Aujourd'hui dimanche j'avais passé la journée en compagnie de Carry, nous avions prit le diner ensemble et elle m'avait aidé à réviser mes cours. J'avais surtout eu besoin de son aide en sortilège et en potion. Pour le reste je me débrouillais pas trop mal enfin sauf en cours de vol. Là, c'était une catastrophe et Carry le savait que trop bien. Et puis surtout, aujourd'hui il avait fait trop froid que je sorte de ce château pour m'entrainer à jouer les petites sorcières à l'ancienne sur leur balais. J'estimais qu'en 2045 nous avions assez de moyen de transport pour éviter de voler sur un balai qui n'est en plus, même pas confortable.

En bref ma journée ne s'était pas trop mal déroulée, j'avais bien mangé, j'avais été joyeuse, j'avais vu mes amies, j'avais même compris quelques subtilités de mes cours de sortilèges alors tous les éléments étaient réunis pour que je puisse passer une bonne nuit. En allant me coucher ce soir là, j'avais le coeur léger et la tête pleine de bon souvenirs. Dans mon lit j'avais commencé par chercher ma position idéale, sur le dos, sur le ventre, sur le côté puis finalement sur le dos. J'avais ensuite imaginé mon rêve, je me voyais sur une plage, au chaud avec mes amies en train de jouer avec un ballon, de faire une partie de carte, la vie rêver. Avec ces images en tête j'avais très vite cédé ma place au sommeil.

Quelques heures plus tard j'avais commencé à remuer dans tous les sens, je me sentais faire des petits cries sans vraiment parler. Je savais que j'étais en train de rêver mais je n'avais aucun moyen de sortir de là. Tout d'un coup la plage sur laquelle je me trouvais avait été prise dans une tempête, du vent, de la pluie et des orages avaient fait leur apparition. Puis, une inondation. Alors que j'essayais de nager vers la surface pour sauver ma vie, j'avais senti une main m'agripper le pied. En me retournant j'avais vu son visage. Je le voyais très nettement, le visage de ma cousine Juvia. Elle me retenait, elle ne voulait pas que je nage vers la surface. Je commençais à m'étouffer, à suffoquer lorsqu'en me tournant mon front frappa violemment le mur sur le côté de mon lit. Ce choc me sortit presque instantanément de mon sommeil.

Je suais à grosse goutte et j'avais l'impression que ma tête allait exploser. Il fallait que je prenne l'air. Je voulais rejoindre Carry dans sa chambre pour qu'elle me rassure mais je n'avais aucune idée de l'heure qu'il était et je ne voulais pas la réveiller et prendre le risque qu'elle ne soit pas en forme le lendemain. Les portes du château étant fermées, j'avais pris la décision de me rendre au sommet de la tour d'astronomie. La dernière fois que j'y étais allée en pleine nuit c'était pendant une crise de somnambulisme et j'avais failli y laisser la vie. Heureusement cette fois ci les choses étaient différentes, j'étais pleinement consciente et j'avais juste besoin de prendre l'air.

Après quelques longues minutes à gravir les nombreuses marches du château, j'étais enfin arrivée au sommet. Je poussais la porte et je sentis presque immédiatement l'air frais glisser sur ma peau. Ça faisait du bien même si j'en avais quelques frissons. Je sentais que le choc sur mon front avait été plus violent que prévu, peut être avais-je une bosse ou un bleu en train de se former ? Ce qui était sur c'est que le lendemain j'allais probablement me retrouver avec une belle marque.

@Rafael Mason j'espère que tout est bon pour toi

Il y avait des dates qui n’étaient jamais faciles à oublier pour certaines personnes et certaines d’entre elles pouvaient faire remonter de mauvais souvenirs à la surface et c’est ce qu’il s’était passé depuis quelques jours pour l’infirmier. Cela faisait une dizaine de jours que le trentenaire avait du mal à trouver le sommeil. Et pour cause, un an plus tôt, le sorcier avait encore subit les répercussions des différents partis politique du pays. Un an plus tôt, il avait perdu son travail suite à la destruction de l’hôpital Sainte Mangouste. Rafael avait mal vécu cette période mais ce n’était pas directement lié à la destruction du lieu en elle-même. Cet évènement faisait écho à l’attentat qui avait eu lieu quelques années plus tôt au ministère de la magie. Depuis, Rafael redoutait le mois de Février car il lui rappelait toujours ce souvenir mais il ne s’était pas attendu à ce que cela soit similaire en Novembre.

