C'est mercredi après midi. Il fait beau mais je n'ai pas envie de m'aventurer dans le parc. J'ai d'autres choses à faire et ces choses m'ont menées tout droit à la bibliothèque de Poudlard. Ici tout est bien en ordre et trouver des sources d'information quand on cherche quelques choses, n'est pas difficile. Après une vingtaine de minutes dans les rayonnages, me voilà avec les bras chargés d'ouvrages divers et variés : Folio Bruti, Créatures abominables des profondeurs, De Potionnis, Maléfices de base pour sorciers pressés et contrariés... Sous mon nez, la pile de livre est si haute que c'est à peine si je parviens encore à voir où j'avance. Il va donc me falloir une table de travail et vite. Ca tombe bien j'en aperçois une au bout du rayonnage juste devant une grande fenêtre à losanges.

Je m'avance, lentement, en tâtonnant l'espace qui se trouve devant mes pieds, jusqu'à la table que je parviens à rejoindre sans faire tomber le moindre ouvrage livre et là, alors que les muscles de mes bras sont à deux doigts de tétaniser, je laisser tomber la lourde pile sur la table dans un grand bruit retentissant : Braam...

Oups, j'ai dû réveiller tous les fantômes du château avec ma bruyante manœuvre et rien qu'à voir les regards noirs des élèves qui se tournent vers moi, je pense que je ne suis pas fait que des amis sur ce coup.

"Oups... désolé. Je crois que j'en ai pris trop."

J'accompagne mes excuses d'un sourire tordu, histoire de renforcer mon air désolé puis m'assois pour commencer à consulter mes trouvailles.

@Ennis O'Belt

Mercredi après midi... Comme souvent, Ennis était à la bibliothèque. Mais une fois n'était pas coutume, elle y était seule. Clément - son meilleur ami - devait travailler en binôme avec quelqu'un pour un devoir, ils étaient donc quelque part dans une salle d'étude alors qu'elle même était sur une petite table au milieu des rayonnages. L'endroit étant normalement calme, il était idéal pour aller piocher un nouveau livre de botanique... Puisque son niveau laissait à désirer paraissait-il... Si tous les profs s'inquiétait de la moindre baisse de résultat quelque part, elle ne pourrait bientôt plus rien faire d'autre. Car pour accorder plus de temps à une matière, elle devait rogner quelque part. Et ils se fourraient la baguette dans l’œil, jusqu'à l'épaule, s'ils pensaient que ce serait sur les courses ou bien les quelques sessions d'entraînement au duel.

Elle travaillait donc sa botanique mais n'était pas spécifiquement dans de bonnes dispositions. Alors quand une pile de livre s'étala juste devant elle, renversant son encrier sur le parchemin où elle était en train de recopier l'introduction de la composition qu'elle devait rendre le samedi suivant, forcément, elle vit rouge. Car son travail en devenait irrécupérable. "Il semblerait." Répondit-elle durement au Gryffondor qui était en train de prendre place sur la chaise d'en face, récupérant ses bouquins en bazar. De son côté, elle serrait les dents, sortant sa baguette pour nettoyer l'encre qui s'étalait partout. Owen avait beau être de bonne composition, elle ne voulait pas lui dire qu'un livre nécessitait un travail de nettoyage qu'elle savait long puisqu'elle lui avait demandé comment ça fonctionnait. Quant à son parchemin... "Foutu." Murmura-t-elle d'un ton coléreux avant d'en faire une boule et d'en sortir un nouveau en fusillant le plus jeune du regard.

La Gryffondor qui me fait face, avec une coupe de grand mère et un badge de Préfet n'est autre qu'Ennis, une des deux Préfets en chef de l'école. Elle semble acquiescer à ma remarque : je prendrai un ou deux livres en moins la prochaine fois.

