Le soleil entamait déjà sa descente alors que le cours n’était pas encore fini mais cela ne semblait déranger ni les élèves de quatrième année, ni leur professeur qui était perché sur son balai. Ils étaient habitués, cela faisait quelques mois déjà que les cours se terminaient alors qu'il faisait nuit. Cela tendant à changer, les jours avaient commencé à rallonger et l'on pouvait dejà le constater. Pour ce cours, Rafael avait décidé de ne pas seulement se consacrer sur la théorie et leur avait donné les balais de l’école pour exécuter un parcours qu’il avait préparé avant le cours. Il détaillait assidûment la pratique de ses élèves afin de leur faire un compte rendu après leur passage. Les minutes passèrent et la totalité des élèves terminèrent le parcours avec plus ou moins de facilité et Rafael les félicita pour leur travail. Il regarda sa montre qui indiquait que le cours était terminé et l’enseignant demanda aux élèves de récupérer une copie où il avait écrit les devoirs à faire pour le prochain cours et leur souhaita une bonne soirée.

Il regarda ses élèves poser un à un les balais de l’école là où ils les avaient pris et chacun pris un devoir avant de se rendre vers le château. C’était le dernière heure de cours et ils ne tarderaient pas à se rendre dans la Grande Salle pour prendre leur repas. Rafael retrouverait donc ses élèves dans peu de temps autour d’un bon repas. Avant cela, le trentenaire devait ranger sa “salle de classe” du jour et fermer son bureau qui était resté ouvert après la partie théorique du cours. Certains élèves étaient encore présents sur le terrain, discutant entre eux mais Rafael n’y prêta pas attention, il n’était pas interdit de rester ici après la fin du cours.

Il commença à réunir tous les balais et en emporta le plus possible avec lui vers le local à balai. Il les rangea minutieusement de manière à ne pas les abimer et à optimiser l’espace pour pouvoir tous les ranger. Cet effort ne lui demanda pas beaucoup de temps et il revint très vite sur le terrain. Il sortit sa baguette et lança quelques sorts pour ranger les différents éléments du parcours qu’il avait sorti quelques heures plus tôt et très vite, le terrain retrouva son apparence normale. Rafael rangea sa baguette et s’approcha des balais restants dans le but de les ranger avec les autres mais il s’arrêta dans son geste. Il avait l’impression d’être observé depuis quelques minutes. Il n’y avait d’abord pas accordé d’importance mais cette présence semblait plus importante. Il se releva dans son geste et se retourna. En effet, il n’était pas seul sur le terrain, tous les élèves étaient partis, sauf une. L’enseignant arrêta ce qu’il faisait et s’approcha de la jeune fille en question.

Le vol ne faisait pas parti des cours qu'elle suivait durant sa quatrième année. Cette matière n'était pas non plus sur la liste des options qu'elle s'était rajouté. En fait, le vol ne faisait plus parti de sa formation. Et la jeune fille, soulagée au départ, commençait à le regretter.

Elle avait donc de ce fait son mardi après-midi de libre. Libre, façon de parler, elle avait bien sûr travaillé durant chacune de ces heures.

Son travail fini, et Jyal sur l'épaule, elle avait pris le chemin du parc, avant de bifurquer vers le stade de Quidditch. Elle s'était arrêté quelques minutes devant l'Arbre Géant, merveille de la Botanique, qu'elle aimait contempler et admirer. Surtout en fin de journée, lorsque cette luminosité particulière pénétrait doucement à travers le feuillage du végétal. L'arbre bicolore était source d’apaisement. Face à lui, elle se sentait si petite, si insignifiante et pourtant si vivante. Elle se contenta de le regarder, et de poser sa main sur son tronc. La surface était rugueuse, râpeuse, et pourtant si douce.

Elle avait ensuite continué vers le mouvement des balais. Les quatrièmes années qui n'avaient pas évincé cette matière terminaient leur cours hebdomadaire. C'était d'une certaine autre façon, également très beau à voir. La vitesse, l'agilité et la précision dont certains faisaient preuve étaient remarquable.

En retrait, elle observait l'aisance des élèves sur ce qui était, ou avait été, pour elle, un objet de torture. Voir l’ancien infirmier hors de sa salle de consultation, alors même qu'il avait quitté son poste depuis quelques mois, lui procurait toujours une étrange sensation.

