Octobre 2048
Cour de la tour de l'Horloge , après-midi
6^e année
@Maïda Sumrak et la participation involontaire d'Antonn Clifford

Léonidas s’était fixé un objectif en tête depuis le début d’année : enfin terminer sa collection de cartes Chocogrenouilles. Pour dire vrai, il n’était qu’à un détail d’atteindre son objectif. Une seule carte, c’est tout ce qu’il lui manquait pour compléter sa collection. Une carte sur laquelle il n’arrivait pas à mettre la main, et ce n’était pas faute de chercher ni d’ouvrir des paquets. Lors de la dernière sortie à Près-au-Lard, il était revenu les poches remplies de Chocogrenouilles, mais rien. La carte d’Arseni Stoyanov lui échappait encore et toujours. Il n’avait eu que des doubles cette fois-ci et il en donna certaines, conservant le reste en vrac dans sa valise.

Le jeune garçon désespérait, bien conscient qu’aucun sorcier normalement constitué ne lui donnerait cette carte. Il s’était résolu à se séparer de l’une de ses cartes or en double, il n’en avait que quelques-unes seulement. Une idée lui avait toutefois traversé l’esprit il y a de cela quelques jours : pourquoi ne pas fabriquer une fausse carte ? Cela ne devait pas être très compliqué et cela réglait son problème lui évitant de se séparer d’une de ses précieuses cartes.

Le Serpentard avait donc passé tout le début de la semaine à confectionner cette fausse carte, persuadé que le résultat était plus vrai que nature (même le regard qui fait peur), ce qui était loin d’être le cas. Un œil un tant soit peu alerte remarquerait bien rapidement que c’était un faux grossier.

Léonidas était donc installé confortablement contre la fontaine, un parchemin et une plume à la main profitant des douceurs automnales pour écrire un devoir de Sortilèges. Devoir qui lui créaient des nœuds aux cerveaux quand il releva les yeux et remarqua quelques mètres devant lui une très jeune Poufsouffle en train d’ouvrir un paquet de Chocogrenouille. Le reflet qui lui éblouit les yeux ne lui laissaient aucun doute, la chanceuse venait d’obtenir une carte or, il se leva et se rapprocha d’un ou deux mètres afin de mieux voir. Aucun doute, ce n’était bien la carte qu’il cherchait depuis des semaines.

Le visage du garçon s’illumina, il ne lui restait plus qu’à la convaincre de lui échanger sa carte contre la sienne, elle n’y verrait que du feu, le Vert et Argent en était persuadé. En effet, selon un avis tout à fait partial, c’est-à-dire le sien, sa carte était parfaite. Il s’adressa alors à la Poufsouffle qui ne semblait pas l’avoir encore remarqué :
— Dit-moi j’ai l’impression que tu aimes bien les Chocogrenouilles, toi aussi tu les collectionnes ?

Il fallait rester simple, direct, efficace, le garçon était trop près du but pour commettre une bourde et ne pas obtenir la carte qu’il convoitait. Il pourrait aussi la prendre par la force, un Accio carte Chocogrenouille et le tour aurait été joué. L’année passée c’est sans doute ce qu’il aurait fait, mais les temps changent. Et puis, la cour de l’Horloge était un endroit bien trop exposé, il y avait beaucoup plus de chance de croiser un préfet, au hasard l’insupportable Clifford. Trop de risques, et surtout le risque de perdre le bien qu’il aurait volé. Définitivement ce n’était vraiment pas l’idée du siècle, il allait donc s’en tenir à son idée initiale.

Voilà dit moi si cela te convient

Maïda contemplait avec un regard gourmand son sachet de chocogrenouilles. Depuis qu'elle était arrivée à Poudlard, on n'arrêtait pas de lui parler de ces délicieuses friandises et elle désespérait d'en goûter un jour. C'était avant qu'un hiboux grand duc lui dépose une pleine boite au petit-déjeuner. Sa commande de confiseries était enfin arrivée et elle avait décidé de patienter jusqu'à l'après-midi pour déguster sa première chocogrenouille au goûter. L'attente lui avait semblé interminable et elle n'avait qu'une hâte, en dévorer le plus possible!

