Le repas avalé bien plus rapidement que d’habitude, je file retrouver mon petit ami un peu plus loin dans la Grande Salle, sautillant presque tant ce jour est particulier non seulement car c’est le jour d’Halloween, mais surtout pour nous deux. Certes, avec nos cours et le fait qu’on ne soit pas dans la même promotion, c’est à peine si on a pu se croiser depuis ce matin et je suis franchement déçue qu’il n’y ait rien d’organisé à l’échelle du château : c’est en effet dans cette pièce même qu’il y a tout juste un an, nous avons commencé à sortir ensemble pendant la soirée qui a eu lieu.

Mais cette année… Ça va plutôt se cantonner aux maisons, et si j’ai très hâte de voir ce que ça va donner au Terrier ainsi que d’y participer, j’aurais quand même préféré pouvoir passer la soirée entière avec Eridan. Bon, il y a bien Samain qui est également organisé de ce que j’ai vu, et je sais qu’Oxy s’y rend, mais c’est Halloween que je veux fêter, moi… J’ai donc préféré décliner l’invitation de ma meilleure amie à la rejoindre pour ce début de soirée, mais aussi à celle d’Orphéa qui voulait s’essayer à je ne sais plus trop quoi. Je n’ai quand même pas oublié que c’était l’anniversaire de la Serpentard et je n’ai pas manqué de lui souhaiter, mais jusqu’à ce qu’il soit l’heure d’aller me préparer et me maquiller pour ce soir, je veux rester avec Eridan.

« Salut, » dis-je donc simplement en arrivant au niveau du sixième année, tout sourire.

Ce qu’on a prévu pour la soirée, par contre… Eh bien comme je l’ai dit, on n’a pas franchement pu trop se voir aujourd’hui avant maintenant, donc je dois dire que je n’en sais rien. Restant donc debout pour le moment, mon regard vient faire un tour de la salle et de tous les élèves encore présents.

« On reste là ? » je demande. « Ou tu veux qu’on aille ailleurs ? »

Je crois qu’aucune des options ne me dérangerait vraiment plus que l’autre, même si le fait d’être juste tous les deux et pas au milieu des autres serait quand même un plus. Mais je le sais bien maintenant, c’est quelque chose qui peut s’avérer bien ardu dans les salles et couloirs de Poudlard.

Eridan semble préférer aller dans un autre coin du château, de son côté, et je hoche la tête à sa proposition de la cour de la tour de l’horloge - ça me plaît bien, il y a en effet quelques bancs un peu plus abrités, que ce soit des regards indiscrets ou du vent et du froid de l’automne.

« Ça me va ! » je réponds donc avec enthousiasme avant de suivre mon petit ami qui a pris ma main pour m’inviter à le suivre jusque là-bas.

Profitant de ce bisou qui a un goût de trop peu sur le chemin, je resserre ma main aux doigts toujours entrelacés avec les siens jusqu’à notre arrivée sur le banc. Assise juste après le garçon, je me positionne de la même manière que lui afin de presque lui faire face. À cette heure, le soleil est déjà couché, et ça me fait un peu bizarre de me retrouver ainsi avec lui dehors alors qu’il fait nuit. Bon, avec le jour qui va décliner de plus en plus tôt ça va être de plus en plus courant et c’est même tout à fait normal, mais quand même.

Ainsi un peu perturbée par le relatif silence de la cour et le fait qu’il fasse nuit, ma main gauche vient rejoindre nos doigts entrelacés pour que ma paume se dépose sur le dos de la main du sixième année. C’est toutefois lorsqu’il reprend la parole qu’un sourire revient naître sur mon visage, et celui-ci est grand alors que je repense à toute cette année écoulée. Ça me paraissait presque insurmontable à ce moment-là, mais je suis vraiment contente de lui avoir proposé de danser lors de la soirée, puis de lui avoir demandé si je pouvais l’embrasser. J’avais tellement peur de la réponse… Mais qui sait comment et quand j’aurais obtenu celle-ci, sinon.

« Oui… » soufflé-je également en cherchant son regard.

Je suis cependant quelque peu surprise par le changement de sujet qui suit, et secoue immédiatement la tête en signe de négation.