Sans s'en apercevoir, elle s'était perdue dans ses pensées et un à un les élèves avaient déserté le lieu. Face à elle, bien qu'encore à bonne distance, elle pouvait voir le professeur venir à sa rencontre.

Elle s'approcha également de l'adulte, un franc sourire sur le visage, et d'une voix forte prit les devants :

- "Bonjour monsieur, besoin d'aide pour le rangement ? Vous avez de la chance, je ne suis pas blessée aujourd'hui ! "

Lilly, une élève de Poufsouffle que Rafael avait vu plusieurs fois dans son bureau, se tenait devant lui. Il se demandait ce qu’elle faisait là car elle n’avait pas assisté au cours qu’il venait de donner. Malgré tout, il l’accueillit avec un sourire et la vit marcher dans sa direction. Lui répondant son sourire, elle entama la conversation avant qu’il ne le fasse en lui proposant de l’aide pour ranger les balais. Elle ajouta sur le ton de la blague qu’il était chanceux car elle n’était pas blessée cette fois-ci. Rafael ria en entendant ces propos car la jeune fille semblait avoir la fâcheuse tendance à se blesser. Arrivée à sa hauteur, il lui répondit:

« — Bonjour Lilly, je suis heureux de constater que vous n’êtes pas blessée. Pour le rangement il ne me reste qu’à fermer le local mais vous pouvez venir avec moi si vous voulez.

Rafael avait eut envie de lui demander comment elle allait aujourd’hui mais quelque chose l’en retint. Ils s’étaient recroisés plusieurs fois depuis les vacances de Noël mais n’avaient pas pris le temps de parler tous les deux. L’ancien infirmier et la jeune Poufsouffle n’avaient pas évoqués le sujet qui était sur les bouches de tout le monde à Poudlard. L’urne noir et le Dominion revenaient souvent dans les conversations mais Rafael n’en avait parlé avec aucun des quatre élèves sélectionnés par l’urne. Le trentenaire avait énormément de difficulté à se faire à l’idée que la jeune fille debout devant elle serait jetée dans la cage aux lions. Une part de lui voulait la raisonner et l’empêcher de faire ça mais il savait que ce n’était pas possible et il n’était pas sur d’être celui qui devait le faire. Il cligna des yeux en essayant de s’ôter la vision de la nomination de Lilly et invita l’intéressée à se rendre vers la réserve qu’il devait fermer. Il essaya d’ouvrir la conversation sur un autre sujet bien qu’une part de lui souhaitait parler à cœur ouvert avec Lilly:

— Comment allez vous? Vous n’aviez pas cours ce soir? D’ailleurs je me demandais, je ne vous ai jamais vue en cours de vol depuis que j’ai repris ce poste. Quelle filière suivez vous? »

Rafael n’avait finalement pas pu s’empêcher de lui demander comment elle se sentait, il avait besoin de savoir ce qu’elle ressentait avec toute cette pression qu’elle avait sur les épaules. Une pression qui était beaucoup trop importante à supporter pour une personne de son âge. Il avait du mal à imaginer ce que lui aurait ressenti si tout cela lui était arrivé alors qu'il était encore élève à Poudlard, il n'aurait peut-être pas eu autant de courage que tous ces élèves qui s'étaient portés volontaires.

Le sourire de l'adulte était un vrai rayon de soleil pour la Poufsouffle. L'ancien infirmier était l'un, si ce n'est celui, des adultes en lequel elle avait le plus confiance. Elle se sentait toujours extrêmement à l'aise en sa présence qui était plus que réconfortante.

Malgré tout, son sourire se coince et se crispe quelque peu. Elle n'était pas blessée pour l'instant. Instinctivement, sa main caressa son cou et passa sur les marques de ronces qui s'y trouvait, gravées dans sa chair. Le contact fut fugace, et elle redirigea rapidement son geste vers la Boursouflette pour quelques caresses, reflet de la réassurance dont elle avait elle même besoin.