Ayant déjà utilisé de la potion de sommeil sans rêve à deux reprises cette semaine, l’infirmier ne voulait pas en reprendre. Il savait que cette potion pouvait vite devenir addictive et il ne voulait pas prendre le risque. Ce soir-là, après s’être assuré que personne n’avait besoin de lui dans son bureau, il avait quitté les lieux et avait fermé la porte à clefs. Il avait marché un petit peu dans les couloirs, était passé par les cuisines où quelques elfes étaient encore au travail. Après avoir grignoté quelques friandises, le sorcier avait décidé de se rendre en haut de la tour d’Astronomie. Dans sa jeunesse, alors qu’il était à Poudlard et que le couvre feu n’était pas si tôt, il avait passé plusieurs soirées dans cette endroit avec ses amis. Il trouvait ce lieu à la fois reposant et beau, lui qui avait sa salle commune au rez-de-chaussée, il enviait les Serdaigle et les Gryffondor seulement pour la localisation de leur salle commune.

L’infirmier avait donc pris la direction de la tour d’Astronomie en essayant de ne pas se faire avoir par les escaliers qui tentaient certainement de le ramener à l’infirmerie. À moins qu’elles ne faisaient exprès de lui faire faire des détours pour le fatiguer et l’aider à dormir. Néanmoins, cela ne sembla pas fonctionner et Rafael arriva à la porte de la tour d’astronomie sans avoir envie de retourner dans son lit. Il fut surpris de constater que la porte était entrouverte mais ne s’arrêta pas sur ce détail. L’infirmier s’engouffra dans la pièce et savoura la fraîcheur de l’air sur ses joues. L’effort qu’il venait de faire était balayé par le vent qui s’engouffrait à cet endroit. Il ferma les yeux quelques secondes et en les ouvrant, il découvrit la silhouette d’une jeune fille dans la pièce et s’en approcha. Arrivé à sa hauteur il demanda:

« — Bonsoir, je peux savoir ce que vous faites si tard hors de votre dortoir? »

Mince, crotte, pas cool.
C'était les premiers mots que j'avais eu à l'esprit lorsqu'une voix masculine me demanda ce que je faisais hors de mon dortoir à une heure si tardive. Il avait pas tord, j'avais rien à faire ici mais comment lui expliquer que j'avais fait un horrible cauchemar ?
Je me retournais pour faire face à mon interlocuteur et, je fus surprise en voyant qu'il ne s'agissait pas d'un professeur ou du concierge mais de l'infirmier. Et lui alors, pourquoi est ce qu'il ne dormait pas encore ? Lui aussi avait fait un cauchemar ? Qu'importe la raison de sa venue ici lui n'avait pas à s'en justifier alors que moi oui.

Tout en frottant la bosse qui était en train de se former sur mon front, je réfléchissais à ce que j'allais bien pouvoir lui dire. Finalement j'avais considéré qu'il était préférable de dire la vérité. Au pire j'écoperais d'une heure de colle ce n'est pas bien grave.

- Pour tout vous dire j'ai fait un cauchemar vraiment horrible et du coup j'ai eu besoin de prendre l'air, sortir un peu... Mais vu que la grande porte du château est fermée beh j'ai du me rabattre sur la tour d'astronomie... Je suis vraiment désolée je ne sais pas quelle heure il est mais j'ai bien conscience que je n'ai pas à être ici. J'accepte ma punition.

Voilà qu'on en finisse, il n'avait plus qu'à me sermonner, me dire que ce n'est pas responsable, qu'ici c'est dangereux sans un adulte ou je ne sais quoi. Dans tous les cas, il avait raison et je n'avais aucun argument à avancer. Mais qu'est-ce que ça pouvait m'agacer de ne rien pouvoir faire. Quand je me sentais mal j'étais obligée de rester dans mon lit ? Réveiller mes camarades ? Je ne comprends pas pourquoi il fallait obligatoirement punir l'élève qui avait finalement quitter son dortoir pour soulager les autres. J'avais déjà fait beaucoup de bruit en me cognant la tête contre le mur alors si en plus j'imposais aux filles mes pensées nocturnes, elles me jetteraient bientôt au fond du lac c'est sur.

