Alice se faufile rapidement dans la salle de répétition. Elle aimait tellement ce lieu où la musique était reine. En plus de ses cours, la brune venait ici dès que le temps lui permettait. Le professeur qu’elle connaissait bien était très gentil, l’enfant connaissait également l’ancienne cheffe de chœurs, aussi sympathique.

Sortant sa partition, elle la pose fièrement sur le pupitre du piano. C’est une musique qu’elle avait écrite elle-même en juin 2044. Évidemment, la lionne la connaissait par cœur, mais le fait de se servir d’un papier aussi ancien la touchait beaucoup émotionnellement. Surtout deux choses qui l’amusaient et lui faisait remonter de vieux souvenirs. La première, son écriture enfantine et tremblante. La deuxième, la phrase écrite en haut à droite "Pour Aaron, la musique de ton âme est éternelle". Voilà la personne qui l’avait inspirée quand elle était plus jeune.

La porte laissée entre ouverte, l’Anglaise la laisse ainsi pour avoir comme une connexion avec le monde extérieur. Fermant les yeux et laissant son cœur partir avec le piano, elle commence à jouer la mélodie. Ce n’était pas la meilleure qu’elle eut jouée, mais celle qui lui apportait le plus de souvenirs. Notamment ceux avec Aaron, elle s’amusait tellement à ses côtés ! Ce sont les seuls moments où Alice se sentait vraiment elle, vraiment bien, vraiment vivre. Réaliser ça la touchait tellement que la troisième année avait les larmes aux yeux. Heureusement, elle pourrait utiliser l’excuse du piano pour toute personne trop curieuse qui oserait l’interrompre.

Ce jour là était assez particulier, depuis ma rentrée deux semaines auparavant, je consacrais généralement tout mon temps libre à m'amuser avec Alice, à faire diverses activités, discuter, jouer, faire des farces aux autres élèves etc... Mais pour une fois, elle n'avait pas reçu ma lettre envoyée par mon hibou du matin, ce qui implique nous n'avions donc pas pu nous donner rendez-vous. Une fois les cours terminés, j'avais passé deux heures à errer dans le château et ses environs à la recherche d'Alice, parcourant les différents endroits où nous avions l'habitude de nous voir : le parc, la bibliothèque, la cour de la tour de l'horloge, le couloir proche de ma salle commune...

Mais elle était pour une fois introuvable, et les différents élèves de Gryffondor à qui j'avais pu demander ne semblait pas savoir où elle était non plus. Me rappelant des différentes conversation qu'on avait pu avoir par le passé, je me souviens qu'elle avait mentionné adorer aller dans la salle de répétition régulièrement lors des deux premières années de sa scolarité, alors je décidais d'aller y jeter un œil.

Approchant de la pièce, je pouvais entendre un air de piano depuis le couloir, air qui m'étais familier mais je n'arrivais pas à me rappeler pourquoi. Cependant, j'étais sûr d'une chose : Alice en était à l'origine. Elle avait une manière de jouer assez particulière, un tempo bien respecté et un toucher qui se ressentait à l'oreille.

Alors je m'approchais de la porte, et en entrant, je la vis de dos, seule dans la pièce en train de jouer, très concentrée. Tout en restant silencieux, je m'approchais d'Alice, l'écoutant jouer, cherchant à ne pas encore me faire remarquer pour ne pas qu'elle arrête. Assez rapidement, je pus remarquer qu'elle avait les yeux fermés alors, animé par une envie de rendre le moment intime alors je sortis ma baguette et chuchotais un sortilège en pointant ma baguette vers les bougies de la pièce pour les éteindre grâce à mes lectures et quelques entrainements qui me permettaient d'avoir un peu d'avance sur les autres élèves de mon année.

