Les examens de fin d'année approchaient à grande vitesse, et Ellana commençait à stresser. Cette période de l'année était sûrement celle qu'elle aimait le moins, les examens s'enchaînant sur une semaine ou un peu plus. Heureusement, après ces épreuves finales, la jeune fille serait en vacances, et l'année prochaine serait synonyme de changements. Elle allait entrer en troisième année d'étude, et elle allait pouvoir choisir sa filière d'étude pour se concentrer sur les matières et les domaines qui l'attiraient le plus. Il était sûr qu'elle abandonnerait le vol et la défense contre les forces du mal, la fillette n'aimant pas ces matières. Néanmoins, même si elle vouait une sorte de haine à ces deux apprentissages, elle voulait tout de même terminer l'année sur de bonnes notes et bien travailler la théorie pour espérer obtenir un Optimal ferait sans doute remonter sa moyenne. Ainsi, elle avait beaucoup révisé tout ce qu'ils avaient travaillés en cours pendant l'année pour essayer de bien se souvenir de tout et faire le moins d'erreurs lors de l'examen.

En cette matinée de mercredi, la jeune brune n'avait pas de cours, et elle pouvait donc prendre pleinement le temps de réviser, et elle le ferait sûrement toute la journée. Elle avait décidé de se rendre dans le parc car elle pourrait respirer l'air frais du dehors, et pourrait se sentir libre au milieu des brins d'herbes, sans être enfermée dans la bibliothèque ou dans sa salle commune. L'enfant avait décidé de s'entrainer à lancer des sortilèges travaillés en défense contre les forces du mal, car elle voulait avoir la meilleure note possible pour avoir le meilleur bulletin possible. Elle cherchait donc un endroit tranquille du parc, où elle pourrait facilement se concentrer sur ses différents lancers.

Le soleil tapait fort en ce matin de juin, et Ellana cherchait l'ombre d'un arbre, de peur d'attraper un coup de soleil si elle restait trop longtemps exposée à ses rayonnements. Elle fit quelques pas en direction d'un arbre, et s'appuya le dos contre le tronc, dans la partie ombragée par le feuillage. Ainsi, elle resta immobile, les yeux fermés, comme à attendre quelque chose. On aurait dit une statue, adossée à cet arbre, pâle mais avec quelques plaques rouges sur ses bras nus, n'effectuant pas un geste. A l'intérieur de cette enveloppe, l'esprit de la fillette était bien loin d'être figé, comme le reste de son corps. La jeune brune essayait de se concentrer, balayant les souvenirs qui affluaient, souvenirs de ses examens de première année, des derniers cours où elle avait lancé des sorts, de ses révisions qui ne s'arrêtaient plus. Elle aurait voulu pouvoir crier qu'elle en avait marre, de toutes ses pensées, de tous ses sentiments, de tous ses souvenirs, elle aurait voulu pouvoir les détruire. Mais elle ne savait comment faire, et crier à haute voix n'était pas une solution, si ce n'est que ça ne ferait qu'empirer les choses. Elle souhaitait oublier son passé, se concentrer sur le présent, mais il revenait toujours et la hantait. En cet instant, elle voulait faire le vide dans sa tête, ne plus penser à rien d'autre qu'à ce qu'elle souhaitait faire. Alors, elle imaginait le noir, un trou béant dans lequel tombaient tous ses souvenirs. Quand enfin la marée s'apaisa et le calme fut revenu dans sa tête, elle prit sa baguette et serra le bout de bois jusqu'à ce que ses mains en deviennent blanches et que le sang s'arrête de circuler. Lentement, elle relâcha la pression et recommença plusieurs fois, cet exercice ayant pour but de l'apaiser.

Doucement, elle rouvrit les yeux, et se rendit compte qu'il lui manquait quelque chose pour qu'elle puisse s'entrainer : une personne. La baguette à la main, une panique démesurée pour la gravité de la situation se reflétant dans son regard, elle fouilla des yeux le parc à la recherche de quelqu'un avec qui elle pourrait s'entraîner. Si elle était toujours adossée à son arbre, elle n'était plus immobile et elle jouait nerveusement du bout des doigts avec sa baguette.