Je m'assois donc précipitamment avec l'envie de dévorer les beaux ouvrages et me décide pour le gros "Créatures abominables des profondeurs" en espérant y trouver des informations sur le calamar géant dont un spécimen vivrait dans le lac noir. Je tourne les pages, à toute vitesse, sans grand soin, quand un bruit de papier froissé me fait lever les yeux.

Toujours Ennis. Elle me regarde cette fois avec un air sévère en sortant un nouveau parchemin de son sac. Est elle furieuse d'avoir à recommencer son écrit ? Peut être, s'est elle rendu compte qu'elle avait fait une grosse erreur dans son devoir ? Je lui répond avec un franc sourire en guise d'encouragement et reprend ma consultation encore plus vivement.

Les pages défilent à toute vitesse dans un joli bruissement de papier : Acromentule de mer... Anémone fumante... Anguille carnivore... Brochet poilu...Bulot gomme... Cachalock Ness

"Ah.. Voilà !!!"

Arrivé sur l'article tant recherché, je me redresse brusquement pour changer de position. Me voilà à présent agenouillé sur ma chaise, le haut du corps écrasant le livre sur la table, en train de marmonner les premières lignes de la page :

"Calamar géant. Crainte des marins moldus, cet énorme poulpe vivant dans les profondeurs marines dépass..."

Mais pourquoi par Merlin lui faisait-il un grand sourire, comme s'ils étaient les meilleurs amis du monde - alors qu'il venait, en moins d'une seconde, de ruiner toute une partie de son devoir? N'était-il pas pourvu d'un minimum de correction? Ou bien son éducation était-elle tellement peu aboutie que le fait de s'excuser ne lui effleurait même pas un demi neurone? La préfète le fusilla du regard puis se remit au travail, puisqu'il se mettait à lire, avec un peu de chance, hormis son manque de savoir vivre évident, ils devraient pouvoir partager l'espace.

Le silence de la bibliothèque n'était maintenant plus brisé que par le grattement de sa plume sur le parchemin alors qu'elle noircissait ce dernier à l'encre noire de son écriture fine et régulière, mais aussi par le bruit que faisait les pages lorsque son jeune camarade de maison et voisin les tournait. En soit, ils auraient pu continuer à cohabiter ainsi pendant un bon moment si le Gryffondor n'avait subitement pas pris la décision saugrenue de lire son texte à voix haute. L'irlandaise releva donc le nez de son travail et, ne retenant pas son soupir, l’apostropha à voix basse. "Le concept de calme, ça te parle?" Exaspérée, elle l'était, à plus d'un titre, mieux valait pour le garçon faire profil bas ou, à défaut, preuve d'intelligence ou d'instinct de survie.

Est ce que le concept de "calme" m'était étranger ? Bien sûr que non et je compris de suite où Ennis voulait en venir. Rien qu'à voir sa tête, on pouvait facilement comprendre qu'elle était exaspérée et qu'il valait mieux ne pas trop la titiller. Elle devrait être du genre grincheuse. C'était peut être un trait de caractère propre aux préfets parce que depuis que j'étais à Poudlard, tous les préfets que m'avaient donné la même impression : toujours fâchés, toujours en train de râler.

"Ah oui... désolé, je fais du bruit. C'est que je ne sais pas lire en silence mais je vais essayer."

Franchement, je n'avais aucune envie d'embêter mon monde, ce n'était pas du tout dans mes intentions. C'est juste que je n'avais jamais été éduqué en communauté, un peu comme quand vous n'avait jamais habité dans un appartement, vous ne savez pas qu'il faut apprendre à marcher d'un pas léger pour ne pas nuire aux voisins du dessous.

Je repris donc ma lecture, le livre posé à la verticale devant mon nez. Ainsi, je ne voyait plus la mine renfrognée de la préfète et elle, le mien. Le temps passa ainsi, je m'efforçais de lire dans ma tête, ce qui ralentissait grandement ma lecture, quand mon estomac se mit à gargouiller. Une faim s'éveillait sous les plis de ma robe de sorcier. Heureusement, j'avais emporté avec moi quelques sablés du petit déjeuner. J'en portai donc un à ma bouche, croqua dedans à pleine dent ("Craaack...") et le mastiqua avec délice ("Schrooonn... Schrooonn... Schrooonn...") avant de mordre à nouveau dans mon Butter cookie.