Elle ouvrit la première confiserie et poussa un petit cri de surprise: une grenouille en chocolat venait de bondir sur sa main ! Elle la saisit, perplexe, et vérifia qu'elle était bien en chocolat avant de mordre dedans à pleines dents. Miam, délicieux! Pas étonnant que tout le monde en parle ! Elle savoura un instant sa première bouchée avant d'engloutir le reste. Elle commença à fafouiller dans son paquet pour en prendre une autre (aucun doute, il ne survivrait pas à l'après-midi) et s'aperçut qu'une carte était glissée dans le premier emballage. Elle la regarda attentivement: un liseré or entourait le portrait d'un homme aux traits acérés. Elle lut "Arseni Stoyanov, élu ministre de la Magie de Grande-Bretagne en 2040". Elle trouvait qu'il faisait un peu peur avec son regard sombre et ne savait pas bien quoi en faire lorsqu'elle entendit:

— Dis-moi j’ai l’impression que tu aimes bien les Chocogrenouilles, toi aussi tu les collectionnes ?

Elle leva les yeux et découvrit un serpentard bien plus grand qu'elle qui semblait attendre une réponse. Il devait être au moins en cinquième ou sixième année et elle se demandait bien pourquoi il lui adressait la parole. Après tout, elle n'était qu'en première année et tout le monde savait que les serpentards n'étaient pas très fréquentables. Un peu impressionnée, elle décida de lui répondre avant qu'un silence inconfortable ne s'installe:

-Heu non, pas vraiment c'est la première fois que j'en mange.

Ceci-dit c'était une très bonne idée et elle n'en revint pas de n'y avoir pas pensé toute seule.

-Mais je vais en commencer une! J'ai déjà une première carte "Arseni Stoyanov", tu connais? Oh excuse-moi, je ne t'en ai même pas proposé. Tu veux une chocogrenouille? Au fait, je m'appelle Maïda. Dit elle en lui tendant le paquet.

Si ce n’était pas un signe du destin qu’est-ce que cela pouvait bien être. Enfin, il serait peut-être bon de ne pas extrapoler au vu des talents notoirement inexistants de Léonidas en matière de divination. Il vaut mieux laisser les prédictions aux devins et se contenter des faits, le Serpentard a vu juste, la gnome de Poufsouffle a bel et bien la carte qui l’intéresse. Si l’idée de la lui prendre de force lui a traversé l’esprit un instant, il y renonce, c’est indigne de Serpentard ce genre de méthode et beaucoup trop risqué en plus.

La pauvre fille à l’air totalement crédule et émerveillé, Léonidas aurait presque du remords en pensant au fait qu’elle est en train de se faire embobiner, mais bon la fin et la faim justifie les moyens. Au diable les remords ! Le garçon adressa un sourire de façade alors qu’il écoutait la jeune Poufsouffle lui raconter que c’est la première fois qu’elle en mange. Léonidas soupira intérieurement, c’était presque trop facile, elle ne devait absolument avoir aucune idée de la valeur des cartes, donc c’était tout bon. Le garçon pourrait tout à fait lui échanger quelques bronzes qu’elle n’y verrait que du feu. Cela dit, la jeune fille aurait peut-être un minimum de jugeote et refuserait l’échange. Pendant que le jeune garçon réfléchissait à comment duper la Jaune et Or, celle-ci continuait de débiter un flot ininterrompu de paroles. Qu’est-ce qu’elle parlait beaucoup de celle-là ! Le garçon ne prit même pas la peine d’écouter ce qu’elle racontait, se contentant de hocher la tête en grognant lorsqu’elle lui proposa uneChocogrenouille et répondant d’un bref :
— Léonidas.

Il attrapa la Chocogrenouille qu’elle lui tendit, ouvrant le paquet et croquant la friandise avant de lui tendre la carte, une simple petite carte bronze sans intérêt pour lui et dont il était bien comptant de se débarrasser. Après avoir ingurgité sa friandise, Léonidas se tourna de trois quarts face à la rouquine au regard enfantin :
— Tu verras c’est super sympa de collectionner les cartes, y’en a des très rares et des super rares, celle que tu as eue c’est une très rare. Tu as plutôt de la chance d’ailleurs pour une première fois, moi c’était une carte toute pourrie ma première Chocogrenouille.