- "Avec plaisir !" Elle suit l'adulte en reprenant un semblant de sourire. Ils marchent côte à côte pendant quelques secondes avant qu'il ne la questionne sur son état. Ces quelques mots suffisent à faire tomber la carapace qu'elle porte chaque jour. Elle essaie de faire illusion, de serpenter entre les sous-entendus, en esquivant tout d'abord la première question.

- "En effet, je ne suis pas les cours de vol car il n'y en a pas dans ma filière. Je suis en filière complète. J'ai eu du mal à me décider sachant que j'avais envie de suivre le maximum de matières possibles. Sauf le vol, j'avais beaucoup de difficultés sur un balais. J'essaie de rattraper, Jacob, qui est très doué, m'a donné un petit cours particulier en décembre par exemple. Mais c'est pas encore trop ça. Elle fige un petit sourire sur son visage. Elle sait qu'elle n'a pas répondu à la première question de l'adulte. La plus difficile des questions. Répondre honnêtement n'est pas une option, il a déjà accueilli ses souffrances de début d'année. Et il avait été à ce moment d'une grande aide pour la jeune fille. Pouvoir s'appuyer sur lui de nouveau la rassure. Elle a envie de s'ouvrir à lui.

- "Comment je vais c'est une bonne question. Je me la pose chaque jour sans avoir la réponse. Perdue j'imagine. Angoissée parfois. Terrifiée le plus souvent. Elle ne trouve pas nécessaire de préciser la cause de toutes ces émotions, le sous-entendu suffisant dans ce cas là. J'ai de nouveaux quelques difficultés à m'endormir même si j'ai quelques exercices qui m'aident parfois. Il est probable que vous m'auriez vu plus tôt si vous n'étiez pas devenu professeur. Ca vous plait d'ailleurs ce changement pour professeur ? Pourquoi le vol si ce n'est pas indiscret ?"

Détourner l'attention de sa personne est une habitude chez la jeune fille. Se soucier des autres également. Alors même qu'elle pourrait se contenter de vider son sac et sa souffrance, elle ne peut s'empêcher de chercher à savoir comment M.Mason vivait ce changement de statut qui était assez excentrique. Accueillir les plaintes et souffrances des élèves étaient dans la définition de son ancien rôle d'infirmier, mais l'était un peu moins en tant que professeur. Elle espérait que cette discussion ne le dérangerait pas.

Alors que Rafael lui parla de blessure, la jeune fille ne put s’empêcher de porter la main à son cou et son collier apparue suite à sa nomination. L’adulte avait souhaité éviter de mettre Lilly mal à l’aise mais il comprit bien vite qu’il avait échoué dans cette tentative. Elle feinta une caresse vers son Boursouflet, cette fameuse Jyal que Rafael avait rencontré quelques mois plus tôt alors que Lilly avait passé la nuit à l’infirmerie. Il sourit en revoyant cette petite créature et après l’approbation de la Poufsouffle, ils se dirigèrent vers la réserve.

Elle lui expliqua en chemin qu’elle n’avait pas de cours avec lui car elle avait choisi la filière complète qui était l’une des filières qui ne contenait pas de cours de Vol. Elle lui révéla ensuite que ne sachant pas trop quoi faire elle s’était décidée ainsi et comme elle n’aimait pas le Vol, cela lui convenait très bien. Malgré tout, elle ne s’avouait pas vaincue et prenait des cours avec Jacob. Après une petite réflexion Rafael devina très vite que ce devait être le jeune garçon qui était lui aussi envoyé dans le Dominion. Tout semblait se rapporter à cela et Rafael eut du mal à avaler sa salive.

Tout en marchant, l’enseignant devina qu’il y avait un petit malaise qui s’installait entre les deux mais il préféra laisser le temps à Lilly de le rompre, ce qu’elle finit par faire. Elle ne savait pas comment répondre à la question qu’il venait de lui poser, elle se sentait perdue et angoissée et Rafael comprit immédiatement que le Dominion y était pour quelque chose. Elle ajouta que ses difficultés à dormir refaisaient surface et Rafael acquiesça, c’est ce qu’il avait craint en entendant le nom de la jeune fille retentir dans la Grande Salle. Cependant, il ne s’était pas attendu à la suite.