Cilblanc agita d'un geste souple sa baguette. Par plaisir et en toute inutilité, elle l'agita pour en faire sortir des petites étincelles de magie à l'état brut dans un éclat doré. Les paroles d'Ollivander lui revinrent à la tête : "Une baguette assez élastique, très résistante, qui demande endurance et détermination, très performante pour la métamorphose." Cilblanc appréciait les cours de métamorphose...mais elle aimait aussi la défense contre les forces du mal, les potions, l'astronomie, ou la botanique. Ces matières étaient parmi ses préférées (en fait, elle aimait pratiquement tout) pour diverses raisons : la défense contre les forces du mal pour sa pratique et l'aide à combattre les forces du mal -tout était dans le nom-, les potions pour leur aspect mystérieux et leurs nombreuses propriétés, l'astonomie pour l'observation des étoiles qui la fascinaient, la botanique pour le contact nécessaire avec la nature, et la métamorphose, bien sûr, car elle aimait tout ce qui touchait aux transformations physiques, surtout du vivant.

Elle fourra un manuel -celui de défense contre les forces du mal, pour réviser- dans sa sacoche vide et y ajouta sa baguette. La jeune Serdaigle avait décidé de réviser au lieu de s'amuser à jeter des Bombabouses sur la porte du bureau de la concierge. Même si elle aimait faire des farces, elle tenait à passer en deuxième année et aimait plutôt travailler, surtout la pratique. Pour la théorie...elle la préférait à la bibliothèque, tranquillement assise face à un livre, une plume et un parchemin. Malgré tout, elle avait déjà commencé ses révisions et s'appliquait consciencieusement à réaliser tous les lancers avec sa baguette, et à retenir tout ce qu'elle avait appris en cours. Elle passait même souvent à la bibliothèque pour chercher plus d'informations, et trouver d'autres méthodes que celles données en cours.

La jeune bleu et argent franchit la porte de sa salle commune d'un pas souple et se dirigea vers la bibliothèque. Elle ne voulait pas vraiment l'admettre, mais la bibliothèque était un refuge où elle aimait travailler et passer du temps. La jeune sorcière entra, parcourant les rayonnages qu'elle connaissait presque par cœur au bout de deux ans de visites. Elle s'arrêta devant une étagère consacrée aux forces du mal. Ou plutôt, à la défense contre les forces du mal. Bien sûr, elle s'était aussi renseignée sur ces dernières, mais cette fois-ci, elle était simplement venue pour emprunter un livre qui l'aiderait à réviser. Peu de temps après, elle trouva l'ouvrage sur lequel portait son intérêt. Il était tout en haut de l'étagère.

Quelques minutes plus tard, elle sortait de la bibliothèque, son livre dans son sac, rangé avec son manuel et sa baguette. Cilblanc s'arrêta au détour d'un couloir. Elle réfléchit où aller. Dans la salle commune ? Dans une salle de classe vide ? Dans le parc ? Finalement, elle opta pour le parc. C'était le meilleur lieu pour s'entraîner au lancers de maléfices et sortilèges divers, sans risquer de casser quoi que ce soit. D'excellente humeur, elle se dirigea d'un pas bondissant vers la grande porte, et sortit tranquillement dans le parc. L'herbe fraiche, une légère brise et l'impression de chez-soi que donnait l'extérieur l'accueillirent avec gaîté. Devant toute cette surface naturelle, Cilblanc ne savait plus trop ou se mettre. Elle scruta les environs. Elle remarqua une de ses camarades de classe adossée contre un arbre. Elle se souvenait parfaitement de son nom de famille car les professeurs les appelaient par leur patronyme. Ils employaient pour sa camarade Miss Duchêne, et la rouquine en avait déduit que cette fille du même âge qu'elle s’appelait quelque chose Duchêne.

Une idée vint à Cilblanc : sa camarade, immobile si l'on exceptait les mouvements qu'elle faisait avec sa baguette, accepterait peut-être de s'entraîner avec elle pour les examens ? La brunette semblait plutôt s’ennuyer, adossée contre son arbre, ou paraissait ne pas avoir le courage de faire quoi que ce soit. La jeune Serdaigle se dirigea à grand pas vers elle, sa sacoche rebondissant paisiblement au gré de ses pas. Elle ne savait pas vraiment comment aborder sa camarade, et souvent, Cilblanc manquait de tact (au plus grand déplaisir de sa mère, qui maintenait qu'il fallait "entretenir le standing" et "savoir se comporter avec de bonnes manières et élégance dans la société") lorsqu'il était question d'aborder quelqu'un. Arrivé devant sa camarade, elle inspira et prit la parole :

- Salut ! Moi c'est Cilblanc (dire son nom de famille serait inutile, elle le connaissait probablement déjà). Tu fais quelque chose d'intéressant ? Si tu t'ennuies, on peut réviser ensemble pour nos examens.

