L'HISTOIRE DU MAESTRO (PART ONE)
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LE CHŒUR DE L'ÉGLISE
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Voici l'histoire d'un imposteur devenu Maestro - et qui en a payé le prix par la main du destin. En effet, le Maestro Piccolo n'a pas toujours été un sorcier très réglo, jusqu'à son nom qui n'est même pas Piccolo mais Placido Tripplehorn.
Placido est un sorcier, fils de sorciers, ayant grandi dans des conditions difficilement supportables pour le commun des mortels : plusieurs générations de la famille Tripplehorn cohabitaient dans une petite maison de ville coincée entre deux autres tout aussi bruyantes... Quatrième enfant parmi une sororité de six sorcières, Placido n'avait jamais été le plus imposant des Tripplehorn. Il aura ainsi été poussé très tôt à troquer le tintamarre incessant des disputes et des éclats quotidiens pour le calme des églises du coin, seuls bâtiments pouvant l'accueillir à tout moment de la journée et donc selon ses besoins.
Il croyait davantage au ciel et ses étoiles qu'aux dieux mais savait apprécier la grandeur et le silence des lieux qui leur étaient dédiés. Un soir plus difficile que les autres, un signe de ces dieux intangibles l'atteignit : alors que Placido Tripplehorn méditait sur l'un des bancs de la nef, une mélodie parvint doucement à ses oreilles d'enfant, comme pour l'enchanter et l'attirer dans ses filets. C'était celle d'un chœur qui s'élevait pour, semblait-il, lui interpréter un hymne doux et harmonieux. Un son apaisant qu'il n'avait encore jamais entendu et que ses proches ne seraient jamais capables de produire. Ce soir-là, il comprit une première fois qu'il n'appartenait pas aux vulgaires et bruyants Tripplehorn mais bien à cette nouvelle famille qui s'était présentée à lui sous la forme d'un ensemble cohérent, ordonné et élégant.
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VIE ET MENSONGE D'UN ARTISTE FANTASTIQUE
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Aidé par son départ pour l'école de sorcellerie où il mit un point d'honneur à rester durant le plus de vacances possibles, Placido gagna son surnom - Piccolo - à cause de son tic de porter sa baguette magique à sa bouche comme s'il s'agissait d'une cigarette - interprétée comme une flûte par ses amis. Il conserva d'ailleurs ce surnom pour choisir son nom d'artiste plus tard, le rappelant à ses origines modestes. Bien que le jeune Tripplehorn n'était pas un intellectuel, il se passionnait par quelques sujets précis à l'école alors il parvenait à maintenir la juste moyenne pour valider ses années scolaires. Bien entendu, dès sa rentrée, il avait décidé d'intégrer la chorale de Poudlard, le Chœur des Grenouilles, qu'il n'a quitté que par contrainte lors de sa dernière année d'étude. Considéré comme un membre intéressant de l'ensemble par le Chef de chœur de l'époque, il développa un réel intérêt - plus technique qu'affectif cette fois-ci - pour la pratique du chant.
Comme il ne pouvait prétendre à aucune école supérieure avec ses capacités magiques moyennes et qu'un tel cursus ne l'intéressait pas réellement, Placido s'engagea dans une troupe de sorciers artistes de rue pour gagner son pain sans avoir à rendre des comptes à sa famille, sous le nom de Piccolo. Pour être accepté, il dut mentir sur son âge, sur son expérience dans les arts du spectacle (et sur la maîtrise d'un instrument), ainsi que sur le fait que sa famille le soutenait dans son entreprise - ce qui créa un certain chaos chez les Tripplehorn lorsque ses parents apprirent que leur unique garçon avait laissé sa sédentarité de côté pour vagabonder en compagnie de sorciers adultes.
Piccolo fournissait beaucoup d'efforts pour apprendre rapidement le métier d'interprète afin de rester parmi les artistes qui lui avaient accordés leur confiance. Hélas, s'il se cantonnait au départ au répertoire du Chœur des Grenouilles pour rythmer les représentations, bientôt on lui demanda d'accompagner les artistes de la compagnie avec son luth fictif. Il réussit à s'en procurer un en se rendant dans l'Allée des Embrumes, nourrissant l'espoir d'apprendre à jouer un morceau avant la date de la première représentation de la saison pour garder sa couverture intacte. Jusqu'à cette date butoir, il travailla avec tant d'acharnement que ses efforts l'amenèrent effectivement à un résultat. Seulement, il fut rattrapé par les Tripplehorn qui venaient d'apprendre où sa troupe allait jouer. Malgré la découverte du pot aux roses, le chef de la troupe accorda une nouvelle chance au jeune sorcier étant donné qu'il avait su progresser aussi rapidement en chant et qu'il disposait d'un intérêt naturel pour les arts pratiqués au sein de leur groupe. Il fallait dire que, malgré les mensonges, Piccolo avait su se créer une place parmi eux. Après de nombreuses explications et négociations qui le réaccordèrent à ses parents, il put prendre le temps d'apprendre son art à son rythme en laissant toutefois son luth de côté puisque le chant restait son véritable talent.