Lilly lui fit comprendre qu’elle aurait bien aimé venir le voir pour lui parler de ses difficultés mais qu’elle n’avait pas forcément osé car il était désormais professeur de Vol. Rafael ferma les yeux, cela avait été une de ses craintes lorsqu’il avait accepté le poste d’enseignant. Il craignait de perdre ce lien de confiance qui s’était créé avec certains élèves du château à travers son métier d’infirmier. La jeune Poufsouffle lui demanda ensuite pourquoi il avait décidé d’enseigner cette matière. Il réfléchit quelques instants et décida de répondre à cette question en premier avant de pouvoir prendre le temps de répondre aux autres ensuite.

« — Ce changement me plait, cela faisait près de quinze ans que j’étais infirmier et une envie de découvrir autre chose commençait à germer en moi. Cette proposition est donc tombée à pic. Le Vol est une matière qui m’intéresse énormément car j’ai hésité pendant mes études à emprunter un parcours sportif professionnel. J’ai officié en tant qu’infirmier dans une équipe de Quidditch pendant près de dix ans et j’ai donc appris énormément de choses sur cette matière. Bien sur cela ne suffit pas et je suis une formation en complément pour valider mes compétences et acquérir des connaissances d’enseignement.

Rafael s’étonnait de se sentir aussi à l’aise avec la jeune fille mais il estimait qu’il en savait énormément sur elle et qu’il était normal qu’elle apprenne des choses sur lui en retour si elle le voulait. Malgré tout, ce n’était pas le sujet qu’il voulait développer dans cet entrevue. Il rebondit alors sur les propos qu’elle avait tenue.

— Lilly, vous savez que même si je suis devenu professeur, vous pouvez venir autant que vous le souhaitez pour me voir. Je ne suis certes plus l’infirmier titulaire dans le château mais je serai toujours là pour vous aider. Si vous avez besoin de parler ou besoin d’aide ou seulement de conseils vous pouvez venir dans mon bureau, je reste le même. D’accord?

Il espérait qu’elle comprendrait qu’il était le même que lorsqu’il travaillait à l’infirmerie. Certes il avait d’autres missions à réaliser mais le role d’enseignant passait aussi par l’aide et l’accompagnement de ses élèves. Arrivés près de la réserve, Rafael s’assît par terre et invita la jeune fille à en faire autant puis décida de ne pas éviter le sujet plus longtemps.

— Asseyez vous, je vous en prie. Je me doute que la réapparition de ces difficultés fait suite aux récentes annonces du Dominion. Est-ce que vous souhaitez m’en parler? »

15 ans. C'était presque son âge. Et cela représentait l'expérience de l'adulte. Elle avait l'impression d'avoir déjà vécu beaucoup de choses. Et pourtant.

- "Je comprends. ça fait long 15 ans c'est sûr. Cela doit être une sensation étrange de redevenir élève après tant d'années."

Elle lève le regard vers lui. Ses yeux sont fascinants. D'un bleu très clair, qui paraît tirer sur le gris. Elle lui sourit et acquiesce d'un mouvement de tête qu'elle ponctue d'un "Oui, merci. C'est gentil."

Elle savait bien qu'il ne pouvait pas se permettre de voir débouler dans son bureau chaque élève ayant envie de s'épancher. Mais elle appréciait la proposition de l'adulte. Et le croyait. Une sincérité se dégageait de ses propos. Et c'est ce que Lilly appréciait chez lui. Le sentiment de sécurité ne pouvait venir que si la confiance était installée. Et l'adulte créait ce climat de sécurité avec une certaine facilité qui étonnait la Poufsouffle. Ses élèves avaient beaucoup de chance de l'avoir.

Arrivés dans la réserve, elle s'assoit en face de lui, à même le sol. Comme elle aime.

- "Je ne me vois pas vous dire non après vous avoir sauté dessus dès la fin de votre cours." Elle sourit, presque amusée. Mais il est fugace. Un voile passe devant ses yeux et elle prend une grande inspiration avant de continuer.

- "Pour une raison que j'ai moi même du mal à comprendre, j'ai déposé mon nom dans l'Urne. J'étais même presque contente et satisfaite d'avoir réussi à oser. Je me sentais bêtement courageuse d'avoir fait ça. J'avais l'impression que c'était important. Que c'était presque un devoir de le faire. C'est bête je suppose mais j'avais l'âge donc la question ne se posait pas trop vous voyez ?"

