ses prunelles tombèrent bien vite sur un élève qui devait tout au plus être en quatrième année, peut-être même en troisième.

Je tente de me retourner discrètement pour observer la réaction du fameux individu. J'avance à pas très lents, et j'espère d'ailleurs que personne d'autre ne se trouve dans ce présent couloir, car j'aurais du mal à justifier mon attitude.

Ah, voilà l'adulte qui passe sa main dans son cou... Il va crier ? Il... QUOI ?

Au ralenti, j'observe mon araignée voler à cause du sort. Mais qu'est-ce qu'il a fait, ce fou ! Il est complètement inconscient, enfin ! Non mais lancer des sorts de cette puissance à des animaux !

– Aiwylittu !

Je ne peux m'empêcher de m'inquiéter, alors que je me dépêche de m'approcher du petit corps à huit pattes qui se trouve au sol. Ma pauvre araignée... Tandis que je la saisis délicatement, je ne peux m'empêcher de me retourner pour lancer un regard noir à cet homme. Mais quel malotru, franchement ! Je n'ai pas franchement envie de lancer la discussion, parce que c'est encore moi qui vais être en tort et blablabla, mais ce prof — enfin je ne l'ai jamais vu dans une salle de cours, tiens — mériterait bien que j'exprime mon mécontentement face à une telle action irresponsable.

Préoccupé, je me tourne à nouveau vers ma petite araignée toute mignonne, que j'examine plus attentivement. Elle n'a pas l'air en si mauvais état, mais je ne suis pas tranquille tout de même. Avec toutes les horreurs que j'ai vu en Soins au Créatures Magiques depuis le début de l'année... Qui sait, cela pourrait être grave !

La réaction de l'élève, qui se trouvait juste derrière lui, fut immédiate. Au moment où les yeux du médicomagie irlandais se posaient sur lui, l'adolescent criait ce qui devait être un nom tout en se jetant à la suite de l'arachnide pour la saisir délicatement dans ses paumes. Dans la tête de Diarmuid, qui n'en laissait pourtant rien paraître, l'association de l'animal doté de huit pattes avec le qualificatif "de compagnie" ne se faisait tout bonnement pas.

En attendant le jeune le fuisilla du regard avant de se préoccuper à nouveau de sa bestiole. "C'est votre araignée?" S'enquit le châtain de son accent qui ne pouvait que rappeler celui de sa soeur a toute personne qui la côtoyait un temps soit peu. Il poursuivit, toujours posément: "Ce sort ne fait que les éloigner de leur position initiale, elle n'est pas tombée d'assez haut pour être blessée." Parce qu'elle n'était pas allée bien loin. Son but avait été de déloger l'animal de sa nuque pas de le tuer, il n'avait donc pas mis énormément de puissance magique dans son sortilège d'expulsion.

Restait le pourquoi du comment une bestiole domestique - par les Fondateurs, rien n'y faisait... - avait finit par déambuler dans ses cheveux plutôt que dans le dortoir de son propriétaires ou même dans ses cheveux à lui si les excroissances de kératine lui plaisait tant!

– C'est votre araignée ?

Non, elle appartient à Merlin. Ou peut-être à sa femme, je n'en suis pas certain. Je ne cherche pas à retenir l'expression presque méprisante qui se peint sur mon visage. Bien sûr que c'est mon araignée, il croit vraiment que je vais me précipiter au chevet de n'importe quel animal mal en point ?

– C'est ça.

Je tâte ce qui me semble être le ventre de mon animal — enfin à vrai dire, je n'en sais pas grand chose, je n'ai jamais étudié l'anatomie des arachnides en détail — pour essayer d'y détecter quoi que ce soit d'anormal. La bestiole remue, et je soupire. Voilà qu'en plus elle en rajoute du sien ! Me voilà bien parti. Mais soudain, la voix de l’adulte résonne de nouveau non loin, et je me retourne. Oh, il est encore là, lui ? Après tout, c'est vrai que je ne l'ai pas entendu s'en aller...

Ses paroles attirent d'ailleurs mon attention — ainsi que son accent qui me semble quelque peu familier — et je scrute ce visage posé. Je ne dois pas relâcher ma vigilance, cet homme reste en effet un adulte. Mais tout de même, il n'irait pas jusqu’à me raconter des sornettes... Si ? Enfin peu importe, mon araignée passe en priorité. Je peux bien ravaler quelques instants ma fierté.

