Un dimanche tranquille, c’était tout ce que je voulais. Ne pas penser aux parchemins vides qui criaient mon nom, ne pas penser aux manuels qui prenaient la poussière, et se croire encore en vacances. Je marchais, les mains dans les poches, vers la grande salle pour gagner un peu de temps avant que tout le monde n’arrive et s’attable. J’avais une envie soudaine de haricots blancs à la tomate, et je…

Oh. Une petite pelote bleue vint se heurter à ma chaussure droite pour y finir sa course. Je souris à cette étrange interruption et tentai de comprendre ce qui se cachait derrière en suivant des yeux le long fil qui avait parcouru ce couloir que je pensais désert. Je saisis l’objet en laine et suivis précautionneusement le chemin qui m’était présenté. Au fur et à mesure, je rembobinais la pelote de ma main gauche, et après cinq long mètres, je fis la rencontre d’un petit chat qui devait sûrement se demander ce que je faisais avec son jouet préféré. Je relevai la tête, aperçus une fille en train de lire un livre, adossée au mur, la jambe repliée sur celui-ci. Elle ne m’avait clairement pas entendu arriver, et si elle était bien la propriétaire de ce chat, elle semblait lui faire totalement confiance. Son chat pouvait visiblement gambader dans tout le château.

- Euh… Excuse-moi, fis-je en signalant ma présence par un léger raclement de gorge. C’est à toi ? Je lui tendis de ma main gauche la pelote bleue complètement rembobinée, posée sur ma paume. Le petit chat semblait se tordre le cou pour suivre les mouvements de son jouet. Une chose était sûre, cette pelote était bien à lui.

Mouvements vus avec la joueuse

Le dimanche matin, j'aimais bien traîner longtemps dans mon lit, dans mon dortoir à Serdaigle, avec mon petit livre de chevet du moment. Mais ce matin, impossible de m'adonner à mon activité préférée : mes camarades de dortoirs avaient soudainement décidé de faire une bataille de coussins. Je m'extirpai donc du chaos, et Nemo, mon adorable petit chat, s'excita en pensant que j'avais décidé de jouer avec lui. Mais non : il était totalement exclu que je sacrifie ma lecture du dimanche pour lui. Je le laissai tout de même me suivre, et pris avec moi son joujou préféré : une petite pelote de laine bleue.

J'avais l'intention d'aller lire dans la salle commune, mais je craignais que Nemo n'embête mes camarades. Je décidai finalement de m'installer dans le couloir, Nemo aurait ainsi tout le loisir de gambader gaiement.

Afin de le distraire et d'éviter que ce ne soit lui qui me distraie, je lançai fort et loin la petite pelote bleue, m'assis contre le mur du couloir, et entrepris enfin ma lecture tant désirée. Il s'agissait d'un roman de l'écrivain Norbert Fallacieux, une biographie de Gwendoline la Fantasque dont le titre était "Au bûcher déguisée". J'arrivais presque au bout du bouquin, et j'avais hâte de savoir ce qui allait lui arriver, à cette sorcière fascinante !

Mais j'avais lu à peine trois pages lorsqu'un jeune Poufsouffle m'interrompit. Décidément ! Je n'avais pas de chance ce matin. Je tentai toutefois de dissimuler ma lassitude.

- Salut euh... Zut, j'avais oublié son prénom. Je me souvenais juste qu'il était ami avec Narcisse, le jeune premier qui se croyait un peu plus intelligent que les autres. Oui oui c'est à moi, enfin pour être exacte c'est à Nemo, mon chat, ajoutai-je en caressant mon bébé. Il te dérange ?

@Lukas Sharp, j'espère que ça te convient.
@Narcisse Brando pour la petite mention.

Lorsque la jeune brune releva la tête pour regarder dans ma direction, elle ne sembla pas me reprocher mon intervention et me salua. Le léger moment de suspension qui suivit son hésitation me fit comprendre qu’elle cherchait mon prénom et le lui offris en un léger sourire amusé.