« Non pas du tout ! Je préfère être avec toi, » souris-je. « Et puis je connais pas bien Samain, je préfère Halloween. Je voulais qu’il y ait une soirée comme l’année dernière, pour danser encore avec toi… » Tout en parlant, je me penche pour que ma tête vienne se poser sur le torse de mon petit ami. Ce n’est probablement pas la première fois que je parle de cette déception depuis que j’ai entendu qu'il n'y aurait rien dans la grande salle, mais je ne peux m’empêcher de le vocaliser une fois de plus. « Même si ça a l’air bien quand même ce qu’on va avoir en salle commune. » Je relève les yeux. « Et toi, ça te dérange pas non plus de pas y aller hein ? »

Heureusement, Eridan ne semble pas non plus gêné par le fait de ne pas être allé à la soirée organisée pour Samain. Je suis certaine que ça aurait été intéressant, mais entre ça et passer du temps avec mon petit ami et en particulier en ce jour, il n’y a quand même pas photo - et puis Oxy pourra me raconter ce qu’elle y a fait.

Levant les yeux en souriant lorsque je sens le bisou du sixième année sur mon front, je ne bouge pas plus, profitant seulement de l’instant. Parce que bon, si on ne peut pas danser à un bal comme il n’y en a pas d’organisé cette année, on peut au moins rester simplement ensemble. Et en considérant nos emplois du temps relativement chargés de la journée, c’est déjà beaucoup.

Ainsi dans mes pensées tout en appréciant la chaleur du garçon contre moi, je me retrouve un peu étonnée lorsqu’après un moment, je le sens bouger et me repousser dans le but de se lever. Est-ce qu’il se passe quelque chose ? Est-ce qu’il préfèrerait aller autre part, finalement ? Comme presque à chaque fois que je me retrouve juste avec Eridan, le monde autour de lui n’a plus d’importance ; mais je ne sais pas si c’est également le cas pour le Serdaigle ou si sa timidité dont j’ai conscience change cet effet. Et si nous sommes sur un banc plutôt isolé, la cour de la tour de l’horloge reste un lieu qui peut s’avérer passant.

Je suis donc surprise en entendant sa proposition. Danser, maintenant ? Au fur et à mesure de ses paroles, mon expression intriguée se mue en un sourire qui s’élargit progressivement. J’avais bien compris, il me propose - et m’entraîne même - de danser, ici même et sans musique. C’est génial !

Entre la situation tout de même un peu incongrue, les excuses du garçon de ne pas s’être amélioré et de ne pas produire de musique, et la manière avec laquelle il m’entraîne en chantant, je finis par rire franchement, complètement emportée dans l’instant.

« Pfffffft, oui on peut faire ça ! » je m’exclame, hilare, avant d’accompagner mon petit ami dans son rythme. « Padam padaam padam la la padam ! »

Je ne fais pas spécialement attention à la danse que nous effectuons et à son potentiel ridicule, préférant garder mes yeux rieurs dans les siens. Et puis je suis quand même plus en rythme que ce que j’aurais pu être par le passé - on peut remercier les entraînements des Hel’s Angels pour ça. Pour ce qui est de la voix par contre, je ne sais pas trop à quel point ce que je chantonne est faux, mais étant donné qu’on invente une mélodie, est-ce que ça a vraiment de l’importance ?

Mais si j’aime beaucoup cette danse improvisée qui a étendu mon sourire jusqu’aux oreilles, c’est tout de même une autre que j’avais en tête lorsque j’ai mentionné la soirée de l’année dernière. Ainsi, comme je l’avais fait lors de ce moment à ceci près que je suis bien plus assurée cette fois, je lâche les mains du Serdaigle pour venir glisser les miennes derrière sa nuque.

« Je vais essayer de pas te marcher sur les pieds cette fois, » confié-je dans un petit rire tout en commençant à me balancer doucement. « T’as un rythme pour ça aussi ? »

Le regard faussement menaçant de mon petit ami me fait plus rire qu’autre chose avant que je ne l’observe réfléchir à la question que je viens de poser de manière amusée et disons-le, totalement innocente. Ainsi, m’attendant à une version de son padam padam sur un autre rythme et une autre mélodie, je suis quelque peu surprise de le voir devenir tout rouge. Je continue à me balancer doucement sur ce lent tempo imaginaire, mais ça me fait quand même me demander ce qui l’a fait changer de teinte de cette façon.