Elle n'attend aucune réponse, elle était lancée. Elle prenait son temps, le débit de ses paroles était un peu moins rapide qu'a l'accoutumé, mais les mots s'échappaient de sa bouche, les uns après les autres. Et cela lui faisait du bien.

- "Ce qui est sûr c'est qu'a aucun moment je ne m'attendais à ce que mon nom soit tiré. J'ai rien de plus ou de moins que d'autres élèves. Que des personnes comme Irene soient choisis, cela n'a rien d'étonnant. Mais moi. C'est presque drôle." Un sourire éteint rehausse légèrement ses pommettes. Elle s'était posé la question de ce choix de nombreuses fois. Sans bien sûr trouver la réponse. Et ces mois passés sans réponses l'épuisaient.

- "Et j'ai peur. J'essaie de ne pas le montrer Je me suis déjà assez affiché comme ça le soir de l'annonce. Mais c'est dur. Je n'arrête pas de me dire 'Et si je faisais honte à Poudlard ?' . Échouer en tant qu'individu c'est quelque chose. Mes erreurs je les gère comme je peux. Mais en tant que représentante c'est autre chose. Et puis on sait si peu de chose sur ce tournoi. Sur ses réels enjeux. Je suis complètement à la ramasse et complètement perdue."

En apprenant que Rafael avait exercé ce métier pendant quinze ans, Lilly sembla étonné. Celui lui paraissait beaucoup et c’était normal, elle était beaucoup plus jeune que son enseignant. Elle comprit bien vite que reprendre des études à son âge était étrange, Rafael avait encore du mal à se faire à l’idée de retrouver sa place d’étudiant. Bien évidemment, cela n’avait rien à voir avec les études à Poudlard, Rafael suivait ses cours par correspondance et c’était une formation condensée. En entendant la jeune fille le remercier et s’asseoir en face de lui, Rafael laissa de côté ses pensées et écouta ce que la Poufsouffle avait à dire.

En aucun cas, Rafael n’aurait forcé la jeune fille à parler de tout cela si elle ne l’avait pas voulu. C’est bien pour cela qu’il lui avait fait comprendre que c’était à elle de décider si elle souhaitait en parler. Elle accepta de lui dévoiler ce qui la tracassait tout en essayant d’alléger la gravité de la situation. Malgré tout, son sourire ne perdura pas longtemps et fut vite remplacé par un regard plus grave. Elle inspira avant de se lancer dans son récit.

Elle commença par expliquer à l’ancien infirmier qu’elle ne savait pas vraiment pourquoi elle avait placé son nom dans l’urne. Et bien qu’il ne voulait pas voir d’élèves de n’importe quelle école se rendre dans cette épreuve, il pouvait comprendre qu’une poignée d’élèves avait inscrit leur nom dans l’urne. S’il y avait eu cet évènement lors de sa scolarité, il l’aurait peut-être fait, lui aussi. Elle ajouta ensuite qu’elle se sentait courageuse sur le moment et elle l’était, il fallait du courage pour faire ce qu’elle avait fait. Elle continua en estimant que c’était un devoir pour elle de le faire, elle avait l’âge requis et elle avait pensé que c’était à elle de le faire. Rafael pouvait comprendre cela aussi. Elle fit une petite pause mais Rafael devinait qu’elle n’en avait pas fini. Elle reprit quelques secondes plus tard.

Alors qu’il était jusqu’ici d’accord avec les propos de la Poufsouffle, ce n’était pas le cas de la suite. Elle ne comprenait pas qu’elle ait été choisie par l’urne, elle jugeait ne rien avoir de spécial et se comparait à Irene Gates. Les titres tels que préfets ou capitaine de Quidditch n’était pas les seules manières de se démarquer et Lilly en était la preuve. Elle était d’une gentillesse et d’une détermination sans faille. Rafael n’avait entendu que du bien d’elle et bien qu’elle ne suivait pas ses cours, il avait entendu des échos comme quoi elle était très bonne élève. Bien qu’il ne soit pas d’accord, il ne coupa pas Lilly dans ses propos mais nia d’un signe de tête ce qu’elle disait. Après une nouvelle pause elle exprima ce qu’elle ressentait sur tous ces évènements.