- Oh.. Moi, c’est Lukas. Et toi ? Je la suivis du regard jusqu’à ce qu’elle s’agenouille vers son chat qui s’appelait donc Nemo. N’ayant aucune référence sur ce choix de nom, je le trouvais plutôt original, mais m’interrogeais tout de même sur ses motivations. Il y avait toujours une histoire derrière un nom, et peut-être qu’un jour, j’aurais osé lui demander de me la raconter. Non, non, il ne me dérange pas, m’empressai-je de répondre pour éviter une quelconque inquiétude. J’avais juste trouvé son jouet. Je regardais la pelote en question que la fille n’avait d’ailleurs toujours pas récupérée de ma main, et me permis de la défaire à nouveau. Je saisis l’extrémité du fil, puis lâchai la pelote en direction du chat pour attirer son attention et le voir jouer.

- Ton chat n’est pas trop triste quand tu es en cours ? Il y a une garderie d’animaux ici ?, demandai-je sincèrement intéressé. Je prenais soudain compte du nombre d’animaux qu’il pouvait y avoir ici et dont je n’étais pas au courant. Je savais que prendre un animal avec moi jusqu’ici était exclu, j’aurais été bien trop inquiet qu’il se sente abandonné à chaque fois que je me rendrais en cours.

Pendant que je caressais Nemo, le Poufsouffle se présenta. Ah, oui, Lukas, bien sûr. Mais ma mémoire était sélective : je me souvenais bien plus facilement des prénoms de filles que des prénoms de garçons. Je commençai peu à peu à comprendre pourquoi...

- Enchantée Lukas, moi c'est Elya.

Je le regardai ensuite s'amuser avec mon chat, qui bien évidemment arrêta de ronronner sous mes caresses pour s'amuser avec sa petite pelote bleue.

Je me relevai pour écouter la suite du discours du première année et sentis comme un petit reproche lorsqu'il me demanda si Nemo ne se sentait pas abandonné. Je tentai dès lors de me justifier...

- Nemo, triste ? Je crois que c'est le chat le plus joyeux du monde ! Il y a suffisamment de personnes dans ce château pour qu'il puisse s'amuser en mon absence. Je crois qu'il aime bien Nick Quasi Sans-Tête, le fantôme des Gryffondor. Ils jouent un peu au chat et à la souris... sauf que c'est Nemo qui joue la souris ! ajoutai-je en rigolant.

- Et non il n'y a évidemment pas de garderie d'animaux ! Tu as déjà pensé à avoir un chat ou une autre bestiole ? J'ai reçu Nemo pour mon anniversaire, ça faisait longtemps que je réclamai d'en avoir !

Puis je tentai de me rappeler ce que j'avais pensé de Lukas les premières fois où je l'avais vu. Il m'avait paru un peu renfrogné, peu enjoué. Voire triste. J'essayai de comprendre ses émotions actuelles, j'aimais bien tenter d'entrer dans la tête de mes camarades...

- Et sinon, tu es content d'être à Poudlard ? Je me souviens vaguement de t'avoir vu un peu tristounet. Ça va mieux désormais ?

Je tentais de retenir l’information donnée sur son prénom, espérant m’en souvenir si je venais à la recroiser un jour dans ces mêmes couloirs. Lorsqu’elle se redressa, je lâchai complètement la pelote et par réflexe inutile, je m’essuyai la main sur ma robe de sorcier. Le fil n’avait pas été sali, mais j’avais eu inconsciemment le besoin de me défaire d’une potentielle poussière.

Son anecdote sur le fantôme des Gryffondor me fit l’accompagner dans son rire, bien que le mien soit plus discret. Si ce Nick-Quasi-Sans-Tête était aussi drôle que le Moine Gras l’avait été avec moi, en me faisant la course dans les couloirs, j’imaginais bien qu’un chat avait de quoi s’amuser tout une journée avant le retour de sa maîtresse. Ce souvenir du Moine Gras me fit sourire davantage. Il faudrait qu’un jour je lui propose une revanche, d’ailleurs.