– Vous... en êtes certain ? Enfin je ne me sentirais pas bien moi, si on me jetait de cette manière.

Car c'est un peu comme tomber du deuxième étage, non ? En admettant faire un rapport entre la taille et la distance de chute... La question reste à creuser.

Une araignée comme animal de compagnie? Après le serpent d'Owen il pensait avoir vu l'essence de l'incongruité comme animal de compagnie... De toute évidence il en avait encore à apprendre sur ce sujet. Lui n'était pas très animaux, comme son père, et pas spécialement à l'aise. Il savait prendre soin d'Hermès et avait développé une relation assez particulière avec son Grand Duc à base de 'je t'aime, moi non plus'. C'est que le hibou avait son caractère et Diarmuid le lui rendait bien.

L'infirmier observa ensuite le jeune vérifier l'état de santé de son arachnide puis s'étonner de l'affirmation qu'il venait de faire à propos de la hauteur de sa chute. "Certain." Confirma le châtain avant d'argumenter son affirmation. "La densité du corps des araignées fait qu'elles survivent à des chutes assez hautes. Une taille d'homme c'est comme tomber de sa chaise pour nous. Elle n'a même pas produit de fil de soie pour tenter de s'accrocher quelque part. Et elle n'est pas recroquevillée. Ce n'est pas ma spécialité mais elle n'a rien de grave en soit. Et si vous en doutez vous pouvez toujours aller demander au professeur de soin aux créatures magiques." Jae Dawson devrait être en mesure de répéter à peu de chose près la même chose que lui. Mais le garçon serait peut-être rassuré de le voir réellement ausculter la bestiole plutôt que de seulement sortir des connaissances théoriques. Non parce que lui, autant tenter de faire ami avec la bousouflette d'Annaëlle il voulait bien -cuisants échecs jusqu'alors - autant une araignée... Non.

Les yeux posés avec une attention sans faille sur l'adulte, je laisse la sérénité qui se dégage de ses mots me gagner. Ma respiration se calme, et je me surprends à pousser un soupir de soulagement alors que ma main vient caresser le corps duveteux de mon animal.

Pourtant, quelques paroles de cet homme me font tout de même redresser la tête, l'incompréhension m'envahissant. Comment ça, ce n'est pas sa spécialité ? Comment peut-il connaître tant de chose sur les araignées, alors que ce n’est pas sa spécialité ?

– Com... ?

Je fronce les sourcils, tandis que je laisse ma question inachevée, pris par les réflexions qui m'assaillent. Évidement, je sais très bien que cet homme n'est pas professeur de soins aux créatures magiques — il n’a pas une once d’ascendance asiatique, c'est certain ! —. Et pourtant... Je ne sais pas, je me disais que c’était peut-être... Rah, ça ne colle absolument pas, non !

Finalement, agacé de tourner en rond de cette manière, je finis par émettre mes interrogations de vive voix :

– Ce n'est pas votre spécialité, mais vous en connaissez autant sur les araignées ?

Il n’essaie pas de me dire ce que je veux entendre pour que je le laisse tranquille, hein ? Ah, parce que c’est bien un truc d’adulte ça, de faire des promesses pour être tranquille puis ne jamais les tenir ! J'en ai été victime bien trop de fois à mon goût...

Alors que Diarmuid pensait avoir réussi à calmer les angoisses de l'adolescent blond qui tenait délicatement sa précieuse araignée entre les mains, il dû se rendre à l'évidence... la réalité était tout autre. Question avortée, sourcils froncés, temps suspendu devant la mine en réflexion et enfin, une vois teintée d'agacement qui posait un question. "Effectivement." Répondit posément Diarmuid qui ne se voyait pas s'emporter avec un élève, comme ça pouvait lui arriver parfois avec des personnes dont l'âge correspondait plus au sien. Pas comme s'il y avait eu quelques exemple pendant cette période où il sortait presque chaque soir où il était libre, mettant sa santé en jeu. Entre autre choses.