De toute évidence, elle avait peur de ce qu’elle allait affronter et Rafael la comprenait, c’était une réaction totalement normale. Ce qui était étonnant était qu’elle avait peur de décevoir les autres, elle n’avait pas peur de ce qu’elle allait devoir affronter. Elle continua en révélant qu’elle se sentait perdue et ne savait pas à quoi s’attendre. Rafael aurait souhaité répondre à cette question et lui expliquer ce qu’il y avait dans ce Dominion mais il n’en savait rien non plus. En entendant les révélations de la jeune fille, son cœur se serra mais il fit en sorte de ne rien montrer, il ne voulait pas effrayer Lilly plus qu’elle ne l’était déjà. L’enseignant s’assura que Lilly avait finit de parler puis lui répondit:

« — Votre réaction est tout à fait normale Lilly, mais il y a une chose sur laquelle j’aimerais revenir. Je ne suis pas d’accord avec vous, vous n’avez rien à envier à vos camarades. Vous êtes une excellente élève et vous avez énormément de qualités humaines. Ayez confiance en vous.

Il ponctua ses propos d’un sourire franc, les yeux toujours fixés dans sa direction et laissa le temps à la Poufsouffle d’accepter ses propos. Il ne savait pas comment rassurer la jeune fille car ne savait pas non plus à quoi elle serait opposé. Il reprit finalement la parole pour ajouter:

— Je n’aurais pas compris si vous m’aviez dit que vous n’aviez pas peur, là aussi c’est normal. En revanche, vous ne devez pas vous concentrer sur ce que diront les autres. Il y aura toujours des personnes pour juger ou donner leurs avis, mais vous ne devez pas pensez à ça. Il faut que vous pensiez à vous avant toute chose.

Avant de continuer, Rafael se rappela des propos de de sa directrice concernant la préparation des élèves qui avaient été sélectionnés et parla de nouveau:

— Il ne fait aucun doute que vous êtes perdue, je ne sais pas non plus ce qui vous attend mais Miss Loewy et Miss Montmort ont dit qu’elles vous aideraient et je sais qu’elles le feront. De mon côté, je ne sais pas ce que vous allez devoir faire mais je peux vous aider du mieux que je peux. Si vous le souhaitez, je peux vous aider à perfectionner vos sortilèges de défense et vous apprendre quelques sorts de soins utiles. »

Rafael n’était pas le meilleur duelliste de Poudlard, il se doutait que d’autres étaient plus doués dans ce domaine mais il était loin d’être le plus mauvais malgré tout. Son expérience au sein du Réveil l’avait aidé à s’entraîner au combat et les quinze ans pendant lesquelles il avait exercé le métier d’infirmier lui avaient permis de perfectionner ses sortilèges de soins.

Les compliments, proche d'éloges, qu'elle recevait de la part de l'ancien infirmier teintèrent ses joues de rouge. Ces paroles, associées au très beau sourire de l'adulte, étaient très agréables. Lilly se sentait considérée et avait le sentiment d'être capable de faire face aux évènements qui se présenteraient. Sa confiance en elle s'en trouvait grandie sur le moment. Elle savait que cela ne durerait probablement pas, pour autant, elle savourait l'instant et les émotions associées.

Durant le silence qu'il laissa après ses propos, elle avait la sensation que les battements de son cœur résonnaient bien en dehors de sa poitrine. Gênée, c'est avec soulagement qu'elle accueillit de nouveau la voix de l'adulte.

Elle ponctua certaines de ces phrases par des hochements de tête, intégrant du mieux qu'elle pouvait les constatations et conseils qu'il prenait la peine de lui donner. Bénéficier de l'expérience de l'adulte était une chance qu'elle savait apprécier à sa juste valeur.

Les paroles de la Directrice durant une autre discussion lui revinrent également en mémoire. Peu à l'aise en général avec les adultes, elle ne les avait pourtant pas évité ces derniers temps, ressentant la nécessité d'une aide qui ne pouvait venir de ses amis. Ne pas rester seule, se rapprocher des élèves d'autres écoles. En d'autres circonstances elle aurait sauté de joie à cette idée. Etre face à d'autres types de magie, à différents enseignements et modes de pensées. C'était une ouverture dont la Poufsouffle rêvait. Mais les circonstance du tournoi ne laissait pas vraiment envisager de rencontres calmes et amicales propices à l'échange et au partage.