Et Elya enchaîna les questions et son débit de paroles me surprit quelque peu. Elle n’avait visiblement pas hâte de reprendre sa lecture, et sa dernière interrogation m’inquiéta. Non seulement le sujet était bien trop délicat pour être abordé lors d’une première rencontre, mais plus les minutes s’égrenaient et plus je sentais que mon estomac allait bientôt me reprocher de n’être pas déjà assis à la table des Poufsouffle. N’ayant pas du tout envie de parler de ce moment, j’offris un sourire qui se voulait sincère pour la rassurer et terminai par une réponse à sa première question.

- Oh, oui, oui ça va mieux, fis-je d’un petit rire forcé avant d’enchaîner sur un autre sujet. Et oui, j’ai déjà pensé à prendre un animal, mais je serais trop inquiet pour eux je crois. Je levai la tête vers le plafond comme pour réfléchir au seul animal que j’aurais pu amener avec moi, et repensais au Botruc de Deryn. C’est vrai que cela me correspondait plus. Peut-être un Botruc, en fait…, fis-je après réflexion en un sourire rêveur. Il pourrait vivre sa vie ou même se cacher dans ma poche lors des cours, ce serait beaucoup moins inquiétant. En le mentionnant, je pensais d’ailleurs à mes cours de langue pour Botruc, il ne fallait pas que j’oublie de la réviser.

La réponse que Lukas me fit ne me rassura pas tant que ça. J'avais vraiment l'impression d'avoir un don pour lire dans l'esprit de mes camarades depuis peu, et là, clairement, il s'efforçait de me mentir. Mais je ne pouvais pas lui en vouloir. Après tout, on se connaissait à peine, j'étais plus âgée que lui, j'étais une fille... Il me semblait normal qu'il ne souhaite pas dévoiler ses sentiments ou émotions si rapidement.

Je fis donc semblant de le croire...

- Ravie que tu ailles mieux alors ! Je sais qu'il est difficile de trouver des oreilles attentives parmi les jeunes sorciers, mais n'hésite pas à venir me voir si tu as besoin de parler de quoi que ce soit. Je ne sais pas à quel point tu as des amis à Serdaigle, mais on aime bien comprendre la psyché des gens chez nous... Enfin... surtout moi en fait. Je souris, en espérant qu'il ne soit pas apeuré par ma remarque.

Il enchaîna sur les Botrucs. Je ne comprenais pas en quoi ce genre de créature pouvait être intéressant. Pour moi, il ne s'agissait que d'un bout de feuille animé !

- Un Botruc ? Mais... ce n'est pas doux, un Botruc ! On peut jouer avec un tel animal ? Je réfléchis rapidement. Ah mais on peut leur parler, non ? Je me souviens vaguement qu'on pouvait choisir d'étudier leur langue. Moi j'ai opté pour la langue des gnomes, juste parce que presque personne ne les avait choisis et qu'il me serait plus simple d'emprunter les livres d'apprentissage ! Je ne suis pas sûre d'avoir fait le bon choix, ils ont l'air un peu teigneux ces petits êtres ! T'as choisi quelle langue toi ? Je me rappelais l'avoir aperçu lors de la séance d'information JoBaRBiLLe et espérais ne pas me tromper...

Elle semblait avoir cru à ma réponse qui se voulait rassurante, et cela me soulagea. Je ne sais pas comment j’aurais pu m’extirper d’une telle situation s’en que cela ne soit gênant ou impoli. Elle m’offrit son aide et je lui souris en guise de réponse. Je repensais à Astrid que j’avais connue en début d’année et qui m’avait semblé aussi à l’écoute. C’est vrai que les Serdaigle avaient quelques similarités avec les Poufsouffle. Je gardais sa proposition dans un coin de ma tête et l’écoutais poursuivre sans l’interrompre.