En le regardant et en attendant ma sanction je me demandais ce que l'infirmier pouvait bien faire ici. La tour d'astronomie c'était pas l'endroit idéale pour préparer des médicaments... Ou alors, tout comme moi il cherchait à prendre un peu l'air. Pour le coup c'est ici le meilleur endroit. Il s'agit du lieux ou l'on se sent le plus proche des étoiles, de la lune. Et la fraîcheur de la nuit permet à quiconque de se remettre les idées en place. J'espérais qu'avec ma petite échappée nocturne les professeurs ne se décident pas à fermer la porte de la tour pour y condamner l'accès la nuit. Je n'avais pas du être la seule à venir ici sans autorisation en pleine nuit donc il n'y avait que peu de chance qu'ils fassent fermer la porte par ma faute mais cette idée me fit un pincement au coeur tout de même.

La jeune fille qui se trouvait devant lui ne devait pas être très vieille. À vue d’œil, Rafael estimait sa taille à celle d’une deuxième ou troisième année et cette impression se confirma lorsque la jeune fille se retourna. Son visage enfantin était entouré par de longs cheveux roux. L’infirmier garda un visage fermé, il ne voulait pas laisser la jeune fille penser qu’elle avait le droit de se promener ainsi dans le château à cette heure. La jeune fille se frotta le crâne et il semblait à Rafael qu’elle essayait de trouver une justification à sa présence ici. Après quelques secondes de réflexion, elle finit par répondre à l’adulte.

Elle lui expliqua qu’elle avait fait un cauchemar qui l’avait poussé à vouloir prendre l’air. Rafael devina sans mal qu’elle appartenait à la maison Serpentard. C’était la seule maison qui n’avait pas de fenêtre pouvant s’ouvrir. Rafael était partagé, une partie de lui voulait se montrer intransigeant et ne pas prendre en compte les explications de la jeune fille. Elle était hors du dortoir et n’en avait pas le droit. Cependant, une autre partie avait envie de creuser un petit peu et s’assurer que tout allait bien pour la jeune fille. Ce n’était encore qu’une adolescente et il n’était pas rare de faire des cauchemars à son âge. Mais si ces cauchemars n’avaient aucune signification pour elle, elle n’en parlerait pas au premier adulte qu’elle voyait.

Elle termina sa réponse par dire qu’elle accepterait la punition qu’il lui imposerait. Cela permit à Rafael de se décider sur le choix qu’il devait faire. Il ne voulait pas la punir, ou du moins, pas tant qu’il ne s’était pas préoccupée de ce qui pouvait provoquer ce genre de réaction chez la jeune fille. Il décida alors de lui répondre:

« — Et si vous me disiez votre prénom avant de parler de punition.

Rafael regarda autour de lui et se rapprocha d’une ouverture qui donnait directement sur le ciel. Voilà pourquoi il avait décidé de venir ici, il voulait pouvoir admirer cette étendue infinie et se perdre dans ce calme intense. Il trouvait cela apaisant et réconfortant à la fois. Il savait qu’en tournant le dos à la jeune fille, il avait pris le risque que celle-ci prenne la fuite mais il ne s’arrêta pas à ça. Il prit le temps de s’asseoir par terre puis se retourna vers elle et sans regarder si elle était encore présente il l’invita à le rejoindre.

— Vous avez raison, vous ne devriez pas être ici à cette heure. Mais maintenant que vous êtes là, vous devriez prendre le temps de vous ressourcez devant ce spectacle. N’est-ce pas magnifique? »

L'infirmier m'écouta sans dire un mot, je ne pouvais distinguer aucune faiblesse ou faille sur son visage. Est-ce qu'il allait croire à ma vérité ou allait il penser que j'étais en train de le manipuler ? Si jamais il pensait ainsi alors je n'aurais aucun nouvel argument à lui apporter... Je lui avais déjà dit la vérité. Mais, contre toute attente il me demanda mon prénom avant de prononcer ma sanction. C'était étonnant qu'il réagisse comme ça... J'étais pourtant persuadée que la plupart des adultes n'auraient même pas cherché à discuter, ils m'auraient simplement donné une punition avec une petite morale et voilà fin de l'histoire. Pas lui. L'infirmier avait l'air de réellement s'intéresser à moi au delà de ma punition. Ou ce n'était qu'une impression.

- Kelly.. Je m'appelle Kelly Monsieur.