La défense contre les forces du mal pourrait attendre, songea Cilblanc. La jeune fille pourrait toujours aller au dortoir chercher ses autres manuels puis passer en coup de vent à la bibliothèque emprunter d'autres livres, surtout si ça lui permettrait de réviser avec quelqu'un. Elle ne savait absolument pas quelles étaient les matières préférées de sa camarde de Serdaigle, mais elle s'y accommoderait. Mais...il était tout à fait possible que la brunette refuse, ce qui était parfaitement compréhensible.

Sous l'ombre des feuilles du grand arbre, la fillette était effacée. Elle ne souhaitait pas être vraiment visible, préférant l'ombre calme et paisible et la solitude, mais dans ce désir, un problème résidait : la brune souhaitait s'entrainer à lancer des sortilèges de défense contre les forces du mal, mais, elle l'avait compris, beaucoup - trop - de sorts nécessitaient une personne qui servait de cobaye. Sauf qu'en restant ainsi, à l'ombre des arbres, figée, il y avait bien peu de chances que quelqu'un vienne la trouver, même si l'enfant ne s'amusait pas à faire des probabilités. Elle avait beau avoir beaucoup aimé les mathématiques quand elle n'avait pas encore connaissance de sa magie et avoir lu beaucoup de livres à ce sujet dans son temps libre, il demeurait néanmoins qu'elle ait changé de passions : Poudlard lui avait fait découvrir la matière sur laquelle travaillait sa mère, de même que l'étude des plantes et la confection de mélanges aux propriétés parfois surprenantes. Ainsi, en comparaison de toutes ces matières magiques, les mathématiques lui semblaient bien banales, et la petite n'avait pas envie de réfléchir à ça, car ça lui rappelait la douleur de la séparation avec ses parents quand elle était entrée en première année.

Chassant ses pensées turbulentes, Ellana plongea son regard dans le parc, semblant attendre quelque chose comme si le parc allait se munir de fleurs de partout et de petits oiseaux chantant. Elle aurait voulu ne jamais venir à Poudlard, rester chez elle avec sa famille, crier contre cette injustice qu'on lui avait faite ; pourquoi, elle, était-elle différente des autres moldus ? L'enfant avait toujours détesté ce terme, et ne l'acceptait presque pas dans son vocabulaire, refusant de l'entendre. Pourtant, elle venait de le prononcer silencieusement, avouant enfin quelque chose qu'elle n'avait pas voulu. Elle était une sorcière, comme dans les livres qu'elle lisait petite. Ces pensées n'étaient pas vraiment revenues depuis un certain temps, et pourtant, là, en cette matinée de fin de printemps, adossée à un arbre, prête à réviser une matière qu'on lui enseignait en vue des examens, cela lui revenait, lui faisant l'effet d'un coup en elle-même. Elle aurait aimé pouvoir tout balayé d'un revers de la main, que tout redevienne comme avant. Et pourtant, d'un autre côté, elle était heureuse d'avoir de la magie, heureuse d'être différente. Elle-même ne se comprenait plus vraiment, tout lui semblant outrageusement contradictoire.

Son regard, perdu et en détresse, aperçu une rousse qui se dirigeait vers elle. C'était Cilblanc Elk, une jeune fille de sa promotion, qu'elle ne connaissait pas très bien, faute de ne pas lui parler vraiment souvent. La rouquine lui proposait de réviser les examens ensemble, et la brune crut durant quelques instants rêver. Elle venait de trouver quelqu'un qui pourrait peut-être l'aider à réviser la défense contre les forces du mal. Si, généralement, elle n'osait pas s'approcher des Autres, occasionnellement, ça ne lui faisait pas de mal, d'autant plus que la jeune brune ne se voyait pas refuser. Se redressant un peu pour ne plus être appuyée à son arbre, elle fit un petit sourire.

- Coucou. Ellana, dit-elle en guise de présentation, même si elle supposait que Cilblanc connaisse son identité. Mmh.. je cherchais quelqu'un pour m'entrainer pour l'examen de DCFM... Est-ce que tu voudrais bien m'aider à réviser ?