Éliminant d’office les paroles que j’ai prononcées, je me dis qu’il a peut-être été gêné par l’arrivée de quelqu’un d’autre dans la cour dans laquelle nous nous trouvons - même si nous sommes pas mal abrités, il doit être plutôt simple de nous voir. Cependant, je n’ai pas envie de lâcher son visage des yeux pour vérifier, et je me contente donc de cette hypothèse. Et puis, c’est peut-être la combinaison de ça et de la danse en elle-même, même si la précédente n’avait pas l’air de le gêner plus que ça…

Lorsque Eridan reprend la parole, j’ai un court instant pendant lequel je me retrouve un peu déçue. Alors, on ne continue pas ces rythmes et mélodies inventés qui rendent ce moment si complice ? Un court instant, c’est toutefois bien le mot adapté : en effet, ce qui suit les deux premiers mots me fait bien vite retrouver mon sourire.

C’est peut-être cette manière de se balancer doucement et l’un contre l’autre qui rappelle le bal pendant lequel nous nous sommes embrassés pour la première fois, mais je comprends tout à fait ce qu’il veut dire. J’en ai bien envie aussi et c’est donc avec plaisir que je viens répondre à son baiser. Et comme celui-ci n’est interrompu ni par la présence de quelqu’un d’autre à proximité - ou en tout cas je ne m’en rends pas compte - ni par un quelconque impératif, je profite de chacune des longues secondes de celui-ci.

Alors mes lèvres viennent finalement quitter les siennes, je reste quelques instants à dévisager le Serdaigle d’un regard amoureux avant de revenir me blottir contre lui, les mains toujours derrière sa nuque.

« Je suis bien là, » je chuchote.

À ce moment, plusieurs émotions se battent en moi. Il y a le contentement d’être tout près de lui bien évidemment, mais aussi une certaine frustration de savoir qu’il faudra mettre fin à ce moment pour revenir dans nos salles communes respectives. Enfin, mon amusement de plus tôt est toujours bien présent lui aussi, et un sourire revient sur mon visage alors que je repense à la dernière question que j’ai posée.

« Padaaam, padaaam, » soufflé-je en reprenant cette petite danse, toujours serrée contre mon petit ami.

Riant à mon tour lorsque Eridan continue la petite mélodie, je me laisse ensuite être bercée par le rythme de nos lents balancements. Ce moment semble en dehors du temps tant je me sens bien dans cette étreinte, mais je ne parviens tout de même pas à écarter de mon esprit le fait qu’il faudra y mettre fin dans certainement bien trop peu de temps à mon goût.

Et justement, mon petit ami recule un peu pour prendre la parole. Écoutant ce qu’il a à dire, je me retrouve étonnée lorsqu’il m’annonce qu’il m’a pris un petit quelque chose. C’est que je ne m’y attendais pas, que je n’y avais à vrai dire même pas pensé ! Est-ce que les autres couples s’offrent des cadeaux dans ces moments-là ? Zut, j’aurais dû demander aux autres, je n’avais vraiment pas fait attention… Et ainsi, comme ça peut être assez facilement devinable à mon expression franchement surprise, je n’ai donc rien pour lui…

« Oh, merci ! » je réponds, malgré tout un peu gênée alors que le Serdaigle semble essayer de justifier son choix. C’est qu’il aurait presque l’air encore plus gêné que moi !

Mais mon attention se reporte rapidement sur la petite boîte qu’il a sortie de la poche de sa cape, la curiosité étant quand même bien présente. Je dois admettre que comme je n’avais aucune idée que le sixième année allait faire ça, je ne sais pas non plus ce qui peut se trouver à l’intérieur…

Aussi, la vue du pendentif me fait ouvrir de grands yeux.

« Ooooh, il est trop joli ! » m’exclamé-je immédiatement, mon visage s’éclairant face à la belle couleur ambrée du bijou. « Merci ! »

Revenant immédiatement serrer Eridan dans mes bras pour lui exprimer ma gratitude, je recule ensuite à nouveau pour décrocher la chaîne et l’accrocher autour de mon cou. J’ai déjà le talisman d’Oxy sous ma chemise, mais il est évident que ce collier-ci se porte au-dessus. Entre la couleur de mon uniforme et celles de mes autres tenues, je suis certaine que ça ira bien avec… Une fois le collier enfilé, je prends quelques instants pour observer un peu plus les détails du pendentif, le sourire aux lèvres, avant que mon expression ne change lorsque je pose de nouveau mes yeux sur mon petit ami.

« Merci c’est trop top comme cadeau ! Mais… » Un air franchement gêné sur le visage, ma voix a plutôt un ton d’excuse alors que je reprends la parole. « J’ai rien pris pour toi, moi… »