La sixième année était un peu étonnée que le garçon ne sache pas mire dans sa tête. Elle ne se souvenait pas vraiment de quand elle-même avait su le faire mais assez tôt après être passée de l'étape du déchiffrement à celle de la lecture. Et de son expérience ici même, tous les élèves de sa classe savait lire en silence. Alors elle eut un temps d'arrêt, qu'elle sut masquer derrière un regard insistant avant de se replonger dans son devoir alors que lui se cachait derrière son livre.

Concentrée sur sa botanique, elle en leva toutefois les yeux au ciel en le voyant faire. Elle ne demandait pas de telles extrémités, juste de pouvoir profiter de la bibliothèque dans le calme. Qu'on chuchote, se déplace, range un livre, qu'un d'entre eux tombe à la rigueur... C'était de l'ordre du normal dans un tel lieu. Mais parler comme si la pièce était à soi c'était beaucoup plus dérangeant, horripilant même quand en plus on faisait des dégâts sans même s'en rendre compte.

Et puis soudainement... Avait-elle ben entendu? Il mangeait bien un biscuit quelconque? En voilà une autre! "Tu feras attention, le bibliothécaire, tout ancien Poufsouffle qu'il soit, ne tolère pas qu'on mange dans la bibliothèque. Je serais toi, je ferais au moins en sorte de ne pas en laisser partout... Et que son serpent ne te voit pas faire, il irait le chercher." Une petite vérité arrangée sur la fin, mais le plus jeune avait-il réellement besoin de le savoir?

"Côha... Un sherpon... ?"

Je mastiquais en vitesse la fin de mon cookie, le déglutissant à moitié puis repris d'une voix plus intelligible :

"Je n'ai pas le droit de manger ici, sinon un serpent va me dénoncer. T'es sérieuse ?"

Je n'avais pas spécialement peur des serpents... ni même des bibliothécaires, mais les propos de la préfète m'interpellaient évidemment. Il y avait donc un serpent qui rodait ici, qui surveillait les élèves et caftais auprès de Mr Locke. Instantanément, je me penchais pour inspecter le dessous de la table et autour de moi.

"Quel genre de serpent ? Un Cobra ? Une couleuvre ? Tu l'as déjà vu ?"

J'inspectais également plateau où j'étudiais afin de vérifier si je n'avais pas laissé trop de miettes trahissant ma petite fringale. J'en récupérais quelques unes que je fourrais dans ma trousse. Là au moins, personne n'irait les chercher.

"Merci de m'avoir prévenu, je vais faire attention."

Sans attendre, je me replongeais dans l'ouvrage, m'efforçant d'être le plus silencieux et sage possible. C'était dur et au bout de quelques minutes ma concentration diminuant, je ressentis des fourmillements plein les jambes et le besoin irrépressible de gigoter sur ma chaise. Je levais alors les yeux sur Ennis. Elle ne semblait plus me prêter attention, je pouvais donc bouger et étirer mes jambes tout en veillant qu'elle ne me remarque pas.

@Ennis O'Belt

Ennis observa son camarade de maison avec un sourire mutin mais un visage et une voix très sérieux. "Tu n'as pas le droit de manger ici parce que ce n'est pas autorisé par le règlement, nuance. Quand au serpent du bibliothécaire, il peut débarquer à tout moment. Si un élève fait quelque chose qu'il ne devrait pas, il part chercher son maître." Expliqua la préfète la plus âgée de la maison Gryffondors alors que son camarade se penchait pour vérifier si Ophion se trouvait sous la table ce qui accentua le sourire de la sixième année. Un sourire qu'elle effaça quand le plus jeune se redressa. Ainsi, il ne put pas voir qu'elle s'amusait quelque peu de sa crédulité. Douce vengeance finalement pas vraiment méchante à son arrivée tonitruante.