Au fil des représentations dans les petits villages aux alentours de l'Angleterre qui mêlaient théâtre burlesque et entractes musicales, il devint alors progressivement une véritable figure de proue de la troupe itinérante. Jeune, charmant et talentueux, il attirait plus facilement l'attention que certains membres ancestraux - attisant ainsi déjà leur jalousie si l'on ajoutait la protection dont il jouissait de la part du chef de la troupe et qui était perçue comme injuste par beaucoup. Ce dernier avait fini notamment par lui attribuer son propre segment dans le spectacle en entendant sa voix de ténor lyrique. Après avoir recueilli de nombreux encouragements de la part du public et de ses mentors - et dans cette ambiance qui commençait à se dégrader avec les anciens membres de la troupe -, Piccolo décida de se tourner naturellement vers les salles de spectacle, retournant ainsi à la sédentarité.
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TRAGÉDIE À L'OPÉRA SORCIER DE LONDRES
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Sa carrière fut brève mais intense. Aujourd'hui, seules les grandes instances de l'industrie et une poignée de connaisseurs britanniques pourront se souvenir de l'affaire qui entoure son nom. Piccolo, comme tous les chanteurs débutants à l'Opéra, occupait essentiellement des rôles secondaires voire de figurant. Certes, il rapportait moins de gallions que lorsqu'il jouait dans sa troupe itinérante mais il gagnait au moins à se professionnaliser - ce qui était assez rare pour un sorcier ne baignant pas dans une famille musicienne installée ou tournée vers les domaines artistiques de façon générale. S'il ne regrettait pas sa décision et savait qu'il aspirait à devenir un véritable chanteur d'Opéra, il ne s'était toutefois pas attendu à trouver une telle compétitivité entre les sorciers de leur domaine. Le chaos qui en résultait parfois le rappelait même à de mauvais souvenirs au sein de la maison Tripplehorn...
Pourtant, le fait qu'il se tenait - comme à son habitude - à l'écart des dissensions charmait les directeurs artistiques qui lisaient déjà dans cette attitude un certain signe de professionnalisme et de fiabilité. Piccolo ne tarda pas à obtenir un rôle plus important au sein de l'Opéra sorcier de Londres : à vingt-deux ans, il fit ses débuts en incarnant le Sorcier au cœur velu dans la pièce éponyme traduite en latin et réécrite pour l'Opéra - une interprétation qui lui valut l'éloge d'un critique pourtant habituellement acerbe de la Gazette du Sorcier. "Tripplehorn a su donner une dimension encore plus tragique à ce personnage déjà tragique, une carrière à suivre sans doute."
Cette carrière s'acheva malheureusement à l'aube de son épanouissement auprès du grand public : devenu la cible première de la jalousie de ses pairs, Piccolo fut victime d'un acte sinistre dont les événements demeurent encore brumeux aujourd'hui. A la suite d'un énième triomphe qui l'avait rappelé plusieurs fois sur scène, le jeune interprète gagna la loge des artistes pour boire la potion destinée à soulager ses cordes vocales, traditionnellement préparée par le personnel qualifié de l'Opéra. Au cours de la soirée, alors que Tripplehorn fêtait le succès de la pièce avec ses partenaires de jeu, le jeune sorcier commença à se plaindre de brûlures au fond de la gorge, "comme s'il avait avalé une dragée de Bertie Crochue saveur feu" témoigna-t-il plus tard à l'officier de la brigade magique en charge de l'enquête. Après avoir quitté ses collègues pour retourner à sa chambre, il s'endormit pour se réveiller aphone, la gorge cette fois-ci extrêmement douloureuse. Un séjour à l'hôpital pour sorciers lui suffit pour établir un diagnostic sans appel : il avait avalé un puissant poison qui avait attaqué ses cordes vocales. S'il put retrouver progressivement l'usage de sa voix avec l'aide et l'intervention de puissants Médicomages, personne ne put faire de miracle pour lui redonner tout son éclat. En l'espace de quelques mois de rémission, il avait de toute manière perdu ses rôles : le monde du spectacle n'attendait pas.