Durant un mouvement de tête du professeur, elle aperçu l'une des marques noires qui ornaient le cou de ce dernier. Cela faisait un moment qu'elle se questionnait sur ces tatouages. Mais elle ne trouva pas le courage de l'interroger à ce sujet. Encore une fois elle se défilait, alors qu'elle mourait d'envie de savoir. Depuis que son corps en était également orné, l’intérêt que la Poufsouffle avait à leur égards était décuplé. Les tatouages que l'ancien infirmier arborait aux bras et au cou étaient magnifiques à ses yeux. Ils n'étaient pas toujours visibles. Et l'adolescente pouvait comprendre la nécessité qu'il avait de les cacher à Poudlard. Après tout, pour les élèves, ce n'était pas autorisé. Est-ce que ceux-là avaient des pouvoirs magiques, c'était ce qu'elle aurait aimé savoir par dessus tout. Mais le sujet n'était pas à l'ordre du jour, il y avait plus important.

- « Merci beaucoup de prendre le temps de m'écouter en tout cas. Vous avez très certainement d'autres choses à faire et j'apprécie beaucoup que vous m'écoutiez. Je ne voudrai pas abuser de votre temps encore plus, mais c'est vrai que ce ne serait pas de refus de profiter de votre expérience. » Elle dirigea un franc sourire plein de confiance vers l'adulte. « Je suis totalement partante pour apprendre de nouveaux sortilèges de soins. D'un côté, j'espère ne pas avoir à m'en servir, mais j'ai conscience que ça serait une sorte de déni. » Son sourire s'efface peu à peu pour laisser place à un air plus sérieux et concentré. « Vous me pensez capable d'apprendre quel sortilège  ? En tant qu'ancien infirmier j'imagine que vous avez de très bons conseils à donner dans le domaine. » De nouveau un petit sourire se dessine sur son visage. L'excitation de cette opportunité d'apprendre de nouveaux sortilèges s'était retrouvée au premier plan, et l'adolescente n'avait plus très envie de s'épancher finalement.

Au fur et à mesure que Rafael parlait à la jeune Poufsouffle, celle-ci acquiesçait et réagissant sans parler à ses propos. Il sembla au professeur de Vol qu’elle prenait confiance en elle en entendant ses paroles. Elle semblait réfléchir à ce qu’il lui disait et cela la rassurait sûrement. Rafael ne savait pas du tout ce à quoi elle devrait faire face mais il croyait sincèrement que cette jeune fille pouvait en ressortir, il le voulait. Une fois qu’il eut terminé de parler, Rafael remarqua que la jeune fille s’attardait sur quelque chose sans qu’il ne puisse deviner quoi. Il essaya de repenser à ce qu’il venait de dire mais rien ne lui semblait inadapté.

Après un bref silence, la jeune fille reprit la parole pour répondre à Rafael, elle le remercia pour le temps qu’il lui accordait et il lui sourit de nouveau. Il trouvait cela important qu’il puisse l’aider à son niveau, c’était la seule chose qu’il pouvait faire. Elle acceptait qu’il l’aide à se préparer à ce qu’elle allait pouvoir affronter. Une part d’elle voulait croire qu’elle n’aurait pas besoin de sortilèges de soins mais elle n’était pas naïve et savait que c’était possible qu’elle y ait recours. Le sujet sembla l’intéresser et elle demanda à l’ancien infirmier ce qu’il pouvait lui apprendre.

Ce-dernier réfléchit quelques instants. Il ne connaissait pas le programme scolaire de ses collègues et ne se rappelait plus en quelle année il avait appris les différents sortilèges de soins. Il répondit d’abord aux remerciements de la jeune fille avant de revenir sur ses questions.

« — Ne me remerciez pas pour vous aider, c’est la moindre des choses.