La fillette regarda l'autre fille, le regard de glace, que même la douceur d'une mangue ne pourrait apaiser. Quoi que... Finalement, elle n'en était pas si sûre. En tout cas, elle souhaitait évacuer de sa tête toutes ses pensées pour se concentrer sur une seule chose : ses révisions pour les examens. Seule, elle dérivait, mais peut-être qu'avec quelqu'un, cela l'aiderait à rester concentrée ? Et même si un monde trop idyllique était une utopie, la fillette aimait croire que tout était parfait, de temps en temps. C'était peut-être une conception un peu naïve, mais elle aimait s'échapper de la réalité, s'enfuir du monde pesant dans lequel elle était. Et sa concentration dépendait beaucoup de ça. Quand elle le voulait vraiment, elle y parvenait sans défaillir, en revanche, sinon, cela lui semblait bien difficile.

- J'me demandais, est-ce que t'arrives à te concentrer facilement ?

Cilblanc connaissait mal la jeune fille. Elle ne l'avait vu qu'en cours, éventuellement croisée dans la salle commune. Ah ! Elle se souvenait de son prénom maintenant ! Elle s'appelait Ellana. Une de ses amies l'avait appelée comme ça dans le petit salon. C'était un très joli prénom, doux et mélodieux qui semblait parfaitement correspondre à la jeune fille. La rouquine se sentit honteuse de ne pas y avoir pensé plus tôt. On voyait qu'elle ne connaissait pratiquement pas sa camarade. Elle ne put donc prédire sa réponse.

- Coucou. Ellana. je cherchais quelqu'un pour m'entrainer pour l'examen de DCFM... Est-ce que tu voudrais bien m'aider à réviser ?

La bleu et argent était plus que partante ! Elle aussi souhaitait réviser pour son examen. Bien que n'envisageant pas forcément une carrière dangereuse, la jeune Serdaigle avait conscience que la défense contre les forces du mal était une matière importante. Sa baguette parla pour elle : des petites étincelles crépitèrent à son extrémité. Ce jour-là, Cilblanc était particulièrement tendue bien que le plus joviale possible et souriante (même si on sentait la crispation dans ses sourires), et ses humeurs un brin excessives. A vrai dire, la journée d'été ensoleillée ne masquait pas la tension qui régnait parmi les élèves s'inquiétant pour leurs examens. Et la jeune sorcière avait beau être de nature joyeuse, ça ne l'empêchait pas de s'inquiéter elle aussi. Sans compter que cette année, ses parents lui avaient plus mis la pression que l'année précédente...

Mais dans tout ça, il y avait quand même du bon : Cilblanc aurait droit à une nouvelle année en plus. Au fond, la jeune fille aimait travailler, surtout la magie. Elle appréciait déjà moins la discipline. Et puis, ce n'était pas pour rien qu'elle était Serdaigle. Elle était la première de sa famille à être dans cette maison (sa famille ne cessait de lui seriner que c'était un grand honneur d'inaugurer la dernière maison dans la famille, et que "pour maintenir le niveau et la réputation de Serdaigle", qu'elle devait beaucoup plus travailler et avoir des notes excellentes). Du côté de son père, tous sans exceptions avaient été à Poudlard, plus précisément à Serpentard. Sa mère était à Gryffondor, et les parents de celle-ci à Beauxbâtons. Les quelques autres membres de sa famille étant allés à Poudlard avaient été à Poufsouffle. Bref, pour la première fois, il y avait un Serdaigle, la dernière des quatre maisons.

Cilblanc songea à Hortense...la pauvre voulait absolument être sorcière, car elle adorait sa grande sœur, et prenait exemple sur elle, pour les bonnes comme les mauvaises choses. De plus, toute la famille était sorcière...mais elle était cracmolle. Cilblanc trouvait ça très bien : les deux sœurs avaient encore plus de choses à partager. Mais toute la famille n'était pas forcément d'accord et ne partageait pas l'opinion de Cilblanc...

- J'me demandais, est-ce que t'arrives à te concentrer facilement ? demanda Ellana, coupant court aux réflexions de la jeune sorcière.

La bleu et argent lui répondit :

- Je peux me concentrer quand il n'y a pas trop de bruits aux alentours, en ce moment c'est parfait ! Je veux bien faire la défense contre les forces du mal ! Justement, j'ai amené un livre que j'ai emprunté à la bibliothèque et mon manuel, si ça t'intéresse.