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L'ADIEU AU SILENCE
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Le jeune sorcier s'était vu obligé d'abandonner la famille qu'il avait choisie pour rejoindre celle qu'il avait fuit il y a bien des années. Curieusement, il ne se souvint pas de cette période comme étant aussi bruyante que celle de son enfance, comme si les Tripplehorn avaient choisi de l'accompagner dans son deuil. On entendait cependant régulièrement le son de cordes se pincer et tenter des accords malhabiles : Piccolo avait ressorti son luth. Sous les conseils de ses parents, il avait affiché une annonce pour proposer ses services en tant que professeur de luth, refusant catégoriquement de retourner au chant malgré sa rémission. Il enseigna alors à des enfants de sorciers souvent à moitié intéressés du fait d'être poussés par les attentes de leurs parents. Lui-même n'était pas friand de cette expérience à cette époque, toujours refroidi par son éviction de l'implacable monde de l'Opéra et n'appréciant pas de consacrer son temps à des élèves qui abandonneraient inévitablement leur apprentissage - que Piccolo les motive ou non. Petit à petit, son nom courait toutefois parmi les grandes familles. Au départ il s'agissait souvent de sorciers plus curieux de connaitre les dessous de l'affaire de l'Opéra que de trouver un réel maestro pour enseigner à leurs enfants mais, au fur et à mesure de ses expériences, la fiabilité et la constance de Piccolo lui permirent de s'installer parmi les meilleurs tuteurs britanniques de sa génération.
Aidé par cette nouvelle réputation grandissante - et par le passage du temps réparateur - il se réaccorda à sa passion première pour le chant en s'essayant à enseigner progressivement son art en plus du luth, aussi bien aux enfants qu'aux adultes - et n'utilisant sa voix qu'en cas de nécessité durant les premières leçons d'assimilation. S'il s'était difficilement considéré comme un véritable professeur de luth jusqu'à présent, ses petites victoires lorsque ses élèves progressaient en chant le comblèrent entièrement jusqu'à le rappeler à une assurance qu'il avait perdu il y a bien des années.
Comme il lui était arrivé de tutorer plusieurs de ses élèves en même temps, le Maestro Piccolo s'était naturellement essayé à l'exercice d'associer leurs voix pour les conduire comme s'ils formaient une chorale. Cette expérience le rappelait à son adoration pour les chœurs d'église et à cette voix unique, parfaite, que produisait un ensemble à ses yeux. Un soir, à l'aube de ses trente ans, après être retourné dans l'une des églises de son enfance, il écouta son envie de créer son propre chœur. Le Maestro Piccolo s'évertua à rassembler essentiellement d'anciens élèves et passionnés de tous horizons. Comme une ode au monde du spectacle itinérant qui l'avait formé, son chœur ne se produisait pas dans les salles de spectacle mais dans les rues, au cœur du Londres sorcier, souvent pour interpréter des cantiques enchanteurs le soir de Noël ou pour accompagner des grands événements commerciaux du populaire Chemin de Traverse.
Sans réellement se rendre compte de son impact, le chœur du Maestro Piccolo arrivait aussi bien à mettre d'accord les critiques d'un public londonien amateur de grandes œuvres lyriques que celui de sorciers plus occasionnels porté sur d'autres genres musicaux. Concilier deux mondes n'avait pourtant jamais été son objectif, lui qui noyait plutôt ses regrets de n'avoir pas pu continuer sa carrière à travers les espoirs de ses élèves. Bien que son métier lui paraissait plus supportable ainsi, il se rendit tout de même compte que ce mode de vie ne le satisfaisait plus à trente-six ans, l'obligeant à loger chez ses parents comme s'il n'en était jamais parti. Alors qu'il parcourait avidement la rubrique "Sorties culturelles" de la Gazette du Sorcier à la recherche des dernières critiques sur ses anciens collègues de l'Opéra, le Maestro Piccolo fut interloqué par une rumeur : la prestigieuse école pour sorciers Poudlard chercherait un Chef de chœur.
Quelque chose s'éveilla alors en lui, derrière le son d'un vieux chœur d'église qui ne l'avait jamais quitté...
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Maestro Piccolo inRP
En poste depuis le 5 janvier 2048 à Poudlard
Avatar : picmitsuba