Je ne savais pas si il fallait que j'en dise plus comme donner ma maison, mon nom et même mon année de scolarité ? Aucune idée. Il m'avait simplement demandé mon prénom alors j'avais répondu à la question, ni plus ni moins.

Pendant que je lui donnais mon nom il s'éloigna de moi, me tournant le dos puis, il prit place par terre. Je le regardais faire. Est ce qu'il cherchait quelque chose dans le ciel ? Pourquoi est ce qu'il s'était assis ici ? Sur le sol froid... Il reprit la parole en m'indiquant que je n'avais effectivement pas ma place ici à cette heure de la nuit mais que je devrais profiter du spectacle. Curieuse de savoir ce qui pouvait y avoir de magnifique là dedans, je m'étais installée en tailleur à côté de lui. Je levais la tête vers le ciel. Il n'avait pas tort c'était assez jolie de voir toutes ces étoiles briller. Ce spectacle avait quelque chose de rassurant. Et puis la lune qui brillait me rappelait que je n'étais pas seule.

- Vous avez raison, c'est un spectacle magnifique...

Je tournais la tête en direction de l'infirmier, pourquoi venait il ici ? Est-ce qu'il avait besoin de se détendre ou avait il besoin de se recueillir. A moins qu'il soit en attente d'une étoile filante pour faire un voeux. Quoi qu'il en soit ce n'était pas mes affaires et je devais résister à l'envie de lui demander. Cela dit je pouvais quand même lui poser une question.

- Vous pensez que lorsqu'une personne meurt elle devient une étoile ? On m'a raconté ça quand j'étais petite mais depuis que j'ai eu des cours avec Monsieur Briggs j'ai beaucoup plus de mal à y croire... Parce que maintenant je sais que c'est juste des boules de gaz plus ou moins grosses qui brulent.

Monsieur Briggs avait faire perdre toute la magie qu'avaient les étoiles avec ses explications sur ces dernières. Bien évidemment je ne pouvais lui en vouloir c'était son travail et en plus il l'avait bien exécuté puisque je m'en souvenais mais quand même... Je trouvais ça tellement plus poétique à l'époque ou je croyais encore que nos morts pouvaient nous guider et qu'en regardant les étoiles on se reprochait d'eux.

Quelques secondes avant que Rafael ne se retourne, il remarqua que la jeune fille semblait surprise qu’il lui demande son prénom. Malgré tout, après une brève hésitation, elle le lui révéla, elle s’appelait Kelly, Rafael ne se rappelait pas avoir déjà entendu ce prénom dans le couloir mais il essayait de l’enregistrer et grava le visage de la jeune fille avant de se retourner.

Assis sur la pierre froide qui constituait le château, Rafael entendit les pas de la jeune fille venir dans sa direction après qu’il l’ait invité à le rejoindre. Ainsi, elle avait décidé de ne pas prendre la fuite. Il n’eut pas besoin de tourner la tête pour constater qu’elle s’était assise à côté de lui. Les légers bruits qu’elle avait faits en se déplaçant se suffisaient à eux seuls. Après quelques secondes de silence, Kelly finit par confirmer les propos de l’infirmier, elle aussi trouvait que la vision qui s’offrait à eux ce soir là était belle. Rafael acquiesça en entendant la jeune fille. Bien qu’il n’avait jamais été bon en Astronomie, il avait toujours apprécié se rendre à ces cours car il trouvait cela apaisant. Coupé dans ses réflexion par la jeune fille, Rafael écouta ce qu’elle avait à dire.

Plus jeune, on lui avait dit que les morts devenaient des étoiles mais elle avait appris récemment, en cours d’Astronomie, que ce n’était pas le cas. Du moins, elle ne savait plus vraiment ce qu’elle devait croire. Rafael devina qu’une part d’elle voulait croire à ce qu’on lui avait dit lorsqu’elle était plus jeune. Son regard se perdit dans les étoiles et sans surprises, ses pensées se dirigèrent vers les souvenirs de sa soeur décédée. La beauté des étoiles avait le don de se rappeler des bons moments avec sa petite soeur. Il ferma les yeux quelques secondes et se tourna vers la jeune fille à ses côtés pour lui répondre.