Sa baguette serrée dans sa main, la brune se laissait emporter par les pensées. Elle se souvenait de nombreuses choses, et des jeux enfantins qu'elle faisait avec Lyna, quand elle n'était pas encore arrivée à Poudlard, qu'elle ne savait pas encore qu'elle était une sorcière. Ce simple détail qui avait changé - aussi bien positivement que négativement - une grande part de sa vie. Elle se rappelait de jeux qu'elle faisait au parc, avec sa sœur, imaginant qu'elle chevauchait un balai magique avec son chat noir et son chapeau pointu, une baguette magique à la main. Cependant, maintenant qu'elle avait vu ce qu'était que le vol sur balai et qu'elle avait une peur affreuse de tomber, maintenant qu'elle avait Lojae une petite chatte adorable et tigrée, maintenant qu'elle posait sur sa tête un haut chapeau pour certaines occasions, maintenant qu'elle avait sa propre baguette à la main, cette image lui semblait bien réelle, et en même temps très fausse.

Plus le temps passait, plus sa poigne se resserrait autour de son catalyseur de magie, comme si ce simple petit objet pouvait l'empêcher de stresser pour les examens qui approchaient à grands pas. Elle avait peur de ne pas réussir, peur que le lien qui la retenait avec sa baguette de tremble se brise et qu'elle se retrouve démunie, à ne plus savoir quoi faire, devant ses professeurs qui l'évalueraient. Jamais, chez les moldus, elle n'avait eu des périodes aussi intenses de révisions ; jamais, elle n'avait autant travaillé que depuis son année à Poudlard. L'école où ils allaient tous semblait beaucoup plus simple en terme de niveau, beaucoup moins exigeante. Alors, pourquoi elle, Ellana Duchêne, avait-elle était "choisie" pour vivre dans un monde qui n'était pas le sien ? Elle se le demandait, encore et toujours, ne trouvant que trop peu de réponses à cette question.

Elle voulait essayer de ressentir le lien qui l'unissait avec sa baguette, ce lien qui lui semblait si fragile, par moments. Et pourtant... quand elle était en vacances, et qu'elle était obligée de l'abandonner, elle avait l'impression qu'il lui manquait quelque chose, pour arriver à l'équilibre... comme si ce quelque chose n'était autre que sa baguette. Elle ferma les yeux, quelques centièmes de secondes, déconnectée de la réalité, ne portant aucune attention à la rousse. Une sensation d'apaisement parcourut son corps dans un frisson chaleureux, lui donnant un brin d'espoir. Ses yeux se rouvrirent, laissant passer les rayons lumineux.

- J'ai... euh... besoin d'm'entrainer avec ma baguette, surtout, déclara la brunette en rougissant.

La théorie, elle s'efforçait de tout maîtriser, pour pouvoir faire remonter ses moyennes en pratique. Elle avait une bonne mémoire, assez visuelle, et n'avait pas de problèmes avec ça, heureusement pour elle. Mais dans les matières nécessitant la baguette, c'était souvent la pratique qui lui faisait défaut. Peut-être n'avait-elle pas assez confiance en ses capacités ?

La jeune élève avait-elle fait une gaffe ? Parlé de travers ? Bah, tant pis au pire. Pourquoi se tourmenter alors qu'Ellana ne semblait pas trouver que Cilblanc ne savait pas s'exprimer ? Mmm...à vrai dire, Ellana semblait plutôt sombrer dans des réminiscences qui s'enchaînaient consécutivement. Peut-être que le brunette avait eu un passif difficile ? Ou qu'elle était timide ? Peut-être qu'elle non plus n'avait aucun tact pour parler aux autres... Décidément, il faudrait ouvrir un classe de "cours de savoir-vivre" à Poudlard, cela pourrait être bien utile. Pourtant, Cilblanc n'avait pas trouvé que sa camarade manquait de tact. Bon, alors c'était autre chose.

Au fond, Cilblanc la comprenait un peu. Sauf que, ne sachant pas ce qu'il fallait comprendre exactement, elle se dit qu'une personne qui aurait du tact ferait exactement ce qu'elle fit : faire comme si de rien n'était et laisser Ellana s'enfoncer dans ses pensées tranquillement. En attendant, elle réfléchissait à ce que la jeune rousse connaissait comme sortilèges de défense. Elle fit un récapitulatif mental des cours qu'elle avait étudiés cette année. Puis elle fit un récapitulatif de ce qu'elle avait lu sur le moyen de jeter un sort. Puis un autre récapitulatif sur ce qu'elle avait du mal à faire. Tous ces récapitulatifs étaient très sommaires, et lorsque Cilblanc en vint à récapituler ce que sa mère lui avait conseillé de réviser, Ellana sembla sortir de sa léthargie. La brunette lui répondit :

- J'ai... euh... besoin d'm'entrainer avec ma baguette, surtout.