- "Ophion est un python royal. Il m'aime bien et il n'est pas rare qu'il vienne me trouver quand je travaille ici." C'était la stricte vérité ça en revanche. Par contre, s'il débarquait vraiment, pas certain qu'elle réussisse à convaincre le reptile de jouer le jeu. Il restait particulièrement indépendant, et friand de la chaleur corporelle qu'il pouvait récupérer en se roulant en boule sur ses genoux. "[color=#741B47d]Il n'y a pas de quoi.[/color]" Finit-elle par dire alors que chacun d'entre eux reprenait son activité. Plusieurs minutes passèrent ainsi, Ennis prenant des notes complémentaires à l'aide de sa lecture, agrémentant son cours. Jusqu'à ce qu'elle sente un regard sur elle et qu'elle relève la tête vers lui. "Oui?"

Un python royal... Ce n'était pas le plus grand des pythons et pour le coup voilà qui était plutôt rassurant. Et puis, la bête avait également la réputation de n'être pas trop agressive. La légende racontait même que la reine d'Egypte Cléopatre en portait plusieurs enroulés autour de ses poignets. J'en avais d'ailleurs vu certains spécimens lors d'un voyage au Nigeria avec mes parents.

Ennis leva les yeux et ne tarda pas à m'interpeller. Elle avait dû sentir mon regard inquisiteur et s'interrogeait naturellement sur la raison d'une telle surveillance. Je devais trouver une parade. Je n'allais quand même pas lui expliquer que je la guettais afin de pouvoir gesticuler à mon aise.

"Je me demandais sur quoi tu travaillais. De la botanique ? Non parce que si c'est de la botanique, j'adore ça. Mes parents sont dénicheurs d'ingrédients... Tu sais pour les potions : Asphodèle, Champignon vénéneux sauteur, Sumac vénéneux... Ils voyagent beaucoup, dans le monde entier à la recherche des meilleurs produits. Et toi, c'est quoi ta matière préférée ? Attends laisse moi deviner... hum... vol ou potion peut être ?"

Tout en parlant, je me levais et contournais la table qui me séparait d'Ennis et m'arrêter une fois à ses côtés pour jeter un regard par dessus son épaule.

"Botanique, j'en étais sur ! Ouah, plus on avance et plus ça doit être génial."

Si Ennis n'avait pas été élevée dans l'apprentissage de l'écoute polie, elle aurait certainement eut un regard dédaigneux pour le garçon qui commençait à lui parler de ce sur quoi elle travaillait. Merci Sherlock, elle avait un livre de botanique ouvert devant elle, son cours disposé en éventail et son herbier qu'elle feuilletait régulièrement. Et puis il avait entrepris de lui parler de ses parents botanistes avant de spéculer sur sa matière favorite. Non vraiment, il était d'un agaçant... Et la châtain ne se privait pas pour laisser son visage se peindre de cette émotion. "Potions et runes." Lâcha-t-elle en réponse un peu durement.

Mais ça n'arrêta pas le gamin qui... C'était une blague? Il venait vraiment de se déplacer pour lire par dessus son épaule. C'était quelque chose qu'elle détestait, non qu'elle exécrait au plus haut point. La curiosité, d'autant plus quand elle était mal placée, ça l’insupportait. Et rare étaient ceux qui pouvaient se permettre ce qu'il venait de faire sans prendre la peine de demander l'autorisation, et encore, même eux savait déceler les signes qui imposait de poser la question avant de le faire. "J'ai été patiente jusque là, mais si tu pouvais faire preuve d'un tant soit peu d'éducation, ça serait appréciable." Asséna-t-elle pour le coup vraiment sèchement. Elle avait assorti le tout d'un regard qui devrait aider à faire passer le message, il devait rejoindre sa place.