« — Selon certaines croyances, l’âme des personnes décédées s’envoleraient pour rejoindre les étoiles. Mais comme vous l’a dit votre professeur d’Astronomie, ces étoiles sont en réalité des boules de gaz. Malgré tout, je pense que vous n’avez pas tout à fait tort de penser que nous pouvons voir à travers les étoiles, nos être chers. Pour moi, regarder les étoiles me permet de penser à ceux que j’ai perdu et c’est pour cela que je trouve cela apaisant. Ce n’est peut-être qu’une croyance et rien ne le prouve mais ce n’est pas pour autant que vous n’avez pas le droit de vous représenter vos êtres chers dans les étoiles.

Rafael savait qu’il n’avait pas vraiment répondu à la question de la jeune fille mais il comprenait ce qu’elle ressentait. Il voulait qu’elle arrive à se faire sa propre idée de ce que cela signifiait pour elle sans qu’elle en souffre par la même occasion. Se rappelant de ce qu’elle lui avait dit quelques minutes plus tôt, Rafael la regarda dans les yeux et lui demanda:

— Dites moi Kelly, cette question aurait-elle quelque chose à voir avec le cauchemar qui vous a réveillé cette nuit? »

L’infirmier était très calme et c’était agréable de discuter avec lui. En temps normal, si j’avais été surprise par un professeur, je ne sais pas si j’aurais réussi à me poser de cette manière pour discuter. Mais la, les choses étaient très simple. Il m’expliqua ensuite que certaines croyances étaient persuadées que notre âme s’envole près des étoiles après notre mort.

Lui aussi regardait les étoiles pour se rappeler ceux qu’ils avaient perdu. Je me demandais si c’était de la famille comme ou si c’était des amis ou simplement des proches. C’était peut-être de la curiosité mal placée mais j’avais envie de savoir, comme si après entendu son histoire j’aurais plus de facilité à lui confier la mienne.

- Je peux vous demander qui voyez-vous en regardant les étoiles ?

La question était posée. Rien ne l’obligeait à répondre et il pouvait penser que je demandais ça pour ensuite m’en servir contre lui ou en parler à toute l’école. C’était même logique qu’il pense comme ça cependant, ce n’était pas du tout le cas…

- Je ne le dirais à personne, je vous le promets.

En attendant sa réponse, je me reconcentrais sur les étoiles, certaines étaient plus brillantes que d'autres. Est ce que les étoiles les plus brillantes représentait quelque chose ou quelqu'un de spécial ? Est ce que ma cousine brillait ce soir dans le ciel illuminait... Et la lune alors, représentait elle quelqu'un ou était ce simplement un satellite naturelle de la terre comme nous l'avions appris en cours d'astronomie.

Ensuite, l'infirmier me demanda si ma question sur les étoiles avait un rapport avec mon cauchemar. Il avait vu juste et ça avait l'air de l'intéressé. Mais qu'est ce que je pouvais bien lui dire ? Moi qui n'avait aucun souvenir... La seule chose dont j'étais sur c'était qu'elle était morte dans l'eau mais sans vraiment savoir les circonstances. Mais je pouvais au moins lui raconter tout ce que je vivais, tout ce que je voyais dans mes rêves ou plutôt, mes cauchemars. Le stress me fit craquer mes doigts pour me détendre.

- Oui, pour vous dire la vérité... Ma cousine, Ju', elle est morte alors qu'on s'amusait au bord de l'eau mais je ne sais pas pourquoi pas je ne sais pas ce qu'il s'est passé... Je me souviens juste qu'on est parti au bord de l'eau et après je me suis réveillée à l'hôpital et c'est là bas qu'on m'a expliqué qu'elle avait perdu la vie... Sauf que...

Je m'étais arrêtée.. C'était le plus difficile à dire, à expliquer. Surtout à un inconnu qui ne me connaissait pas.

- Sauf que maintenant je la vois à chaque fois que je ferme les yeux et elle me fait peur.. Tout à l'heure, dans mon rêve j'étais sur la plage avec des amis et d'un coup une grosse a tout emporté et j'arrivais pas à sortir la tête de l'eau parce qu'elle m'agrippait la jambe pour que je ne puisse pas retourner à la surface. C'est bizarre non ?