Alice avait l’étrange sensation de sentir une présence près d’elle, et un doux parfum flottait à présent dans la pièce, celui d’Aaron à coup sûr ! Les souvenirs devaient vraiment rendre la chose réelle, et puis, elle trouverait ça stupide d’arrêter sa musique, d’ouvrir les yeux et de se retourner pour s’en assurer. Son imagination et son désir de le voir devaient juste lui jouer des tours.

L’Anglaise entame la partie suivante, la mélodie s’accélère alors, devenant encore plus imprégnante et plus touchante. Une larme coule le long de sa joue, mais la lionne ne peux malheureusement pas l’essuyer sans s’arrêter de jouer, elle la laisse alors couler doucement sur son visage. La larme, un peu salée laissait de l’humidité sur sa joue droite.

Le piano, c’était une façon autre que de voir le Serdaigle de se retrouver. Enfin, surtout la musique, qu’elle l’écoute, la joue ou bien la chante, l’enfant savait qui elle était et ce qu’elle voulait devenir, mais également son but dans la vie. Et ça lui remontait bien souvent le moral. Mais… elle aurait préféré être avec lui que de jouer seule dans cette pièce.

Pourtant, rien ne l’empêchait de courir le retrouver. Mais quelque chose au fond d’elle hésitait, avait peur de déranger, peur de tout gâcher, la jeune fille savait que dès qu’elle le verrait, elle n’hésiterait plus une seule seconde, mais il faudrait déjà qu’elle ait le courage d’aller le voir…

Toujours en approchant silencieusement, je me laissais transporter par la douce mélodie que ma cousine.. enfin... Alice, produisait. Elle était, comme d'habitude, merveilleuse et bourrée de talent.

Une fois arrivé à ses côtés, toujours sans faire de bruit, je me mis sur sa gauche avant d'approcher mes mains du clavier. J'avais vraiment envie de me joindre à elle afin que nous jouions à quatre mains, mais j'hésitais à le faire par peur de gâcher son œuvre en ne respectant pas correctement le tempo ou en jouant dans la mauvaise gamme. Et le souvenir me revint, je savais désormais pourquoi cette musique m'étais familière, un vieux souvenir de quand nous étions plus jeunes, ce jour là je n'avais pas osé me joindre à elle. Mais il fallait que je me rattrape... Pourtant je le savais, je savais que ça lui ferait plaisir même si je n'offrais pas la meilleure des performances.

Alors je pris mon courage à deux mains, posant mes mains sur les notes graves du clavier, après quelques secondes les premières notes étaient jouées. Étonnamment j'étais assez rapidement plutôt fier de ma prestation, j'avais réussi à jouer dans les temps tout en gardant le tout sonnant juste. Tout en jouant je tournais discrètement le regard en direction d'Alice pour voir si elle s'en était rendu compte, et surtout, essayer de comprendre ce qu'elle en pensait.

La musique continuait et elle ne pouvait s’empêcher de penser au Serdaigle. Mais qu’est-ce qui lui prenait franchement à s’imaginer qu’il était là ? En plus, elle ne se concentrait même plus sur sa musique. Replongeant à nouveau dans son univers, elle arrête un peu de penser à lui.

Une chaleur s’approche derrière elle, ce n'est pas possible, Alice se convainc de rêver. Soudain, des notes plus graves accompagnent la mélodie, une personne, c’était ajouté, même les yeux fermés, elle savait qui c’était, Aaron. Son doux parfum, son merveilleux contact, son unique présence rassuraient la brune et la mettaient à l’aise.

Lors de leur dernière rencontre, il l’avait tellement aidé et réconforté qu’aucun remerciement ne serait assez puissant pour lui rendre son aide. Bien que ce ne soit pas son cousin, elle l’aimait toujours autant, voir plus, cette histoire avait renforcé grandement leur entente et leur lien de confiance. Elle en ressortait que plus forte au final. Mais ce n’est pas pour autant qu’elle remerciera ses parents de cette histoire et de cette fichue annonce !