Timidité ? Gêne ? Ou autre ? La rouquine n'était franchement pas la personne à qui il fallait demander de traduire l'état d'esprit des gens et leurs émotions. Peut-être qu'Ellana n'était pas à l'aise lorsqu'elle parlait avec des gens qu'elle ne connaissait pratiquement pas, ce que Cilblanc ne pouvait lui reprocher car cela arrivait souvent. Pour ne pas se lancer dans des hypothèse sans doute fausses, la petite sorcière se reconcentra sur quelques récapitulatifs qu'elle avait établis quelques secondes plus tôt. Elle répondit à Ellana :

- Super ! s'exclama-t-elle. Dans ce cas, on n'a qu'à s'installer; même si enfin, rester debout, c'est mieux. On révise quoi ? La pratique depuis le début de l'année dans l'ordre chronologique ?

Il y avait eu immobulus, expelliarmus, et les épouvantards. Bon, autant éliminer tout de suite les épouvantards, il n'y avait pas de quoi faire dans le parc.

- On n'a qu'à commencer par Immobulus et Expelliarmus ? L'une jette un sort à l'autre, et la première essaye de lui prendre sa baguette. Sinon, on peut commencer par réviser les sorts de l'année dernière. Ou encore d'autres sorts ?

Cilblanc avait appris d'autres maléfices à la bibliothèque par curiosité. C'était peut-être le moment de mettre tout ça en pratique.

Y avait-il quelqu'un, sur cette terre, qui aimait les examens de fin d'année ? Ellana se posait bien la question. Certes, il était important de revoir les acquis d'une année, de tout se remettre bien en tête, mais le fait de passer une semaine à ne faire que des examens dans toutes les matières qu'elle avait la faisait beaucoup - trop ? - stresser. Cesserait-elle un jour d'être anxieuse par rapport à ses résultats scolaires ? Elle ne voulait pas décevoir ses parents ; elle voulait leur montrer qu'elle était capable de réussir, dans un univers où ils ne l'aidaient pas.

Cilblanc était une enfant enthousiaste, c'était indéniable. Et Dieu savait ô combien la brunette aimait la tranquillité. Elle avait beau avoir été élevée avec sa petite sœur, Lyna, qui était une boule d'énergie sur pieds, elle s'était un peu enfermée sur elle-même à son entrée à Poudlard, ne trouvant plus de moments où se lâcher. L'image que se faisait les autres d'elle était importante pour l'enfant, et elle ne voulait certainement pas passer pour un cancre ou pour quelqu'un ne tenant pas en place. Elle préférait se faire discrète, effacée au milieu de la foule, qu'on ne la remarque pas au premier coup d'œil.
Si ça n'avait tenu qu'à elle, Ellana serait peut-être partie à la recherche d'un coin de paisibilité dans le parc, pour pouvoir s'entrainer à lier des liens encore plus forts avec sa baguette. Parfois, elle avait peur que leur relation soit bancale et de ne pas réussir les sorts qu'elle lançait. Le problème, dans ce plan, c'était qu'elle ne pourrait pas bien s'entrainer à lancer les sortilèges avec lesquels elle avait plus de difficultés. Et que si elle voulait réussir son examen de défense contre les forces du mal, elle avait intérêt à s'être bien préparée.

Ses phalanges étaient blanches, agrippant le morceau de bois. Elle aurait peut-être dû laisser le sang circuler de nouveau, mais elle ne parvenait pas à se détendre. Crispée, elle ne laissait néanmoins rien paraitre sur son visage autre que de la sérénité - et peut-être un peu de froideur ?
Sa camarade de promotion lui proposa alors de commencer par lancer Expelliarmus et Immobulus, et n'ayant pas le cœur à trouver d'autres sorts, la jeune fille hocha la tête distraitement, toujours tournée vers sa baguette. Quand après plusieurs autres secondes, elle releva la tête, daignant détacher son regard de son catalyseur, elle prit la parole, d'une voix douce et calme.

- J'tente Immobulus et toi Expelliarmus ? demanda-t-elle.

Et sans attendre la réponse de Cilblanc, Ellana replongea son regard vers sa baguette, concentrée, prête à lancer le sort. Elle n'aimait pas particulièrement lancer ce sort, car elle avait l'impression de priver sa cible de sa liberté de bouger, mais elle devait reconnaître que ça pouvait être plutôt pratique, dans beaucoup de situations. En fait, il lui fallait surtout travailler son endurance, sa concentration, sa maîtrise des émotions et sa rapidité. Elle avait du mal à réaliser toutes les étapes des sortilèges promptement, et prenait toujours le temps de réfléchir, ce qui n'était pas toujours à son avantage : ça réduisait certes de beaucoup les probabilités qu'elle se trompe, mais elle se faisait toujours avoir sur sa vitesse de réaction. Sauf que cette fois, elle ne voulait pas. Elle voulait surprendre la rousse, même si celle-ci savait qu'elle allait lui lancer Immobulus. Il fallait juste qu'elle réussisse avant de ne plus avoir sa baguette.