Le jeune garçon laissa planer un léger silence pour la laisser digérer le petit mensonge qu’il venait de distiller. Bien au contraire la carte d’Arseni était l’une des plus rares, mais il devait absolument lui laisser penser le contraire. Elle devait avoir l’impression que c’était lui le perdant dans l’échange, ce genre de réflexion devrait normalement être à la portée d’une enfant de 11 ans non. Sinon il avait bien quelques bonbons qui trainait au fond de son sac s’il fallait négocier autrement, la jeune fille ayant un léger problème avec les friandises visiblement, le garçon pourrait sans doute en profiter. Ill ajouta quelques instants après :
— Si tu veux, je peux t’échanger la carte que tu viens d’avoir contre une carte encore plus rare, l’une des plus rares même ! T’es partante ?

Excuse moi pour le p'tit délai de réponse

Si Maïda avait déjà eu une expérience malheureuse avec une serpentarde @Cheryl Styles, elle était dépourvue des préjugés de ses camarades nés dans des familles de sorciers et elle se fit la réflexion que tous les Serpentards n'étaient peut-être pas aussi mauvais qu'on le racontait. Tandis qu'elle observait
attentivement l'adolescent en train de manger sa chocogrenouille, elle se trémoussait sur son banc, impatiente de lui poser des questions mais n'osant pas interrompre sa dégustation. Pour prendre son mal en patience, elle enfourna deux friandises en même temps et ne put pousser qu'un couinement ravi quand elle entendit Léonidas lui expliquer qu'elle avait découvert une carte rare. La bouche pleine, elle déglutit péniblement et observa avec de grand yeux sa précieuse carte. Avec les deux qu'elle venait tout juste de découvrir et celle que le garçon lui avait rendue, elle avait maintenant quatre cartes : sa collection s'agrandissait à vue d'oeil! Elle se rengorgea de fierté, rougissant de plaisir à l'idée d'avoir trouvé une carte spéciale et flattée de l'intérêt que lui portait l'élève.

-Waouh c'est trop cool, merci Léo pour ces infos ! ça t'embête pas que je t'appelle Léo hein? Léonidas c'est trop long, je suis sure que tous tes amis t'appellent Léo. Moi c'est pas possible, Maï ou Ida ce serait trop bizarre, donc je préfère Maïda.

Elle regardait le grand Serpentard avec adoration. Elle avait toujours rêvé d'avoir un grand frère et elle l'imaginait comme lui, gentil et prévenant. Peut-être même qu'il était venue la voir parce qu'il avait remarqué qu'elle était toute seule. La fillette n'avait pas encore beaucoup d'amis et, rassurée par le ton avenant et les encouragements du jeune sorcier, elle lui fit un grand sourire... qui se crispa légèrement lorsqu'elle se rendit compte qu'il voulait échanger la carte d'Arseni, la toute première carte qu'elle avait découverte. Il est vrai qu'il lui proposait une carte encore plus rare, et elle serait folle de refuser. Elle était tiraillée entre deux envies contradictoires : d'un côté elle souhaitait accepter sa proposition et enrichir sa collection mais de l'autre, elle voulait garder la carte pour elle. D'un ton hésitant elle lui répondit:

-Heuuu je sais pas trop, je pensais plutôt la garder en souvenir, c'est ma toute première carte !

La petite Poufsouffle ne voulait pas décevoir son camarade et elle eut une idée lumineuse.

- Si tu veux, je te donne la prochaine carte que je trouve! Et puis tu peux garder aussi celle que tu as redonnée.

Dans un geste de conciliation, elle lui tendit à nouveau le paquet pour qu'il pioche une nouvelle chocogrenouille. Dans son enthousiasme, elle fit un mouvement si brusque que le paquet entier se déversa sur le serpentard. Habituée à sa maladresse, elle partir d'un grand éclat de rire, ne doutant pas que son nouvel ami en rigolerait lui aussi.

- Oups, quelle triple buse ! Désolée Léo!

Elle se leva pour ramasser le tas de bonbons et se faisant, déposa toutes ses cartes sur le banc, à proximité de Léonidas.