La mélodie continuait s’accordant parfaitement avec l’instant. Pour le regarder discrètement, elle entrouvre les yeux, remarquant au passage la salle plus sombre qu’auparavant. C’était agréable. Puis elle se retourne donc vers lui, histoire de l’observer, tombant directement sur son regard vu qu’a sa plus grande surprise, il l’observait déjà.

Son regard perçant se dirigeait vers moi, me laissant admirer les différentes nuances de marron qu'il renfermait. C'était clair, elle adorait ce moment tout autant que moi, réalisant que nous vivions un moment intense et mémorable que nous ne serions pas prêt d'oublier.

Après quelques minutes à jouer la première musique, tous deux extrêmement concentrés, en nous regardant de temps en temps dans le blanc des yeux, regards parfois accompagnés d'un sourire amical, nous approchions de la fin de la partition... le tempo se calmait petit à petit et l'intensité des notes diminuait progressivement. Une fois la dernière note jouée, il paraissait évident que nous étions rentrés en symbiose, nous mains étaient entrées en harmonies comme les notes que l'on jouait. La partition qui suivit fut comme une évidence à nos yeux, nous n'avions pas eu besoin de parler ou même de tourner les pages de son carnet pour retrouver la bonne partition que nous savions directement quelle musique jouer. Nos mains se mirent en mouvement au même instant, jouant les bonnes notes, permettant de reconnaitre presque instantanément que nous avions tous les deux fais le bon choix, le même choix.

Alors nous commencions jouer parfaitement synchronisés, créant une nouvelle musique plus complète, plus harmonieuse du fait que nous avions quatre mains réunies au lieu de deux. Arrivés au milieu de la musique, la musique n'était plus la bonne, sans vraiment nous en rendre compte, nous avions commencé à improviser, tout en restant dans la même gamme pour éviter les erreurs. J'enchaînais des accords sur les notes graves tandis qu'Alice imaginait une toute nouvelle mélodie qui rayonnait en moi. Cet instant était tout bonnement magique.

Leurs regards se croisent, aucun mot ne s’échappe, les pupilles se fixent, aucun ne bouge et le silence perdure. Alice perdait intérieurement ses moyens, et rougit de plus belle. Gênée était notre petite protégée en cet instant. La troisième année de bouge pas d’un poil, admirant les moindres trait du visage d’Aaron.

Le piano continuait de se jouer, sans trop réfléchir, sans trop d’erreurs. En temps normal, la lionne en aurait été assez fière, mais les pensées perdues sur le visage du Serdaigle, elle n’y prend même pas garde. Le souffle coupé, à la fois de stress et de contemplation, ses doigts et ceux d’Aaron entame déjà une nouvelle musique.

Lui lançant un regard complice, l’Anglaise se lance sur une nouvelle mélodie, plus joyeuse, d’un rythme plus accéléré. C’était une improvisation totale, et pas si mal d’ailleurs. Son cœur battait à toute allure, manquant d’exploser. Ces deux choses, qui la réconfortaient, étaient là, les deux en même temps ! La Gryffonne se sentait si bien, le grand sourire affiché sur ses lèvres en était d’ailleurs la preuve. Un sourire rayonnant. Un sourire spécial. Un sourire rare. Un sourire unique. Un vrai sourire.

C’était assez rare de la voir comme ça depuis ses dix ans environ, l’enfant n’est même plus sûre que les gens se souviennent de l'Alice qui souriait vraiment. Et en ce moment, ça arrivait de plus en plus souvent qu’elle soit réellement joyeuse ! Notamment aux côtés d’Aaron.

Alors que nous continuions d'improviser chacun de notre côté pour créer une nouvelle mélodie, je cherchais un petit moyen de compliquer l'exercice. Une idée me traversa l'esprit, alors je me penchais un peu vers la droite en direction d'Alice et je passais ma main droite par dessus les siennes en croisant nos bras afin d'atteindre les notes les plus aigues du clavier et rajouter quelques subtiles notes hautes en fréquence qui rajoutait un charme à la mélodie créer par Alice.