Son étonnement face à mon choix de créature me fit me redresser légèrement, de manière imperceptible. J’étais toujours un peu sur mes gardes lorsqu’on critiquait quelque chose que j’appréciais. Les confidences que je pouvais faire parfois se répercutaient souvent sur l’autre, et je n’aimais pas penser que l’on puisse juger mes goûts. Bien sûr que c’était doux un Botruc. Du moins, pour moi, ça l’était. Et bien sûr l’on pouvait jouer avec un tel animal, comme elle le disait. Ce n’était évidemment pas avec une pelote de laine, mais peut-être plus avec un arbre ou une serrure de porte, mais après tout, c’était un amusement comme un autre. Heureusement, elle ne me laissa pas le temps de la reprendre sur ses mots et m’interrogea sur mon choix de langue.

- J’ai justement pris la langue des Botruc. J’ai préféré les claquements de langues aux grognements de gnomes j’imagine, lâchai-je d’un petit rire encore un peu blessé par la remarque de la Serdaigle. L’esprit occupé par mon amour pour mes petites créatures des arbres, je ne pris pas la peine de relever sa remise en question sur son choix de langue. Je pensais déjà à m’enfouir dans mon livre pour observer les images des Botrucs qui me fascinaient.

Je jetai un regard arrière moi, comme pour indiquer que quelque chose m’attendait. Et pour cause, un repas m’attendait. Je revins vers Elya et lui souris.

- Excuse-moi mais…, commençai-je en prenant soin de bien choisir mes mots pour ne pas paraître malpoli, je me dirigeais vers la grande salle pour aller manger. Comme à mon habitude, je me grattai l’arrière de la tête avec ma main gauche. Du coup… Je pointais du pouce la direction dans laquelle je souhaitais me diriger, ben je vais y retourner. Ravi de t’avoir rencontrée, terminai-je sincèrement.

Je jetai un petit regard au chat, comme pour le saluer à son tour, mais celui-ci était visiblement bien occupé à donner des petits coups de pattes arrières à la pelote, tout en s’y agrippant par les dents. Je souris aux deux, puis tournai les talons vers mon futur repas.


@Astrid Keaty pour la mention

J'observai sur le visage de Lukas que ma critique des Botruc l'avait chiffonné. Cependant, il ne m'en fit pas la remarque. Typique d'un petit Poufsouffle, ça... Éviter la confrontation probablement. J'en étais un peu déçue, ça m'aurait amusée de débattre sur ces animaux fantastiques.

Il ne s'empêcha toutefois pas de faire une remarque sarcastique sur la langue des gnomes, mais j'explosai de rires. Je n'en étais pas vexée pour une Noise : j'avais la même opinion que lui. Je regrettais parfois d'avoir choisi cette langue.

- C'est sûr que le grognement des gnomes n'est pas des plus doux aux oreilles ! m'empressai-je de répondre. J'espérais qu'il voie que moi, je n'étais pas du genre à me vexer. Qu'il en prenne de la graine, peut-être même...

Mon ventre commençait à grogner et j'avais envie d'aller manger avec mes camarades. Enfin, j'espérais surtout rejoindre Astrid...
De toute évidence, mon interlocuteur avait lui aussi faim puisqu'il s'empressa de prendre congé de moi.

- Ah oui, moi aussi je dois y aller, je meurs de faim ! Ravie de t'avoir rencontré, Lukas, et au plaisir de te revoir !

Je repris la pelote de laine et joua quelques instants avec Nemo. Je lui devais bien ça, le pauvre : je l'avais délaissé un peu trop longtemps. Je lui demandai ensuite de retourner dans le dortoir en attendant mon retour. Et oui, j'étais chanceuse : mon chat était très obéissant. Pouvait-on en dire autant des Botruc ?