La question qu'il posait était peut-être indiscrète mais Rafael n'obligeait en aucun cas la jeune fille à y répondre. Elle pouvait tout aussi bien le laisser seul dans cette tour et reprendre le chemin de la salle commune de sa maison. Mais une part de l'infirmier se doutait que la jeune fille avait besoin de parler, si ce n'était pas le cas, elle aurait déjà pris la fuite et n'aurait pas engagé la conversation sur les étoiles. Malgré tout, avant de répondre à la question de Rafael concernant la cause de ses cauchemars, la jeune fille décida de poser elle aussi une question à son interlocuteur. Elle se demandait à qui il pensait lorsqu'il se perdait dans la contemplation des étoiles.

Rafael hésita quelques secondes, peu de personne savait ce qu'il s'était passé dans la famille de l'infirmier. Ce-dernier n'était pas sur de vouloir que cela se sache dans tout le château et il savait à quel point les informations pouvaient très vite circuler dans cette école. Néanmoins, ce n'était pas vraiment un secret, son nom de famille figurait dans plusieurs journaux suite à l'attentat qui avait emporté sa soeur. La promesse de la jeune fille fit douter le trentenaire, il n'avait aucune certitude qu'elle tiendrait sa promesse et qu'elle garderait cela pour elle. Cependant, il était conscient qu'il lui avait implicitement demandé la même chose et qu'il était inadapté de ne pas lui répondre. Avant qu'elle n'ajoute quelque chose, il souffla donc la réponse:

« — C'est ma petite soeur, il y a plus de trois ans.

C'était la seule réponse qu'il accordait à l'adolescente sur le sujet, il n'avait pas très envie de dévoiler ce pan de vie à une élève qu'il ne connaissait pas. Après un silence poli, l'élève en question reprit la parole pour répondre à la question que lui avait posée l'infirmier quelques minutes plus tôt. La situation ne semblait pas facile pour elle, elle peinait à trouver ses mots. Elle lui expliqua que c'était sa cousine qu'elle voyait dans les étoiles mais les circonstances de sa mort semblaient floues. Kelly avait vraisemblablement était présente lors de l'accident mais ne se rappelait de rien.

Rafael devina rapidement que le traumatisme provoqué par la mort de sa cousine avait entrainé une amnésie de l'évènement. Ce mécanisme de défense créé par le corps était assez fréquent chez les sujets jeunes et Rafael comprenait sans mal que cette situation était très difficile pour l'adolescente. Il n'y avait plus une élève qui n'avait pas respecté le règlement devant lui mais une patiente qui avait besoin d'aide pour faire face à une situation difficile. Sans surprise, elle faisait des cauchemars liés à cette situation et Rafael essaya de comprendre en reformulant:

— Si je comprends bien, votre cousine est décédée alors que vous étiez avec elle. Votre esprit a occulté ces souvenirs mais des cauchemars vous réveillent la nuit et vous rappellent vaguement ce qu'il s'est passé durant cette journée. Vous avez pu en parler avec votre famille, ou les personnes qui étaient présentes lors de l'accident? »

L'infirmier semblait hésiter à m'apporter une réponse, peut être que le sujet était trop sensible pour lui. Ou alors, il avait peut être du mal à en parler tout comme moi. Il cherchait surement ces mots enfin la dernière possibilité mais pas la plus improbable c'est que tout simplement il ne m'accorde aucune confiance. Et, comment lui en vouloir ? Il ne me connaissait pas.

En voyant qu'il restait silencieux, je commençais à baisser la tête tout en ramenant les genoux vers mon menton. J'allais rester là à attendre toute la nuit. Non j'allais simplement attendre un peu avant de retourner à mon dortoir. Mais, après quelques instants, l'infirmier prit la parole. Il m'avoua qu'il avait perdu sa sœur mais il ne m'informa d'aucun détail concernant les circonstances de sa sœur. Avec l'intonation de sa voix j'avais l'impression que celle-ci était plus jeunes que lui. Est ce qu'il s'en voulait de ne pas avoir pu la protéger ?

Finalement les circonstances de la mort importaient peu, le principal c'est que je pouvais lui faire confiance et lui confier à mon tour mon secret. Ainsi j'avais l'impression que nous avions tous les deux intérêts à garder le secret de l'un et de l'autre. C'était rassurant bien qu'un peu glauque. Après lui avoir raconté mon histoire l'infirmier sembla me regarder autrement, comme si j'avais dit quelque chose qui venait de piquer sa curiosité. Il reformula ce que je venais de dire pour s'assurer qu'il avait tout bien compris.

- Oui c'est bien ça.