Dans le même mouvement, je profitais de la proximité de nos visages pour déposer un bisous sur la joue chaude et douce d'Alice. Comme d'habitude, j'adorais le contact physique avec elle, me faisant me sentir plus en sécurité, plus fort, aimé, apprécié et pleins d'autres sensations. En ramenant ma main droite sur les notes graves du clavier, j'en profitais pour volontairement caresser le dessus de ses mains toujours dans le même objectif.

Progressivement, le rythme se calmait une nouvelle fois, nous jouions de moins en moins fort jusqu'à arriver progressivement à un moment où les notes étaient inaudibles. Ne sachant ni trop quoi faire, ni trop quoi dire, j'hésitais à parler ou même détourner le regard en direction d'Alice, alors je me contentais de rester silencieux tout en fixant mes mains, mains qui commençait à trembler sous la pression du silence, et la peur d'avoir fait une bêtise, que ce soit dans ma prestation générale, ou dans mon mouvement de mains osés par-dessus les siennes ou bien encore le bisous que je lui ai déposé.

Le Serdaigle se penche alors, compliquant le jeu, et mélange nos mains. C’était amusant, mais un peu plus difficile à jouer. Au bisou qu’il dépose sur sa joue, elle ne peut s’empêcher de rougir. Sentant la chaleur se propager dans son corps, c’est la perte de moyens assuré ! Quand il frôle ses mains, ça y est, Alice n’arrive plus à se concentrer sur la mélodie.

N’osant pas dire un mot, faire un geste ou même le regarder. Comme il fait de même, le silence perdure. Après quelques instants de réflexion, notre petite protégée décide de faire quelque chose pour rompre ce silence gênant et pour faire plaisir à Aaron, sachant très bien qu’il aimait le contact physique, elle savait que faire.

Inspirant un peu comme pour se donner du courage, sans même savoir de quoi elle avait réellement peur au final. L’enfant approche doucement sa main de celle du Serdaigle, jouant simplement du piano à deux mains, comme avant. Mais, deux mains de deux personnes différentes, c’était tellement drôle et magique à la fois !

Sa main, toute chaude, si proche, toute agréable réconfortait la jeune fille. Elle n’avait qu’une envie, fermer les yeux et plonger dans un sommeil doux, paisible et agréable en sentant encore la chaleur de sa main et en entendant toujours la jolie mélodie. Ça serait merveilleux non ? Sachant que ça faisait des nuits et des nuits qu’elle n’avait pas bien dormi !

La mélodie était plus calme, ce moment était très agréable, nous jouions simplement à l'aide d'une seule main chacun. Pourtant, nous arrivions à avoir une harmonie presque parfaite, sans même avoir besoin de parler. Tous ces moments avec Alice étaient plus qu'appréciables, et chaque moment passé à ses côtés se transformaient en souvenir heureux qui me permettait de retrouver un peu de lumière dès que l'obscurité essayait de se frayer un chemin dans mon esprit, souvent tard le soir dans mon lit.

Après encore quelques autres minutes à jouer sans décrocher un mot, je me mis à improviser quelques paroles sur l'air que nous étions en train d'imaginer :
L’ami est celui qui comprend
Sans avoir besoin de paroles
D’un seul regard il nous console
De nos chagrins petits ou grands

Puis je marquais une pause, espérant qu'Alice complèterait les paroles en en créant à son tour, et que peu à peu, grâce à nos intervention respectives nous pourrons construire une musique. J'espérais de tout cœur qu'elle prendrait le relais, bien que le silence soit toujours appréciable en sa compagnie, sa voix me manquait. J'avais vraiment envie de l'entendre chanter, comme quand nous étions plus petit et qu'elle chantait pour m'aider à m'endormir. Comme souvent, j'étais très nostalgique des moments passé à ses côtés, animé par une envie de remonter le temps pour les vivre à nouveau et éclaircir ces pensées qui s'effacent malheureusement avec le temps.