Il fit une petite pause en essayant de se rappeler du programme qu’il avait appris et répondit à la Lilly:

— Je ne sais pas vraiment quel niveau vous avez dans ce domaine ni ce que mes collègues vous ont appris mais je pense qu’on peut voir ou renforcer les sortilèges comme Ferula ou Revigor. Si je vois que vous vous en sortez bien on pourrait aussi voir pour travailler le charme du bouclier pour vous protéger d’une quelconque menace. »

Ce-dernier sort n’était pas dans le programme des premières années mais le fait de savoir les bases pouvait peut-être l’aider à se protéger un minimum contre d’autres élèves ou contre des pièges du Dominion. Les deux premiers sorts cités lui permettraient de pouvoir continuer à marcher malgré une entorse ou une petite fracture et remettre en état de marcher ses probables camarades. Ce n’était pas des sorts très puissants mais il pouvait se montrer assez utiles dans certaines circonstances. Selon son niveau, Rafael pourrait adapter son soutien avec des sorts plus ou moins compliqués.

Apprendre était source de plaisir et d'excitation pour la Poufsouffle. Sa curiosité naturelle et sans limite lui permettait d'être toujours enjouée à l'idée de découvrir de nouvelles choses. D'autant plus quand cela touchait à la magie. Et ce d'une manière encore plus forte lorsqu'elle pouvait en tirer une utilité. Tout ce qui pouvait potentiellement l'aider durant ce tournoi était la bienvenue. Et la proposition de l'enseignant fut accueillie avec gratitude par l'adolescente. Dont le respect et l'admiration pour l'adulte ne cessaient de croître. Sa générosité et sa disponibilité la rassurait. Il lui semblait que la barrière et la distance naturelle entre professeur et élève se réduisait peu à peu. Le fait qu'elle soit totalement à l'aise et détendue en présence d'un adulte exerçant ce rôle pouvait en témoigner.

Elle avait bien du mal avec cette notion et trouvait dommage que cela ne soit pas aussi simple avec tous les adultes. Sans entretenir des relations forcément amicales et de proximité, elle trouvait que certains adultes mériteraient d'être plus accessibles. Cela pouvait éviter tellement de souffrance et d'angoisse à cet âge déjà difficile qu'était l'adolescence. Mais elle comprenait également la nécessité d'une telle distance, question de respect que parfois certains élèves avaient bien du mal à trouver lorsque les professeurs laissaient une telle liberté s'installer. Les relations humaines étaient définitivement bien compliquées. Et la Poufsouffle se questionnait souvent à ce sujet. Cherchant sa place, cherchant comment agir en cohérence avec son âge, son statut et bien sûr ses émotions qui ne rendaient pas ça facile.

« Je pense n'être pas très mauvaise en sortilèges. J'ai un bon niveau lorsque j'ai un peu de recul sur les sortilèges à lancer. Mais par contre il est rare que j'y arrive du premier coup. J'ai toujours un petit temps d'adaptation pour les cerner et les lancer correctement.» Elle rigole doucement. Et fait une confidence qui n'en est finalement pas une pour qui côtoie ne serait-ce qu'un peu la jeune fille. « C'est sans doute dut à mon manque de confiance en moi. »

Ce trait de caractère était difficile à dissimuler. Et la remarque lui était souvent faite par ses professeurs. Elle s'efforçait d'y travailler mais ce changement de personnalité ne se ferait certainement qu'avec le temps et la maturité. Enfin c'est ce qu'elle se disait pour se rassurer. Même si cette idée de manquer constamment de confiance l'angoissait beaucoup. Elle savait également que cela ne viendrait pas sans efforts.

Un sourire ornait donc son visage, maintenant bien plus rayonnant. La perspective d'apprendre de nouveaux sortilèges était très stimulante. De plus, elle connaissait de nom les sortilèges cités. Avec bien sur Protego sur lequel progresser ne serait certainement pas inutile.

« Si je ne dis pas de bêtise, Ferula permet de faire une atèle pour un membre et Revigor donne un petit coup de fouet, façon de parler, à la personne visée, c'est bien ça ? »

Sûre d'elle et sans attendre la réponse de son professeur improvisé, elle se redresse et tout en lissant rapidement sa robe énonce d'une voix certainement un peu trop enthousiaste : « Je suis prête ! »