Se concentrant, elle passa rapidement en revue dans sa tête les différentes étapes avant de se lancer, desserrant légèrement sa prise sur sa baguette. Sentant le sang affluer dans sa main, essayant de ne pas se laisser déconcentrer, elle ferma les paupières avant des les rouvrir une demi-seconde plus tard : cet instant de reprise d'elle-même aurait facilement pu être confondu avec un clignement d'œil, si on n'y faisait pas attention.

- Immobulus, dit-elle, attendant de voir si son lancer avait fonctionné.

Rien ne sortit de sa baguette pour atteindre l'autre fillette, au grand désespoir d'Ellana. Pourquoi avait-il fallu qu'elle rate son premier lancer ? Où était donc le problème, pourquoi cet échec ? Réfléchissant, elle n'osait pas regarder Cilblanc.

Cilblanc était très contente. Aha ! Et voilà, elle avait trouvé quelqu'un de sage, intelligent, érudit sans doute, et très probablement quelqu'un d'affable et poli, bien éduqué, mais peut-être un peu trop renfermé. La mère de Cilblanc aurait adoré Ellana. Elle aurait sûrement préféré une fille sage à l'image de la brunette. Elle se voyait déjà traîner sa nouvelle camarade à Killarney, pensant voir une future amie intime en Ellana, comme à peu près tout le monde qu'elle croisait, et se demandait d'ailleurs comment se faisait-il qu'elle la connût si peu.

Bien entendu, la jeune Serdaigle ne songeait pas une seconde au fait qu'Ellana préférait sans doute être tranquille, et qu'elle n'avait peut-être cure de ses excès d'enthousiasme. Elle était décidément, une petite sorcière, vivace, un peu trop entêtée, et surtout irréfléchie et immature. C'était sans doute la raison pour laquelle elle recevait en permanence des lettres de ses parents qui se résumaient en général à "Nous attendons mieux de ta part étant donné ton potentiel." Alors la petite bleu et argent se disait qu'il n'y avait que ses parents pour voir du potentiel en elle, et que par ailleurs c'était propre aux parents de trouver du potentiel, même inexistant, chez leurs enfants. Elle ne se focalisait pas autant qu'elle le devrait sur ses études, sans doute, ce qui n'empêchait pas qu'elle aimât le travail en lui-même. Mais parfois elle ne pouvait s'empêcher de désobéir ; tant pis pour elle. Ce n'était pas parce qu'elle n'était pas au top de la classe qu'elle était mauvaise. Ses notes étaient tout à fait correctes, et elle avait même quelques éclairs de génies dans certaines matières. Et comme la rouquine ne stressait presque jamais, pas de quoi se faire du mouron pour l'événement qu'étaient les examens...même si une vague inquiétude la parcourait, la rendant presque à fleur de peau, un peu trop expressive, probablement. Sans doute le fait qu'on lui mettait légèrement la pression du côté familial. Elle n'avait pas non plus l'intention de décevoir sa famille.

Un peu compliqué, tout ça. Peu importait pour le moment. Ellana, qui fixait sa baguette avec un air d'intense concentration, suggéra de sa voix calme, presque timide, mais pourtant n'hésitant pas :

- J'tente Immobulus et toi Expelliarmus ?

Le regard d'Ellana se remplit de la magie qu'elle projetait vers son catalyseur, de concentration ; elle transmit son pouvoir, plus encore, sa confiance à sa baguette, avant de fermer les yeux pour mieux ordonner :

- Immobulus.

Mais aucune étincelle, aucun sort ne fit surface pour s'échapper de la longue et gracieuse tige de bois. Ellana parut soudain affligée de sa performance. Son regard fit soudain parler Cilblanc, d'un ton vif avant même que la rouquine ne put se rendre compte de ses paroles :

- Oh mais tu sais c'est pas grave ! Moi non plus je n'y arrive pas tout le temps. En fait, je crois que c'est une question de stress. C'est pour ça que les examens ne sont pas une excellente méthode ; mais tu sais quoi ? C'est assez aléatoire. Alors on va voir si je fais mieux, et si ça se trouve, on va bien rigoler devant nos performances !