Il me demanda également si j'avais abordé le sujet avec ma famille. Voilà un sujet sensible. Ma tante était venue en me traitant de monstre, ma mère m'avait fait comprendre la même chose et moi je n'avais même pas encore compris que ma cousine n'était plus de ce monde. Avec tout ça, comment est ce que j'aurai pu aborder la situation ? Parler de mes cauchemars ? J'étais rentrée à la maison au bout de plusieurs jours d'hospitalisation, dans une maison que je ne connaissais, dans une chambre qui ne me disait rien. Et surtout, dans une famille qui me tenait pour responsable de la mort de Juvia.

Oh bien sur l'infirmier n'était pas au courant de tout ceci, il ne savait pas et ne pouvait pas le savoir mais comment justifier ça sans lui dire que je viens d'une famille de moldu. Je n'ai pas honte de ce statut mais j'ai entendu des bruits de couloirs, des rumeurs sur ce qu'on fait aux nés moldus dans ce château et je ne voulais pas savoir si les rumeurs étaient vrai. J'avais pris une grande inspiration avant de reprendre la parole. Il m'avait fait confiance, à moi de lui faire confiance en retour.

- Vous savez, c'est difficile d'en parler avec ma famille parce qu'ils sont persuadés que si elle est morte c'est par ma faute... Je ne sais pas si c'est vrai mais je ne le pense pas. Je n'ai aucune raison de lui vouloir du mal. Enfin pardon, je n'avais aucune raison..

J'avais parfois encore du mal à parler d'elle au passé. Pour moi elle était toujours là, toujours présente. Comme si elle nous avait joué à tous une mauvaise blague.

Kelly ne fit pas de remarque sur la manière dont lui avait répondu Rafael. Il n'avait pas développé sa réponse et avait dit le strict nécessaire et cela semblait convenir à l'adolescente. À son tour, elle lui révéla la personne à qui elle pensait en regardant les étoiles et confirma le résumé qu'avait fait Rafael de la situation. Ce-dernier remarqua que la question qu'il venait de poser à la jeune fille mal la gênait mais il n'arrivait pas à identifier pourquoi. Ne voulait pas accentuer cette gêne, Rafael laissa le temps à l'élève de réfléchir à la manière de répondre à l'infirmier de l'école.

Après quelques secondes de réflexion, elle finir par sortir du silence et expliqua à Rafael ce qui rendait les choses plus compliquées. Outre le fait qu'elle ne se souvenait pas de l'épisode, sa famille la considérait comme responsable de la mort de sa cousine et Rafael avait beaucoup de mal à en comprendre les raisons. En écoutant l'histoire de Kelly, Rafael n'avait pas l'impression que sa famille avait été présente lors de l'accident mais il n'arrivait pas à en être certain.

À cela s'ajouter le fait que les noyades étaient l'une des raisons majeurs de décès chez les enfants. Cela était majoritairement du à des accidents domestiques. L'infirmier avait énormément de mal à comprendre comment la famille de Kelly pouvait penser que c'était elle la responsable de ce décès et il voulait comprendre. Il ne faisait aucun doute que toute cette situation était très difficile pour l'adolescente et elle aussi avait besoin de réponse.

« — J'essaye de comprendre toute cette situation, mais il y a quelque chose que je ne comprends pas. Vous ne vous souvenez pas de l'accident et comment votre famille pourrait savoir ce qu'il s'est passé. Est-ce que l'un d'entre eux était présent pendant l'accident, pourquoi pense-t-il que vous en êtes la responsable? »

Cela faisait beaucoup de question et Rafael se rendit compte qu'il était peut-être très intrusif envers Kelly. Lui ne s'était pas montré aussi ouvert quand elle lui avait posé des questions sur lui et Mila, sa soeur décédée quelques années plus tôt. Bien sur, il n'insisterait pas si la jeune fille ne voulait pas répondre aux questions mais une part de lui avait l'impression que Kelly souffrait de cette situation et sa famille n'était pas aidante face à toute cette situation. Rafael ne savait pas depuis quand sa cousine était décédée mais Kelly en était encore affectée aujourd'hui. Elle faisait des cauchemars qui l'empêchaient de dormir et elle était même prête à recevoir une punition pour se changer les idées. Elle avait besoin d'en parler à quelqu'un d'extérieur à toute cette histoire et Rafael pouvait être cette personne.