- "Ma spécialité ce sont les soins aux humains dotés de pouvoirs magiques." Dit-il avec le brin d'humour qui le caractérisait. "Mais j'ai étudié les Soins aux Créatures Magiques à Poudlard et ait fait preuve de curiosité. C'est comme ça que j'ai appris quelques bases sur la santé des araignées." Mais qu'il ne lui demande pas de l'inspecter en long, en large et en travers. Un rapace d'accord, un félin ou un canidé passerait, un boursouflet pourquoi pas... Mais le reste des bestioles, il faudrait se contenter des informations qu'il tirerait du visuel. "Mais si vous avez peur, on peut même aller voir le professeur Dawson ensemble." Ca allait sacrément serrer son planning que d'aller au fond du parc pour faire constater à sn collègue l'état de l'arachnide, mais s'il fallait ça pour que le gamin se rassénère enfin, il le ferait.

L'assurance calme dans la voix de l'adulte me fait quelque peu reprendre mes esprits. Ne soit pas paranoïaque, Nolan ! Après tout, s'il avait réellement voulu me nuire, il m'aurait simplement envoyé dans le bureau de mon directeur de maison. Ces pensées se frayent confusément un chemin dans mon cerveau, tandis que j'écoute la suite du discours de l'adulte.

« Ma spécialité ce sont les soins aux humains dotés de pouvoirs magiques. »

Que... ? Les yeux écarquillé, j'observe à présent le châtain d'un tout nouveau regard. Les soins ! Il a une spécialité en soins ! Le voilà qui me propose justement de rendre visite au professeur de Soins aux Créatures Magiques, cependant, je secoue énergiquement la tête. Pas besoin, je lui fais confiance, à présent.

– C'est trop stylé !

Soins aux humains dotés de pouvoirs magiques... Mes yeux brillent tandis que j'imagine un super docteur. Ça fait terriblement sérieux, comme appellation ! Je voudrais bien faire cela, moi aussi. Je m'imagine déjà au chevet de héros tels que Harry Potter. Décidément, c'est terriblement classe, comme fonction !

– Je vous crois, vraiment, je suis désolé pour mon attitude. J'étais inquiet.

J'espère qu'il ne l'a pas trop mal pris... Si j'avais su, je n'aurais pas été pris d'une telle méfiance. Enfin quoique, je ne l'aurais peut-être pas cru. Il a bien fait de m'en parler après m'avoir assuré qu'Aiwylittu se portait bien.

D'ailleurs, qu'en est-il de ma pauvre araignée ? Toujours dans ma main, je la sens se tortiller. Tout doucement, j'essaie alors de la calmer, et je la pose sur mon épaule. En général, elle apprécie cet endroit.

– Allez, ça va. Tu vas bien, le monsieur très doué l'a dit.

Ma voix se fait plus posée, et je suis vraiment soulagé qu'un adulte de haute confiance ait été là. Je n'ose imaginer si ça n'avait été qu'un vugaire professeur... Je ne tenterais plus de farces sur un adulte avec mon araignée, c'est certain !

Sa figure de style n'avait pas spécialement eut l'effet auquel il s'attendait. L'expression béate du gamin, ses yeux brillants... à des miles de la colère qu'il exprimait quand son araignée avait fait un vol plané magique. Diarmuid hocha la tête. "Je peux comprendre." Bon, inquiet pour une araignée ça le dépassait, mais c'était l'animal de compagnie - il pourrait en frissonner - de l'adolescent qui tournait de nouveau son attention plein vers la bestiole munie de huit pattes bien trop velues et agitées au goût de l'infirmier scolaire. Et voilà qu'il la plaçait sur son épaule. Lui ne manipulait Hermès que sur un gant adapté pour sauvegarder son avant-bras, et subissait les assauts d'Ophélie jusqu'à ce que sa maîtresse ait finit de rire de la situation. Quoiqu'il attendait maintenant que la boursouflette se lasse, ça durait ainsi moins longtemps et les deux amoureux pouvaient ainsi passer à autre chose que de le débarrasser de la boule de poils un brin jalouse.

- "Faites attention qu'elle ne se promène pas n'importe où. Si je ne suis pas très à l'aise avec les araignées, certains sont paniqués en les voyant et pourraient être plus... virulents." S'il avait été plus cru, il aurait parlé de toutes ces personnes qui les écrasaient sans autre forme de procès. Mais le but n'était pas de parler de la mort de son animal au jeune garçon.