Elle brandit sa baguette, à laquelle elle donnait nombre de surnoms, et s'exclama intérieurement "Allez l'amie, donne-toi à fond, mets le paquet !" Son humeur communicative pourrait l'aider comme lui mettre des bâtons dans les roues. Elle inspira, fixa soudain la pointe de son catalyseur à qui elle transmettait en permanence ses émotions, ferma les yeux pour mieux se concentrer, visualiser... Elle inspira, et ordonna :

- Expelliarmus !

La baguette d'Ellana lui sauta subitement des mains et alla valser dans les airs tandis que Cilblanc essayait vainement de la rattraper. Eh bien, c'était un bon début ! Qui s'opposait strictement à ce que la petite Serdaigle avait dit ; décidément, lorsqu'elle voulait dire quelque chose, il se produisait son contraire. Mon Dieu, avait-elle encore manqué de tact ?

Désespérée. Voilà comment était Ellana. Elle n'y parviendrait jamais. Elle n'arriverait pas à obtenir la note qu'elle voudrait avoir en défense contre les forces du mal, ou même en sortilèges ! Peut-être demandait-elle trop d'elle-même, mais l'échec était quelque chose qu'elle ne supportait pas. Qu'elle n'avait jamais supporter. Elle ne pouvait pas ne pas réussir, elle ne pouvait pas se contenter simplement d'avoir un niveau moyen. L'année prochaine, elle pourrait -enfin !- arrêter cette matière qui commençait à vraiment l'agacer mais d'ici là, elle allait devoir prendre son mal en patience. De toute façon, juin était là et ce mois apportait avec lui la fin de l'année ; il ne restait plus que l'examen, cet examen qu'elle appréhendait plus que tout autre...

Cilblanc tenta de la rassurer, de lui dire que ce n'était pas grave et qu'elle aussi, elle n'y parvenait pas à chaque fois. La brunette ne répondit rien, se morfondant dans son silence. Elle n'avait rien à dire de toute façon. Elle n'avait aucune envie de rire de ses piètres performances, aucune envie de passer trop de temps à faire ça. Elle n'aimait pas s'entrainer. Mais elle n'aimait pas échouer. Et à choisir entre les deux, c'était l'entrainement qui avait gagné.
Le sort de sa camarade fit mouche. Sa baguette lui échappa, s'envolant dans les airs avant de retomber un peu plus loin. *T'as vu... t'as fait mieux que moi, y'a qu'moi qui n'sait pas faire* songea-t-elle, n'osant pas dévoiler ses pensées à haute voix. Elle était jalouse que Cilblanc ait parfaitement réussi son lancer. Malgré tout, elle laissa échapper un petit "Bien joué" à son attention, deux petits mots qui n'avaient pas été dit d'un ton très chaleureux mais qui étaient bien trop courts pour qu'on puisse déceler autre chose dans le ton de sa voix.

La fillette partit alors chercher son bâton magique, le regardant d'un air dédaigneux. Et si c'était lui, la source du problème ? Ce n'était peut-être pas elle qui était incompétente, mais son bout de bois qui ne fonctionnait plus ! Il faudrait qu'elle songe à retourner voir le vieux bonhomme qui la lui avait vendu ; pas de doute possible, elle s'était fait arnaquer. Sinon, pourquoi n'arrivait-elle pas à lancer un simple sort, quand sa camarade y parvenait avec beaucoup d'aisance ? Ellana avait besoin de trouver un coupable à ses échecs, elle ne voulait pas admettre que c'était simplement elle qui manquait d'entrainement, elle qui n'avait pas de facilités à faire ça. Elle avait toujours eu des facilités partout ; découvrir qu'il fallait qu'elle travaille un peu plus pour y parvenir en sorts la ramenait trop difficilement à la réalité. Elle n'admettait pas.

Elle lança un dernier regard à sa baguette puis regarda Cilblanc, d'un œil déterminé. Allait-elle réussir cette fois ?

- Je peux te lancer un Tarentallegra ? demanda-t-elle, pour être sûre d'avoir le consentement de la rousse.

Puis, elle tenta de se concentrer pour ne pas échouer comme la dernière fois. Elle n'avait pas envie de rater, pas envie de se laisser ridiculiser une fois de plus. Quand elle se sentit prête à lancer le sort, elle traça dans les airs deux jambes un peu bizarres, gestuelle assez particulière de ce sort, tout en disant "Tarentallegra". Elle fixa Cilblanc, dans l'espoir de la voir se mettre à danser.